Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 59 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. P athologie Olivier Gallocher1, Muriel Garcia2 1Oncorad Garonne 6, rue Mespoul, 31400 Toulouse <[email protected]> 2Institut Bergonié, 229, cours de l’Argonne, 33076 Bordeaux <[email protected]> Évolution de la radiothérapie des cancers bronchopulmonaires : l’asservissement respiratoire Forme locorégionale évoluée es cancers bronchopulmonaires (CBP) représentent en France près de 20 % des cancers masculins et environ 10 % des cancers féminins. Ils sont responsables d’un tiers des décès par cancer chez l’homme (soit la première cause de mortalité par cancer) et de 20 % des décès par cancer chez la femme (soit la troisième cause de mortalité par cancer, après le cancer du sein et le cancer colorectal). L’âge moyen de survenue est de 60 ans. La survie globale reste faible, de l’ordre de 15 % à 5 ans, toutes formes et tous stades confondus. Dans la stratégie thérapeutique, on différencie les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) regroupant les carcinomes épidermoïdes, les adénocarcinomes et les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules, et les cancers bronchiques à petites cellules (CPC). Le pronostic est très différent entre les CBNPC (survie de l’ordre de 15 % à 5 ans) et les CPC (moins de 5 % de survivants à 5 ans). Nous aborderons dans cet article les évolutions récentes des techniques d’irradiation des CBNPC. L Bulletin Infirmier du Cancer La chirurgie constitue le traitement de première intention pour les patients opérables porteurs d’un CBNPC localisé (stades I et II). Pour 30 à 40 % des patients atteints d’un CBNPC, le diagnostic est porté à un stade localement avancé, apparaissant souvent comme non résécable. Le pronostic de ces patients de stade III reste aujourd’hui assez péjoratif avec des taux de survie entre 20 % et 40 % à 2 ans, et entre 5 % à 10 % à 5 ans. Le traitement standard des CBNPC de stade III inopérables localement avancés est actuellement fondé sur une association de chimiothérapie comportant un sel de platine et d’une radiothérapie ; les meilleurs résultats en terme de survie sont obtenus si cette chimiothérapie est délivrée de manière concomitante à la radiothérapie, à la condition que les patients soient en bon état général. L’étude randomisée 9501 du Groupe français de pneumologie cancérologique a mis en évidence un taux de survie de 25 % à 3 ans [1] ; la dose de 66 Gray (Gy) en 33 séances 59 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 60 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. P athologie (1 séance par jour, 5 séances par semaine) était délivrée en technique « classique » (c’est-à-dire non conformationnelle), associée à 4 cycles de cisplatine-vinorelbine (pendant les 1re et 5e semaines de la radiothérapie, puis 2 cycles seuls supplémentaires en consolidation). La radiothérapie, comme tout traitement en oncologie, est soumise au délicat compromis entre destruction tumorale et protection des tissus sains. Or, dans le cas des tumeurs bronchiques, la radiothérapie « classique en 2 dimensions », fondée sur des radiographies de simulation, ne permettait pas une précision suffisante pour obtenir un index thérapeutique (rapport contrôle de la maladie/toxicité) satisfaisant. Les volumes étaient reportés manuellement sur les clichés de simulation à partir de l’imagerie TDM et de la description obtenue par la fibroscopie. Une marge de sécurité uniforme de 1,5 à 2 cm était recommandée afin de prendre en compte les incertitudes du report tumoral, du positionnement et des mouvements du patient, de la « pénombre » des faisceaux. Il en résultait une exposition de larges volumes de tissus sains, dont la tolérance imposait de limiter les doses délivrées. Son imprécision pouvait conduire à une mauvaise couverture du volume cible (responsable d’un mauvais contrôle local) et/ou à des complications aiguës et tardives par surdosage au niveau des organes critiques avoisinants (pneumopathies, œsophagites et myélites radiques). cées sur la peau du thorax et matérialisées par des repères radio-opaques (dosimétrie prévisionnelle), visibles sur la TDM, utiles au repositionnement du patient et des faisceaux. Une étape capitale de la procédure [2, 3] est la délinéation sur chaque coupe scanographique du volume cible correspondant au volume tumoral macroscopique GTV (tumeur, ganglions), au volume anatomoclinique (« maladie microscopique ») CTV (espace péritumoral et