Quel antitussif recommander? - Policlinique médicale universitaire

pharmaJournal 19 | 9.2014
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Pharmazie und Medizin · Pharmacie et médecine
Toux sèche aiguë chez l’adulte
Quel antitussif recommander?
Laure Nicolet, Jérôme Berger, Olivier Bugnon
Des mesures non médicamenteuses sont parfois suffisantes pour soulager
une toux sèche aiguë. Si un traitement s’avère nécessaire, le choix s’effec-
tuera au cas par cas en tenant compte des co-morbidités et des co-traite-
ments. En l’absence de consensus clairement établi, nous recommandons de
privilégier le dextrométhorphane en cas de toux diurne de l’adulte. La codé-
ine lui sera préférée en cas de co-traitement sérotoninergique. Loxoméma-
zine, en raison de son effet sédatif marqué, peut être conseillé en cas de toux
nocturne chez les patients adultes entre 18 et 65 ans.
La toux sèche est un réflexe physiolo-
gique protecteur qui se caractérise par
l’absence de production de mucus.
Lorsqu’elle n’est pas le symptôme d’une
pathologie chronique ou un effet indési-
rable médicamenteux, la toux sèche est le
plus souvent liée à une irritation des voies
respiratoires. Dans les cas bénins, sa gué-
rison est généralement spontanée après
quelques jours. Cependant, une toux
sèche aiguë peut persister jusqu’à trois
semaines et il est parfois nécessaire
d’avoir recours à un traitement antitussif
pour soulager le patient (p. ex. améliorer
sa qualité de sommeil) [1].
Choix de l’antitussif
Les molécules remboursées par l’assu-
rance de base [2] qui sont les plus cou-
ramment utilisées dans la pratique sont
des antitussifs à action centrale tels que
codéine, dextrométhorphane ou antihis-
taminiques. L’efficacité de ces molécules
dans le traitement de la toux sèche aiguë
reste controversée. Seul un faible nombre
d’études ont comparé l’efficacité de ces
molécules versus placebo. La variabilité
entre ces études en termes de nombre de
patients recrutés, de leurs caractéristiques,
ainsi que la différence des interventions
menées ne permettent pas de juger clai-
rement de l’efficacité des traitements
[3, 4]. Il n’y a donc actuellement pas de
consensus clairement établi concernant le
choix d’une molécule. Ces traitements
visent le soulagement des symptômes et
devraient être instaurés uniquement dans
les situations où la toux sèche affecte la
qualité de vie du patient.
Le tableau 1 présente les spécialités
non-combinées indiquées dans le traite-
ment de la toux sèche, remboursées par
l’assurance de base et disponibles sur le
marché suisse. Les préparations combi-
nées (p. ex. avec décongestionnant nasal,
associant expectorant et antitussif, etc.)
sont à évitercar elles n’apportent pas de
gain d’efficacité toute en exposant à un
plus grand risque d’effets indésirables.
Autres molécules antitussives
D’autres molécules antitussives sont disponibles
mais ne sont pas remboursées par l’assurance de
base: morclofone et butamirate. Leurs méca-
nismes d’action ne sont pas précisément connus,
on suppose qu’elles agissent au niveau central.
Par rapport à la codéine, au dextrométhorphane
et à l’oxomémazine, il est plus dicile de juger de
leur ecacité car les études disponibles sont peu
nombreuses, concernent des populations bien
précises (p. ex. patients âgés, enfants, etc.) et sont
souvent anciennes [5, 6]. Pour ces raisons, nous ne
parlerons pas de ces molécules dans cet article.
1. Antitussifs à action centrale:
codéine et dextrométhorphane
Le dextrométhorphane et la codéine
agissent au niveau central en diminuant
le réflexe de la toux. Ces deux molécules,
bien que couramment utilisées, peuvent
présenter des effets indésirables et des
interactions potentielles aux doses anti-
tussives usuelles. Il ne faut donc pas ou-
blier les risques potentiels liés à leurs
usages!
Tableau 1: Spécialités non-combinées indiquées dans le traitement de la toux sèche,
remboursées par l’assurance de base et disponibles sur le marché suisse
Principe actif Spécialité Forme galénique (dosage) Posologie adulte usuelle
Antitussif
à action centrale
Codéine Codéine Knoll® Comprimés (50 mg) 1 cp 3 ×/j
Makatussin® Gouttes (20 gttes=10.6 mg) 15–20 gttes 3–4 ×/j
Dextrométhorphane
Bexine® Comprimés (25 mg) 1 cp 3–4 ×/j
Bexine® * Gouttes (25 gttes=20.8 mg) 30 gttes 3–4 ×/j
Bexine® Sirop (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/j
Calmerphan-L® Sirop (30 mg/10 ml) 10–15 ml 2 ×/j
Calmesin®-Mepha Sirop (30 mg/10 ml) 10–15 ml 2 ×/j
Dextro-Med® Sirop (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/j
Emedrin® N Sirop (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/j
Pulmofor® retard Capsules (50 mg) 1 caps 2 ×/j
Anti-histaminique Oxomémazine Toplexil® Sirop (3.3 mg/10 ml) 15–30 ml en 2–3 prises
Toux nocturne: 10 ml au coucher
* Spécialité contenant de l’alcool
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Effets indésirables occasionnels
mais plus marqués pour la codéine
La codéine, en raison de son effet opioïde,
présente généralement des effets indési-
rables plus marqués que le dextrométhor-
phane [7]. Les effets indésirables les plus
fréquemment rapportés pour les deux
molécules sont des troubles gastro-intes-
tinaux (nausées, constipation, vomisse-
ments) ainsi que des vertiges et de la
somnolence.
