Le syndrome du périnée descendant (SPD) a été décrit en 1966 par
PARKS [28] chez des patientes se plaignant de difficultés d’exonéra-
tion parfois accompagnées de douleurs périnéales. Cliniquement, il
correspond à l’abaissement, lors de la poussée, du plan cutané du
périnée postérieur au-dessous du plan bitangent aux tubérosités
ischiatiques. Il est défini radiologiquement par l’abaissement de la
jonction anorectale de plus de 3 cm au-dessous de la ligne pubo-
coccygienne [24, 28]. On a décrit des périnées “descendants” avec
une descente anormale au cours d’un effort de poussée et des péri-
nées “descendus”, encore mobiles, avec un abaissement anormal au
repos. Le périnée “gelé”, immobile, est une situation rare consti-
tuant le stade ultime de la dégradation du plancher pelvien.
Les données radiologiques, manométriques et électromyogra-
phiques ont montré que la descente périnéale anormale était sou-
vent associée à une procidence rectale, un prolapsus rectal, une
contracture paradoxale des muscles du périnée, une incontinence
fécale ou un ulcère solitaire du rectum [4, 16, 34]. Il est donc très
probable que, dans la majorité des cas, le périnée descendant ne soit
pas la cause des troubles fonctionnels mais que ceux-ci soient
secondaires aux anomalies associées.
En pelvi-périnéologie [39], la notion de périnée descendant est
importante, car elle traduit une hyperlaxité du plancher pelvien et
un périnée à risque. Cependant, son évaluation clinique et sa prise
en charge diagnostique et thérapeutique restent aléatoires et mal
définies en pratique.
L’objectif de cet article est de faire une mise au point concernant le péri-
née descendant de la femme. Pour ceci, on s’est appuyé sur l’expérien-
ce de notre équipe et sur une recherche exhaustive de la littérature,
concernant le SPD, sa définition, son diagnostic clinique et paracli-
nique, sa physiopathologie, sa prise en charge thérapeutique en utilisant
la base MEDLINE (1966-2004) par le moteur de recherche PUBMED.
DIAGNOSTIC CLINIQUE
L’affaissement du plancher périnéal se traduit cliniquement par une
“ballonnisation” à la poussée, reconnue lors de l’examen en posi-
tion gynécologique et effaçant parfois plus ou moins le sillon inter-
fessier. La descente périnéale peut ne s’accompagner d’aucun trou-
ble ou s’observer dans des circonstances très diverses. Les patien-
tes peuvent se plaindre de troubles de l’évacuation (constipation
terminale ou “Obstructed Defecation Syndrom” (ODS) des anglo-
saxons) ou à l’inverse d’incontinence anale mais aussi de douleurs
pelviennes ou anopérinéales mal définies [28]. L’évaluation cli-
nique subjective a été considérée insuffisante [2]. Notre propre
expérience a montré que seuls les cas extrêmes sont diagnostiqués
cliniquement. L’exploration clinique des troubles de la statique
pelvi-périnéale de la femme (interrogatoire et examen clinique) est
effectuée dans notre service suivant un planning déjà publié [41],
prenant en compte les éléments du SPD. Cette évaluation est cou-
plée systématiquement à un colpocystogramme. Une revue
rétrospective de 1023 colpocystogrammes réalisés entre 2000 et
2003 selon la même technique [46] a montré 81 périnées descen-
dants- ptose de la jonction ano-rectale par rapport à la ligne pubo-
coccygienne à l’effort de poussée supérieure à 3 cm- soit 8% des
cas. Onze cas (14%) seulement ont été diagnostiqués cliniquement.
