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n° 500
juin 2009
KS
NEUROLOGIE
ACTUALITÉ EN...
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1. Introduction
Depuis les années 90, la médecine et la kinési-
thérapie sont soumises à “l’Evidence base
medicine” (EBM), c’est-à-dire à la médecine
par la preuve. On ne peut donc, en principe,
évoquer une pathologie et son traitement sans
se référer aux résultats des études sur le sujet,
réalisées avec la rigueur méthodologique en
vigueur.
Malheureusement, la rééducation en kinési-
thérapie pour la maladie de parkinson (MP)
manque d’étude avec un niveau de preuve suf-
fisant pour valider un protocole de rééduca-
tion standardisé. Nous utilisons donc actuelle-
ment les résultats des recommandations de la
réunion de consensus qui a eu lieu en 2000
rédigée par la Haute autorité de santé (HAS)
[1].
Classiquement, la posture ou le rôle du kinési-
thérapeute est de jouer l’interface entre le
malade et le médecin. C’est de cette place que
je vais développer mon exposé, j’espère donc
être compréhensible par les uns et par les au-
tres !... Je vais évoquer à la fois ce qui est
actuellement recommandé par l’HAS et l’illus-
trer par ma pratique de terrain auprès des
patients. Il s’agit d’un article de vulgarisation.
Il est difficile de parler d’une maladie, comme
la maladie de parkinson (MP), à un public
généraliste. Les patients posent souvent,
après une durée variable, des questions préci-
ses, il est souhaitable de leur répondre aussi
honnêtement et documenté que possible.
Chacun “entre en maladie” à son rythme et il
est nécessaire de respecter les questions que
ne se posent pas les patients.
Ce qui suit est conçu pour aider les patients,
les aidants, les praticiens qui sont confrontés à
la MP, à mieux comprendre cette maladie et à
mieux y faire face de façon raisonnée, pour ne
pas dire raisonnable (la kinésithérapie a aussi
ses limites !).
Même si le traitement médical est un allié essen-
tiel, l’exercice physique participe très largement
au maintien de la qualité de vie des patients. Il
est plébiscité par tous les patients qui le prati-
quent de façon adaptée et régulièrement.
La MP évolue lentement tout au long de la vie.
Bien que la nosologie soit précise, il faut
savoir qu’il existe des variantes dans l’expres-
sion clinique de la maladie. Tous les malades
n’évoluent pas exactement à la même vitesse
ni avec exactement les mêmes symptômes. Je
ne fais pas allusion aux syndromes parkinso-
niens, car s’ils ont évidement de grandes simi-
litudes avec la MP, ils diffèrent néanmoins par
nombre de points que je ne détaillerai pas ici.
Mais, même au cœur de la MP, la variabilité
des présentations cliniques et leur importance
ainsi que leur évolution existent. On parlera de
MP “sage” ou au contraire de maladie “sévère”
à évolution plus rapide. Entre ces extrêmes,
vous l’avez compris, existe un large spectre
symptomatique.
Quoi qu’il en soit, la kinésithérapie peut pour
chaque profil de la maladie, apporter un
“plus” significatif pour le patient.
Classiquement, on décrit trois phases qui
débutent après le diagnostic. La période de
diagnostic, qui est toujours vécue difficilement,
demande une approche particulière par les soi-
gnants (l’annonce d’une maladie grave) :
– la phase dite de lune de miel où les symptô-
mes, bien que présents, sont discrets et
n’engendrent pas d’ajustements trop lourds
dans la vie du patient ;
– la phase d’installation où la maladie est bien
contrôlée par le traitement mais où ses effets
secondaires sont souvent gênants ;
– et la phase dite de déclin lorsque les traite-
ments contrôlent moins efficacement celle-
ci. La durée des phases est variable d’un
patient à l’autre, mais on peut dire qu’autour
de 5 à 8 ans, après l’annonce du diagnostic,
il est nécessaire d’apprendre à composer
avec la maladie dans sa vie quotidienne. La
kinésithérapie est indispensable à ce stade.
Encore un élément avant de terminer cette
introduction : il est maintenant de plus en plus
admis que la MP ne provoque pas, au cours de
son évolution, seulement une perturbation de
la motricité, mais également qu’elle a une
influence sur “l’humeur” et sur les aptitudes à
“organiser ses actions” (motrices et cogniti-
ves, en particulier la concentration). Il faut par-
ler d’une atteinte des comportements plus que
d’une seule atteinte de la motricité.
La MP est une maladie chronique neurodégé-
nérative qui, par l’atteinte d’un système de
régulation perturbe, à des degrés divers, plu-
sieurs fonctions neurologiques : motrice,
associative et limbique. Mais il reste légitime
de dire que l’entrée dans la maladie est
motrice et qu’elle peut ensuite atteindre les
autres fonctions évoquées. Les proches et les
soignants devront intégrer ces modifications
comme partie intégrante de la maladie et
adapter leurs propres comportements ou stra-
tégies thérapeutiques à cette évolution.
L’importance de la variable psychologique est
donc essentielle à la compréhension du
malade pour dispenser une aide efficace.
La MP atteint la motricité automatique, mais
celle-ci n’est que le relais d’une décision
volontaire qui de fait se trouve perturbée. Je
vous proposerai, pour commencer, un rappel
théorique très succinct sur les mécanismes
neurologiques des mouvements volontaires
sur le modèle actuellement admis, un autre
sur la physiopathologie de cette maladie
(atteinte des mouvements automatiques).
Ensuite, je vous présenterai des exercices pra-
tiques de rééducation, ciblés sur les difficultés
que rencontrent le plus souvent les patients
parkinsoniens lors des premières difficultés
motrices, notamment la marche.
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INTÉRÊT DE LA KINÉSITHÉRAPIE
POUR LE PATIENT ATTEINT
DE LA MALADIE DE PARKINSON
(1ÈRE PARTIE)
Thierry PERON-MAGNAN
Kinésithérapeute libéral, Paris
Consultant au Centre national de référence (CNR) maladie de Wilson Lariboisière, Paris
Coordonné par Jean-Pierre Bleton
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