périganglionnaire autour du GTV, espace ganglionnaire prophylactique) et des organes à risque (OAR) (poumons, moelle épinière, œsophage, cœur). Le volume cible prévisionnel (planning target volume ou PTV) ajoute au CTV les incertitudes liées aux mouvements des organes et des erreurs de positionnement du patient. Il est théoriquement scindé en deux selon les causes d’incertitudes : le volume cible interne (internal target volume ou ITV) prend en compte les mouvements internes du patient et un second volume défini par l’addition d’une marge de mise en place (set-up margin) autour de l’ITV prend en compte les incertitudes de positionnement pendant le traitement. Le PTV est le volume de prescription : il doit être entouré par la surface isodose choisie et spécifiée par l’oncologue radiothérapeute comme appropriée (par exemple, l’isodose 95 %) de façon à ce que la distribution de dose soit adéquate dans le CTV. Le volume traité (treated volume ou TV) est le PTV entouré des marges radiophysiques (qui augmentent avec l’énergie des faisceaux et à l’inverse avec la faible densité pulmonaire). Radiothérapie thoracique conformationnelle La radiothérapie actuelle dite « conformationnelle » est un mode d’irradiation intégrant des moyens d’imagerie moderne pour aboutir à une irradiation de haute précision (meilleure adaptation au volume tumoral et limitation de l’exposition des organes sains) avec l’ambition d’augmenter la dose à la tumeur (minimum de 60-66 Gy), donc le contrôle locorégional. La procédure intègre les développements technologiques en matière de contention (interne ou externe), d’imagerie médicale, de dosimétrie, d’appareils de traitement et d’assurance de qualité. OAR particulier : les poumons Il existe des modèles permettant de prédire le risque de complications radiques pulmonaires en fonction de la proportion de poumon irradié. Pour la réalisation des histogrammes dose-volume, on définit une unité « (poumon droit + poumon gauche) – PTV » faite du volume total des 2 poumons auquel on soustrait le volume cible prévisionnel. On relève ainsi V20 et V30 qui correspondent aux volumes recevant respectivement au moins 20 et 30 Gy. V20 semble un paramètre fiable : Graham [4] a montré l’absence de pneumopathie radique de grade 3 (requérant une oxygénothérapie) lorsque moins de 25 % du parenchyme pulmonaire recevait une dose totale de 20 Gy, et, à l’inverse, un taux de 19 % lorsque plus de 37 % du parenchyme pulmonaire était irradié à une dose supérieure à 20 Gy. Planification du traitement La première étape consiste en une tomodensitométrie (TDM) en position de traitement (patient en décubitus dorsal, calé dans un système de contention, bras au-dessus de la tête) ; des marques arbitraires sont plaBulletin Infirmier du Cancer 60 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 61 P athologie Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Volume des cibles (cm3) Radiothérapie asservie à la respiration L’existence de mouvements respiratoires est une préoccupation majeure de la radiothérapie des tumeurs thoraciques (poumons, seins, médiastin) et abdominales (foie, reins). Ces mouvements doivent être pris en compte dans l’ITV selon les définitions du rapport ICRU 62. Avec le développement de la radiothérapie conformationnelle, plusieurs équipes ont mesuré les mouvements des organes internes avec la respiration, en comparant des acquisitions TDM faites à différents temps du cycle respiratoire [5]. Les déplacements moyens du lobe inférieur du poumon sont plus importants que ceux du lobe supérieur dans les 3 directions de l’espace. Les déplacements du diaphragme sont les plus importants : ils sont de l’ordre de 16 mm mais peuvent atteindre une amplitude de 52 mm. Les sommets pulmonaires sont en revanche beaucoup moins mobiles, leurs déplacements étant estimés en moyenne à 2 mm dans toutes les directions (maximum 3 mm). La carène bouge également peu dans le plan latéral avec une valeur moyenne de 3 mm, mais ses déplacements longitudinaux sont plus importants, mesurés en moyenne à 5 mm (maximum 12,5 mm). Ross [6] a analysé les mouvements rapides du cœur grâce à un scanographe particulier. Il a observé que les tumeurs proches du cœur bougent de façon importante, de 10 à 15 mm en moyenne ; à l’inverse, les tumeurs fixées à la paroi se déplacent peu, de l’ordre de 3 mm. En résumé, les mouvements de la tumeur en fonction du cycle respiratoire sont d’importance variable en fonction du site anatomique (ils sont d’autant plus importants que la tumeur