premiers à être renvoyés. Ensuite, ce fut le gouverneur du Yucatan, au printemps dernier,
après qu’il ait permis à l’opposition de remporter l’hôtel de ville de la capitale de l’État.
Dans les trois exemples les plus récents, la faute inexcusable, ce n’était pas la fraude elle-
même (phénomène universel au Mexique)…mais bien l’insuccès de cette fraude.
Aussi inquiétant pour la cause de la réforme authentique est le mépris envers les checks
and balances constitutionnels. En théorie, les États-Unis mexicains (nom officiel du pays)
forment un système fédéral d’États qui se gouvernent eux-mêmes, d’après le modèle des
États-Unis. Dans la pratique, cependant, les présidents mexicains ont joui de pouvoirs
presque illimités, grâce à leur maîtrise du PRI.
Loin de stopper cette mauvaise habitude, Salinas la renforce en remplaçant
personnellement les gouverneurs, à une vitesse qui dépasse celle de tous ses
prédécesseurs.
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Par ailleurs, Salinas emploie l’armée au mépris de toute norme constitutionnelle. Au lieu
d’employer la police pour arrêter La Quina, le patron dépravé du syndicat pétrolier, il a
envoyé l’armée. Il a envoyé des parachutistes aux mines de cuivre de Cananea pour
prévenir une grève possible. Et il a envoyé les chars d’assauts au Michoacán, pour
reprendre le contrôle des Hôtels de ville occupés par des citoyens enragés par la fraude
électorale!
Quand la presse mexicaine — en principe indépendante — prête sa voix aux mécontents,
elle le fait à ses risques et périls.
En novembre dernier, le gouvernement a forcé la démission du rédacteur en chef d’El
Porvenir, un journal de Monterrey qui avait osé remettre en question les agissements
inconstitutionnels du président. À la suite des avertissements du secrétaire de presse de
Salinas, Otto Granados — «Nous ne supporterons plus les critiques directes à propos du
président»—, le gouvernement a mis fin aux contrats de publicité avec le journal, et
refusé l’accréditation à ses journalistes. Précédemment, le gouvernement avait imposé au
rédacteur en chef du quotidien de México Uno Mas Uno, l’exil en Espagne après que son
journal ait donné trop d’espace à l’opposition.
Sur ce fond de violations constitutionnelles, la corruption continue sans freins. En
novembre dernier, à Veracruz, l’armée a massacré sept agents fédéraux antidrogues
pendant que ces derniers essayaient d’arrêter des contrebandiers colombiens de cocaïne,
pendant qu’on faisait le plein de leur avion à un avant-poste de l’armée. Toujours en
novembre, le gouvernement a vendu la banque étatisée BCH à une association guidée par
un homme d’affaires de Tabasco qui a — on l’a appris ensuite — servi de façade à
Federico de la Madrid…le fils du président précédent!
Tout cela donne une bien bizarre réforme. La structure du Mexique est en train de
changer énormément, oui. Mais la plupart des changements renforcent le modèle
autoritaire. Les nouvelles lois électorales avalisent la domination du PRI dans toutes les
commissions électorales, avec le ministre de l’Intérieur comme directeur de la
commission fédérale.