par tous ceux qui s’interrogent sur notre société, sur la place qu’elle laisse aux pauvres hères qui
échouent dans la rue. À défaut, le spectacle conçu par Guillaume Barbot et interprété magistralement
par Jean-Christophe Quenon peut servir d’utile aide-mémoire.
On peut imaginer – vaguement – la condition des SDF, les difficultés à se nourrir, à se laver et à
satisfaire les autres besoins naturels, y compris sexuels. En l’occurrence, nos capacités d’imagination
sont bien en dessous de la réalité. Il faut en effet avoir fréquenté assidûment les clochards, discuté
avec eux, les avoir vus vivre pour connaître l’horreur de leur condition, la déchéance physique et trop
souvent mentale de ceux qui ont sombré.
J.-C. Quenon dégage toute l’empathie nécessaire pour endosser de nombreuses personnalités, de
clochards ou d’autres auxquels ils peuvent avoir affaire. Il incarne ces divers personnages tout en
gardant constamment une certaine distance, comme pour ménager les spectateurs. Après un
commencement plutôt « soft », le spectacle monte progressivement en intensité et, pour les
spectateurs, en émotion. Pas de discours théorique ou de prêchi-prêcha moralisateur mais l’exposé
des faits dans toute leur crudité.
Un spectacle à voir, et pas seulement pour les questions qu’il pose. Aussi pour la manière dont il est
mené. On regrette seulement le choix du titre, tellement moins explicite que celui du livre, et que la
tension retombe un peu, à la fin, lorsque le discours se focalise sur l’enquête du médecin désireux de
comprendre ce qu’il est advenu d’un clochard qui a brutalement disparu, ce qui nous intéresse moins
que les récits de vie des SDF eux-mêmes.
— Par Selim Lander —
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On a fort mal dormi de Patrick Declerck
13 juillet 2016 / par Stéphane Capron
Un texte unique, à faire entendre de toute urgence. Un spectacle sous forme de rencontre. Jean
Christophe Quenon, ogre blessé, drôle et percutant, nous embarque magistralement dans cette
expérience hors du commun.
La Cie Coup de Poker ‐ Guillaume BARBOT, depuis 2004, a présenté notamment L’évasion de
Kamo, Club 27 (à la Manufacture en 2012), Nuit (Prix du public Impatience 2015), ou L’histoire
d’un punk converti à Trenet. Chaque création prend comme base un texte non dramatique, et tend
vers un théâtre de sensation qui donne à penser.
Elle est compagnie associée au Théâtre de Chelles et aux Studios de Virecourt.
Patrick Declerck a été ethnologue, psychanalyste à la Mission France de Médecins du Monde ainsi
qu’à l’hôpital de Nanterre, et est aujourd’hui écrivain (Les Naufragés, Démons me turlupinant –
Prix Rossel 2012…)
« Soyons franc. Il est assez salutaire que souffrent et meurent dans la rue et sous nos yeux
quelques‐uns de ces insupportables oisifs. Le clochard est un fou de l’exclusion. Il joue sur la
scène du théâtre social un double rôle essentiel. Celui de la victime sacrificielle. Et celui du
contre‐exemple. Clodo est là pour nous enseigner cette terrible leçon : la normalité est sans
issue.»