SEMINAIRE 2 : Europe et Tiers secteur économique

SEMINAIRE 2 : Europe et Tiers secteur économique : vers une réelle
reconnaissance (Solidar / La Ligue de l’Enseignement, 20 et 21 Mai 2005,
Paris)
COMPTE RENDU DU SEMINAIRE.
Dans la suite du séminaire de Rolandseck en Février 2005, trois questions importantes ont été identifiées :
1) Quelle est la spécificité des associations, fournisseurs de services sociaux , dans un contexte
d’accroissement de la concurrence ? Comment préserver ces spécificités , tout en prenant en
compte un processus constant de professionnalisation
2) Comment définir ces spécificités, et comment peuvent-elles être reconnues dans les processus
d’appel d’offre, tout comme dans le développement des politiques nationales et communautaires ?
3) Comment définir le tiers secteur et les employeurs de l’économie sociale en Europe ?
A ) Experts.
> Marie-Hélène GILLIG, CEGES (Conseil des employeurs et des groupements de
l’Economie Sociale)
Le CEGES a été créé en 1970, pour rassembler les associations, les mutuelles , les coopératives, les
syndicats d’employeurs, dans le champ de l ‘économie sociale. Ce secteur (ou tiers secteur) représente 760 000
entreprises et deux millions d’employés, en France. Les buts du CEGES sont le lobbying, la formation et
l’information. Les groupements les plus importants de l’économie sociale en France sont membres du CEGES.
Le président est actuellement le directeur de la banque « Crédit coopératif ».
Le CEGES est une organisation intervenant au niveau national, pour s’assurer que les spécificités de
l’économie sociale sont reconnues et surtout s’inscrivent dans la législation nationale. Le CEGES est membre du
CEP CMAF, qui représente les membres de l’économie sociale à un niveau Européen. Le CEP CMAF est un
acteur capital de l’intergroupe de l’économie sociale au Parlement Européen.
La question centrale en représentant un large spectre d’acteurs de l’économie sociale est : Qu’ont-ils en
commun ?
- La non recherche du profit : ils ne travaillent pas avec des marges de profit, et ne rémunèrent pas le
capital.
- Chaque individu peut en devenir un membre.
- Gérés sous une forme démocratique (un membre, une voix)
- Basés sur des valeurs partagées : par exemple la solidarité, l’indépendance vis à vis des autorités
publiques, le développement du bien être de la personne.
L’économie sociale est considérée comme un modèle spécifique dans l’offre de services (social, santé,
éducation, culture,…) « Entreprendre autrement ». Les projets Européens d’intégration économique, n’y font
cependant pas référence, et ne prennent pas en compte les organisations de l’économie sociale. Le cadre
réglementaire n’est pas orienté vers ces organisations.
L’économie sociale est un secteur en développement. Il est indispensable de trouver des nouveaux
partenaires dans les nouveaux états membres. Le CEGES et le CEP CMAF souhaitent être des interlocuteurs des
nouveaux processus d’intégration en marche.
> Un point de vue Européen sur les services sociaux : Présentation par Raymond MAES,
Commission Européenne, DG Emploi et Affaires Sociales.
Une présentation Power Point a illustré les livres verts et blancs sur les services d’intérêt général (Mai
2003 – Mai 2004). Dans ces documents, la Commission a souhaité clarifier « comment promouvoir des services
d’intérêt général de qualité et accessibles dans l’Union Européenne».
Concernant le cadre de la Directive sur les services d’intérêt général (SIG), le point de vue majoritaire
est d’attendre la ratification du Traité Constitutionnel, puisque l’article III-122 reconnaît la possibilité que la loi
européenne fournisse un cadre réglementaire à la fourniture des services d’intérêt général.
Une communication sera publiée début 2006, identifiant l’organisation des services sociaux et de santé
dans les Etats membres de l’Union, informant sur leurs spécificités, et analysant les cadres d’organisation de
chaque Etat membre. Il sera également question de vérifier si la méthode ouverte de coordination (MOC) peut
jouer un rôle dans l’organisation de ce secteur.