est plus proche du diaphragme), mais aussi de ses extensions à des structures relativement fixes (gros vaisseaux de médiastin) ou au contraire relativement mobiles (paroi thoracique). À l’extrême, une tumeur périphérique lobaire inférieure est beaucoup plus mobile qu’une tumeur proximale lobaire supérieure partiellement fixée au médiastin. Les études précédentes ont permis des mesures précises des déplacements des organes intrathoraciques, mais pour les tumeurs situées près du diaphragme dont les mouvements ont une amplitude moyenne de 35 mm dans l’étude de Giraud [7], les marges théoriques seraient telles que le volume des tissus sains irradié deviendrait rapidement inacceptable. Si on considère arbitrairement que la forme de la tumeur contourée GTV est une sphère Bulletin Infirmier du Cancer 1000 950 900 850 800 750 700 650 600 550 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 Rayon PTV CTV GTV Figure 1. Augmentation exponentielle du volume du PTV en fonction du GTV. (alors qu’elle ressemble plus généralement à une masse patatoïde), en appliquant la formule mathématique de calcul menant du rayon (R) d’une sphère à son volume (4/3 πR3), on obtient un volume exponentiellement majoré (figure 1) difficile à traiter. Ces constatations ont conduit les équipes à réfléchir à des moyens de contrôler les mouvements respiratoires, afin de réduire les marges entre CTV et PTV : c’est ce que l’on appelle « la radiothérapie asservie à la respiration (RAR) » ou respiratory gating en terminologie anglo-saxonne. L’intérêt théorique de la RAR est de réduire et de maîtriser les incertitudes de traitement liées aux mouvements respiratoires conduisant à une limitation des complications, en irradiant moins de tissus sains, avec également l’espoir d’augmenter la dose au GTV pour améliorer le contrôle local. La RAR procède de deux grandes approches : soit la respiration du patient est bloquée pendant l’acquisition de l’imagerie pré-thérapeutique et l’irradiation (« gating the patient »), soit le patient respire librement, et le déclenchement des différents appareils s’effectue à un niveau respiratoire donné (« gating the machine »). Une troisième stratégie, plus futuriste, propose de suivre les mouvements de la tumeur – « tracking » – ou d’intégrer les déplacements respiratoires dans les mouvements des lames d’un collimateur multilame. L’approche la plus physiologique, que tout patient est capable de supporter, consiste à suivre en temps réel 61 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 62 P athologie Niveau de référence Blocage en inspiration profonde Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Rythme respiratoire de base Durée (s) Figure 2. Courbe spirométrique d’un cycle respiratoire normal suivi d’un blocage en apnée de référence. En ordonnées, la courbe représente un volume en litres par rapport à une calibration. Figure 3. Position de traitement, contention et spiromètre. le rythme ventilatoire spontané et à déclencher le scanneur ou l’accélérateur linéaire à un niveau toujours identique du cycle respiratoire. Les mouvements respiratoires peuvent être détectés grâce à plusieurs types de capteurs. Par exemple, le real-time position management (RPM) de la société Varian® comporte un bloc de plastique posé sur la partie haute de l’abdomen sur lequel sont collés des réflecteurs renvoyant la lumière d’un illuminateur infrarouge vers une caméra reliée à un ordinateur. Le mouvement des réflecteurs lors de la respiration est analysé par un logiciel qui commande le déclenchement du scanneur ou de l’accélérateur en fonction de critères prédéfinis. Cependant, les mouvements mesurés à la surface du corps d’un patient ne sont pas forcément reproductibles et corrélés de manière précise aux mouvements internes de la tumeur et des organes. De plus, le temps de traitement est allongé puisque le canon ne tire que dans une certaine position du réflecteur (correspondant au moment choisi dans l’ensemble du cycle respiratoire continu). La toute dernière innovation en termes de synchronisation respiratoire consiste à effectuer une acquisition tomodensitométrique 4D (la quatrième dimension étant le temps), chaque coupe scanographique ayant sa situation dans le cycle respiratoire (enregistrement d’un grand nombre de coupes scanographiques jointives en continu avec simultanément l’enregistrement de l’amplitude respiratoire du patient) [8]. Dans la seconde technique, la respiration du patient est bloquée, habituellement en inspiration, soit par