
dans l’espoir d’un progrès pour les autres. Il garde ainsi, jusqu’au bout, le sentiment de 
participer et de conserver sa dignité d’homme. 
 
  C’est dire que je ne suis pas un adversaire absolu et inconditionnel de 
l’acharnement thérapeutique, bien au contraire. Néanmoins, pourquoi suis-je quand 
même président d’une association qui s’appelle « Association pour le Droit de Mourir 
dans la Dignité », association qui a précisément pour but de lutter contre l’acharnement 
thérapeutique ? C’est que je crois que, dans notre société, ce problème est fortement 
ressenti par la majorité de la population. Pour beaucoup, la notion d’acharnement 
thérapeutique est vague, voire erronée, mais la crainte en est grande. Par exemple, pour 
les bien-portants, le simple fait de placer une sonde gastrique ou des perfusions peut 
représenter quelque chose d’horrible qui s’apparente à une torture, alors que pour le 
malade qui subit cet acte, ce n’est certes pas agréable, mais c’est rarement ressenti 
comme un sévice. Nous devons être conscients que les réactions des malades et de leurs 
proches ne sont pas nécessairement les mêmes. 
  C’est pourquoi je pense que chacun devrait s’efforcer de s’interroger sur ce qu’il 
désirerait pour soi-même, s’il se trouvait dans cette situation. A fortiori, le malade, qui est 
dans cette situation, doit faire connaître son avis. Pour qu’un véritable dialogue 
s’établisse entre le malade et le médecin, il est indispensable qu’un maximum de sincérité 
existe entre ces deux individus. Le malade doit demander des informations sur son état, 
sur le diagnostic et le pronostic de sa maladie, sur les caractéristiques des traitements 
proposés. Sauf de rares exceptions, le médecin est tenu de donner ces informations. C’est 
seulement lorsqu’il est en possession de toutes ces données que le malade peut prendre 
une décision d’accepter un traitement ou de le refuser. C’est lui seul qui peut établir le 
critère de ce qui est, pour lui, acharnement thérapeutique abusif. C’est lui qui peut définir 
ce qui lui paraît intolérable, mais j’insiste, intolérable pour lui et non pour la famille. J’ai 
d’innombrables exemples, dans ma pratique personnelle, de cas où la famille ne peut plus 
supporter la phase terminale de la maladie d’un être proche. La tension a été trop forte 
pendant trop longtemps : la fin est – inconsciemment – attendue comme une délivrance. 
Je pense que ce sentiment est normal, mais ce n’est certainement pas ce qui doit 
déterminer l’arrêt d’une thérapeutique active et, moins encore, amener une décision 
d’abréger la vie. 
  L’A.D.M.D. encourage donc ses membres à signer une déclaration concernant la 
fin de la vie. Pour nous, c’est le point essentiel : donner à l’individu lui-même le droit de 
décider ce qui est pour lui la façon la plus digne de terminer sa vie, que ce soit en luttant 
jusqu’au bout ou, au contraire, en acceptant la fin inévitable ou même en hâtant celle-ci, 
soit seul, par ses propres moyens (suicide), soit avec l’aide de quelqu’un (euthanasie 
active volontaire). En face de ce terrible problème, deux individus doivent se rencontrer : 
le malade et le médecin. Je regrette que la proposition de Monsieur D’Hose néglige le 
rôle du médecin traitant, l’écarte des décisions ou même donne l’impression de le tenir en 
suspicion. Il me semble, à moi, que les derniers moments de la vie sont ceux où la vérité 
et la profondeur du dialogue, du colloque singulier, comme on dit, sont les plus 
nécessaires.