VIE PROFESSIONNELLE Histoire de la médecine Ornella Salvatore M edecin G en eraliste, Titulaire du diplôme universitaire d’histoire de la medecine (Universit e Paris V Descartes). Thèse d’histoire de la m edecine portant sur l’histoire et l’ evolution de la medecine gen erale en France à partir du XIXe siècle [email protected] Tir es à part : O. Salvatore Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Résumé Discipline en plein essor, la médecine générale est de nos jours une spécialité à part entière qui a su prendre, au fil des siècles, une place capitale dans la prise en charge du patient. Au-delà des simples modifications de son enseignement, elle est devenue une spécialité à part entière et une discipline d’avenir tournée également vers la recherche. Au gré des grands bouleversements politiques et scientifiques des XIXe et XXe siècles, la médecine générale est passée des mains des officiers de santé peu qualifiés du début du XIXe à celles des médecins « omnipraticiens » formés à partir d’un cursus universitaire similaire à celui des étudiants en spécialités médicales. Son rôle : prendre en charge le patient dans sa globalité. Mots clés médecine générale. Abstract. History and development of general practice in France: focus on the twentieth century General practice, a booming discipline, nowadays is a specialty in its own that has taken over the centuries, a crucial role in the patient's care. Beyond simple changes in teaching, it has become a specialty in its own, and a promising discipline oriented towards research. Following the great political and scientific upheavals of the nineteenth and twentieth centuries, general practice was transferred from unskilled health officers in the early 19th century to those doctors or ’GPs’ formed from the same university course as for students in medical specialties. Their role: to treat the patient as a whole. Key words general practice. Histoire et évolution de la médecine générale en France : focus sur le XXe siècle « Il faut savoir d’où l’on vient pour savoir où l’on va »1 Des fondements de la médecine générale aux portes du XXe siècle : survol de l’évolution de la discipline Les premières traces de médecine remontent à la nuit des temps [1]. En effet, des trépanations crâniennes étaient pratiquées à l’époque préhistorique dans le simple but de soulager le malade [2]. Pour commencer à parler de médecine au sens propre du terme, il faut avancer dans le temps et faire une halte dans l’Antiquité. En Mésopotamie pour commencer, dans ce « berceau de la civilisation » [3] où le premier système d’écriture a été inventé : dans le célèbre Code juridique de Hammurabi (qui date d’environ 3300 av. J-C.) figurent pour la première fois neuf paragraphes consacrés à l’activité médicale. Les médecins étaient alors appelés les « azus » [3]. Continuons notre survol en Égypte pour saluer nos lointains confrères, les « sounou » (« médecin » en égyptien). Grâce à l’embaumement, les médecins ont pu développer leurs connaissances anatomiques et certains ont laissé à la postérité de nombreux papyrus médicaux [3, 4] qui font, encore de nos jours, l’admiration de la communauté scientifique. Revenons maintenant en Europe pour visiter la Grèce. . . C’est au Ve siècle avant J-C. que l’école de Cos fut fondée par Hippocrate [3], abandonnant ainsi les pratiques mythologiques ainsi que celles des philosophes-savants. Basant sa pratique sur une approche holistique du patient, Hippocrate s’opposait à Euryphon et son école de Cnide pour qui le diagnostic était forgé sur l’organe qui souffre. Ainsi, sans le savoir, Hippocrate inventa les principes de la médecine générale. Il exposa sa nouvelle vision de la médecine dans son Corpus Hippocraticum et basa sa pratique sur la fameuse, mais non moins fausse, théorie des humeurs. Que cela soit dit : Hippocrate sera le nouveau « Père de la Médecine » ! . . . et c’est à lui, aujourd’hui encore, que les nouveaux diplômés rendent hommage en prêtant serment le jour de leur thèse. Après la conquête la Grèce, de nombreux médecins de l’école d’Alexandrie arrivèrent à Rome [3] et une multitude de courants de pensée s’affrontèrent jusqu’à l’avènement de Claude Galien au IIe siècle. Considéré comme le fondateur de la physiologie expérimentale, et reprenant les principes de la théorie d’Hippocrate, il inventa le concept de médecine galénique. DOI: 10.1684/med.2016.21 Quittons maintenant l’Antiquité et plongeons-nous dans le Moyen-Âge, divisé en deux périodes : la période monastique et la période scolastique [3]. 