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étape, par vagues successives, s’agrègent, de plus en
plus nombreux, aux « vrais » Arabes, pour poursuivre
un peu plus loin. On sait, par exemple, que les
« Arabes » qui ont conquis l’Espagne étaient, pour
leur très grande majorité, des Berbères convertis.
L’expansion de l’islam à travers le monde eut égale-
ment ceci de particulier qu’elle véhiculait à la fois la
nouvelle religion de Mohammed : l’islam et la langue
de la révélation du Coran : l’arabe. Les populations
conquises se voyaient donc proposer un ensemble a
priori indissociable : la religion musulmane et la lan-
gue arabe. Beaucoup de ces peuples adoptèrent ainsi,
rapidement, la nouvelle religion et la langue qui la
portait. Mais ce fut loin d’être toujours le cas. Ainsi
certains adoptèrent-ils progressivement la langue
arabe sans pour autant abandonner leur religion juive
ou chrétienne : des îlots parfois très importants de
judaïsme et de christianisme ont pu dès lors survivre
jusqu’à nos jours au Maghreb et au Machrek*, ce qui
permet d’évoquer à juste titre des chrétiens arabes*
et des juifs arabes*. A l’inverse, des populations
intégrées au vaste empire musulman (il atteint son
apogée au IXesiècle) se convertirent très vite à l’islam
sans pour autant abandonner leur langue : ainsi les
Turcs et les Persans islamisés refusèrent ils d’adopter
la langue arabe, pour se contenter de transcrire leur
propre langue en caractères arabes.
Au Maghreb, les populations des plaines du Nord
adoptèrent assez vite la religion musulmane et la
langue arabe mais les habitants des massifs mon-
tagneux et des zones désertiques, s’il se convertirent
aussi à l’islam, surent préserver leur langue : le ber-
bère. La carte des zones berbérophones est très par-
lante, elle correspond très exactement, pour s’en tenir
à l’Algérie, aux massifs du Chenoua, de la Kabylie et
traces. Cette variété de populations caractérise tout le
Maghreb et il suffit de sillonner l’Algérie et le Maroc
pour mesurer l’inanité de cette image galvaudée des
« Berbères blonds aux yeux bleus » face aux « Arabes
bruns aux yeux noirs ». Les deux types existent bien
sûr, avec tant d’autres, mais on les rencontre dans
tout le Maghreb, sans qu’une région soit plus
« typée » que l’autre en fonction de la langue qu’elle
pratique.
Deuxième point : c’est bien de langue qu’il s’agit
et, si distinction il doit y avoir, elle n’est pas entre
« Arabes » et « Berbères », mais entre arabophones et
berbérophones. En effet, si l’on peut affirmer qu’il y
a bien une seule population maghrébine, avec toute
sa variété, on n’en constate pas moins qu’il y a des
Maghrébins arabophones (une majorité) et des
Maghrébins berbérophones. Et cela s’explique aisé-
ment par l’histoire. La langue originaire (c’est d’ail-
leurs le territoire historique de cette langue qui défi-
nit les limites du Maghreb : du Sud de la Mauritanie
à l’Est de la Libye) est bien la langue berbère, le
tamazight*, pratiquée par toute la population de
l’Afrique du Nord antique, mâtinée de punique au
temps de Carthage puis de latin au temps de Rome,
résistant aux Vandales et aux Byzantins mais vacillant
au moment de la conquête arabe des VIIeet XIesiècles.
L’expansion de l’islam à partir de la péninsule
arabique est tout d’abord le fait de cavaliers arabes,
accompagnés de théologiens et de marchands. Mais ils
sont peu nombreux et, au fur et à mesure qu’ils
conquièrent le Proche-Orient vers le Nord, puis
l’Égypte, le Maghreb et l’Espagne vers l’Ouest, la
Perse et l’Asie centrale vers l’Est, ce sont souvent les
peuples nouvellement convertis qui, d’étape en