Toutefois, ces effets restent occasion-
nels (<1% des patients) aux posologies
antitussives habituelles. La codéine pos-
sède également un effet dépresseur sur le
système respiratoire. En cas d’insuffi-
sance respiratoire ou d’asthme, l’utilisa-
tion de dextrométhorphane est donc pré-
férable.
Spectre d’interactions plus large
pour le dextrométhorphane
La codéine et le dextrométhorphane sont
tous deux métabolisés dans le foie par le
CYP2D6. L’utilisation simultanée de
substances inhibant le CYP2D6 (p. ex.
amiodarone, fluoxétine, paroxétine, rispé-
ridone, etc.) peut augmenter leurs
concentrations plasmatiques et donc la
survenue d’effets indésirables. Dans de
tels cas, une diminution de la posologie
est recommandée.
En plus de ces interactions pharma-
cocinétiques, le dextrométhorphane ex-
pose à un risque de syndrome sérotoni-
nergique s’il est associé à d’autres médi-
caments ayant le même effet, tels que
certains antidépresseurs ou psychotropes
[8]. En présence de substances sérotoni-
nergiques, on privilégiera plutôt l’utilisa-
tion de la codéine.
2. Antihistaminique: oxomémazine
L’oxomémazine est un antihistaminique
de la famille des phénothiazines. En agis-
sant sur les récepteurs H1, cette molécule
a pour effet de diminuer l’intensité et la
fréquence des quintes de toux. En raison
de son effet sédatif marqué et du manque
de données disponibles concernant son
efficacité, l’utilisation de l’oxomémazine
devrait être réservée aux cas de toux noc-
turne. Chez les enfants et les adolescents
(moins de 18 ans), son usage doit se faire
uniquement sur prescription médicale.
Effets indésirables à éviter chez
la personne âgée
L’oxomémazine expose à divers effets in-
désirables typiques des antihistaminiques
d’ancienne génération: sédation, effets de
type anticholinergiques tels que séche-
resse buccale ou constipation, troubles de
l’équilibre, vertiges et confusion mentale.
Nous n’avons pas trouvé d’indication de
fréquence de ces effets dans la littérature
[9], probablement dû au fait que l’oxomé-
mazine n’est pas commercialisée dans les
pays anglo-saxons [10]. En tenant compte
de ce spectre d’effets indésirables, l’oxo-
mémazine devrait être évitée chez les
personnes de plus de 65 ans.
Faible spectre d’interactions
L’oxomémazine n’interagit pas avec les
enzymes du CYP450, ce qui limite le
risque d’interactions. Les principales inter-
actions à relever sont une potentialisation
des effets dépresseurs au niveau central
ou des effets anticholinergiques en asso-
ciation avec d’autres molécules possédant
ces mêmes effets.
Les antitussifs dans la pratique
La toux sèche, dont la guérison est généra-
lement spontanée, ne nécessite pas forcé-
ment de traitement médicamenteux. Il est
généralement possible d’avoir recours à
des mesures non médicamenteuses, en
plus, voire à la place d’un traitement anti-
tussif, notamment chez les patients poly-
médiqués ou présentant une contre-indi-
cation à l’utilisation d’un antitussif.
Une hydratation adéquate et la
consommation de boissons chaudes (p. ex.
avec du miel) ou de bonbons à base de
glycérine aident souvent à soulager l’irri-
tation. En cas de toux nocturne, l’humidi-
fication de l’air peut aider à soulager les
symptômes. Il est également conseillé
d’arrêter de fumer et d’éviter toute expo-
sition à des facteurs irritants (p. ex. aller-
gènes) [1].
Si la toux est vraiment trop gênante
malgré ces mesures et qu’un traitement
s’avère nécessaire, le choix s’effectuera au
En cas de toux diurne bénigne, la codéine est recommandée chez les patients déjà traités par un
médicament agissant sur le système sérotoninergique. © Zerbor - Fotolia
Dépendance et risque d’abus [11, 12]
Un traitement antitussif devrait toujours être
conseillé pour une durée limitée (en moyenne 5
à 7 jours) afin d’éviter tout risque d’abus. En effet,
l’usage abusif et/ou prolongé d’antitussifs à ac-
tion centrale (codéine et dextrométhorphane)
peut engendrer une dépendance physique et
psychique.
