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Konrad-Adenauer-Stiftung e.V.
FRANC E
MATHILDE DURAND
17 mars 2011
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la qualité de la relation tient aussi à une
certaine maturité des deux côtés du
Rhin : bien que les deux pays aient des
intérêts nationaux divergents, qui ne se
recoupent pas nécessairement, ils ont un
intérêt commun à dégager un intérêt
communautaire pour valoriser les intérêts
nationaux. L’Allemagne et la France ont pris
conscience qu’elles devaient faire des
efforts réciproques pour parvenir à des
compromis, ce qui a été le cas dans de
nombreux domaines récemment, tels que le
gouvernement économique, la convergence
fiscale, le fonds de stabilisation, le principe
de la taxation des revenus financiers, le
mécanisme de sanctions, les volets offensif
et coercitif du pacte pour l’euro ou encore le
dialogue avec les partenaires sociaux. Il
existe donc désormais une vraie
dynamique, irrésistible et extrêmement
positive, qui a permis de franchir des étapes
considérées jusqu’à présent comme
infranchissables.
Néanmoins, dans toute relation très forte, il
existe un risque de condominium, de diktat.
La France et l’Allemagne doivent veiller à
éviter ce travers afin de prendre en
compte l’évolution de l’Union
européenne et le renforcement de son
hétérogénéité. Les deux pays doivent
donc apprendre la retenue : ils peuvent
certes faire des propositions mais celles-ci
doivent notamment faire l’objet d’une
appropriation par Herman Van Rompuy et
les autres États membres. Il s’agit d’un
apprentissage difficile mais qui est
nécessaire pour maintenir le point
d’équilibre. La relation franco-allemande
n’est plus construite sur le sentiment, sur
les artifices mais sur la conscience profonde
des intérêts nationaux.
La France souffre actuellement d’un certain
complexe d’infériorité à l’égard de
l’Allemagne, qui dispose de forces
incontestables, notamment en termes de
Mittelstand et d’organisation de branches
mais aussi d’apprentissage, la culture
d’entreprise étant ainsi au cœur de la
société, ce qui favorise le consensus au
niveau des questions économiques. De son
côté, la France voit dans sa démographie
une grande force : dans vingt ans, la France
pourrait avoir dépassé l’Allemagne. La
démographie constitue le seul facteur de
croissance économique à long terme. En
outre, la France a su mettre en place un
crédit-impôt pour l’innovation qui constitue
un véritable modèle et devrait encourager
des coopérations. Il n’y a donc pas lieu
d’avoir de complexe d’infériorité.
En conclusion, Laurent Wauquiez estime
que la relation franco-allemande repose sur
de vraies différences (modèles
économiques, structure sociale, structure de
pensée) mais la magie de la relation franco-
allemande est la complémentarité des deux
pays. Comme dans La montagne magique,
de Thomas Mann, qui critique la culture de
l’excès et fait l’éloge de l’équilibre, la France
et l’Allemagne doivent porter un message
d’équilibre tout en protégeant l’économie
sociale de marché et en soutenant un
partage équitable de la richesse.
Laurent Wauquiez se prête ensuite à un
exercice de questions-réponses. Selon lui,
Herman Van Rompuy et Catherine
Ashton ont la « grande intelligence d’être
discrets », peut-être trop au goût des
Français, ce qui les rend suspects. Mais face
à des instances dans lesquelles les chefs
d’États et de gouvernement ont souvent des
egos très affirmés, cela ne peut que les
servir. Herman Van Rompuy joue
discrètement les intermédiaires et incarne
parfaitement l’Europe qui avance dans le
compromis et la négociation. Il s’agit donc
d’une personne clé, très appréciée. De son
côté, Catherine Ashton est chargée des
questions de défense et de politique
étrangère, qui constituent le cœur de la
souveraineté, et donc le degré ultime du
fédéralisme : il est donc très difficile d’aller
loin dans ce domaine. Elle a néanmoins joué
un rôle important, notamment dans le
contexte des révolutions arabes.
Sur la question de l’ouverture du marché
ferroviaire en Europe, la France a fait de
gros progrès et le règlement de certains
problèmes transfrontaliers devrait
permettre d’avancer encore au cours des
prochains mois.