Un questionnaire du Comité de Protection Sociale adressé à l’ensemble des gouvernements des Etats
membres de l’UE, et retourné vers la mi décembre 2004 montrait que :
- Les services sociaux d’intérêt général et le rôle joué par eux dans la garantie de certaines valeurs, et
dans la promotion de la cohésion sociale et locale sont reconnus à travers l’ensemble du territoire
de l’UE. Nombre d’Etats membres ont reconnu la nécessité de fixer des règles assurant l’accès
(possibilité et financement), le fonctionnement et l’évaluation des services sociaux dans le but de
s’assurer que ceux-ci peuvent remplir leurs missions et protéger les usagers.
- L’ensemble des Etats membres souhaite moderniser la fourniture des services sociaux. Les mots
clés de ce processus sont l’établissement de normes, la qualité du management, la décentralisation,
l’externalisation des tâches mises en place par le secteur public. De nombreux Etats membres
souhaitent promouvoir les partenariats privé / public.
- Une clarification est nécessaire à propos de la distinction entre services économiques et non
économiques, sur comment réguler l’aide de l’Etat et les processus d’appels d’offre publique. (En
particulier savoir s’il faut réglementer au niveau Européen les articles des appels d’offre).
- Les États membres appellent l’UE à respecter le principe de subsidiarité et à établir des outils
simples tels que l’échange de bonnes pratiques (MOC) et les critères de qualité.
La question de la finalité est primordiale dès que l’on parle de fourniture de services sociaux : la loi de
l’UE s’intéresse aux résultats, c’est à dire au service fourni et non à la structure qui le fournit. Par rapport à
l’économie sociale, aucun service au sein de la DG Emploi ne travaille sur ce secteur.
Points de débats.
¾ Pouvons nous distinguer les services économiques, des services non économiques ?
Non. La distinction est seulement une distinction légale pour l’application de règles communautaires qui ne sont
pas tenues en réalité. La Cour Européenne de Justice commence à prendre en compte le fait que les bénéfices
soient redistribués ou réinvestis. La Cour a également reconnu que même des services de nature économique
pouvaient être placés hors du cadre les règles de compétition. Plutôt que de renforcer cette distinction, ce serait
une meilleure stratégie que de considérer l’ensemble des services comme économiques, et réfléchir aux
conditions d’exercice de services économiques d’intérêt général.
¾ La distinction entre lucratif ou non-lucratif est-elle plus opérante ?
La Cour de Justice utilise cette distinction. Mais nous avons besoin de clarifier ce point : La qualité du service
est-elle différente quand un service est non-lucratif ?
¾ Les services Sociaux sont un élément important du modèle social Européen !
C’est important d’insister sur le fait que les services sociaux et éducatifs sont une part importante du modèle
social Européen. Nous devons être plus précis sur le rôle de ces services dans le modèle social Européen. Il faut
peut-être mieux définir le modèle Social Européen. C’est aussi important d’appuyer le fait que les privatisations
et la libéralisation ne conduisent pas toujours à de moindres coûts, et que ces deux processus créent quelquefois
du chômage.
B) Etudes de cas de quelques organisations membres de SOLIDAR.
Six organisations membres de SOLIDAR ont été sollicitées pour présenter une de leurs activités, dans
laquelle il existe une concurrence avec des fournisseurs privés, des administrations publiques, ou d’autres ONG.
Quels sont les points communs entre les activités présentées ? Qu’est ce qui les distingue ?
Dans ces situations de concurrence, quels en sont les avantages ?
Et quelles caractéristiques spécifiques pouvons nous identifier dans les services fournis par les
ONG ?
Dans ce qui va suivre, les études de cas seront présentées dans des cadres, suivies par un court résumé
des débats (hors des cadres).
Deux manières de recevoir des fonds publics. Deux projets de la Ligue de l’Enseignement, Paris.
La Fédération de Paris de la Ligue de l’Enseignement est une fédération d’associations. 500
associations sont adhérentes, 50 000 personnes en sont membres, le budget est d’environ 6 millions d’Euros par
an. C’est un mouvement qui défend des valeurs, et cest également une entreprise de l’économie sociale.
Exemple 1 : Un centre de ressources pour associations ( informations, comment recevoir des fonds, formation,
aide,…) créé conjointement par la Ligue et la Ville de Paris.
- Le projet est une initiative de l’association. Le projet a été soumis à la Ville de Paris. Il a été
financé, car il a été considéré comme un soutien important au développement de la vie associative.
- Deux salariés à temps plein mènent le projet, qui est installé dans les locaux de la fédération.
- Le budget se décompose en 75 % de la Ligue, 5 % des usagers, 20 % de subventions publiques.
