318 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XX - n° 5 - mai 2011
DOSSIER THÉMATIQUE
Cancers de la thyroïde :
aspects innovants
1 © Correspondances en Métabolismes
Hormones Diabètes et Nutrition 2010;
XIV(7):202-8.
* Unité Thyroïde, service de radiologie
adulte Pr Hélénon, hôpital Necker,
Paris.
L
a prise en charge des nodules thyroïdiens a
considérablement évolué grâce aux progrès
de l’échographie, qui permettent une caractéri-
sation détaillée du nodule en mode B et en doppler.
Pris isolément, les signes de présomption de mali-
gnité sont insuffisamment discriminants, mais leur
association permet d’établir une valeur prédictive
positive (VPP) de malignité avec une spécificité et
une sensibilité élevées (1). Par ailleurs, l’échographie
guide l’aiguille de cytoponction, et la conjonction
des deux techniques offre au clinicien une identi-
fication de la nature du nodule dans la très grande
majorité des cas. Certaines tumeurs (en particulier
folliculaires) restent toutefois d’appréciation difficile.
Les progrès de l’imagerie ultrasonore sont consi-
dérables, et chaque année voit l’émergence de
nouvelles techniques qui nous donnent la possibilité
d’affiner notre étude. L’élastographie est l’une d’entre
elles. L’idée d’apprécier par imagerie ultrasonore
la déformabilité d’un tissu date de plus de 30 ans.
En 1983, A. Eisenscher (2) a décrit une technique
nommée échosismographie, qui utilisait le mode
TM. L’avènement du mode B a permis l’observa-
tion de la déformation des tissus (3, 4), mais il fallu
attendre 1991 pour que J. Ophir baptise la technique
du nom d’élastographie (5). Elle était initialement
dédiée au muscle et surtout au sein, les premières
études in vivo sur cet organe remontant au milieu
des années 1990 (6). En 2005, A. Lyshchik a été le
premier à publier une étude consacrée à l’élasto-
graphie thyroïdienne (7).
Pourquoi vouloir mesurer
la dureté d’un tissu ?
Avant tout, il faut revenir aux définitions :
➤
La dureté est la mesure de la capacité d’un maté-
riau à résister à une contrainte.
➤La rigidité décrit le degré de déformation élas-
tique du matériau sous cette contrainte.
➤
L’élasticité est la capacité du matériau
à reprendre sa forme initiale à l’arrêt de la
contrainte.
La découverte d’une structure dure dans un tissu
mou a toujours inspiré la suspicion. Avant l’ère de
l’échographie, seuls les nodules palpables étaient
localisés, et leur rigidité était appréciée en même
temps que celle du parenchyme. L’échographie nous
permet d’objectiver tous les nodules. L’élastographie,
en étudiant le couple déformation-dureté, a pour
objectif de passer de la subjectivité de la palpation
à l’objectivité de la mesure de la dureté.
À quoi est due la dureté du cancer ?
La plupart des tumeurs malignes se caractéri-
sent par la qualité de leur stroma anormalement
ferme (présence de collagène et de fibroblastes
activés) : c’est la transformation desmoplastique.
Ce stroma tumoral favorise la prolifération des
cellules malignes (et pourrait même l’initier) [8, 9].
En 2005, Lyshchik étudia ex vivo la dureté de la
thyroïde et de différentes tumeurs thyroïdiennes.
Il trouva une différence très significative entre le
cancer (63,3 ± 36,8 kilopascals [kPa]) et le tissu sain
(10 ± 4,2 kPa) [10].
Nodule dur = cancer ?
Les cancers papillaires sont le plus souvent durs à la
palpation. Les cancers folliculaires ne se caractéri-
sent généralement pas par leur dureté. Par ailleurs,
les kystes à colloïde très épais peuvent donner une
impression de dureté, ainsi que certaines tumeurs
fibreuses bénignes.
Élastographie thyroïdienne
Thyroid elastography
H. Monpeyssen, J.M. Correas, J. Tramalloni, S. Poirée, O. Hélénon*
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