INTRODUCTION GÉNÉRALE
Les prémices de l’assurance moderne
Les premiers dispositifs d’assurance modernes remontent au XIVe siècle et
concernent l’assurance maritime. Le commerce maritime s’était jusqu’alors
développé grâce aux prêts à la grosse aventure qui consistaient, pour
l’armateur, à emprunter une somme d’argent gagée sur la valeur des
marchandises qui devaient être expédiées par delà les mers. En cas d’arrivée à
bon port, l’emprunteur remboursait cette somme majorée d’un intérêt très élevé
venant en contrepartie du risque des voyages maritimes puisque, si la cargaison
était perdue, ni l’intérêt, ni le capital n’étaient remboursés.
Cette opération n’était pas à proprement parler une opération d’assurance
mais plutôt une opération de crédit dans laquelle le prêteur porte le risque de la
perte du capital. Le fait que l’intérêt stipulé soit fixé arbitrairement sans réelle
considération au risque effectivement encouru a conduit au développement
d’une activité spéculative sur ce type de contrats. Aussi, le recours au prêt à la
grosse aventure a pratiquement disparu suite à l’interdiction de la pratique de
l’usure par l’Église catholique en 1234. Il a alors fallu trouver un autre moyen
de financer ces expéditions qui participaient au développement du commerce et
de l’économie. C’est ainsi que naît la convention d’assurance sous sa forme
moderne : des banquiers acceptent de garantir la valeur du bateau et de sa
cargaison (le capital sous risque) en cas de naufrage du navire (le risque) contre
le paiement d’une somme fixe (la prime). Le développement de ce type de
contrat connaît un réel succès compte tenu, notamment, des conséquences de la
survenance des risques de la mer sur la solvabilité des armateurs.
Le deuxième type d’assurance à connaître un essor considérable est
l’assurance incendie. Le début de son développement est généralement associé
au gigantesque incendie qui frappa Londres au XVIIe siècle. En effet, le 2
septembre 1666, un feu se déclare dans Londres et ravage les quatre cinquièmes
de la ville en une semaine. Le bilan1 est de 13 200 maisons et 87 églises
détruites dont la cathédrale Saint-Paul. Le coût de la reconstruction est
considérable, aussi l’État britannique encourage la création de sociétés
d’assurance pour couvrir ce risque dans le futur.
Les facteurs du développement de l’assurance
Ces deux exemples historiques illustrent parfaitement les deux axes qui ont
conduit ces derniers siècles au développement de l’assurance.
Le premier est celui du développement économique : des projets de grande
envergure comportent un grand nombre de risques différents dont la survenance
d’un seul de ces risques peut mettre en péril l’intégralité de l’entreprise. Les
opérations d’assurance, en transférant le risque de l’assuré vers l’assureur,
permettent d’envisager de telles initiatives qui seraient impossibles sinon. C’est
ainsi que des projets qui n’étaient concevables auparavant que par les États du
1. Cf. Ewald et Lorenzi (1998) pour les données chiffrées sur l’incendie de 1666.