- L’administration publique contrôle l’utilisation des subventions, à travers les rapports financiers.
Exemple 2 : Ateliers Multi Media ( Formation pour tous sur l’utilisation des ordinateurs, libre accès à des
équipements informatiques, aide à la recherche d’emploi, organisation de projets,…)
- Initiative : Appel d’offres de la Ville de Paris (objectifs et critères fixés).
- Il y a au moins 20 ateliers avec environ une trentaine de salariés, installés dans différents locaux.
- Budget annuel : 1 300 000 euros.
- 90 % du budget est issu de fonds publics.
Avantages de la concurrence ?
Dans l’appel d’offres de la seconde initiative, il n’existe aucune restriction ou spécification sur la nature
du fournisseur. Un opérateur privé (lucratif) aurait pu remporter l’appel d’offres. Quels sont les avantages de
cette concurrence pour la Ligue ?
- Une histoire de coopération – parmi les membres, mais aussi avec la Ville de Paris.
- Valeurs partagées.
- La réputation de l’association.
- La taille et la puissance de la fédération : Sa capacité à travailler avec de multiples organisations du
secteur social.
Un soumissionnement basé sur la qualité et le prix de revient.
En France, s’appuyant sur larticle 30 du code des marchés publics, certains projets peuvent être
acceptés même s’ils n’offrent pas le prix le plus bas. Une certaine liberté d’action est laissée aux autorités
publiques, en regard de la qualité des projets. Les règles régissant les marchés publics en France ont changé sous
l’influence des autorités publiques souhaitant choisir des contrats sur la base de critères d’intégration sociale et
économique. La Cour Européenne de Justice a statué contre cette manière de faire.
La liberté d’action de décider sur des critères de qualité est positive. Le risque de la situation actuelle est
que la jurisprudence décide quel pourcentage entre qualité et prix de revient doit être appliqué dans les appels
d’offres. Les règles devraient être changées pour pouvoir prendre en compte les spécificités et les
caractéristiques de certaines activités.
Les valeurs sociales ajoutées des organisations sociales, critères pour l’intérêt général. Une
proposition de AWO.
Exemple : AWO Sano : Maison de vacances familiale (famille et enfants)
Une plainte a été déposée par un « concurrent » auprès de la Commission Européenne, questionnant la
qualité « d’intérêt général » de AWO Sano, et l’aide de l’Etat non notifiée, reçue par AWO Sano. La
Commission a désormais interrogé le gouvernement Allemand pour avoir son avis. Le prix, l’offre et la qualité
sont examinés. Les questions de transparence, de dépassement de financements, et de superposition de
subventions sont également importantes dans l’étude.
Ce cas montre la position de la Commission Européenne de n’attribuer le label « Intérêt général » qu’à
certains services, et non aux organisations qui les portent. Pour les organisations Allemandes, ceci marque un
changement de vision, auxquelles les organisations doivent se confronter. Elles doivent répondre à la question de
la valeur ajoutée sociale de chaque service et son lien avec le statut d’intérêt général.
Différents acteurs sont engagés dans la fourniture de services sociaux et ont des intérêts différents.
* Les fournisseurs : Ont des besoins et des volontés d’agir de manière entrepreneuriale, avec des coûts réduits, et
une optimisation du service.
* Les professionnels : veulent une sécurité d’emploi, un travail intéressant et un bon salaire.
* Les usagers : a) usagers du service (le client roi) : veulent les meilleurs services possibles au prix le plus faible.
b) les personnes nécessitant une aide : veulent un contact humain, de la confiance.
* Les volontaires : veulent des contacts sociaux, de la gratitude, faire quelque chose d’utile.
La valeur ajoutée sociale est créée par un mélange de tâches, d’intérêts et de relations. Quelle est l’importance de
la valeur ajoutée sociale dans le processus de fourniture de services sociaux ?
Le Capital social – 4 hypothèses :
1. Le capital social est la base de la valeur ajoutée sociale.
2. Les fournisseurs de services sociaux ne sont pas des producteurs de capital social
3. Les usagers sont les consommateurs du capital social.
4. Les volontaires produisent du capital social.
Welfare mix c’est la combinaison entre la fourniture de services sociaux et la création de valeur ajoutée sociale.
Les organisations sociales doivent prendre les bonnes décisions pour assurer cette combinaison.
