Vaisseaux, Cœur, Poumons I Vol 22 I N°2 I 2017
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CARDIOLOGIE
postprandiales et une perte de poids. Des
formes sévères ont été rapportées dans
quelques cas, aboutissant finalement à une
hémicolectomie. L’infarctus mésentérique
survient rarement, mais peut entraîner une
défaillance multi-organes et finalement le
décès. La triade classique d’un bruit épi-
gastrique avec douleur digestive et perte
de poids est indicative d’une maladie arté-
rielle intestinale occlusive (13).
La DFM viscérale peut également être à
l’origine d’anévrismes et de dissections de
l’artère (14). La plupart des anévrismes vis-
céraux sont asymptomatiques et détectés
fortuitement lors d'examens radiologiques.
Les anévrismes symptomatiques peuvent
être à à l’origine de douleurs abdominales
ou de saignements (intra-abdominaux ou
gastro-intestinaux). L’examen clinique
peut révéler un bruit abdominal et par-
fois une masse abdominale pulsatile pal-
pable. La rupture de ces anévrismes est
rare (<2%), mais constitue souvent une
urgence vitale. La dissection spontanée
de l’artère cœliaque causée par la DFM
est rare et peut être asymptomatique; le
symptôme le plus fréquent est la douleur
abdominale.
Le dépistage de la DFM viscérale devrait
absolument être réalisé chez les patients
présentant des symptômes suggérant une
ischémie. Le diagnostic peut être effectué par
écho-Doppler (seulement en cas d’ischémie
chronique), angio-CT ou angio-IRM, et angio-
graphie conventionnelle par cathéter (immé-
diatement en cas d’ischémie aiguë) (15).
Les différentes options thérapeutiques
comprennent un suivi médical optimal,
la revascularisation par angioplastie-
stenting, l’embolisation par spire ou le
clipping d’éventuels anévrysmes et la
chirurgie vasculaire reconstructrice.
Chez les patients atteints de DFM viscérale
il est recommandé de rechercher une DFM
des autres lits vasculaires, en particulier
des artères rénales et cervico-céphaliques.
«SCAD» et DFM
La DFM pourrait être étroitement liée à la
dissection spontanée des artères coronaires
(SCAD, spontaneous coronary artery dissec-
tion). Le diagnostic de SCAD est à évoquer en
cas d’événement coronarien aigu chez une
femme d’âge jeune ou d’âge moyen, sans
facteurs de risque cardiovasculaire majeurs.
Une étude de référence rapporte que 86%
des patients avec dissection spontanée d’une
artère coronaire présentent une DFM dans
au moins 1 territoire non coronarien (16).
Il s’agit dans 58% des cas d’une atteinte
localisée aux artères rénales et dans 47%
des cas d’une atteinte cervico-céphalique.
Dans cette étude, la prévalence de la DFM
localisée aux artères iliaques atteint 49%.
Le diagnostic de SCAD peut se révéler diffi-
cile et nécessiter le recours à l’IVUS (intra-
vascular ultrasound) ou à la tomographie
par cohérence optique (17).
Le traitement du SCAD est généralement
conservateur eu égard à une probabilité de
guérison spontanée supérieure à 50% et aux
résultats souvent décevants de l’angioplas-
tie-stenting ou du pontage (16).
Une maladie familiale?
Une étude de cohorte française a évalué la
prévalence des cas familiaux de DFM chez
des sujets atteints d'une forme apparem-
ment sporadique de la maladie (18). L’étude
a porté sur 104 malades issus de familles
différentes. Un cas, à première vue spora-
dique, était requalifié de familial lorsque les
investigations entreprises chez les autres
membres de la fratrie aboutissaient à la
détection d’une DFM chez au moins un frère
ou une sœur. Les investigateurs ont ainsi
observé une prévalence de cas familiaux
de l’ordre de 11%. Ils précisent que cette
prévalence est probablement sous-estimée,
dès lors qu’une angiographie n’a été réalisée
que chez quelques-uns des frères et sœurs.
Dans le registre américain, le pourcentage
de patients avec DFM rapportant un autre
cas de dysplasie chez un membre de leur
famille est de 7,3% (6).
Les études sur le caractère potentiellement
familial de la DFM se heurtent au risque de
classer, par erreur, parmi les sujets sains des
membres de la famille dont la DFM n’est
pas apparente. Cet écueil pourrait en par-
tie être évité par l’identification de lésions
infra-cliniques grâce à l’échographie à haute
résolution (19, 20).
Le premier locus génétique associé à la ma-
ladie vient d’être identifié par une équipe
française (21).
Les patients s’associent
L’attention portée à la DFM est actuelle-
ment insuffisante, de sorte que le délai
entre les premières manifestations de la
maladie et le diagnostic est parfois long,
laissant les patients désemparés et inquiets
durant une période prolongée. Cette situa-
tion a conduit à la création d’une première
association de patients, aux Etats-Unis, la
FMDSA ou Fibromuscular Dysplasia Society
of America (22). Une des réalisations ma-
jeures de cette association a été la création,
en collaboration avec le monde scientifique,
d’un registre (8) considéré aujourd’hui
comme une référence. Nos voisins néer-
landais ont suivi l’exemple et ont créé à
leur tour une association de patients (23).
Une association belge vient d’être consti-
tuée et est déjà très active (voir encadré).
Le but ultime est de créer une association