1 ÉDECINE Fernand Braudel, dans la préface de l’Histoire de l’Afrique noire par Joseph Ki Zerbo, Hatier, 1972. MÉDECINE Février 2016 91 VIE PROFESSIONNELLE Histoire de la médecine | Histoire et évolution de la médecine générale en France : focus sur le XXe siècle La période monastique fut une période d’obscurantisme médical dominée par l’Église, la plupart des médecins étant des clercs. La seconde période débuta au XIe siècle et fut marquée par l’école de Salerne. Suite à une série de conciles, l’Église se désengagea alors progressivement de la médecine et les pratiques « empiriques » prirent le pas sur les pratiques religieuses. La Faculté de Montpellier vit le jour et la médecine fut érigée au rang de science à part entière. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. La Renaissance, avec la mise au point de l’imprimerie, contribua à la diffusion des savoirs scientifiques de l’époque. Vint le XVIIe siècle, qui est à considérer comme le Siècle d’Or des sciences avec le développement des sciences fondamentales, mais où règne encore la théorie des Humeurs d’où découlent les principes thérapeutiques définis par Galien, centrés sur la saignée. Le XVIIIe siècle, enfin, fut marqué par une audace thérapeutique, l’invention de la vaccination, réalisée par Edward Jenner en 1796, et des avancées techniques comme celle de la percussion mise au point par Auenbrugger ou encore le stéthoscope inventé par Laennec. À l’aube de la Révolution, la misère et la grande mortalité infantile étaient encore bien courantes [5]. Les établissements hospitaliers étaient dans un état catastrophique et les charlatans sévissaient dans les rues. Il fut question de fermer les hôpitaux et de favoriser les secours à domicile. Félix Vicq d’Azyr décida alors de réformer l’enseignement de la médecine [5] afin d’éviter les inégalités locales en matière de soins médicaux. Il proposa une formation mixte, théorique et pratique, et destina les meilleurs étudiants à une longue carrière hospitalière. Les autres étudiants, eux, exerceraient dans les campagnes. Cette réforme, jugée non conforme aux idées révolutionnaires, ne verra pas le jour. En 1791, ce sont la loi Allarde et la loi Le Chapelier qui furent adoptées. Celles-ci supprimaient toute corporation médicale et autorisaient l’exercice médical à qui paiera une patente à l’État [6, 7]. Nous arrivons maintenant au XIXe siècle, époque où la médecine profita de l’évolution des savoirs fondamentaux pour modifier sa pratique et son enseignement. Il était désormais question de « confrontation anatomoclinique » et de spécialisation [3]. Après la Révolution et ses lois chaotiques, l’heure était à la réorganisation de l’enseignement de la médecine. Il fallait faire face à la montée du charlatanisme et vite ! C’est en 1793 que le corps des officiers de santé vit le jour [8], justement dans le but de pallier le manque de docteurs en médecine surtout dans les campagnes. La loi du 19 ventôse an XI (10 mars 1803) créa une médecine à deux vitesses avec d’un côté les officiers de santé formés rapidement au sein d’écoles de santé, et de l’autre les docteurs en médecine [9]. Petit à petit, les écarts de formation entre les deux corps s’amenuisèrent, jusqu’à la loi Chevandier du 30 novembre 1892 [5, 7] qui supprima l’officiât de santé. La pratique de la médecine était désormais rendue aux seules mains des médecins. 92 MÉDECINE Février 2016 La médecine au XXe siècle : l’avènement de la médecine générale Au début du XXe siècle, l’espérance de vie s’allongea de plus de 30 ans grâce aux nombreuses découvertes scientifiques. Les spécialités médicales n’étaient pas encore codifiées et chaque médecin était un médecin « généraliste ». Parcours d’un étudiant en médecine au début du XXe siècle Les études médicales rencontrèrent un franc succès en ce début de siècle. Il y avait 4 495 étudiants en médecine à Paris en 1898 et environ 45 000 médecins en France en 1910 [10]. Pour que le lecteur se fasse une opinion : cela revient à dire qu’un médecin consultait en moyenne un patient tous les douze jours. . . ! Des mesures restrictives (création de l’examen du PCN : physique, chimie, sciences naturelles [10] ; deux années de service militaire obligatoires au lieu d’une pour tout étudiant de 27 ans n’ayant pas obtenu son doctorat) furent donc instaurées afin de réduire le nombre d’étudiants en médecine. Et cela fonctionna puisque le nombre d’étudiants en médecine à Paris en 1906 passa à 3 157. Pour pouvoir « entrer » en Faculté de médecine, il fallait être titulaire d’un