SEANCE DU 01 décembre 2015.
Restitution de l'intervention de : Philippe GABRIEL
Par l'équipe d'auditeurs : Barbara, Camille, Joëlle, Michèle, André, Gilles et Roland.
TITRE : Psychologie de la mémoire et de l’oubli
Deuxième partie
Dans cette deuxième partie de la séance, dans cette troisième section finalement de cette
présentation sur la mémoire, je vais évoquer les influence sur le souvenir et la mémoire. Très
rapidement, j'ai noté ici l'origine des principales influences : influence psychogène, influence
organique ou extérieure, influence contextuelle, pharmacologique ou socioculturelle. On va
essayer de faire le tri
Pour les aspects psychogènes, j'ai noté trois façons de voir les choses. Il y a l'aspect
refoulement : la psychanalyse va surtout être du côté de cette approche. L'idée que certains
souvenirs peuvent être générateurs d'angoisse, et donc l'un des mécanismes de défense, c'est le
refoulement, c'est de tenir le souvenir à distance.
L'aspect psychogène c'est sur le versant cognitif, cela peut être considéré en tant que
traitement de l'information. On peut considérer que certaines informations ne sont pas
particulièrement pertinentes par rapport aux situations que nous rencontrons. Il y a donc un
traitement qui n'est pas prioritaire de certaines informations, ce qui fait que se souvenir de façon
inconsciente est conservé à distance de la conscience.
On peut parler aussi en terme de résilience, l'esprit peut avoir besoin de passer à autre
chose, tout se passe comme si, il fallait passer à autre chose, mettre de côté, ne plus actualiser
des souvenirs qui correspondent à une riode que l'on cherche à oublier. C'est l'approche que je
pourrais faire de ces facteurs psychogènes en suivant, grosso modo, les théories dominantes. On
pourrait évoquer que le souvenir, aussi, n'est pas lié à d'autres souvenirs, dans les aspects
composites de la mémoire : composite dans la mesure il y a une dimension constructive,
composée. Le souvenir n'est pas atteint parce qu'il n'est pas relié à des événements, et peut être
qu'il émergera un peu plus tard. Vous avez sans doute fait l'expérience, que je fais régulièrement,
de chercher le nom d'un auteur, le titre d'un bouquin : je commence à faire cet exercice à 8 h du
matin, et qu'à 8 h 05, je me dise que ce n'est pas la peine, cela ne me revient pas, mais ce n'est
pas grave, ce soir je l'aurais en tête. Et effectivement le soir je me dis : ah oui, c'était ça! ça revient
dans le contexte, et puis il peut y avoir des processus en tâche de fond, qui fonctionnent.
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UPA
e-bulletin
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Pour les aspect socioculturels, je serai un peu plus prolixe. Les aspects socioculturels
c'est, par exemple, les représentations du monde. Par exemple les cartes mentales, les
représentations du monde que nous avons, c'est une expérience de P Gould et R White faite dans
les années 1974. Gould et White comparaient les représentations de Los Angeles par :
La population blanche du quartier de West Wood.
La population noire dans les quartiers Watts.
La population hispanique du quartier de Boyle Heights.
Nous avons pour un même lieu, 3 représentations et 3 mondes différents.
Cela va avoir des effets en terme de souvenirs, parce que l'on sait, d'une manière
générale, que la culture générale et la familiarité, sont des facteurs facilitants. Plus le cerveau en
sait dans un domaine, plus vite il assimile de nouvelles informations : d'où cet encouragement que
l'on peut donner à développer la culture générale chez les jeunes générations. Si l'on a plus de
culture générale, les nouvelles informations trouvent davantage, plus facilement, une place pour
s'intégrer dans le puzzle. William James, un psychologue nord Américain qui s'est beaucoup
intéressé aux questions éducatives disait, par exemple, quand les enfants regardent une série
télévisée, même si elle est stupide et inintéressante, ils connaissent beaucoup de choses sur
les personnages et leurs aventures. De ce fait les nouveaux éléments vont plus vite se graver en
mémoire très facilement, parce qu'ils connaissent bien le contexte.
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Notre cerveau fonctionne comme cela, plus on en connaît dans un domaine, plus on
assimile vite de nouvelles informations. Si l'on ne prend plus les enfants, mais un cardiologue qui
assiste à une conférence pointue sur les transplantations cardiaques, il retiendra 10 fois plus
d'informations, de choses, qu'un novice en médecine, comme nous le montre la recherche en
psychologie ; donc des implications importantes pour l'enseignement en classe. On comprend dès
lors peut-être mieux, pourquoi des enfants en classe apprennent mieux des déclinaisons ou des
tables de multiplications, dès lors qu'ils les chantent sur un air connu. Cela peut aussi expliquer
pourquoi les résultats sont meilleurs dès lors qu'il y a une culture générale qui est importante,
même si le quotient intellectuel n'est pas supérieur. Cela explique aussi pourquoi un livre structuré,
qui va progressivement explorer le sujet, va être plus efficace qu'une succession d'activités
supposées lisibles, mais qui à chaque fois sont nouvelles et sans rapport étroit entre elles.
