Dans le dernier volume de sa
„Geschichte des Westens“, l’his-
torien HeinrichAugust Winkler
rappelle quele président français
François Mitterrand avait, à
cause de cescraintes, poussé
pouraliser aussi vite que possi-
ble uneunionmonétaire euro-
péenne.Si la D-Mark se fondait
dans unemonnaie européenne,
le danger d’une hégémonie alle-
mande en Europe seraitmoins
grand.Le projet d’unionpoliti-
que fut parconséquent coup
du projet d’union monétaireet
remis aux calendes grecques. De
plus, l’euro fut introduit sans que
les Etats membres de lazoneeuro
ne l’ingrentdans une union fis-
cale, avec des politiquesbudgé-
taires et financresharmonisées
et des critères clairset stricts.
Dans lesannées 1990, la Com-
munauté européenne futrebapti-
sée Unioneuropéenne, mais elle
fut agrandie au lieu d’être appro-
fondie et ce que Winkler et d’au-
tres appellent le „Geburtsfehler
der Europäischen Union“, le dé-
couplage entre unionpolitique et
unionmonétaire, ne fut pascor-
rigé.
„Geburtsfehler der
Europäischen Union“
Dans le cadrede la crise grecque,
on peut évidemment souligner
encore et encore le caractère
„homemade“ des probmeshel-
nes, probmes bien anrieurs
àl’arrieau pouvoir de Tsipras
et de ses alliés:le clientélisme des
deux grands partis grecsqui aen-
genduneadministrationpubli-
que surdimensione, l’énorme
budget militaire,l’absence de ca-
dastre, la non-taxation de fait des
armateurset de l’Eglise ortho-
doxe, le plus grand proprtaire
foncier du pays, l’inefficacitéde
la justice et de l’administration
des impôts, les fraudes fiscales
systématiquesnon seulement des
riches.Seulement,tous cespro-
blèmes étaient connus lors-
que la Grèce fut admise dans la
zone euro, lorsque le Conseil eu-
roen et la Commission euro-
péenne surestimèrentcompte-
ment l’impact de politiques euro-
péennes par rapportau poids de
traditions nationales.
La crise financière mondiale de
2008 et sesconséquences,
commeles déficitsbudgétaires et
la crisedes dettes publiques, ré-
la au grand jour lesdysfonc-
tionnements économiques et fi-
nanciers, nonseulementen
Grèce. L’euro avacillé, sans tom-
ber toutefois, et représente tou-
jours une desmonnaies les plus
fortes de la planète.Mais la solu-
tion de la crise a de plus en plus
été délocalie en s’appuyant sur
des institutionsfaiblement
contrôlées d’unpointde vuedé-
mocratique, comme la Banque
centrale européenne.Et la crise
et sa gestionn’ont pasrapproc
les citoyens et citoyennes desdif-
férents Etats membres. Bien au
contraire, le projet d’unification
européenne estde plus en plus
remis en question. La politique
d’austérité dans les pays méditer-
raensconcers a conduit à
des mouvements de protestation
et des ressentiments contre l’UE,
surtout l’Allemagne à laquelle on
reproche nonseulementde profi-
terplus que tout autre paysde
l’euro, en tant qu’économie tour-
née vers l’exportation,mais en-
core de vouloirs’emparer du
pouvoir politiqueau sein de l’UE.
En Allemagne, en revanche,
comme lesderniersmois l’ont
montré,un ’chauvinisme du ri-
che’ se propage de plus en plus,
non seulement dans lescolonnes
de la Bild-Zeitung,avec ses juge-
ments hautains et dédaigneux sur
d’autres peuples.
L’échec du projet de Trai
constitutionneleuropéen en
2005 l’avaitdéjàmont.Le pro-
jetd’unification européenne,
même en face de défisqui deman-
dent justementuneapproche dif-
férente,ne parvient pas à se dé-
fairede sa logique de projet de
gouvernants pour le peuple, mais
nonpar et avec le peuple.
Comme nos hommes et femmes
politiquescraignent comme le
feu lesdébats contradictoires sur
l’Europe, de débatsautour du
pour ou contre, „NAI“ ou „OXI“,
on reste largementdans la logi-
que de lagociationet de la
prisede décisionentrereprésen-
tants des Etats nationauxet hauts
fonctionnaires,àporte close, loin
des yeux du public. Or,une iden-
tité euroenne,un sentiment
d’appartenance au projet euro-
péen,ne peut se créer que par le
débatpublicen Europe surl’Eu-
rope.
Lesactionsavant et apsle
référendum grec l’illustrent fort
bien.Avantle férendum: les
Grands de l’Europe, unegrande
partie des dias européens ont
d’abordtout fait pour empêcher
que les électeurs et électrices
grecs optent pour une position
différente desinstitutionseuro-
péennesen disant non au plan
soumispar la Commission euro-
péenne,la BCE et le FMIet à ses
mesures d’austérité.LesGrands
avaient brandi le scénario catas-
trophe de la sortie de l’euroet du
retour au drachme. Ils ontpré-
tenduquele vote serait un vote
non pour ou contre leurs plans
mais pour ou contre l’euro et
l’UE. Malgce mélange de
conseils paternalistes, de pres-
sions et de menaces à peine voi-
es, les citoyenset citoyennes
grecs ont osédirenon àJuncker,
Draghi,Tusk, Schulz, Hollande
et Merkel. Ils ontfait du référen-
dum un moment fort de lamo-
cratie en Europe.
