39- commentaire sur l' épigraphie latine d' après le livre de Paul
CORBIER (1ère partie), par Philippe POTEL-BELNER, publié le 3 octobre 2014 sur Aca-
demia.edu
Alors que je suis en train de finir d' écrire le deuxième volet de ma trilogie comprendre la reli-
gion gaulois et la religion romaine par les inscriptions antiques d' Italie, je souhaiterais partager
avec d' autres épigraphistes quelques réflexions , et leur demander leur avis.
Alors que, tout le monde en conviendra, comme Paul CORBIER, il existe plus de questions que
de certitudes en ce qui concerne les traductions d' épigraphes et la religion romaine, je pro-
pose d' apporter un éclairage nouveau sur les mots latins et particulièrement le vocabulaire
religieux. Cet "éclairage nouveau" je peux l' apporter principalement en raison du travail éty-
mologique que j' ai fait en amont, ainsi que de ma bonne connaissance des textes anciens de
l' Inde, qui nous renseignent à la fois sur des croyances très anciennes, mais également et je
dirais même "surtout", sur la construction de nos langues.
Parmi les très nombreux éléments que j' ai analysés dans mon livre en cours, j' ai sélectionné
une hypothèse significative et centrale, bien qu' un peu osée: les prénoms dans les tria nomina
romains.
L' hypothèse retenue jusqu' à présent est celle d' un nom sans réelle utilité, peut-être utilisé
seulement à un âge précoce (PC-28).
A l' époque classique, ils étaient réduits à quelques uns, souvent typiques de la gens à la-
quelle appartenait l' individu: Caius, Publius, Cneus, Quintus, etc...
A partir de mes nombreuses études d' inscriptions et de mon étude de la religion romaine,
en grande partie confortée, par exemple, par les opinions exprimés par plusieurs chercheurs
dans la mort au quotidien dans le monde romain, actes du colloque organisé par l' Université
de Paris IV en octobre 1993, j' ai bâti une hypothèse qui se révèle valide dans toutes les ins-
criptions que j' ai traduites.
Cette hypothèse se forma également en raison de la forme récurrente que prennent toutes
les inscriptions funéraires de l' Antiquité: l' inscription funéraire indique "corps OU enveloppe"
de X (le défunt), afin de bien montrer que l' âme (re)prend un chemin différent de celui du
cadavre.
Mon hypothèse est que les Romains, héritiers d' une culture beaucoup plus ancienne,
croyaient à l' état transitoire de la vie. On en revient toujours à cet "apprivoisement" de la
mort, dont a parlé Philippe ARIÉS, dans l' homme devant la mort (1977).
C' est pour cette raison qu' ils avaient inclus dans leur nom le fait qu' ils n' étaient qu' un
maillon d' une chaîne, qu' une étape d' un cycle.
Caius, signifie étymologiquement "qui rend visible" > qui fait vivre, c' est la définition religieuse
du corps. On retrouve ce sens dans le grec: Gaia OU GÊ = la déesse nourricière Terre.
MARTIALIS C(aius) OLI ... (CIL X-826) = Martialis, corps né de Olus. Le "i" génitif de Oli est équiva-
lent au -ius du gentilice Olius, il s' agit en réalité d' un suffixe très ancien (védique) qui signi-
fie "qui vient de" / "né de". (note 1)
Dans les croyances anciennes, la fabrication du corps, destiné à habiller l' âme , est issu de l'
activité sexuelle humaine. Ces activités sexuelles forment une lignée, puisque Z, est fabriqué
par Y (son père), qui a lui même été fabriqué par X (père et grand-père), et ainsi de suite.
C(aius) IVLIVS DIVI AVG L ... (CIL VI- 5747) = corps de Iulus (descendant de Iulus) (nommé) Divi...
(Divi est un NP, voir Oswald-107).
Ce terme de Caius était ici utilisé en épitaphe, mais il était également utilisé du vivant de la
personne: ce qui devait donner à peu près ceci: "ave ! Martialis, corps né de Olus !" OU "ave !