baccalauréat ès lettres ainsi que d’un baccalauréat ès sciences. Ce dernier sera remplacé par le concours du PCN mentionné plus haut. La formation était mixte avec une part pratique le matin en stage hospitalier et l’après-midi lors des travaux « pratiques » ainsi qu’une part théorique lors des cours magistraux. La réussite des études requérait la validation d’examens probatoires ainsi que la réalisation et la soutenance d’une thèse. La création des concours de l’internat (en 1802) et de l’externat avait pour but d’ouvrir la voie hospitalière aux étudiants qui le désiraient et qui en étaient capables. Ils n’étaient donc pas obligatoires. L’installation De façon générale, les jeunes médecins s’installèrent en ville, à proximité de confrères débordés afin de pouvoir les suppléer à l’occasion [10]. La démographie médicale étant dense dans les grandes agglomérations, le niveau de vie des médecins était assez faible. Ainsi, mis à part ceux qui avaient la chance de reprendre la patientèle d’un médecin jeune retraité, il n’était pas rare que certains médecins soient obligés de trouver un autre emploi afin de gagner leur vie. Déjà à cette époque, l’on encourageait les jeunes diplômés à aller exercer leur art dans les campagnes, véritables déserts médicaux laissés en proie aux charlatans et aux rebouteux. La grande majorité des médecins souhaitait malgré tout rester en ville. La perspective de s’isoler dans une campagne peu facile d’accès et loin des VIE PROFESSIONNELLE Histoire de la médecine | Histoire et évolution de la médecine générale en France : focus sur le XXe siècle Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. rêves de gloire et de fortune n’attirait pas les carabins qui, pour la plupart provinciaux, avaient quitté le nid familial depuis au moins six ans justement dans l’espoir de passer à la postérité ! Cela revenait à faire machine arrière. . . Lieu d’exercice défini, diplômes enregistrés sans frais auprès de la préfecture : le médecin « généraliste » n’avait plus qu’à se mettre au travail. . . Finalement, la consultation médicale du début du XXe siècle ressemblait assez à celle que nous connaissons. Un interrogatoire et un examen physique. La différence résidait dans le fait que le médecin effectuait (et analysait) lui-même ses prélèvements. Quand il était suffisamment équipé, il réalisait les clichés radiologiques. Précisons également que le médecin réalisait entre dix et quinze visites à domicile par jour : l’invention du téléphone et du vélocipède furent d’une aide précieuse ! Place de la médecine dans les conflits mondiaux Au cours de la première guerre mondiale, plus de 16 000 médecins français furent mobilisés sur le Front [11]. Cette Grande Guerre a fait plus de 10 millions de morts parmi les soldats, toutes nationalités confondues. En ce qui concerne la France, l’on dénombra plus de 5,5 millions de blessés [12]. Les soldats devaient faire face à de nouvelles façons de combattre et à de nouvelles armes, obligeant ainsi les médecins à adapter leur pratique et à faire évoluer leurs connaissances. Si la médecine générale n’existait pas encore en tant qu’entité à l’époque de la Grande Guerre, il n’y avait pas plus généraliste qu’un médecin exerçant dans l’horreur des tranchées. Confronté aux pathologies chirurgicales, infectieuses et même psychiatriques, le médecin devait faire face à une multitude de cas cliniques pour lesquels il constituait un premier recours. À lui de savoir reconnaître les urgences, de les traiter et d’orienter son patient. À l’image du médecin généraliste du XXIe siècle, le médecin des tranchées était aussi amené à créer des liens avec ses patients afin, si possible, de constituer un soutien psychologique. Malheureusement, accompagner les patients dans la souffrance ou même dans la mort relevait aussi des qualifications du médecin qui, durant cette période, était bien souvent démuni face à l’atrocité du conflit. La période de l’entre-deux guerres marqua l’apparition de certaines spécialités telles que la pédiatrie ou encore la phtisiologie (pneumologie) [13]. C’est le 7 octobre 1940 que le Conseil de l’Ordre des Médecins fut institué [14] mais il s’agissait en fait d’organiser une épuration de la profession médicale. Le Conseil de l’Ordre tel que nous le connaissons fut créé le 24 septembre 1945 [13]. L’ordonnance du 4 octobre 1945 créa quant à elle la Sécurité Sociale [13]. La médecine dans la seconde moitié du XXe siècle L’accroissement rapide des connaissances nécessita la création des spécialités médicales. C’est sous