2 - Livret - Le directoire et la fin de la république

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE V
LE DÉLITEMENT RÉVOLUTIONNAIRE ET LA FIN DE LA RÉPUBLIQUE - N°3
LES RÉPUBLIQUES SOEURS
ET LES TENTATIVES D’EXPORTER LA RÉVOLUTION
«Au nom de la nation, la République accordera fraternité et
secours à tous les peuples qui voudront la liberté.»
Décret de la Convention, 19 novembre 1792
I LA SITUATION DE CET ÉPISODE DANS LE CADRE DE LA RÉVOLUTION
1 - Un autre aspect caractéristique de la Révolution française : les «Républiques soeurs»
2 - Phénomène qui commence dès 1792 et dont lapogée sera sous le Directoire avec la conquête de
lItalie en 1797
3 - Des républiques souvent éphémères et à la fin absorbées par la République (transformées en
départements)
4 - Une histoire relevant des guerres révolutionnaires et de la politique extérieure de la Révolution
5 - Dans ce cours, je m’en tiens uniquement aux «Républiques soeurs» de la période de 1792-1799
6 - Des Républiques soeurs à ne pas confondre avec les révolutions et républiques «parallèles»
A - États Belgique unis (1789-1790), Belgique qui sera annexée à la France aussi
B - République liégeoise (1789-1791), incorporée à la France en 1795
C - Le cas partiel de la République batave (1795)
II LE PROCESSUS DE CRÉATION DES RÉPUBLIQUE SOEURS
1 - Un principe absent des idéaux de 1789, mais qui deviendra très important à partir de 1795
2 - A ce titre, le 12 mai 1790, la Constituante déclare renoncer aux guerres de conquête
3 - Un processus qui débute fin 1792 avec les premières victoires françaises en Belgique
4 - L’origine de la question est la suivante : que faire des territoires conquis ?
5 - En plus, les politiques français devront faire face à des demandes d’aides de révolutionnaires
européens
6 - A cela s’ajoute quelques réelles demandes de rattachement de populations à la France au début
(avant que cela ne devienne une fiction justifiant les annexions)
7 - Sans oublier la participation de nombreux étrangers dans les armées françaises
8 - Cela donnera lieu à des grands débats du côté des révolutionnaires français
9 - L’exemple de la conquête des pays bas autrichiens par Dumouriez
10 - Des positions politiques qui évolueront en fonction des circonstances et des régimes politiques
révolutionnaires, entre annexion pure et simple et République soeurs
11 - Au final, la décision d’appliquer les principes de la révolution aux territoires conquis, qui
deviennent ainsi «libérés»
12 - Une mesure officialisée par la Convention le 15 décembre 1792
13 - Le résultat de la convergence de cinq lignes de forces politiques et idéologiques
14 - La ligne politique initiale du pré-carré des «frontières naturelles» évoluera vers l’expansionnisme
et lannexion
15 - Ce qui expliquera leur destin au sein de la Révolution, autant que leur disparition sans le soutien
français
16 - Après 1799, le déclin de cette politique au profit de l’annexion
III LES PRINCIPALES RÉPUBLIQUES SOEURS
- En Allemagne
- République de Mayence (1792-1793)
- République Cisrhénane (1797), départementalisée en 1797 et annexée à la France en 1801
- En Suisse
- République rauracienne (Jura suisse) (1792-1793), la première publique soeur, annee à
la France le 21 mars 1793
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- République lémanique (canton de Vaud) (1798), intégrée à la république Helvétique
- République helvétique (1798-1803), qui deviendra la Confédération Suisse sous tutelle
napoléonienne
- Belgique (annexée en 1793 et 1795)
- République bouillonnaise ou république de Bouillon (1794-1795), annexée par la France
- Pays-bas
- République batave (1795-1806)
- Irlande
- République de Connaught (1798)
- Les républiques soeurs italiennes
- République d'Alba (dans le Piémont) (1796), du 25 au 28 avril 1796 !
