DR avocate à la cour, et associée fondatrice du cabinet Féral-Schuhl Sainte-Marie La valeur juridique du SMS Le fait : le SMS est une technologie d’écrit électronique tellement entrée dans les mœurs que les preuves par texto se multiplient auprès des juridictions. Mais sont-elles toujours recevables ? Le SMS étant devenu un moyen de communication important, les tentatives de s’en servir pour attester tel ou tel fait se multiplient. Or, très rapidement, la question de la recevabilité d’un texto comme preuve s’est posée dans des domaines juridiques variés. L’analyse de la jurisprudence témoigne d’une appréciation variable de cette recevabilité. Un texto comme preuve de harcèlement sexuel La Cour de cassation s’est ainsi prononcée en 2007 dans le cadre d’un litige opposant une salariée à son employeur, lequel était poursuivi pour harcèlement sexuel. La Cour a admis qu’un SMS pouvait prouver le harcèlement. Elle a considéré que si la preuve rapportée devant la justice devait résulter d’un procédé loyal pour être recevable, la production de SMS, « dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur », remplissait cette condition. L’usage du texto rencontre toutefois des limites. En application du formalisme protecteur des salariés instauré par le code du travail, employés et cadres ne peuvent se voir convoqués à un entretien préalable au licenciement par SMS. L’article L1232-2 du code du travail précise en effet que la convocation doit être effectuée uniquement par une lettre envoyée en recommandé ou remise en main propre contre décharge. La procédure engagée par SMS est donc irrégulière, quand bien même la preuve serait rapportée de l’envoi et de la réception dudit SMS. Recevabilité contestable dans les domaines contractuels Le code civil pose, en son article 1316-1 introduit en 2000, un principe d’assimilation de l’écrit électronique à l’écrit papier, dans les domaines contractuels. Ils bénéficient désormais d’une même force probante. Aussi, il est admis que l’écrit électronique peut constituer une preuve recevable en justice à condition que puisse être « dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité ». Dès lors, la question se pose de savoir si un SMS remplit les conditions de preuve recevable posées par cet article ? Or, en cas de contestation sur son émission, le texto n’est pas suffisant pour déterminer quelle personne l’a envoyé, puisque la perte du téléphone ou sa prise de contrôle par un tiers autre que le titulaire de l’abonnement peuvent créer un doute sur l’identité de l’émetteur.M Christiane Féral-Schuhl CE QU’IL FAUT RETENIR De plus en plus de preuves tentent d’être rapportées en justice par le biais de SMS. Leur recevabilité dépend néanmoins des éventuelles exigences ­formelles applicables. Leur valeur probatoire demeure ainsi aléatoire, dès lors que leur fiabilité est remise en cause par celui à qui on les oppose. Exploitation illicite d’un fichier clientèle Un ancien salarié a été condamné le 20 octobre par le tribunal de grande instance de Digne pour contrefaçon de la base de données clients de son ex-employeur. C’est la récupération et l’exploitation de la majorité du fichier clientèle de l’entreprise qui ont constitué l’atteinte portée aux droits du producteur de données et non la structure même de la base de données. L’ex-salarié avait ainsi bénéficié frauduleusement d’un fichier préétabli pour lancer une activité identique à celle de son ancien patron. Registrars et registries : fin de la séparation Par une résolution adoptée le 5 novembre, l’Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) supprime la séparation entre les registries (le registre des noms de domaine) et les registrars (les bureaux d’enregistrement) pour les futures extensions gTLD (Generic Top Level Domain) personnalisées – de type .paris ou .voiture –, dont l’introduction pourrait être décidée en 2011. A travers cette mise en concurrence, l’Icann entend favoriser les synergies de compétences. La décision (en anglais) est sur http://goo.gl/ceOu2. Mobilisations contre Google Adwords Par un communiqué publié le 9 novembre, les représentants des annonceurs, des fabricants et des médias français exigent de Google la suppression des nouvelles modalités d’utilisation du service d’annonce par mots clés Google Adwords. Tout annonceur peut désormais acheter, pour sa publicité, des mots clés de marques concurrentes, à charge pour les titulaires de ces dernières de dénoncer a posteriori une utilisation frauduleuse. Cette situation favoriserait le développement de pratiques déloyales, dont les propriétaires de marques étaient auparavant protégées, par le blocage de ces mots clés. Le communiqué est à lire sur http://goo.gl/Jltpv. 01informatique I 2/12/2010 I www.01netpro.com Christiane Féral-Schuhl, Nul n’est censé… juridique 43 043_Exp6.indd 43 25/11/10 17:28