Le concept de Welfare Mix doit être basé sur la reconnaissance des compétences personnelles des citoyens en
tant que volontaires ; une nouvelle conception de la citoyenneté entraîne un concept élargi de la participation qui
devrait être une des bases de l’état providence moderne.
Valeur ajoutée sociale et engagement des citoyens : Le travail des volontaires marque le lien entre le travail
social et la citoyenneté, qui a besoin d’être reconnu par la population. L’organisation sociale, parce qu’elle est
fondée sur des valeurs, peut combiner la fourniture de services avec des éléments d’engagement civique, comme
aucun autre fournisseur.
La valeur ajoutée sociale – contribution spécifique des organisations sociales :
1) Dans le but de remplir leur rôle dans le renforcement de la valeur ajoutée sociale, les organisations sociales
se doivent d’être attractives pour leurs volontaires, les groupes d’aide mutuelle, les considérations locales.
2) Elles doivent être les défenseurs des préoccupations de la communauté, développer un système de
management professionnel pour le volontariat, favoriser le changement des rôles de l’équipe
professionnelle .
Acteurs et intérêts.
Les politiques et les administrations publiques peuvent être rajoutés à la liste des acteurs. Cependant,
l’influence de l’administration publique doit être discutée. On peut aussi arguer que les organisations sociales
opèrent dans le cadre d’un marché, et qu’elles ne dépendent pas forcément d’autorités publiques.
La distinction claire entre les rôles et l’intérêt n’existent pas dans la réalité : Très souvent, les usagers
sont eux-mêmes engagés dans la fourniture de service social ; la confiance et le contact humain peuvent aussi
être dispensés par l’équipe professionnelle.
Pas d’intérêt général sans volontariat ?
En accord avec l’argumentaire de la présentation, AWO Sano ne peut être considérée comme un
service d’intérêt général. En effet, il n’y a pas de volontaires engagés dans la fourniture des services. Si les
organisations ne peuvent s’appuyer sur des volontaires dans leurs services, doivent-elles accepter l’idée que ces
services n’ont pas un caractère d’intérêt général et devraient par conséquent être sujets aux règles de la
concurrence ?
L’influence des organisations sur le volontariat.
Jusqu’où les organisations encouragent-elles le volontariat ? Très souvent les volontaires créent du
capital social en dehors des organisations. Les organisations permettent aux volontaires de travailler ensemble, et
les aident à s’organiser. Les fournisseurs privés peuvent aussi s’appuyer sur des volontaires.
Des conditions / cadres pour les services sociaux – Volskhilfe fournisseur de soins à
domicile.
Il est important de prendre en compte que l’étendue du nombre de fournisseurs de services, les
conditions de financement (prix, quotient familial), les réglementations (systèmes de management de la qualité,
répartition des compétences, imprimés), les offres (qualité, étendue de l’offre, évaluation) et la situation de
concurrence (appels d’offres, financement local) diffèrent d’un état fédéral à l’autre en Autriche.
Soins à domicile : dans certains états, il existe une allocation territoriale des services (subvention) , mais
les processus d’appels d’offres, et la libre concurrence deviennent de plus en plus importants (comme dans
l’ensemble de l’UE). Les clients sont les états fédéraux et les collectivités territoriales, les personnes nécessitant
une aide et les familles.
Comment générer un avantage compétitif à travers l’orientation du client ?
Prix : Le plus souvent encore régulé. N’est donc pas un facteur de concurrence.
Qualité : Importante. Difficile à équilibrer face à la pression des prix.
Identité : L’identification des usagers à travers les valeurs politiques ou idéologiques, décroît ;
l’identité dans les appels d’offres est quelquefois une gêne.
Confiance : Les organisations sociales jouissent souvent d’une meilleure crédibilité que les
fournisseurs privés.
Offres supplémentaires : Difficiles à financer
Spécificités des ONG
1) Les ONG bénéficient d’environnement plus pertinent.
2) Une valeur ajoutée sociale à travers deux fonctions (la fourniture de services et l’engagement politique).
3) Valeur ajoutée à travers des financements croisés.
4) Motivations différentes dans la fourniture de service
5) Mise en place de « services d’accompagnement ».
6) Interaction entre l’engagement de la société civile et le rôle de fournisseur de service
Ce que nous voulons
- Reconnaissance de la position particulière des ONG en tant que fournisseur de services sociaux.
- Une concurrence régulée dans le cadre d’une reconnaissance des spécificités des ONG.
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