- République bolonaise (1796), intégrée dans la République Cispadane le 16 octobre 1796
- République cispadane (à Modène) (1796-1797), intégrée à la République Cisalpine
- République transpadane (à Milan) (1796-1797), intégrée à la République Cisalpine
- République cisalpine (Lombardie) (1797-1799), rebaptisée République italienne en 1802
- République bergamasque (Venise) (1797), intégrée à la République Cisalpine
- République crémasque (Venise) (1797), intégré à la République Cisalpine
- République bresciane (Venise) (1797), intégrée à la République Cisalpine
- République ligurienne (ancienne République de Gènes) (1797), annexée à l’empire en 1805
- République d’Ancône (région Marches) (1797-1798), intégrée à la République Romaine
- République tibérine (Pérouse) (1798-1799), intégrée dans la République Romaine en 1799
- République piémontaise (royaume de Piemont-Sardaigne) (1798-1799), puis République
Subalpine (1802) avant d’être annexée par la France
- République romaine (1798-1799), ex États pontificaux
- République parthénopéenne ou napolitaine (Naples) (1799)
- En Grèce
- Les départements français de Grèce (Venise) (1797-1799), qui deviendront la
République des Sept-Îles en 1800
IV PARTICULARITÉS DE CET EPISODE DANS LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
1- Une création de Républiques soeurs qui jouera beaucoup plus dans la mobilisation européenne
que la mort de Louis XVI
2 - Des républiques «clones» plus que soeurs, la «françisation» de leurs institutions
3 - Des républiques liées à la France par des traités de soumission (troupes, argent, fournitures...) et
la présence de troupes françaises
4 - Des états satellites, prélude à leur annexion et départementalisation
5 - Ces «républiques» furent en fait pour les français des administrations d’occupation
6 - De libérateurs dans certains cas, les français vont toujours devenir occupants et s’aliéner les
populations
7 - Une politique d’exploitation économique et de pillage des oeuvres d’art des «Républiques soeurs»
8 - Des républiques ne fonctionnant que grâce à des minorités jacobines, aux troupes françaises et à
de dures répressions
9 - L’occupation française entraînera d’innombrables insurrections populaires pour se libérer du joug
français et révolutionnaire
10 - Les idéaux politiques justifiants ces intervenants militaires, notamment le droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes, ont le plus souvent été bafoués par l’occupation française
11 - Très vite, les espoirs de liberté des peuples serviront de prétexte aux annexions françaises
12 - Les intérêts nationaux primeront sur le respect des idéaux révolutionnaires en externe
13 - Un mouvement qui va continuer pendant la période napoléonienne
14 - Paradoxalement, le démantèlement des Républiques «pas soeurs» qui existaient antérieurement
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V CONCLUSION
1 - Les Républiques soeurs furent donc surtout une expansion de la République plus que de la
révolution
2 - Le triple échec politique des Républiques soeurs pour la France
A - Elles vont envenimer les relations entre la République et le restant de l’Europe
B - Ces occupations dressèrent une bonne partie des peuples contre la France, même
partisans de la Révolution
C - Elles ne résisteront pas sans la France
3 - Un autre exemple de l’état «révolutionnaire» contre l’esprit de la Révolution
4 - Elles vont contribuer à faire de la Révolution française une Révolution européenne
ORA ET LABORA
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Document 1 : En 1789-1790, les Constituants mettront régulièrement en avant le droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes. C’est même l’acte fondateur de la Révolution avec le serment du Jeu de Paume. On
peut étudier plus particulièrement le cas des principes avancés dans le cadre de l’affaire des princes
possessionnés en 1790 (princes étrangers ayant des possessions en Alsace). Au moment de l'abolition des
droits féodaux, les princes allemands ayant des biens et des possessions en Alsace, protestèrent contre la
perte de leurs droits et en appelèrent à l'empereur et à la Diète du Saint Empire. L'Assemblée constituante
refusa leur demande en vertu de la thèse de Merlin de Douai selon laquelle l'Alsace était française, non pas
en vertu des traités de Westphalie, mais par la volonté de ses habitants. Voici un passage central de
l'argumentation de Merlin de Douai sur ce thème extrait de son Rapport fait à l'Assemblée nationale au nom
de son Comité de féodalité, le 28 octobre 1790, sur les droits seigneuriaux des princes d'Allemagne en
Alsace (l’orthographe est d’époque).
Philippe Antoine Merlin, dit Merlin de Douai (1754-1838)
Mais le traité de Munster existe, &, je l'ai déjà dit, il n'est pas plus permis dans une
convention publique que dans une convention privée, de prendre l'utile, & de laisser
l'onéreux. Dès-là, nécessité de reconnaître que si c'est par le traité de Munster que la
France est devenue souveraine de l'Alsace, la France doit exécuter les conditions qu'il lui
a imposées, & par conséquent fournir les indemnités dont nous parlons.
C'est donc sur le traité de Munster que porte la question toute entière, & il est évident que
la France doit des indemnités, si elle a eu besoin de ce traité pour devenir souveraine de
l'Alsace; comme il est évident qu'elle ne doit rien, si elle a pu le devenir sans le secours
des stipulations qu'il contient.
Qu'avons-nous donc à examiner en dernière analyse ? un seul point, un point infiniment
simple, celui de savoir si c'est le traité de Munster qui forme le titre légitime de la France
à la souveraineté de l'Alsace, ou, ce qui revient au même, si c'est à des parchemins
diplomatiques que le peuple Alsacien doit l'avantage d'être François.
