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LE CONCOURS MÉDICAL
TOME 137
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N° 4
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AVRIL 2015
Hémochromatose génétique
PARCOURS DE SOINS
Rôle majeur du généraliste, collaboration
régulière, intervenants multiples
Les articles de ce dossier du Concours médical
soulignent le rôle majeur du médecin généraliste à
toutes les étapes d’une longue histoire :
– diagnostic initial face à des symp-
tômes souvent peu spécifiques
(asthénie chronique, arthropathie,
modeste cytolyse hépatique non
expliquée…) ;
– dépistage familial, auquel il faut savoir faire adhérer
le patient ;
– bilan initial à adapter en fonction du stade auquel la
maladie est diagnostiquée, saignées à vie impliquant
rigueur et soutien ;
– enfin, vigilance sur de longues années avec implé-
mentation d’un dépistage échographique semestriel
du carcinome hépatocellulaire si une cirrhose a été
repérée au moment du diagnostic.
Une telle prise en charge implique une collabo-
ration régulière avec des partenaires variés (spé-
cialistes et centres de référence et de compétence,
infirmiers, associations de patients) et la tenue d’un
carnet de suivi par le patient sous le contrôle de son
médecin généraliste.
Plus de moyens pour une prise en charge
plus précoce
Au cours des quarante dernières années, le
visage de la maladie s’est considérablement
modifié.
L’avènement de moyens diagnostiques perfor-
mants (IRM hépatique, test génétique) permet un
diagnostic de plus en plus précoce : les formes
d’expression purement biologique et les formes
monosymptomatiques (asthénie, ostéo-arthropa-
thie) ont remplacé le tableau classique de cirrhose
bronzée avec diabète.
Le traitement, de mieux en mieux codifié,
apporte une espérance de vie améliorée si la fer-
ritinémie initiale est inférieure à 1 000 μg/L et
normalisée si celle-ci est comprise entre 1 000 et
2 000 μg/L. Seules les formes sévères avec fer-
ritinémie initiale supérieure à 2 000 μg/L voient
leur espérance de vie amputée, essentiellement
par le diabète et le carcinome hépatocellulaire.
Tous les outils sont à présent en place pour
permettre une prise en charge toujours plus
précoce. Le temps diagnostique est donc à
l’information des médecins, des patients et de
leur famille. Le temps thérapeutique reste à la
saignée en attendant que les mini-hepcidines,
les agonistes de BMP6 (bone morphogenetic
protein 6) et autres inhibiteurs de TMPRSS6
(transmembrane protease, serine 6) viennent
remplacer cette thérapie certes désuète mais ô
combien efficace dès lors qu’elle est correcte-
ment menée.
Bonne lecture ! •
Nous avons les moyens d’éviter
la surcharge en fer et ses complications
Pr Yves Deugnier
([email protected]), service des maladies du foie, centre de référence des surcharges génétiques en fer rares et centre de dépistage familial de l’hémochromatose, hôpital Pontchaillou, CHU de Rennes
Les hémochromatoses génétiques (HG) sont largement dominées par
l’hémochromatose HFE – aussi dénommée HFE-1 – qui représente en
France plus de 95 % des surcharges en fer héréditaires et concerne
une personne sur 300. Ce dossier du Concours médical aborde de
façon pragmatique la prise en charge du patient hémochromatosique,
laquelle a beaucoup évolué au cours des dernières décennies.
L’homozygotie C282Y, condition nécessaire mais pas suffisante
L’hémochromatose génétique HFE-1 est une maladie autosomique récessive liée à une
mutation majeure, C282Y, à l’origine d’une perturbation de la synthèse d’hepcidine,
hormone de régulation de l’absorption digestive et de la sortie macrophagique du fer.
L’homozygotie C282Y conduit à un décit en hepcidine, lequel aboutit à une augmentation
du fer systémique à l’origine d’une élévation de la saturation de la transferrine, signe biolo-
gique cardinal de l’affection, puis secondairement à la constitution d’un excès viscéral de
fer dont témoigne l’élévation progressive de la ferritinémie. Les autres génotypes HFE-1
(hétérozygotie C282Y, hétérozygotie dite composite C282Y/mutation mineure, homozygotie
pour une mutation mineure) ne sont pas responsables de surcharges en fer signicatives.
L’homozygotie C282Y est une condition nécessaire mais non sufsante au développement
de la surcharge en fer HFE-1. L’excès de fer et ses potentielles complications ostéo-
articulaires, hépatiques, endocriniennes et cardiaques sont modulés par d’autres facteurs
génétiques encore mal cernés et par des facteurs d’environnement (alimentation, alcool,
syndrome métabolique, tabac…).
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêts.
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