Plusieurs cas d’abus de dextrométhorphane ont
été recensés ces dernières années [12], notam-
ment chez les adolescents. Cette molécule est
connue pour provoquer des effets de type
« euphorisant» si elle est consommée de manière
abusive. Ces cas restent cependant rares et isolés
et les médicaments à base de dextrométhor-
phane sont toujours considérés comme sûrs sils
sont utilisés aux posologies thérapeutiques re-
commandées [12]. Pour éviter de tels abus, la
forme galénique à privilégier est le sirop car il
exclut pratiquement tout risque d’abus. Il en-
traîne en effet nausées et diarrhée sil est
consommé en grande quantité [13].
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cas par cas en fonction des co-morbidités
et des co-traitements du patient. En te-
nant compte des données actuelles à dis-
position, nous recommandons le dextro-
méthorphane en première intention dans
le traitement des toux diurnes bénignes.
La codéine sera cependant préférée chez
les patients traités par un médicament
agissant sur le système sérotoninergique.
En cas de toux nocturne bénigne, l’oxo-
mémazine peut être proposée chez les
patients adultes entre 18 et 65 ans en
raison de son effet sédatif marqué.
Littérature
[1] Revue Prescrire 2011; 31 (334): 612–614
[2] www.listedesspecialites.ch (consulté en août 2014)
[3] «The Cochrane Library» John Wiley and Sons 2010; Issue
9: 35 pages
[4] Cough 2011; 7 (1): 7
[5] Therapeutische Umschau 1983; 40 (4): 358–361
[6] Orvosi Hetilap 2005; 146 (13): 609–612
[7] www.swissmedicinfo.ch (consulté en août 2014)
[8] Revue Prescrire 2014; «Le guide des interactions»
[9] Meyler’s Side Effects of Drugs, 14e éd., 2000
[10] Martindale: The Complete Drug Reference, 38th Edition
[11] www.toxi.ch (consulté en août 2014)
[12] www.who.int (Comité OMS d’experts de la Pharmacodé-
pendance 2012; 35e rapport)
[13] pharmaJournal 2008, 18: 9
Adresse de correspondance
Dr Jérôme Berger
Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire
Rue du Bugnon 44
1011 Lausanne
Tél. + 41(0)21 314 48 48
Fax + 41(0)21 314 48 40
Trockener Reizhusten bei Erwachsenen
Welches Antitussivum soll empfohlen werden?
Laure Nicolet, Jérôme Berger, Olivier Bugnon
Nicht medikamentöse Massnahmen können zur Linderung eines akuten tro-
ckenen Reizhustens genügen. Wird eine Pharmakotherapie nötig, so wird
deren Auswahl von Fall zu Fall unter Einbezug allfälliger Komorbiditäten und
Komedikationen getroffen. Da ein klar etablierter Konsens fehlt, empfehlen
wir, bei trockenem Reizhusten tagsüber Dextromethorphan zu bevorzugen.
Codein hingegen wird vorgezogen bei einer serotonergen Komedikation.
Oxomemazin kann wegen seiner ausgeprägten sedativen Wirkung für Er-
wachsene zwischen 18 und 65 Jahren bei nächtlichem Reizhusten empfohlen
werden.
Der trockene Reizhusten stellt einen phy-
siologischen Schutzreflex, der durch eine
fehlende Schleimproduktion charakteri-
siert ist, dar. Ist er nicht Symptom einer
chronischen Erkrankung oder eine uner-
wünschte Arzneimittelwirkung, so steht
der trockene Reizhusten meistens in Zu-
sammenhang mit einer Reizung der
Atemwege. In benignen Fällen erfolgt die
Heilung im Allgemeinen spontan nach
einigen Tagen. Der akute trockene Reiz-
husten kann aber auch bis zu drei Wochen
persistieren; eine antitussive Behandlung
kann zur Entlastung des Patienten not-
wendig sein (z. B. zur Verbesserung der
Schlafqualität) [1].
Tabelle 1: In der Schweiz verfügbare und von der Grundversicherung vergütete Monopräparate mit
der Indikation trockener Reizhusten
Wirkstoff Spezialität Galenische Form (Stärke) übliche Erwachsenen-Dosis
Zentral wirkendes
Antitussivum
Codein Codein Knoll® Tabletten (50 mg) 1 Tabl. 3 ×/d
Makatussin® Tropfen (20 Tropfen=10.6 mg) 15–20 Tropfen 3–4 ×/d
Dextromethorphan
Bexin® Tabletten (25 mg) 1 Tabl. 3–4 ×/d
Bexin® * Tropfen (25 Tropfen=20.8 mg) 30 Tropfen 3–4 ×/d
Bexin® Sirup (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/d
Calmerphan-L® Sirup (30 mg/10 ml) 10–15 ml 2 ×/d
Calmesin®-Mepha Sirup (30 mg/10 ml) 10–15 ml 2 ×/d
Dextro-Med® Sirup (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/d
Emedrin® N Sirup (25 mg/10 ml) 10 ml 3–4 ×/d
Pulmofor® retard Kapseln (50 mg) 1 Kaps. 2 ×/d
Anti-histaminikum Oxomemazin Toplexil® Sirup (3.3 mg/10 ml) 15–30 ml in 2–3 Einnahmen;
Husten nachts: 10 ml beim Zubettgehen
* Spezialität enthält Alkohol
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