Sans doute, Messieurs, il vous paroîtra fort extraordinaire qu'il faille remonter à des
temps de guerre, de désolation & de tyrannie, pour trouver la cause de l'association de
nos frères d'Alsace à la belle & heureuse constitution qui s'élève au milieu de nous.
Nous ne le savons que trop, il a été un temps & il n'est pas si éloigné, les Rois,
habiles à profiter du titre de pasteurs des Peuples que leur donnent dans un autre sens
les livres sacrés, disposoient en vrais propriétaires de ce qu'ils appeloient leurs
troupeaux. Vendre, échanger, donner, céder par force des villes, des cantons, des
provinces entières, tels étoient les jeux de leur puissance ou les sacrifices de leur
foiblesse, tel étoit l'objet principal de leur politique.
Alors, sans doute, un traité par lequel un Monarque acquéroit de nouveaux sujets &
aggrandissoit son domaine, étoit pour lui un contrat obligatoire ; nul prétexte ne pouvoit le
dispenser d'en remplir les conditions ; & si, par exemple, Louis XIV ou Louis XV avoient
voulu supprimer en Alsace les droits dépendans des fiefs régaliens, nul doute que l'un ou
l'autre n'eût été tenu d'en indemniser les propriétaires.
Mais aujourd'hui que la raison déchirant le bandeau de l'ignorance, a appris à tous les
hommes leurs véritables droits ; aujourd'hui que la souveraineté des peuples, si long-
temps oubliée ou méprisée, est enfin consacrée avec éclat; aujourd'hui que les Rois sont
généralement reconnus pour n'être que les délégués, les mandataires des nations dont
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ils avoient jusqu'à présent passé pour les propriétaires & les maîtres ; qu'importent au
peuple d'Alsace, qu'importent au peuple Français les conventions qui dans les temps du
despotisme ont eu pour objet d'unir le premier au second ? Ce n'est pas à ces
conventions qu'est dûe l'union qui s'est opérée entr'eux. Le peuple Alsacien s'est uni au
peuple François parce qu'il l'a bien voulu. C'est donc sa volonté seule qui a ou
consommé ou légitimé l'union. Et comme il n'a mis à cette volonté aucune condition
relative aux fiefs régaliens d'Alsace, ne peut-on pas, ne doit-on pas même regarder les
droits dépendans de ces fiefs, comme soumis à la règle générale suivant laquelle il ne
peut être exigé d'indemnité pour l'anéantissement des impositions ci-devant perçues au
profit de particuliers ?
C'est ainsi, Messieurs, que vous avez repoussé par un il n'y a lieu à délibérer, la
réclamation que la république de Gênes faisoit devant vous le 21 Janvier dernier, d'un
article du traité par lequel elle prétendoit avoir cédé à la France la souveraineté de la
Corse. Vous avez dit : " Ce n'est pas en vertu de ce traité que le peuple Corse est uni à la
France: son union est l'effet d'un consentement libre de sa part, & elle n'existe que
depuis que ce consentement a été manifesté par l'envoi de ses députés à l'Assemblée
Nationale: le traité qu'on réclame ne mérite donc aucune considération. " - Et d'après ce
raisonnement, voici ce que vous avez prononcé : "L'Assemblée Nationale a décrété
qu'attendu le vœu énoncé par les habitans de l'Ile-de-Corse de former partie de la
Monarchie Françoise, il n'y a lieu à délibérer sur le mémoire de la ville de Gênes ".
Vous trouverez, sans doute, Messieurs, une grande analogie entre ce cas & celui sur
lequel vous allez délibérer. - Comme le peuple Corse, le peuple Alsacien a manifesté
clairement, l'année dernière, le vœu d'être uni à la France. Comme le peuple Corse, le
peuple Alsacien a par ce vœu légalement & librement émis, purifié ce qu'avoit eu
jusqu'alors d'injuste & d'illégal l'exercice que nos Rois avoient eu sur lui d'une
souveraineté qu'ils ne devoient qu'à des conquêtes & à des traités. Comme le peuple
Corse, le peuple Alsacien est devenu François parce qu'il y a consenti. - Et puisque vous
avez décidé que le traité par lequel la Corse avoit été cédée de fait à la France, n'étoit
pas même digne d'une délibération de votre part; quel cas pouvez-vous faire aujourd'hui
des conditions apposées au traité qui a transféré de fait à la France la souveraineté de
l'Alsace ?
Merlin, député de Douay
Rapport fait à l'Assemblée nationale au nom de son Comité de féodalité, le 28 octobre
1790, sur les droits seigneuriaux des princes d'Allemagne en Alsace
A.Nationales, AD XVIIIA 51
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