4 LE MARKETING DERRIÈRE LES ALIMENTS POUR BÉBÉS
INTRODUCTION
Les données au sujet des problèmes de santé reliés à
l’alimentation sont inquiétantes. Le taux d’obésité réel chez
les adultes au Canada est de 24,1 % (McGuire et al., 2011).
La proportion des moins de 18 ans obèses serait passée de
14,6 % à 22,6 % entre 1978 et 2004 (Santé Canada, 2007).
Cette augmentation est d’autant plus inquiétante que l’obésité
contribue à une multitude de maladies chroniques, dont le diabète,
les maladies cardiovasculaires, l’hypertension, les maladies du
foie et les cancers du sein, du côlon et de la prostate (Morrison
et Chanoine, 2007). En 2007, les coûts directs de ces maladies
chroniques étaient de 4,3 milliards de dollars (Santé Canada,
2007). Selon l’Organisation mondiale de la Santé, l’obésité est
principalement associée à une alimentation malsaine et à un
manque d’activité physique (OMS, 2014).
Paradoxalement à cette augmentation du taux d’obésité,
l’intérêt général de la population à adopter une alimentation
saine est plus que jamais présent (Blackman, 2005). En effet,
l’institut américain du marketing alimentaire rapporte que
8 parents sur 10 font des efforts pour que leur famille ait une
alimentation saine (Sloan, 2002). L’éducation est primordiale
pour l’adoption de saines habitudes de vie et il s’avère que la
création d’environnements favorables l’est d’autant plus (Papas
et al., 2007). Parmi ces environnements, le marketing alimentaire
influence considérablement le choix des consommateurs. Les
acteurs du marketing alimentaire ont bien saisi l’intérêt de la
population à adopter une alimentation plus saine. Ils utilisent
cette connaissance du marché à leur avantage afin de promouvoir
leurs produits (Golodner, 1993). Étant le deuxième plus grand
annonceur publicitaire tout juste derrière l’industrie automobile
(Gallo, 1999), l’industrie alimentaire est une composante
majeure de l’environnement des consommateurs. Son influence
sur les décisions de ces derniers n’est pas à négliger.
La présente revue de littérature documente le marketing des
aliments destinés aux enfants âgés de 6 à 24 mois. Elle met
en lumière le comportement de ces futurs consommateurs et
de leurs parents en plus de recenser les politiques provinciales
et internationales sur le marketing de ces produits. Enfin,
les initiatives internationales existantes visant une meilleure
compréhension du marketing alimentaire ciblant les tout-petits et
leurs parents sont exposées.
MÉTHODOLOGIE
La revue de littérature a été réalisée à partir d’une recherche sur
les bases de données PubMed et Science Direct sous plusieurs
mots clés : marketing tout-petits, marketing bébés, marketing
enfants, marketing alimentaire, publicité tout-petits, promotion,
emballages d’aliments. Les articles recensés ont été publiés ces
dix dernières années à l’exception de quelques lignes directrices
datant des années 1999-2001. Parmi les 70 articles, on retrouve
des revues de littérature, des études qualitatives (sondage ou
groupes de discussion) et des essais cliniques. Trois documents
gouvernementaux ont aussi été recensés.
ÉTAT DE SITUATION
L’industrie investit des milliards de dollars dans la promotion des
produits alimentaires. L’environnement est saturé de publicités et
d’informations vantant les mérites des différents produits offerts (Elliot,
2008). L’industrie alimentaire utilise une multitude de moyens pour
atteindre le consommateur. Elle a notamment recours à la publicité
télévisée, aux panneaux publicitaires, à la publicité aux points de vente,
aux emballages des produits et aux médias imprimés.
Les jeunes parents sont assaillis par toutes ces informations avant
de prendre leur décision d’achat. Combinée au fait qu’ils sont
pressés par le temps et limités par des moyens financiers, cette
exposition constante à une grande quantité d’informations où il
est difficile de distinguer le vrai du faux peut miner sérieusement
leur sens critique et aboutir à l’achat d’un produit de piètre
qualité nutritionnelle (Elliot, 2008; Mehta et al., 2012).
Très jeunes, les enfants disposent de la capacité de reconnaître les
produits auxquels ils sont exposés dans les publicités (Valkenburg,
Buijzen; 2005), aussi sont-ils la proie des départements de
marketing alimentaire.
La majorité des produits alimentaires qui font l’objet de publicité sont
riches en gras, en sel et en sucre et ont des qualités nutritionnelles
discutables (Story et French, 2004). Plusieurs études démontrent
une relation entre l’exposition à la publicité et la consommation
d’aliments qui représentent de moins bons choix (Page, 2008;
Berry et McMullen, 2008; Which?, 2007; Eliott, 2008; Mehta et
al., 2012). Ces données sont inquiétantes puisque les habitudes
alimentaires établies au cours de l’enfance et de l’adolescence
sont déterminantes pour l’état de santé à l’âge adulte (Bergadaà
et Urien, 2006). En effet, les habitudes acquises tôt dans la vie
influencent les préférences futures (Story et French, 2004).