l’occlusion d’une valve (active breath control, ABC), soit par une apnée volontaire (blocage en inspiration pro- fonde BIP ou en anglais deep inspiration breath hold, DIBH). La technique de contrôle actif de la respiration la plus répandue consiste à utiliser un spiromètre comportant une valve qui peut bloquer la respiration à un moment déterminé du cycle respiratoire (commercialisée en France par la société Elekta®). Le blocage volontaire de la respiration, en général inspiratoire, est plus étudié que le blocage actif. La méthode utilisée pour l’asservissement respiratoire peut être le blocage volontaire en inspiration profonde grâce à un pneumotachygraphe Spirodyn’R® de DYN’R®, intégrateur d’une différence de pression du flux respiratoire. Ce spiromètre est relié à un micro-ordinateur PC sur lequel le logiciel Spirodyn’R® est installé. Ce logiciel permet d’intégrer l’archivage des données de chaque patient. Une représentation graphique dynamique du cycle respiratoire du patient est projetée en temps réel sur écran pour le personnel, et dans les lunettes vidéo pour le patient (figure 2). Le patient visualise ainsi sa courbe respiratoire et par sa participation active peut diriger son rythme respiratoire et réaliser une inspiration bloquée dans le niveau d’apnée de référence (75 % de l’inspiration maximale). À toutes les étapes de la radiothérapie (apprentissage, scanner, simulation, traitement), le patient est installé en décubitus dorsal, allongé sur un système de contention thoracique, les bras maintenus au-dessus de la tête (figure 3). Une cale est souvent placée sous les genoux pour améliorer le confort du patient. Robin Garcia [9] a testé cette technique sur 5 patients porteurs d’un CBNPC. Après une phase d’apprentissage, tous les patients ont pu être traités en inspiration Bulletin Infirmier du Cancer 62 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 63 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. P athologie Figure 4. Coupes frontales en RL à gauche et en AR à droite. Figure 5. Coupes sagittales en RL à gauche et en AR à droite. profonde avec une bonne tolérance. La réduction des mouvements respiratoires et l’inflation du volume pulmonaire ont permis de diminuer le volume de parenchyme sain non irradié (réduction de 30 % du volume pulmonaire recevant plus de 25 Gy selon Hanley [10]), offrant à terme des perspectives d’augmentation de dose dans le volume cible sans toxicité pulmonaire majorée. Au moment de l’acquisition de la TDM en position de traitement, le blocage inspiratoire permet d’améliorer la qualité des images [11, 12]. En effet, l’inspiration bloquée est utilisée depuis toujours en radiologie pulmonaire pour supprimer les artefacts liés à la mobilité respiratoire des organes intrathoraciques et améliorer la qualité des images diagnostiques. En radiothérapie conformationnelle, les TDM en position de traitement sont réalisées habituellement en respiration libre pour Bulletin Infirmier du Cancer obtenir une position moyenne des organes et de la tumeur, et permettre une dosimétrie prévisionnelle dans les conditions de traitement. Il en résulte des images de qualité médiocre avec un flou cinétique responsable de striations multiples (figures 4 et 5), gênant la délinéation des volumes cibles et des organes à risque. En plus de ces difficultés de visualisation précise des volumes, de nombreuses études ont montré qu’il existait une variabilité de définition suivant les médecins. Grâce à une étude prospective sur un petit échantillon de 5 patients [13], dont le GTV était défini en RL et en AR, nous avons montré une tendance à l’amélioration de la variabilité de délinéation du GTV par le blocage respiratoire au sein d’une équipe de 6 observateurs (4 radiothérapeutes et 2 radiologues). Les méthodes les plus accessibles pour améliorer la variabilité inter-observateur semblent être la concertation à plusieurs (en par- 63 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 64 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. P athologie médico-physiques de radiothérapie sont tentées d’utiliser l’asservissement respiratoire lors d’irradiations stéréotaxiques hypofractionnées extracérébrales, notamment pour des tumeurs localisées bronchopulmonaires ou abdomino-pelviennes [17]. Le traitement de choix de patients opérables de lésions bronchopulmonaires de stade I est bien sûr la chirurgie, avec un taux de curabilité à 5 ans de 60-70 %. Pour les patients inopérables en raison de contre-indication médicale, les