La comparaison des données du planning du groupe des patientes
diagnostiquées cliniquement (n=11) et du groupe des patientes non
UROLOGIE DE LA FEMME Progrès en Urologie (2005), 15 , 265-271
Le périnée descendant de la femme
Richard VILLET (1),Nadim AYOUB (1),Delphine SALET-LIZÉE (1),Brigitte BOLNER (2),Albert KUJAS (2)
(1) Service de Chirurgie Viscérale et Gynécologique, (2) Service de Radiologie, Groupe Hospitalier Diaconesses Croix Saint Simon, Paris, France
RESUME
Le syndrome du périnée descendant décrit en 1970 par PARKS reste d’interprétation physiopathologique et cli-
nique difficile. A partir de la littérature, de 1966 à 2004, et de la lecture rétrospective de 1023 colpocystogram-
mes, une revue générale sur le périnée descendant a été effectuée. La symptomatologie observée est le plus sou-
vent secondaire à des lésions associées. Les périnées descendants radiologiques n’ont pas toujours de traduction
clinique. Le colpocystogramme montre la descente périnéale et les troubles associés de la statique pelvienne anté-
rieurs et moyens alors que la défécographie permet de mieux expliquer la dyschésie qui résulte en général d’un
trouble postérieur associé (rectocèle avec intussusception rectale). La prise en charge des périnées descendants
repose sur le traitement médical et la rééducation. Il n’y a pas de consensus concernant le traitement chirurgi-
cal. La chirurgie traite en général les lésions associées. En cas d’effondrement complet du périnée, la voie abdo-
minale avec soutien sous vésical, pré et rétro-rectal, fixé sans tension au promontoire, pourrait être intéressante
alors qu’une réfection transanale du rectum à l’agrafeuse pourrait être proposée lorsque le périnée descendant
n’est associé qu’à une intussusception rectale ou à une rectocèle.
Mots clés : Périnée descendant, statique pelvienne, dyschésie, constipation terminale (Obstructed Defecation Syndrom).
265
Manuscrit reçu : janvier 2005, accepté :mars 2005.
Adresse pour correspondance : Dr.R. Villet Service de Chirurgie Viscérale et Gynécolo-
gique, Groupe Hospitalier Diaconesses Croix Saint-Simon, Site Reuilly, 18, rue du Ser-
gent Bauchat, 75012 Paris.
Ref : VILLET R., AYOUB N., SALET-LIZÉE D., BOLNER B., KUJAS A. Prog. Urol.,
2005, 15, 265-271
diagnostiquées (n=71) a montré que les seules différences statisti-
quement significatives ont concerné la fréquence plus importante
deconstipation, de dyschésie, de présence de manœuvres vaginales
et/ou périnéales, et de la sensation d’exonération incomplète dans le
premier groupe ainsi que l’importance de l’amplitude de la descen-
te périnéale radiologique (40+/-6,7 mm contre. 35+/-7 mm).
(Tableau I). Ainsi, à ce jour, dans un service traitant tous les trou-
bles de la statique pelvienne mais orienté vers la chirurgie gynéco-
logique, le diagnostic de périnée descendant n’est retenu, sans
doute logiquement, que lorsqu’il existe une symptomatologie cli-
nique.
Pour pallier l’insuffisance de l’examen clinique, on peut utiliser un
périnéomètre [16]. Il consiste en un cylindre central gradué en cen-
timètres, mobile verticalement sur une base métallique. Ce cylind-
re est bordé par deux bras métalliques parallèles pouvant être
immobilisés sur la base commune. Le patient est placé en décubitus
latéral gauche. Le cylindre mobile central est ajusté au niveau de la
marge anale avec les deux bras métalliques parallèles ajustés à la
hauteur des tubérosités ischiatiques. Les mesures sont prises au
niveau du cylindre central en position de repos puis en poussée. La
différentielle obtenue correspond à la descente périnéale. Une des-
cente périnéale anormale a été définie comme une descente de la
marge anale dépassant le plan des tubérosités ischiatiques en pous-
sée [16]. La marge anale se situe au repos, chez un sujet normal, à
2,5 cm au-dessus des tubérosités ischiatiques, et en poussée à 0.9
cm. Il y a donc, lors de l’exonération un abaissement de 1.6 cm. En
cas de périnée descendant, la marge de l’anus se situe au repos à 2
cm au-dessus des tubérosités ischiatiques. Elle est par conséquent
peu abaissée. En poussée, elle s’abaisse à 1.2 cm au-dessous. Il y a
donc un abaissement de 3.2 cm lors de l’exonération. L’avantage de
la périnéométrie est de permettre de quantifier la descente périnéa-
le sans exposition aux rayons. Cependant, il a été démontré que le
périnéomètre apprécie moins bien de la descente périnéale que la
défécographie, et que ses résultats peuvent être incorrects chez les
patientes obèses [27].