Et un succès de Tsipras contre
Merkel. Même si Tsipraset son
gouvernement savent ce
qu’avaientdéjàmontré leursder-
nières propositions débutjuin –
que de nouvellesmesures d’aus-
ridoivent être présentées par
la Grèceet quele Non au référen-
dum permettra justed’obtenir
des concessions dans lesdomai-
nes de la restructurationde la
dette et du soutien financierà la
croissance de l’économie grec-
que.
2005-2015:
mêmesactions
Lesactionsau rendumde
dimanche dernier ressemblent
parailleurs à cellesauxnons aux
référendums de 2005 surle Trai
constitutionnelen France et aux
Pays-Bas. Achaque fois, en ces
moments de crise, lesdirigeants
européensredécouvrentla mo-
cratie, du moinsdans leursdis-
cours, interviews et apparitions
publiques.
En 2005, lesresponsablespoli-
tiquesétaientunanimes pour dé-
clarer que l’Europe devait se rap-
procherde ses citoyens. Au Som-
met de Varsovie, les chefs d’Etat
et de gouvernement des Etats
membres du Conseilde l’Europe
promettaient:„Nous oeuvrerons
pour aliser notre objectif com-
mun de promouvoir, dans l’inté-
rêt de tous nos citoyens,une dé-
mocratieet une gouvernance de
la plushaute qualité sur lesplans
national, gional et local (...).“
Ils décidèrent de mettre en place
„un Forum du Conseilde l’Eu-
rope pour l’avenir de la démocra-
tie pour renforcer la démocratie,
leslibertés politiques et la partici-
pation descitoyens“.Depuis,
bien des idées et projets ontété
développés par ce Forum, visant
le renforcement des acteurs lo-
caux et régionaux en Europe et la
participationaccrue des citoyens
et de la société civile aux proces-
sus de prise de décisions. Mais,
honnêtement, qui parmilesci-
toyens européens, qui parmi
nous conntun seul de ces
beaux projets?
En 2015, rebelote: tout le
monde déclare respecter le vote
populaire grec et tirer les bonnes
leçons de cet exercice de démo-
cratie directe.Mardi,devantle
Parlement européen,Jean-
Claude Juncker,présidentde la
Commission européenne, com-
mençait son discours en souli-
gnantqu’il ne s’étaitpasencore
prononcé publiquement surle ré-
férendum car il voulaitd’abord
s’exprimer dans cette enceinte à
Strasbourg oùbat le coeur de la
démocratie européenne.
Juste avantle férendum, Jean-
Claude Trichet, ancien président
de la Banque centrale euro-
péenne,clarait dans uneinter-
view au Monde,que lescisions
p.ex.sur le maintien ou non dans
la zone euro devaient être prises
de façon plus mocratique:
„Pourcette raison,les Européens
devraient à l’avenir dépasser un
telaffrontement (degitimités
démocratiques) en confiant le
dernier mot au Parlement euro-
péen (ouàune réunion du Parle-
ment européen et de délégués des
parlements nationaux) dans une
formation unissant les parle-
mentaires de la zone euro. Cette
procédure exceptionnelleaurait
trois avantages: une solution se-
rait trouesans drame; le prin-
cipe de subsidiariserait res-
pecpuisque la procédure serait
résereàdes casexceptionnels;
surtout, les représentants du peu-
pledécidant en dernier ressort, la
gitimité démocratique de la
gouvernance économique de la
zone euro serait incontestable.“
Ces discours suret ces féren-
ces àla mocratie font partie
d’un côdu positionnement et
des jeux tactiques au sein des
âpres gociations entrela Grèce
et l’Unioneuropéenne. Pour
l’historien, cette rhétorique ren-
voie d’un autre côàun pro-
blème de fond. Le férendum et
les enjeux de la crisegrecque ap-
portent unepreuve suppmen-
tairequele processus d’ingra-
tion européenne n’avancera pas
sans un renforcement de la giti-
mation et du contrôlemocrati-
que des institutionseuropéennes.
Les parlementsnationaux tout
comme le Parlementeuropéen ne
jouent pas parhasard un le ac-
cru dédans le cadre de cette
crise, me si ellecontinue d’être
gérée avanttout au niveau inter-
gouvernemental. Le geste de
Juncker se présentant d’abord de-
vant les dépus européens à
Strasbourg et la recommandation
de Trichet surla cessaire codé-
cision entre parlementsnatio-
naux et Parlement européen dans
la solution de questions écono-
miqueset financres internatio-
nalesont valeur de symbole.
Le symbole quele saut de qua-
lid’une union économiquevers
uneunionpolitique ne pourra se
faire que par un renforcement de
la gitimité mocratique.La
réalisationdu rêve d’une unifica-
tion politique pacifique de ce
continent,comme ponse aux
deux conflits dans lesquels il a
entraîné le monde, est àce prix.
L’Europe et la démocratie,
au-delà de la rhétorique
Il était unefois un mur.
Appelé le Mur de Berlin.
Il tomba une soirée de
novembre, il y a plus de 25
ans, en 1989. Pour la joie de
beaucoup. 25 ansplus tard,
c’estle souvenir de cette joie
qui fut omniprésent dans les
lébrations
commémoratives. Or, la chute
du Mur fut pour d’autres une
source d’inqutude. De
vieilles peursse veillèrent,
notammentla peur que
l’Allemagnedeviendrait trop
puissante et prendraitle
pouvoir au sein du projet
européen.
L’histoiredu tempsprésent
Denis Scuto
Photo: AP/MarkusSchreiber
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