Donc dans les phénomènes qui influencent la mémoire, on a vu les aspects psychogènes,
on a vu les aspects que l'on peut qualifier de socioculturels. La dimensions plus largement
environnementale est importante : les relations entre l'individu et son environnement. C'est comme
cela que j'ai qualifié les aspects qui sont liés au stress, parce que le stress va avoir une influence
démontrée sur la mémoire. Tout à l'heure, deux personnes sont venues me voir et m'ont raconté
des situations stressantes qu'elles ont vécues, et l'impact que cela a eu sur leurs souvenirs. Ces
questions d'images, qui leur est arrivé pour l'une d'entre elles notamment, le stress joue un rôle
important en terme d'influence extérieure.
On a une loi dans le domaine, qui s'appelle la loi de Yerkes-Dodson qui lie une forte
motivation, comme dans le cas de stress (si dans l'année je pars pour un semestre sabbatique aux
États-Unis, ça peut être vécu comme stressant). Donc une forte motivation, comme dans le cas de
stress, de perturbation émotive, qui facilite la mémorisation, jusqu'à un certain point à partir duquel
on constate ensuite une décroissance. La loi de Yerkes-Dodson c'est l'effet inverse de la primauté
et l'effet de récence dans le sens on n’a pas une courbe en "U" mais un "U" inversé. Plus le
stress s'élève, plus le souvenir va être fort, jusqu'à un certain point. Avec toutefois un bémol, c'est
qu'en général, les émotions fortement négatives, traumatisantes, vont nous empêcher de percevoir
les attitudes et de se souvenir, donc certes le stress, mais du bon stress. Un bon stress peut être
un facteur facilitant à l'inverse en revanche d'un mauvais stress dans des expériences négatives et
traumatisantes qui s'accumulent. Par exemple un incendie qui se déclare dans un cinéma, on
pourra redire maintes fois cet évènement à ses amis, ces redites par effet de répétition vont
améliorer notre souvenir de l'évènement, éventuellement renforcer des détails de la perception
initiale, mais la peur et le stress provoqués par ce type d'évènement, a tendance à diminuer la
perception correcte des détails des évènements, et donc notre aptitude à se rappeler par la suite.
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On a évidemment toujours des contre exemples. Je ne sais pas si vous connaissez
Lameda, un poète Vénézuélien qui était inspiré par les régimes communistes. Il est allé en Corée
du Nord, il a été accusé d'espionnage et condamné aux travaux forcés. Au pénitencier, la
nourriture était médiocre et il vivait dans des conditions extrêmement brutales, il a perdu 25 kg, il a
rencontré d'énormes difficultés. Mais malgré ces difficultés il a réussi à composer de mémoire 400
poèmes et 300 sonnets, dont certains furent publiés après. Il disait : « ils ont tout tué en moi, sauf
la mémoire ». Il avait vraiment mémorisé et enregistré ces 400 poèmes et 300 sonnets, avec
beaucoup de concentration, il les a répétés, il les a ordonnés en mémoire, avec des efforts
gigantesque, on veut bien le croire, mais qui lui ont permis d'acheminer ses poésies dans la
mémoire à long terme et de les restituer par la suite.
Il y a aussi dans les influences extérieures, l'effet de l'alcool. L'effet de l'alcool est assez
net, il n'entraîne pas de diminution globale du rappel, il tend à réduire le rappel des mots de la
première partie de la liste, mais pas ceux de la deuxième partie. C'est dire que, je ne vous en parle
pas tout de suite, je vous en montrerai l'illustration, on verra les troubles de mémoire après. Donc
voilà ce qui se passe avec l'alcool : ce qui est indiqué sur le graphique ici, c'est à jeun et sous
l'imprégnation alcoolique, les dernier mots qui ont été déversés dans la mémoire à court terme, ont
aussi bien été retenus par les sujets qui ont bu que par ceux qui n'ont pas bu. Le test consistant à
donner une suite de mots et à demander ce que je viens de dire à quelqu'un qui est sous
imprégnation alcoolique. On peut se faire avoir, parce que si c'est la dernière chose qui a été dite,
effectivement il peut la restituer ; par contre, si c'est ce qu'il y a en début, la mémoire va être
altérée. Donc l'alcool nous laisse la capacité de nous servir de notre mémoire à court terme, mais
son principal effet est de gêner la transmission dans la mémoire à long terme. On peut se rappeler
des bribes d'informations, mais passé un certain délai, on va être confronté à un problème.