études européennes et nord-américaines obtiennent des taux intéressants de contrôle locorégional à 3 ans de 80-85 %. Les hypofractionnements utilisés sont variables : 3 séances de 20 Gy pour les stades I-IIB (T1T2N0 ou T3 < 5 cm N0) pour le Radiation Therapy Oncology Group [18], 4 séances de 10 Gy pour l’équipe de l’hôpital de Beaumont, Michigan [19], au prix d’une tolérance acceptable. Malheureusement, les taux de survie globale à 3 ans et 5 ans restent décourageants (56-72 % et 48 %), principalement en raison d’une population étudiée âgée ou présentant des antécédents médicaux importants grevant la survie. En s’adressant à des patients opérables donc en meilleure santé, les séries japonaises [20] qui emploient ce type d’irradiation (par exemple, 4 séances de 12 Gy) montrent quant à elles de meilleurs résultats (taux de contrôle local à 3 ans de 94 % et de survie globale à 3 ans de 79 %), données comparables aux résultats des séries chirurgicales ; des études prospectives complémentaires (étude 0618 du Radiation Therapy Oncology Group et étude 0403 Japan Clinical Oncology Group) sont en cours pour confirmer la robustesse de cette technique. Ainsi l’irradiation stéréotaxique hypofractionnée bronchopulmonaire pourrait devenir une option efficace, pouvant même se substituer à la chirurgie dans la population de patients opérables. ticulier avec les radiologues) et la planification de la radiothérapie avec la TEP (en levant les difficultés classiques au niveau des zones d’atélectasie et des adénopathies médiastinales). Une évaluation nationale de l’asservissement respiratoire de la radiothérapie dans le cadre des cancers pulmonaires non à petites cellules (CPNPC) et des cancers du sein (radiothérapie asservie à la respiration, RAR) est en cours dans le cadre du programme de soutien des innovations diagnostiques et thérapeutiques coûteuses (STIC année 2003). Dirigée par Philippe Giraud, elle a pour but l’évaluation de la qualité balistique, la prévention des séquelles après radiothérapie, l’évaluation médico-économique. Cette étude prospective consiste à comparer des patients traités en radiothérapie conformationnelle en respiration libre à des patients traités avec RAR pour des lésions mammaires, bronchopulmonaires, voire hépatiques. Irradiation stéréotaxique thoracique Le fractionnement classique en irradiation bronchopulmonaire (traitement normofractionné) est de 2 Gy par séance, 1 séance par jour, 5 séances par semaine pour 30 à 33 séances, soit 60 à 66 Gy en 6-6,5 semaines sans interruption. Il existe une relation nette entre une dose totale élevée délivrée et un meilleur contrôle local de la maladie. Arriagada et al. [14] ont montré un taux de survie à 3 ans respectivement de 6 % après 40 Gy et de 15 % après 60 Gy, illustrant la relation dose-effet. Il est alors logique d’intensifier la dose de radiothérapie en modifiant le fractionnement (dose par séance et nombre de séances) afin d’augmenter la dose biologique équivalente (DBEq) à plus de 100 Gy [15] ; l’irradiation de type CHART (continuous hyperfractionated accelerated radiation therapy) illustre cette intensification de la DBEq, en délivrant 54 Gy en 12 jours consécutifs (3 séances par jour) pour un bénéfice net en survie (taux de survie à 3 ans de 30 %) par rapport à la radiothérapie conventionnelle [16], dans les mêmes proportions que la chimiothérapie concomitante (taux de survie de 25 % à 3 ans dans l’étude 9501 du Groupe français de pneumologie cancérologique [1]). S’inspirant des techniques de radiochirurgie de tumeurs cérébrales (une séance unique à haute dose dans un volume réduit, au prix d’une contention crâniale rigoureuse), les équipes Bulletin Infirmier du Cancer Conclusion Les progrès en termes de taux de survie en cancérologie thoracique sont d’ampleur modeste. Cependant, la qualité de cette radiothérapie a largement progressé (imagerie multimodale, systèmes de contention externe et interne, délinéation des cibles et OAR, dosimétrie prévisionnelle par planification de la balistique des faisceaux, modification du fractionnement, chimiothérapie concomitante) permettant à l’heure actuelle de pouvoir proposer un traitement moins toxique, plus adapté au patient et à sa maladie, et d’espérer améliorer la survie. 64 Vol.8-n°2-avril-mai-juin 2008 Pathologie 2 Bic n°2 vol 8 27/10/08 15:25 Page 65 P athologie radiotherapy and control of respiration : current perspectives. Cancer Radiother 2002 ; 6 Suppl 1 : 135s-139s. 12. 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