l’impulsion des médecins généralistes désireux de parfaire leurs connaissances que les spécialités médicales virent le jour. Il fallut attendre l’arrêté du 6 octobre 1949 pour que les spécialités médicales soient codifiées et que les conditions nécessaires à leur pratique soient fixées officiellement [15]. Les certificats d’études spécialisés (CES) sont alors créés [5]. Les enseignements des CES sont proposés après le doctorat, donc après l’année préparatoire de PCB et les sept ans d’études de médecine, et ce sont 2 000 étudiants qui sont inscrits en 1956. À l’origine, il s’agit simplement pour les omnipraticiens de perfectionner leurs acquis dans certains domaines. Néanmoins, peu de temps s’écoulera avant que la spécialisation devienne l’objectif des jeunes médecins. . . reléguant la médecine générale au grade de « non-spécialité ». Le 30 décembre 1958, la « loi Debré » [5, 13, 16] met en place les CHU ainsi que le statut des médecins hospitaliers. Les pensées évoluent puisque la voie hospitalo-universitaire semble désormais nettement plus prestigieuse que le secteur libéral. Face au triomphe des « médecines d’organes » [17], certains praticiens de médecine générale tentent de mettre en place une résistance. C’est entre 1973 et 1975 que la Commission Fougère se prononce pour la formation obligatoire de deux ans pour les futurs généralistes. L’idée de supprimer l’internat et de créer un concours classant obligatoire pour tous a également été évoquée mais aussitôt rejetée par les étudiants au début des années 80. . . Toujours dans le même esprit de promouvoir la médecine générale, certaines UFR mettent en place des enseignements de médecine générale ainsi que des stages auprès de praticiens libéraux (Bobigny, Tours, Nancy. . .). Cependant, la médecine générale et les spécialités médicales ne sont pas encore sur un pied d’égalité et l’internat de médecine générale est baptisé « résidanat » [18]. Les études de médecine dans la seconde moitié du XXe siècle Les évènements de mai 68 ont permis l’adoption de nouvelles réformes dans l’enseignement et l’organisation des études médicales comme, par exemple, l’autonomisation des CHU ainsi que la suppression du concours de l’externat. Ces réformes aboutissent à un afflux massif d’étudiants en médecine et, par conséquent, à la nécessité de réguler ce flux en instaurant le numerus clausus en 1972 dès la fin de la première année [5, 17]. L’externat est alors obligatoire pour tous [5] dès la fin de la troisième année d’études et l’externe est désormais appelé « étudiant hospitalier ». Le premier et le deuxième cycles durent six ans au total et constituent un tronc commun à tous les étudiants hospitaliers. Pour entrer dans le troisième cycle, les étudiants doivent avoir validé le deuxième cycle et obtenu le certificat de synthèse clinique et thérapeutique (CSCT) [17]. MÉDECINE Février 2016 93 VIE PROFESSIONNELLE Histoire de la médecine | Histoire et évolution de la médecine générale en France : focus sur le XXe siècle En 1982, le concours de l’internat devient le seul moyen d’accéder aux spécialités en ouvrant la voie des DES (Diplômes d’Études Spécialisées) : les CES sont alors supprimés. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Jusqu’en 2004, les futurs médecins généralistes ne passent pas le concours de l’internat. Leur deuxième cycle est suivi d’une période de résidanat qui dure deux ans et demi (trois ans pour les nouvelles promotions de résidents à partir de 2001). \L’organisation du 3e cycle de médecine générale est définie par le décret du 7 avril 1988, modifié par le décret du 16 mai 1997. Il comporte une formation théorique, une formation pratique hospitalière et une formation pratique extrahospitalière [17]. Les résidents effectuent cinq stages rémunérés d’un semestre : quatre stages hospitaliers, dont un en CHU, et un stage en structures de soins primaires, essentiellement auprès de praticiens généralistes. Pour obtenir le diplôme d’État de docteur en médecine, avec qualification en médecine générale, les étudiants doivent avoir validé la formation théorique et la formation pratique du résidanat, et soutenu une thèse. Au total, pour pouvoir accéder au troisième cycle des études médicales, l’étudiant doit avoir validé son deuxième cycle, obtenu son CSCT et avoir été classé en rang utile aux ECN afin de pouvoir choisir sa spécialité ainsi que la région dans laquelle il effectuera son internat. L’internat dure ensuite de trois à cinq ans en fonction de la spécialité choisie. L’internat de médecine générale en 