PHYSIOPATHOLOGIE
L’éthiopathogénie des troubles de la statique pelvienne est bien
définie [40]. Par contre, celle concernant la dynamique du plancher
pelvien proprement dit a été rarement étudiée. La position normale
du plancher pelvien dépend de la position du corps. Elle se situe le
plus bas en position assise, puis debout, puis en position couchée
[13]. Avec le vieillissement, la position du plancher pelvien devient
plus basse au repos, alors que l’amplitude de la descente périnéale
en poussée se réduit [31]. 48 heures après un accouchement par
voie basse, le plancher pelvien est abaissé au repos et à la poussée
et 2 mois plus tard uniquement à la poussée [36]. Après cinq ans, il
retrouve sa position d’avant l’accouchement [35]. La constipation
de transit (définie comme inférieure à 3 selles par semaine pendant
au moins 3 ans) n’affecte pas la descente périnéale au repos ou à
l’effort d’exonération [13]. Par contre, cette descente est plus pro-
noncée chez des patientes ayant une histoire chronique de straining
(dyschésie) [22]. Enfin, le périnée descendant est le seul trouble de
la statique pelvienne associé de façon significative à la rectocèle
[45].
Le périnée descendant est aussi bien rencontré chez des sujets
asymptomatiques que chez des sujets constipés, incontinents, souf-
frant d’algies pelviennes ou porteurs d’un trouble de la statique rec-
tale [29]. Cependant, dans le SPD l’histoire est faite de plusieurs
années de constipation terminale, puis de la disparition progressive
etspontanée de cette symptomatologie qui laisse la place à une
incontinence anale [42]. Une fois constituée, la descente périnéale
aggrave les difficultés d’exonération. Les muscles du périnée se
laissent déformer par les efforts de poussée ce qui disperse les for-
ces propulsives et aggrave les difficultés de vidange rectale. Paral-
lèlement les déformations et la ballonnisation des parois du rectum
sont à l’origine d’une obstruction du canal anal par la paroi rectale
redondante. Il s’installe donc un cercle vicieux où les efforts d’exo-
nération sont à l’origine du périnée descendant qui les aggrave. Aux
difficultés d’exonération, sont généralement associées des manœu-
vres d’appui sur le périnée postérieur ou latéral visant à compenser
lepérinée descendant et des manœuvres intra-anales visant à libé-
rer le canal anal de la paroi rectale qui l’obstrue.
Les études neurophysiologiques du périnée descendant ont montré
que les lésions ne sont pas seulement musculaires mais également
neurologiques. En effet, l’abaissement du plancher pelvien entraîne
une lésion de son innervation et notamment du nerf pudendal. Le
nerf pudendal pénètre dans le périnée en s’enroulant autour de l’é-
pine ischiatique. La descente du périnée lèse le nerf pudendal en
l’étirant au-delà de celle-ci dans le canal d’Alcoq. Une descente
anormale de 2 cm représente un étirement de 20% [16]. Or, des
dégâts irréversibles apparaissent au-delà d’un étirement de 12%
[38]. Il s’installe un cercle vicieux : le périnée descendant est à l’o-
rigine d’une neuropathie d’étirement ; cette dénervation entraîne
une dégénérescence des fibres musculaires du périnée et leur élon-
gation progressive ; ensuite, lors des efforts aigus d’exonération, les
lésions d’élongation du nerf pudendal sont aggravées par la des-
cente rapide du périnée à laquelle rien ne s’oppose [9]. Ainsi, la
notion d’incontinence anale secondaire à une neuropathie d’étire-
ment favorisée par le périnée descendant est considérée actuelle-
ment comme un concept physiopathologique valide [29].