Le trou de mémoire alcoolique, peut être en avez-vous entendu parler, on considère que
c'est une histoire en soi. Parler de trou de mémoire pour désigner l'influence de l'alcool peut
paraître ambiguë : environ 2/3 des alcooliques chroniques, perdent ainsi fréquemment la mémoire
lorsqu'ils ont bu. Donc deux sortes de problèmes de mémoires dans le domaine de l'alcoolisme.
Une première qui est fragmentaire, ponctuelle : l'individu va réaliser qu'il a oublié quelque chose
parce qu'après coup quelqu'un lui en parle, lui fait réaliser qu'il a quelque chose qu'il n'a pas en
mémoire.
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Et puis le deuxième aspect c'est l'oubli en bloc d'événements signifiants, avec ce qui
l'accompagne : c'est le sentiment d'un temps perdu. Donc là, on parle d'un oubli qui est
généralement global et en apparence définitif en pensant qu'il n'existe pas de chance de rafraîchir
la mémoire. Dans le trou de mémoire alcoolique, l'individu a la sensation d'avoir effectivement
complètement oublié, de ne pas avoir vécu pendant un moment. Il n'arrivera pas, ou il aura
beaucoup de mal à se rappeler de quelque chose. C'est une expérience assez pénible, parce que
la personne peut se demander si elle n'a pas blessé, tué, quelqu'un par exemple.
En parler notamment avec les étudiants, c'est leur expliquer comment cela a le plus de
chance de se produire, pour qu'ils évitent. Notamment parce que les jeunes générations, ici cela
ne se voit pas trop, mais pour être allé en Angleterre, le vendredi soir dans les environs des
universités, on est ame à vivre des choses absolument effrayantes. Le "binge drinking" qui va
concerner filles et garçons, et franchement cela fait bizarre. Ils se mettent en totale position de
connaître le trou de moire parce que c'est ingurgiter très vite de l'alcool et en grande quantité.
En fin de semaine quand on est bien fatigué, c'est "idéal" et si en plus, on a pris des sédatifs et
tranquillisants…. !
Le trou de mémoire, l'oubli d'événements signifiants, c'est un grand classique des
prétoires. Vous avez différentes illustrations du trou de mémoire d'événements signifiants, dans un
article, une journaliste dit :
« dans ce trou noir, il pratiqué des attouchements poussés sur l'enfant avant de le
poignarder dans sa voiture »
Le père de trois enfants, dont un bébé d'un mois et demi, expliquait avoir trop bu et
évoquait un trou noir dans sa tête entre le samedi soir 17 h et le dimanche matin 9 h, soit
entre la disparition d'Océane rue Florian, dans le centre de la commune Gardoise, et la
découverte de son corps près de la cave.
Donc je vous dis c'est un classique des prétoires et l'on va retrouver à peu près la même
chose :
« A l'hôpital un sédatif m'a été administré, je ne me souviens pas, on m'a raconté
déclare Lukanus à la barre du tribunal, où il dit regretter son emportement »
Et quelques temps plus tard, toujours le même : « après avoir bu des bières, Lukanus n'a
rien trouvé de mieux que de lancer des poubelles sur des voitures, mené à l'hôpital il a
mordu un des policiers municipaux. encore il regrette et dit ne se souvenir de rien, et
donc il accepte tout ».
Donc c'était pour l'alcool ; après, il y a le syndrome de Korsakoff, dont je vous ai dit deux
mots tout à l'heure : cela va se traduire par l'incapacité à se souvenir des éléments récents. Je
vous rappelle, il y a une mémoire explicite, une mémoire implicite, on peut faire des petites
différences. Bon comment en arrive-t-on ? Il n'y a pas que l'alcool, car je crois que l'on peu y
arriver par une survitaminose A à base de jus de carotte, on peut y arriver aussi je crois.
Ce que l'on sait pour sûr, du côté de la psychologie, c'est que si l'on a pris de l'alcool
chaque jour pendant 10 ans, il ne faut pas s'étonner d'avoir la mémoire un peu obscurcie. On
parlera des troubles de l'alcool, en même temps on sait que ces problèmes peuvent disparaître en
grande partie si l'on arrête de boire. Les alcooliques qui ont passé des tests de mémoire, même 5
semaines après avoir commencé leur traitement, ont obtenu généralement des bons résultats. En
revanche, lorsqu'il s'agit du syndrome de Korsakoff, c'est fini : c'est irréparable parce que l'on a
une lésion organique du cerveau, donc absence de souvenir des événements récents.
Une autre chose qui est intéressante sur les influences extérieures sur la mémoire, c'est la
question de la marijuana, pour vous dire qu'il y a un certain nombres d'expériences qui ont été
faites. Des expériences avec différents types d'absorption de marijuana, il y a eu "la fumette" et il y
a eu le gâteau (le space cake).
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