2015 Il dure trois ans (donc six semestres) et comporte des stages obligatoires : un stage en médecine adulte polyvalente (souvent en médecine interne ou gériatrie), un stage en pédiatrie ou un stage en gynécologieobstétrique, un stage aux urgences ainsi qu’un stage chez un praticien de ville dit « stage de niveau 1 ». Les autres stages sont libres et l’interne peut, s’il le souhaite, réaliser un « stage autonome en soins primaires ambulatoires supervisé » ou SASPAS. Parmi tous les stages, l’interne doit réaliser au moins un stage en CHU. La médecine générale au XXIe siècle Nouveautés dans l’organisation des études médicales L’année 2004 marque la fin du concours de l’internat. Il est remplacé par les Épreuves Classantes Nationales et devient obligatoire pour tous les étudiants en médecine, quelle que soit la spécialité choisie. L’ancien résidanat prend alors définitivement le nom d’internat de médecine générale [5]. Depuis la rentrée 2010, la première année du premier cycle d’études médicales (PCEM1) devient la « première année commune aux études de santé » (PACES). Les futurs étudiants en médecine, odontologie, pharmacie et les futures sages-femmes sont soumis au même concours à la fin de cette PACES. Chacun étant ensuite classé en rang utile (ou non. . .) pour pouvoir poursuivre dans la voie qu’il s’est choisie. Les premier et deuxième cycles des études médicales gardent la même durée qu’à la fin du siècle précédent. La formation est toujours mixte : théorique à l’Université et pratique au sein des stages hospitaliers (CHU). Chaque étudiant hospitalier doit effectuer quatre stages de trois mois par an, consistant en cinq matinées par semaine, l’après-midi étant réservé aux cours à l’Université, aux examens et à la préparation des ECN. Certains stages comme la chirurgie, la médecine interne, les urgences ou la réanimation, la pédiatrie et la gynécologie-obstétrique sont obligatoires. Les étudiants hospitaliers effectuent des gardes aux urgences et perçoivent une rémunération. À la fin du deuxième cycle, les étudiants doivent obtenir leur « certificat de synthèse clinique et thérapeutique » (CSCT) qui correspond au module 11 des ECN. 94 MÉDECINE Février 2016 Pour valider son troisième cycle, l’interne doit avoir réalisé et validé l’ensemble de ses stages, avoir rédigé ses travaux universitaires (ces derniers devant être approuvés par le tuteur de l’interne), avoir suivi un nombre suffisant d’heures d’enseignement et, last but not least (comme le disent nos amis anglo-saxons), avoir soutenu sa thèse de doctorat. L’interne peut, s’il le souhaite, compléter sa formation grâce à la validation de Diplômes d’Études Spécialisées Complémentaires (DESC) ou bien de Diplômes Universitaires (DU), ou encore de Diplômes Inter-Universitaires (DIU). La médecine générale aux plans mondial et national La WONCA Au début des années 70 se crée la « World Organization of National Colleges and Academies of General Practice/ Family Medicine » [19] dont le but est « non seulement d’apporter une définition précise à la profession de médecin généraliste/médecin de famille, mais aussi et surtout d’assurer le leadership scientifique et académique et de représenter la discipline de médecine générale/ médecine de famille pour le continent. Son rôle principal est de promouvoir et développer la discipline pour obtenir et maintenir un haut niveau d’éducation, de formation, de recherche et de pratique clinique au bénéfice individuel des patients et de la communauté » [20]. Il existe une sous-section européenne ainsi qu’une association d’enseignants de médecine générale appelée EURACT [20] (European Academy of Teachers in General Practice). VIE PROFESSIONNELLE Histoire de la médecine | Histoire et évolution de la médecine générale en France : focus sur le XXe siècle Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Voici la définition de la médecine générale selon la WONCA [20] : « Les médecins généralistes-médecins de famille sont des médecins spécialistes formés aux principes de cette discipline. Ils sont le médecin traitant de chaque patient, chargés de dispenser des soins globaux et continus à tous ceux qui le souhaitent indépendamment de leur âge, de leur sexe et de leur maladie. Ils soignent les personnes dans leur contexte familial, communautaire, culturel et toujours dans le respect de leur autonomie. Ils acceptent d’avoir également une responsabilité professionnelle de santé publique envers leur communauté. Dans la négociation des modalités de prise en charge avec leurs patients, ils