La relation linéaire entre l’amplitude de la descente périnéale et
celle de la neuropathie pudendale a été démontrée par deux études
et réfutée par une troisième. JONES [20] a étudié 60 patientes pré-
sentant une incontinence fécale idiopathique. Il existait une relation
significative entre l’amplitude de la descente périnéale clinique à la
poussée et l’allongement du temps de latence distal du nerf puden-
dal (TLDNP) (p< 0.001). HO[17] a évalué 141 patients consécutifs
présentant une descente périnéale clinique pathologique. Ces
patients présentaient une constipation chronique (n=81), une
incontinence fécale neurologique (n=31), un prolapsus muqueux
rectal (n=17) et une incontinence urinaire d’effort (n=9). Une ana-
lyse multivariée, a montré que l’âge a été la seule variable corrélée
àla descente périnéale au repos (p<0.005), alors que l’allongement
du TLDNP était la seule variable corrélée à la descente périnéale à
la poussée. Ces résultats ont été remis en cause par JORGE [21] qui
a, dans une étude prospective, évalué la relation entre la neuropa-
thie pudendale et la descente périnéale radiologique anormale chez
213 patients consécutifs présentant des troubles fonctionnels divers
comprenant la constipation (n=115), l’incontinence fécale idiopa-
thique (n=58), et des douleurs rectales chroniques (n=40). Aucune
corrélation n’a été mise en évidence entre l’allongement du TLDNP
et l’amplitude de la descente périnéale. Ces résultats peuvent être
secondaires à une technique différente de mesure de la descente
périnéale, la périnéométrie utilisée dans les deux premières études
pouvant sélectionner des périnées descendants plus évolués que
ceux diagnostiqués par la défécographie utilisée dans la dernière.
D’autre part, si le sphincter externe est innervé par le nerf pudendal,
la sangle pubo-rectale l’est par des branches venues directement de
S3 et S4 qui peuvent, comme le nerf pudendal, être lésées par la
R. Villet et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 265-271
266
descente périnéale. Cependant, dans une population masculine et
féminine de périnées descendants le même degré de neuropathie du
sphincter anal externe a été mis en évidence, alors qu’une dénerva-
tion du puborectal statistiquement plus significative a été retrouvée
chez les femmes, ce qui laisse penser à une origine multifactorielle
de l’atteinte neurologique du nerf pudendal chez la femme dont le
traumatisme obstétrical par exemple [3].
BILAN PARACLINIQUE
Le bilan paraclinique est dominé en pelvi-périnéologie par le col-
pocystogramme. Il s’agit d’un examen facile, reproductible et peu
traumatisant pour les patientes [46]. En plus de la descente périnéa-
le, le colpocystogramme permet d’étudier le prolapsus de tout le
combiné viscéral en poussée, sortant parfois complètement de l’ex-
cavation pelvienne. Cette “ptôse” peut ne s’accompagner d’aucun
élément de “cèle” au niveau des trois étages antérieur, moyen et
postérieur. Les aspects variables de la descente utérine en sont
l’exemple parfait. Dans sa technique princeps, BETHOUX [6] plaçait
un repère métallique dans la cavité utérine, afin de suivre exacte-
ment son déplacement. La technique actuelle comprend un badi-
geonnage vaginal complet, y compris les culs-de-sac vaginaux, per-
mettant d’apprécier ce déplacement. La descente de l’utérus dépend
étroitement de son orientation. Lorsqu’il est en position intermé-
diaire et que ses amarrages postérieurs et latéraux ont lâché, il va se
placer dans l’axe du vagin et pouvoir descendre en “piston” devant
le cap anal jusqu’à l’orifice vulvaire. Tout l’utérus habite le prolap-
sus. Il s’agit de l’hystéroptose périnéale antérieure, classée en sta-
des mesurés en effort de poussée (intravaginale, affleurant la vulve,
et dépassant l’orifice vulvaire) allant jusqu’au prolapsus total exté-
riorisé. Dans le périnée descendant, les hystéroptoses peuvent sur-
venir sans désaxation utérine et il est alors difficile de les diagnos-
tiquer cliniquement. Le vagin est presque horizontalisé, le col uté-
rin appuie sur l’ampoule rectale et il existe un cul-de-sac de Dou-
glas profond. Il s’agit de l’hystéroptose périnéale postérieure. Entre
R. Villet et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 265-271
267
Tableau I. Résumé des données du planning et comparaison des résultats des périnées descendants (PD) diagnostiqués cliniquement et non
diagnostiqués.
