Les déséquilibres globaux sont de retour
Jacques Adda
Alternatives Economiques n° 301 - avril 2011
Pour rééquilibrer l'économie mondiale, la Chine devrait stimuler sa consommation, l'Allemagne
engager une relance de sa demande intérieure et les Etats-Unis remédier à la faiblesse de leur
épargne. Le moyen le plus simple d'y parvenir serait de s'entendre pour jouer sur les taux de
change, mais pour l'instant ça bloque.
Une batterie d'indicateurs. C'est ce à quoi se résument les résultats du G20, réuni en février à Paris
pour promouvoir entre autres un rééquilibrage de la croissance mondiale. Pas un mot sur les taux
de change, ni sur les réserves de change : le barrage chinois à toute référence susceptible de placer
les pays qui dégagent des excédents commerciaux en position d'accusé a tenu bon.
En matière commerciale, comme dans le domaine financier, un déséquilibre met toujours en cause
deux parties. Les excédents chinois ne seraient pas possibles sans les déficits américains et
inversement. L'Espagne ne serait pas tant déficitaire dans ses échanges extérieurs si l'Allemagne
n'était pas tant excédentaire. Aux griefs américains sur le caractère mercantiliste de la politique
chinoise, répondent les réprimandes chinoises, à forte connotation morale, sur l'endettement
inconsidéré des Américains, qu'il s'agisse des citoyens ou de l'Etat.
Insoluble à court terme
Les deux parties sont dans le vrai, mais les moyens préconisés par chacune d'entre elles, par-delà
leur symétrie apparente, ne produisent pas du tout les mêmes résultats. Si la raison des créanciers
devait l'emporter, comme c'est le cas en Europe, la résorption des déséquilibres sera de nature
récessive pour tous, la contraction de la demande dans les pays endettés freinant la croissance
globale. Si la raison des débiteurs l'emporte, la résorption des déséquilibres pourra se faire dans la
croissance des uns et des autres.
La Chine et avec elle l'Allemagne ont donc tort. Le problème est qu'elles ont tort du point de vue
de la bonne marche de l'économie mondiale, mais pas de leurs points de vue particuliers. La Chine
pourrait difficilement stimuler sa consommation sans attiser une inflation qui, déjà, fait mine de
s'envoler. Elle évoque ouvertement la nécessité de rééquilibrer son modèle de croissance, mais sait
que cela ne se fera que sur la durée, tandis qu'à court terme, tout ralentissement de ses exportations
menace l'emploi et la stabilité sociale. Et l'Allemagne, qui digère encore la réunification et dont la
dette publique dépasse 80 % de son produit intérieur brut (PIB), se voit mal faire de la relance
budgétaire pour rééquilibrer sa croissance.