intègrent les dimensions physique, psychologique, sociale, culturelle et existentielle, mettant à profit la connaissance et la confiance engendrées par des contacts répétés. Leur activité professionnelle comprend la promotion de la santé, la prévention des maladies et la prestation de soins à visée curative et palliative. Ils agissent personnellement ou font appel à d’autres professionnels selon les besoins et les ressources disponibles dans la communauté, en facilitant si nécessaire l’accès des patients à ces services. Ils ont la responsabilité d’assurer le développement et le maintien de leurs compétences professionnelles, de leur équilibre personnel et de leurs valeurs pour garantir l’efficacité et la sécurité des soins aux patients ». Le médecin généraliste est donc le médecin de premier recours. Il se définit par des compétences dites « génériques » classées en six catégories : les soins de première ligne, les soins centrés sur la personne, le processus décisionnel pour résoudre des problèmes, l’approche globale, l’orientation communautaire et l’adoption d’un modèle holistique. Ces compétences résument les fonctions du médecin généraliste qui prend en charge le patient dans sa globalité. La loi française Peu à peu, le médecin généraliste se place au centre de la prise en charge du patient et cela devient d’autant plus effectif lorsque la loi du 13 août 2004 est votée [21, 22] : elle prévoit la coordination des soins autour du médecin traitant. En toute logique, l’Arrêté du 20 novembre 2004 a élaboré un formulaire de « déclaration de choix du médecin traitant », à remplir également par tous les assurés de 16 ans et plus. De même, la loi met en place la création d’un dossier médical personnel qui permet de suivre le cheminement du malade dans son parcours de soins. La recherche en médecine générale La médecine générale devient une discipline d’avenir. Tout comme les spécialités médicales, elle se tourne vers la recherche et l’enseignement. La recherche en médecine générale est en lien avec la recherche en soins primaires [23]. Créée aussi pour diminuer les écarts avec les spécialités médicales et rendre attrayante la médecine générale, elle est à la fois clinique et épidémiologique. Son domaine d’application est celui des patients pris en charge en médecine générale. Parfois les équipes de recherche sont multidisciplinaires car elles peuvent mobiliser des chercheurs en santé publique, en sciences sociales et humaines ainsi qu’en économie. La médecine générale de demain L’année 2015 est synonyme de changements pour les médecins et surtout pour les médecins généralistes. La loi de santé [24] proposée par Madame Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, veut moderniser le système de santé français. Les trois grands axes de cette prise en charge concernent : la prévention, la création de nouveaux droits pour les patients, le placement des soins de proximité au centre de la prise en charge du patient. Ce projet de loi ambitieux fait polémique par certains de ses aspects et entraîne, depuis son élaboration, manifestation sur manifestation. Au cœur des débats et des désaccords : la généralisation du tiers-payant et l’accroissement de certaines fonctions du personnel paramédical. Conclusion Parler de l’histoire de la médecine générale revient à évoquer l’histoire d’un paradoxe. Souvenez-vous : présente dès le début des temps et conforme aux préceptes holistiques d’Hippocrate, la médecine générale a longtemps été la seule forme d’exercice. Ce n’est que bien des siècles plus tard et sous l’impulsion des généralistes que se sont créées les spécialités ! Le second paradoxe se situe dans le fait que la soussection de médecine générale au Conseil National des Universités ne date que de décembre 2014 faisant d’elle la spécialité médicale la plus jeune. . . Le médecin généraliste est aujourd’hui plus que jamais au cœur de la prise en charge de ses patients et son avenir est en passe de subir de profondes modifications. ~Liens d’intérêts : l’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec l’article. NDLR. Depuis une trentaine d’années, nombre de généralistes, tant dans le cadre associatif que dans celui de la formation continue ou de l’université, s’impliquent dans la défense et la promotion de la médecine générale. Nous reviendrons très prochainement sur le développement et l’articulation des différentes modalités et structures et le développement de la Filière Universitaire de Médecine Générale (FUMG). 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