PD diagnostiqués PD non diagnostiqués p
(N=11) (N=71)
Age (ans) 51+/-12 57+/-11 0,116
Parité 1,3+/-0,8 2,6+/-3,9 0,291
Ménopause 8 51 1.000
ANTECEDENTS
Chirurgie IUE 3 11 0,416
Chirurgie Statique Pelvienne 6 19 0,082
MOTIF DE CONSULTATION
Prolapsus génito-urinaire 8 55 0,801
Incontinence Urinaire 1 8
Dyschésie/Incontinence Anale 2 8
SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE
IUE 6 33 0,749
IUI 4 15 0,269
Pesanteur périnéale 8 41 0,512
Saillie vulvaire 6 41 1,000
Dyspareunie 0 2 1,000
Constipation 10 27 0,002
Dyschésie 7 13 0,003
Manœuvres vaginales/périnéales 6 8 0,002
Exonération incomplète 5 8 0,012
Utilisation de laxatifs 4 11 0,110
Ecoulement anal anormal 1 2 0,354
Incontinence Anale 3 12 0,413
EXAMEN CLINIQUE
BMI 26,7+/-4,5 25,6+/-4,1 0,455
Prolapsus de l’étage antérieur (>C1) 3 34 0,329
Prolapsus de l’étage moyen (>H1) 2 27 0,312
Prolapsus de l’étage postérieur (>R1) 6 28 0,512
IUE clinique 6 36 1,000
Tonus du sphincter anal mauvais 3 10 0,368
Diastasis des releveurs 3 10 0,368
Force des releveurs <ou = 3/5 6 36 1,000
BILAN URODYNAMIQUE
Débit max. < 15ml/sec. 4/8 18/59 0,423
Instabilité vésicale 0/8 3/59 1.000
Pression de clôture<30 1/8 7/59 1,000
COLPOCYSTOGRAMME
Descente périnéale (mm) 40+/-6,7 (30-50) 35+/-7,0 (30-55) 0.029
la retenue et la poussée, survient une “bascule postérieure” de l’u-
térus et de tout le combiné viscéral (Figure 1). Aucun paramètre
radiologique objectif permettant de quantifier cette bascule n’est
utilisé jusqu’à présent.
Comme le SPD n’est pas une entité clinique autonome, la recherche
d’une anomalie associée complète le bilan. Il peut s’agir avant tout
d’une procidence ou d’un anisme mais aussi d’un syndrome de l’ul-
cère solitaire du rectum ou d’une incontinence.
Une défécographie doit être faite dans le cadre du bilan morpholo-
gique et fonctionnel. Elle confirme la descente périnéale à la pous-
sée. Elle est différente du colpocystogramme. En effet la déféco-
graphie étudie une fonction physiologique : la défécation. Elle est
réalisée en position habituelle d’exonération avec un périnée théo-
riquement “relaxé” alors que le colpocystogramme étudie la mobi-
lité des organes pelviens et la résistance d’un périnée “verrouillé” à
la poussée abdominale. Il a été démontré que la descente périnéale
à la défécographie a une valeur prédictive dans la survenue d’une
incontinence anale chez les patientes dyschésiques [5]. La déféco-
graphie permet aussi d’apprécier l’ouverture de l’angle recto-anal et
la verticalisation au repos de l’intestin terminal. Elle peut mettre en
évidence un prolapsus muqueux, une procidence ou une rectocèle
associée [24]. La défécographie par IRM permet d’obtenir des
informations identiques dans le SPD [33]. En rectographie dyna-
mique numérisée, une mesure angulaire a été proposée pour évaluer
la descente du périnée de façon objective [8]. Il s’agit de l’inclinai-
son rectale postérieure (IRP), définie par l’angle formé entre l’hori-
zontale passant par le coccyx et la ligne unissant le coccyx à la jonc-
tion ano-rectale, et sa variation à l’effort (V IRP). Trois populations
présentant un degré d’altération périnéale croissant ont été mises en
évidence : les périnées solides (IRP<20°, V IRP<20°), les périnées
descendants (IRP<20°, V IRP >20°) et les périnées descendus (IRP
>20°).
La manométrie ano-rectale joue un rôle majeur dans la compré-
hension et la prise en charge des troubles de la continence et de la
défécation. Elle peut mettre en évidence une hypotonie sphincté-
rienne, un anisme et une diminution de la compliance rectale [25].
De plus, au test de continence au sérum salé, les sujets ayant un
périnée descendant présentent dans la majorité des cas des fuites
alors que les sujets normaux peuvent retenir 1500 ml sans fuites
[4].
L’exploration électrophysiologique va, grâce à l’activité de détec-
tion électromyographique et la recherche du réflexe sacré, objecti-
ver l’activité des muscles périnéaux et des sphincters anaux, et
juger de l’intégrité du nerf pudendal et de l’arc sacré. Elle est indi-
quée en présence d’une incontinence anale, de dyschésie, de dou-
leurs périnéales et dès que l’on suspecte une atteinte neurologique
périphérique ou centrale [42]. Des atteintes neurogènes périphé-
riques isolées du nerf pudendal et associées à des atteintes muscu-
laires sont présentes respectivement dans 64 et 20% des cas de
périnées descendants chez la femme [32].
Une échographie endo-anale doit être systématique en cas d’incon-
tinence anale. Elle permet d’étudier le plus précisément les sphinc-
ters interne et externe sur le plan morphologique [42].
PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
Le traitement du SPD n’est pas défini. Il semble surtout prudent, au
moment du choix de l’indication thérapeutique, de faire une analy-
se exhaustive des différentes composantes de la statique pelvienne.
Le traitement médical. Lorsque la gêne fonctionnelle est représen-
tée par la dyschésie, le traitement est d’abord médical et vise à favo-
riser l’exonération par les moyens habituels: régime, fluidifiants des
selles et laxatifs [28]. Chez une patiente neurologique, en particu-
lier avec un syndrome de la queue de cheval, la prévention des trou-
bles de la statique rectale débuterait par une prise en charge vésico-
sphinctérienne active qui nécessiterait le plus souvent le recours
aux autosondages pour supprimer les mictions par poussées abdo-
minales. Devant un SPD chez une patiente souffrant des séquelles
d’un syndrome de la queue de cheval, la décision thérapeutique est
particulièrement difficile à prendre et reste à déterminer par une
confrontation multidisciplinaire. En raison des troubles de la motri-
cité colique d’origine neurologique, la chirurgie (une rectopexie par
exemple) peut aboutir à une constipation majeure, obligeant parfois
àréaliser une stomie. La nécessité d’une décision multidisciplinai-
re s’observe également chez des jeunes femmes souffrant d’ano-
rexie mentale. Une prise en charge nutritionnelle et psychiatrique
s’impose avant tout geste chirurgical qui se trouve compliqué du
fait de l’altération, par la dénutrition, de la qualité des tissus de sou-
tien et de suspension.
La rééducation périnéale. Une rééducation peut être proposée qu’il
yait ou non anisme. Dans une étude rétrospective, les résultats de
la rééducation périnéale par biofeedback dans le SPD ont été éva-
lués par questionnaire avec un recul moyen de 2 ans (1-9 ans) [15].
Le taux de réponse était de 64%. Douze sur 17 patientes étudiées et
ayant eu une rééducation par biofeedback présentaient toujours une
constipation ou une dyschésie. La descente périnéale était signifi-
cativement inférieure chez les 5 patientes améliorées par la réédu-
cation (3,3+/-1 cm contre 4,9+/-0,5 cm- p=0,005). Ainsi l’amplitu-
de de la descente périnéale paraît comme un facteur prédictif des
résultats de la rééducation. La rééducation par Biofeed-back a éga-
lement été essayée comme traitement de première intention chez les
patientes présentant une asynergie pelvi-périnéale avec un syndro-
me ODS avec un taux de succès à court terme entre 50 et 60% [26].
Enfin, l’efficacité à long terme de la rééducation par biofeedback a
été démontrée prospectivement pour le traitement de l’incontinence
fécale par déficit sphinctérien dans une série de 16 patients dont 7
femmes présentaient un syndrome du périnée descendant où la des-
R. Villet et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 265-271
268
Figure 1. Aspect typique de périnée descendant au colpocystogram-
me.
cente périnéale radiologique était supérieure à 5 cm [12]. La conti-
nence a été améliorée à 6 mois et à 30 mois. Cependant, les résul-
tats du score d’évaluation clinique utilisé étaient meilleurs à 6 mois
qu’à 30 mois suggérant l’utilité de répéter le traitement chez cer-
tains patients.
La neuromodulation des racines sacrées est utilisée de façon récen-
te pour le traitement de l’incontinence fécale. Elle peut être propo-
sée aux patients ayant une incontinence fécale secondaire à une
neuropathie pudendale d’étirement se rencontrant dans un SPD
[23]. Ses résultats restent encore préliminaires.
Le traitement chirurgical dépend de la présence d’une incontinence
anale et d’un trouble associé de la statique pelvienne et rectale. En
raison de l’absence d’une technique chirurgicale consensuelle, il
semble illogique d’opérer les périnées descendants asymptoma-
tiques. L’existence d’une incontinence associée au syndrome du
périnée descendant nécessite la recherche de son mécanisme et l’é-
limination d’une lésion sphinctérienne. Si cette dernière est objecti-
vée, sa réparation s’impose. En cas d’une incontinence idiopa-
thique, certaines interventions ont été proposées dans le SPD :
-Le “post anal repair” a été préconisé en premier [14]. Il a pour
objectif principal de rétablir une anatomie normale en surélevant
le plancher pelvien et en rétablissant l’angle ano-rectal. Bien que
cette procédure ait été largement utilisée pour l’incontinence féca-
le, ses résultats à long terme sont décevants. Dans une série de 36
patients dont 33 femmes présentant une incontinence fécale
majeure idiopathique et sans antécédents chirurgicaux, une amé-
lioration a été signalée dans 83% des cas à 6 mois de l’interven-
tion, avec maintien du résultat dans 53% des cas avec un recul
moyen de 25 mois (6-72) dont seulement 28% d’amélioration
significative [19].
-Le “Total pelvic floor repair” a été introduit pour pallier les
modestes résultats du “post anal repair”. Il comprend de plus une
myorraphie des releveurs et une plicature sphinctérienne. PINHO a
comparé les deux techniques [30]. Ils ont rapporté après le “total
pelvic floor repair”, avec un recul moyen de 15 mois, un taux de
continence aux matières et aux gaz de 41% et aux matières seules
de 55% contre respectivement 4% et de 21% pour le “post anal
repair”. De plus, la descente périnéale a été significativement
améliorée dans le groupe du “total pelvic floor repair” unique-
ment.
-Une sacro-rectopexie par voie intersphinctérienne postérieure
avec périnéoplastie antéro-postérieure et mucosectomie a été pro-
posée par COSTALAT pour la prise en charge du périnée descendu
chez 22 patientes après échec du traitement médical [7]. Après un
recul moyen de 12 mois (6 à 30 mois) les résultats ont été excel-
lents et objectifs sur les rectorragies, les douleurs, le syndrome du
prolapsus muqueux et l’incontinence anale. La normalisation du
nombre des selles et leur exonération facile a été quasi-constante.
L’amélioration du syndrome dyschésique a été diversement per-
çue par les patientes avec une amélioration dans 78% des cas. La
cicatrisation des lésions muqueuses, ulcères solitaires (n=2), rec-
tites suspendues (n=2), prolapsus muqueux ulcérés (n=3), a été
obtenue dans tous les cas avec un délai inférieur à un mois. Aucu-
ne complication grave n’a été observée. Les auteurs ont attribué
les bons résultats à la justesse de l’indication réservée aux péri-
nées herniaires dont la qualité musculaire est nettement altérée.
R. Villet et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 265-271
269
Tableau II. Résultats fonctionnels de la prise en charge thérapeutique de 11 prolapsus pelvien associés a un SPD.
Nom Traitement Recul Constipation Dyschésie Manoeuvres Exonération Utilisation Incontinence
(mois) chronique vaginales/ incomplète de laxatifs anale
périnéales
S.C Rééducation périnéale 35 P P P - - P (aux gaz)
F.M. Rééducation périnéale 17 P P P - P N (aux gaz)
H.M. Promontofixation voie haute 23 A - - - - -
(2 prothèses) + TVT
P.J. Promontofixation voie haute PDV
(2prothèses)
L.E Promontofixation voie haute 36 A A G A - -
(2 prothèses) + TVT
B.C. Promontofixation voie haute 20 A - - - - -
(2 prothèses)
I.G. Promontofixation voie haute 32 A - - - P -
(2 prothèses) + TVT
M.H. Cure de prolapsus des 3 17 P P P P P -
étages par voie basse
C.J. Cure de rectocèle par voie 19 P P P P - P
basse + TVT
B.M. Promontofixation voie haute 22 - - - G - G
(3 prothèses)
P.R. Rectopexie + sigmoidectomie 37 G G - G P -
Abréviations = PDV : perdue de vue ; - : symptôme absent en préoperatoire ; A: amélioration ; P : persistance ; G :guérison ; N : Apparition de novo.
1 / 7 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !