Revue Scanner cardiaque dans l`imagerie non invasive des artères

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Revue
mt cardio 2005 ; 1 : 158-68
Scanner cardiaque dans
l’imagerie non invasive
des artères coronaires
Jean-Louis Sablayrolles , Nawwar Al Attar, Patrick Nataf
Centre cardiologique du Nord, 32-36, rue des Moulins-Gémeaux, 93207 Saint-Denis Cedex,
France
<[email protected]>
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
Résumé
L’évolution des techniques d’imagerie cardiaque incite à développer une technique d’angiographie coronaire non invasive, reproductible et fiable. Le scanner cardiaque, par ses avancées
technologiques, est la technique qui à l’heure actuelle suscite le plus d’intérêt. Les scanners
multibarrettes permettent, en une seule acquisition volumique de 20 secondes synchronisée
sur l’ECG avec injection intraveineuse de produit de contraste iodé, une étude bidimensionnelle (2D) et tridimensionelle (3D) des structures cardiaques et des artères coronaires. Les
inconvénients principaux de la technique sont l’absence de clichés dynamiques et l’exposition
aux rayons X. La grande spécificité et la sensibilité du scanner coronaire font de cet examen un
excellent outil diagnostique et, à terme, un candidat au remplacement potentiel des procédures invasives diagnostiques. Il devrait pouvoir réduire la morbidité et la mortalité ainsi que le
coût de l’angiographie coronaire conventionnelle. En outre, il a comme avantage une
meilleure résolution spatiale pour l’exploration des vaisseaux examinés.
Mots clés : tomodensitométrie, angioscanner, coronaires
Abstract. Non-invasive coronary CT angiography
Recent trends in computed tomography (CT) scanner technology have opened new frontiers in
the field of non-invasive coronary angiography. Given the relatively important number of
negative invasive angiographies performed each year, eliminating the risks inherent to this
procedure by non-invasive methods greatly would contribute to diminishing the risk. After
injection of contrast, the procedure is performed under short apnea and triggered by electrocardiographic (ECG) recording that provides a multitude of possible image reconstructions ;
i.e., volume rendering, virtual angioscopy, and three-dimensional (3D) reconstruction of the
heart and coronary vessels. Besides evaluating coronary artery atherosclerosis, computed
tomography angiography (CTA) allowed the diagnosis of coronary aneurysm and exact
localization of postoperative false aneurysm. The main disadvantages of the technique are the
absence of dynamic films and exposure to radiation. The increased accuracy and sensitivity of
noninvasive coronary angiography make it an excellent diagnostic tool and a probable
replacement to diagnostic invasive procedures. It should reduce the morbidity and mortality as
well as the cost of conventional coronary angiography. Furthermore, it has the added benefit of
offering better spatial resolution of the examined vessels.
Key words: CT scanner, coronary arteries, heart morphology
mtc
Tirés à part : J.-L. Sablayrolles
L
es maladies cardiovasculaires sont
depuis plusieurs années, dans les
pays occidentaux, la première cause
de mortalité. L’évolution des techniques d’imagerie cardiaque incite à développer une technique reproductible, fiable, non invasive, et apportant
mt cardio, vol. 1, n° 2, mars-avril 2005
le maximum d’informations pour le
clinicien. L’étude des artères coronaires en IRM cardiaque est encore au
stade de développement, et cette technique ne doit pas être négligée dans le
futur (voir article de J. Garot,
p. 148–57).
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Scanner cardiaque dans l’imagerie non invasive des artères coronaires
Le scanner cardiaque, par ces avancées technologiques, est la technique qui à l’heure actuelle suscite le plus
d’intérêt. Les scanners multibarrettes actuels permettent,
en une seule acquisition volumique de 20 secondes synchronisée sur l’ECG avec injection intraveineuse de produit de contraste iodé, une étude bidimensionnelle (2D) et
tridimensionelle (3D) des structures cardiaques et des
artères coronaires.
La principale indication est l’évaluation des cardiopathies ischémiques. Cette imagerie doit permettre à la fois
l’étude des coronaires à la recherche d’occlusion ou de
sténose et l’étude du myocarde à la recherche d’un retentissement fonctionnel (perfusion-contraction). La même
acquisition permet une étude fine des différentes structures cardiaques et des vaisseaux du médiastin.
Techniques d’acquisition
La préparation du patient est identique à celle d’un
examen standard. Le patient est à jeun, sous oxygénothérapie pour mieux supporter l’apnée, avec une voie
veineuse brachiale (18 G). Des électrodes sont posées sur
le thorax. Plus la fréquence cardiaque est basse, meilleure
est la qualité de l’image. C’est pourquoi l’utilisation des
bêtabloquants est utile en dehors des contre-indications
habituelles. L’examen pour le patient est rapide (environ
10 minutes), en ambulatoire. Il n’y a pas de contreindication. Les précautions habituelles sont prises comme
pour toute injection de produit de contraste iodé.
Les paramètres de l’acquisition seront un compromis
entre l’apnée d’environ 10 secondes pour le scanner à
64 barrettes, le volume à explorer (entre 12 et 15 cm), une
résolution spatiale (coupes submillimétriques) et en densité optimale (120 Kv, 600 mA) et une résolution
temporelle < 250 msec pour éviter les artefacts cinétiques
(le cœur est une structure mobile) grâce à une rotation du
tube de 400 msec et une synchronisation à l’ECG. Le pitch
(espacement entre les pixels sur un moniteur) est < 1. La
synchronisation rétrospective est la plus utilisée.
Les paramètres d’injection varient suivant les équipes
(injection mono- ou biphasique, pulsée...). En moyenne,
Liste des abréviations
2D : bidimensionnel
3D : tridimensionnel
ECG : électrocardiogramme
IRM : imagerie par résonance magnétique
IVA : artère interventriculaire antérieure
mA : milliampère
MIP : maximum intensity projection
MPR : multiplanar rendering
MPVR : multiplanar volume rendering
VR : volume rendering
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100 à 120 mL de produit de contraste iodé à 350 mg/L par
voie intraveineuse sont injectés avec une seringue automatique à un débit de 3 à 5 mL/sec.
Ce type d’acquisition est plus irradiant qu’un scanner
standard. Plusieurs techniques permettent de réduire les
doses d’irradiation, en particulier en modulant les mA en
fonction de l’ECG. Concrètement, la dose d’irradiation
varie en fonction de la phase du cycle R-R, une dose
maximale en diastole de 65 à 85 % du cycle et une dose
minimale pour les autres phases.
Parmi les facteurs responsables de la qualité de
l’image, la synchronisation à l’ECG est le paramètre essentiel. Un défaut de synchronisation provoque des artefacts
cinétiques en bande qui dégradent l’image.
Notre étude sur 167 patients a montré en définissant
4 niveaux de qualité d’image que la probabilité d’un
examen de qualité optimale décroît avec la fréquence
cardiaque (tableau 1) et surtout avec les variations du
rythme en cours d’acquisition. En effet, quelle que soit la
fréquence, un rythme régulier donne un examen de qualité dans plus de 90 % des cas. Pour une variation de plus
de 10 battements par minute, le nombre chute à 67 %.
L’acquisition synchronisée sur l’ECG permet de reconstruire les images cardiaques aux différentes phases du
cycle cardiaque. La meilleure phase pour les artères coronaires est la diastole (entre 70 et 80 % du cycle). En effet,
c’est la phase de l’immobilité complète des structures
cardiaques et du meilleur remplissage des coronaires. Il
est souvent nécessaire de reconstruire plusieurs phases à
la recherche de la meilleure sans artefacts cinétiques,
variable chez chaque patient et pour chaque artère coronaire. Ainsi, dans notre étude sur 100 patients, dans 83 %
des cas, les meilleures phases pour étudier l’artère coronaire gauche sont en diastole entre 70 et 80 % du cycle
R-R.
Pour l’artère coronaire droite, dans 25 % des cas, les
meilleures phases sont en systole entre 30 et 40 % du
cycle, d’autant plus que la fréquence cardiaque est supérieure à 75 bpm (série personnelle du CCN).
Traitements d’image
Pour des raisons anatomiques, les coupes axiales sont
insuffisantes pour analyser les différentes structures cardiaques, en particulier les artères coronaires. Des logiciels de
reconstruction fiables et rapides ont été développés pour
extraire l’information. Grâce à l’acquisition volumique du
Tableau 1. Proportion d’un bon niveau de qualité d’image
en fonction de la fréquence cardiaque
(expérience du Centre cardiologique du Nord)
Rythme (bpm)
< 60
60-70
70-80
80-90
> 90
% Excellent ou bon
94,5
87,5
67,7
65
70
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coupes 2D, on étudie la lumière, les parois (plaque molle,
calcifications, stent...) et les espaces périvasculaires. Les
coupes 2D sont indispensables pour l’étude et la quantification des sténoses, l’étude de la plaque athéromateuse et
de la lumière intrastent ;
– l’endoscopie virtuelle est une vue endoluminale de
la paroi de l’artère. Ce logiciel peut être utilisé dans les
anomalies d’implantation, contrôle des bifurcations ou
des stents (figure 3).
Pour l’étude des structures cardiaques telles que le
ventricule gauche, on utilise l’imagerie en 2D aux incidences habituelles : coupes petit axe, 2 cavités, 4 cavités.
Les reconstructions aux différentes phases du cycle cardiaque permettent une étude cinétique et fonctionnelle du
ventricule gauche. À la différence de l’échocardiographie
et de l’IRM, ces reconstructions sont réalisées a posteriori
lors du traitement d’image et non en cours d’acquisition
grâce à l’acquisition volumique.
La qualité d’image, avec une bonne dissociation
cavité-myocarde, permet une quantification automatique
des volumes, de la fraction d’éjection, de la masse myocardique globale ou segmentaire, de la perfusion et du
volume de la lésion.
scanner spiralé et à un voxel isotropique (volume pixel,
pixel de volume, la plus petite partie en forme de boîte qui
peut être distinguée d’une image tridimensionnelle), il est
possible de reconstruire les images en 3D ou en 2D quel
que soit le plan de l’espace, avec une résolution spatiale
identique aux coupes axiales de base.
Pour les artères coronaires, plusieurs logiciels sont
utilisés :
– l’imagerie en 3D : volume rendering (figure 1) et MIP
(figure 2) avec effacement automatique des structures environnantes et des cavités opacifiées. Cette imagerie 3D
donne une véritable cartographie du réseau coronaire par
rapport aux autres structures cardiaques et les vaisseaux
médiastinaux. Elle permet de localiser les lésions coronaires, de diagnostiquer précisément une occlusion ou un
anévrisme ou des pontages coronaires. Un mode ciné des
différentes projections peut être réalisé dans n’importe
quel axe. Ces deux techniques 3D ont chacune des avantages et des inconvénients : le MIP visualise la lumière de
l’artère et les calcifications pariétales. Le volume rendering est plus utilisé pour préciser la topographie de chaque
artère et leur rapport aux structures avoisinantes ;
– l’imagerie en 2D : MPVR et MPR, en particulier
curviligne dans le grand et petit axe du vaisseau. On utilise
des logiciels d’identification automatique de la lumière
vasculaire de chaque branche des coronaires. Grâce aux
Applications cliniques
Figure 1. Image 3D en volume rendering des artères coronaires
droite et gauche.
La principale application de cette technique est l’évaluation des cardiopathies ischémiques grâce à l’étude des
coronaires en coronarographie à la recherche d’une occlusion ou d’une sténose, et l’étude du myocarde.
Cette étude est morphologique mais aussi fonctionnelle. Elle doit préciser si l’atteinte myocardique est réversible (ischémie) ou irréversible (nécrose) et si le territoire
concerné peut être revascularisé avec un bénéfice fonctionnel.
Pour l’étude des artères coronaires, la coronarographie
est la technique d’imagerie de référence pour mettre en
évidence la distribution et les anomalies de la lumière des
artères coronaires. Le principal avantage de cette technique est sa haute résolution spatiale et temporelle. Néanmoins, elle présente un certain nombre de limitations :
– son caractère invasif avec une morbimortalité voisine de 5 pour mille,
– son imagerie bidimensionnelle qui ne visualise que
la lumière artérielle.
Il en résulte une sous-estimation à la fois du degré de
sténose et de l’extension de la maladie. En effet, la plaque
d’athérome reste longtemps purement intrapariétale avant
de subir un remodelage qui peut conduire tardivement à
une sténose réduisant le calibre de la lumière artérielle.
Bien que la valeur prédictive positive de la coronarographie soit élevée, une coronarographie normale ne permet pas d’exclure un athérome coronaire. Ceci est
d’autant plus important qu’une plaque d’athérome d’athé-
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1
2
3
4
Figure 2. Artère coronaire gauche en maximal intensity projection avec effacement automatique des cavités cardiaques. 1 : de face ; 2 : de
profil ; 3 : spider view ou incidence « araignée » ; 4 : oblique antérieur gauche et inclinaison crânio-caudale.
rome peu ou pas sténosante peut se compliquer d’un
syndrome coronaire aigu et présente un risque de rupture
au moins égal à celui d’une plaque très sténosante. Ces
limitations de la coronarographie laissent la place pour
une technique d’imagerie non invasive permettant d’étudier la paroi artérielle et la plaque athéromateuse.
L
S
P
R
I
A
Cut OFF
AOR
Figure 3. Anomalie d’implantation : les ostia de l’artère coronaire
droite et gauche naissent dans le sinus gauche.
161
Pour l’étude du myocarde, l’échocardiographie au
repos, à l’effort et sous stress pharmacologique (dobutamine) évalue les territoires sains, infarcis et ischémiques
en étudiant la dynamique des anomalies de la contractilité
segmentaire ventriculaire gauche. Elle définit la topographie les zones d’akinésie, de dyskinésie ou d’hypokinésie
et recherche une réserve contractile (en cas d’anomalies
de la contractilité au repos) et des zones d’ischémie.
L’échocardiographie de repos détecte les complications
mécaniques de l’infarctus. La scintigraphie myocardique
de perfusion au repos, à l’effort et éventuellement sous
stress pharmacologique, détecte des zones ischémiques
en rapport avec une sténose coronaire aortique.
Les avantages et les inconvénients de ces explorations
de routine permettent aux techniques d’imagerie en coupe
non invasive les plus récentes, l’IRM et le scanner, de
trouver leur place dans l’évaluation des cardiopathies
ischémiques. En effet, en plus d’un fort potentiel évolutif,
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Tableau 2. Études récentes sur les scanners multicoupes dans l’exploration des coronaires
Auteurs [références]
Nieman [1]
Achenbach [2]
Gerber [3]
Knez [4]
Kopp [5]
Giesler [6]
Nieman [7]
Ropers [8]
Dewey [9]
N Pts
Sensibilité %
Spécificité %
VPP %
VPN %
Segments non vus %
35
64
25
44
102
100
59
77
34
77
85
82
78
93
91
95
92
88
97
76
96
98
97
89
86
93
91
81
59
73
85
81
66
80
79
88
97
98
97
96
99
98
97
97
95
27
32
30
6
0-30
29
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VPP : valeur prédictive positive ; VPN : valeur prédictive négative.
l’imagerie en coupe peut, en un seul examen et en ambulatoire, étudier l’anatomie coronaire et les conséquences
d’une lésion coronaire (viabilité, perfusion, ischémie).
Étude des artères coronaires
C’est l’indication majeure du scanner cardiaque qui
visualise en routine la lumière et la paroi des artères
coronaires. Progressivement, les indications se précisent.
Les études les plus récentes sur les scanners 16 coupes
confirment l’intérêt clinique du scanner dans l’exploration
des coronaires [1-9] (tableau 2).
Anomalies congénitales
Fistules
Les fistules des artères coronaires sont de loin les
anomalies les plus fréquentes (figure 5). Environ la moitié
proviennent de la coronaire droite, les autres de l’IVA ou
de la circonflexe, mais il existe de multiples origines. Elles
se drainent dans le ventricule droit (41 %), l’oreillette
droite (26 %), l’artère pulmonaire (17 %), le ventricule
gauche (3 %) ou la veine cave supérieure (1 %). Le shunt
gauche-droit est le plus fréquent (> 90 %). Asymptomatiques dans 50 % des cas, elles peuvent être responsables
d’un accident ischémique, d’une endocardite, d’une insuffisance cardiaque ou d’une rupture sur fistule anévrismale [1].
Les indications du scanner cardiaque sont les anomalies coronaires congénitales et les variations importantes
de l’anatomie des coronaires : nombre, topographie, origine et distribution des artères. Les anomalies majeures
sont présentes chez environ 1 à 2 % des patients [1, 4, 8].
Elles sont isolées ou associées à des cardiopathies congénitales. Elles peuvent être à l’origine d’ischémie myocardique mais aussi de mort subite, comme les fistules ou
certaines anomalies d’implantation coronaire.
Ponts intramyocardiques
Les ponts intramyocardiques ne sont pas toujours faciles à mettre en évidence (figure 6). Les reconstructions 2D
dans l’axe de l’artère ou en petit axe montrent la portion de
l’artère ayant un trajet intramyocardique. En mode ciné,
on trouve les modifications de calibre et le rétrécissement
de l’artère en systole au moment de la contraction. Ces
ponts se situent sur l’IVA [1].
Anomalies d’implantation
Les anomalies qui peuvent être responsables d’ischémie myocardique sont des artères aberrantes cheminant
entre le tronc de l’artère pulmonaire et l’aorte :
– naissance de la coronaire gauche dans l’artère pulmonaire,
– naissance de la coronaire gauche ou du sinus de
Valsalva droit ou de la coronaire droite,
– naissance de la coronaire droite ou du sinus de
Valsalva gauche ou de la coronaire gauche,
– naissance de l’IVA du sinus droit,
– naissance de la circonflexe de la coronaire droite ou
du sinus droit.
Le scanner visualise la naissance aberrante des artères
coronaires et précise leur trajet et leur rapport avec les
autres structures cardiaques, en particulier le tronc de
l’artère pulmonaire, en coronarographie conventionnelle
(figure 4).
Les lésions, en particulier ostiales, sont souvent masquées ou difficiles à dégager à la coronarographie (et plus
généralement, toutes les régions aveugles de cette technique). En coronarographie, les sténoses proximales du
tronc commun sont les plus difficiles à apprécier du fait du
cathétérisme sélectif des premiers centimètres du tronc
commun. Le diagnostic est souvent posé par la chute
importante des pressions lors du cathétérisme sélectif et la
sténose est plus souvent suggérée que visualisée lors du
retrait du cathéter. Le scanner confirme la sténose : topographie (par rapport à l’ostium et à la bifurcation de l’IVA
et de la circonflexe), quantification, nature de la plaque
(figure 7). Il précise la longueur du tronc commun et guide
la décision thérapeutique (traitement endoluminal avec
stent ou traitement chirurgical par pontage). Le scanner est
également indiqué dans la surveillance des sténoses intermédiaires ou après traitement endovasculaire : position
du stent, perméabilité.
Étude des lésions du tronc commun
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Cx
Ao
TC
IVA
TC
Ao
CD
CD
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AP
Cx
AP
IVA
Figure 4. Naissance aberrante de l’artère coronaire droite qui passe entre l’aorte et l’artère pulmonaire. Naissance aberrante de la circonflexe
qui vient de la droite.
IVA
Ao
AP
Figure 5. Fistule provenant de la coronaire droite et de la coronaire gauche.
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IVA
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Ao
myocarde
Figure 6. Trajet intramyocardique de l’interventriculaire antérieure.
Figure 7. Scanner montrant une sténose du tronc commun ostial et son rapport avec l’ostium et la bifurcation de l’IVA et de la circonflexe.
Étude des lésions athéromateuses
Dans l’étude des lésions athéromateuses des artères
coronaires, le scanner cardiaque permet de préciser :
– le nombre d’axes coronaires lésés : lésions d’une,
deux ou trois artères ou diffusion à toutes les branches.
L’évaluation des artères coronaires doit se faire de façon
systématique, segment par segment, en imagerie 3D et
2D. À droite, artère coronaire droite dans son premier,
deuxième et troisième segments, le trépied et la distalité.
À gauche, tronc commun, artère interventriculaire antérieure proximale moyenne et distale et les diagonales,
artère circonflexe proximale et distale et ses branches.
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1
2
3
1
20
405
2.5 mm2
3
20
405
13.6 mm2
7.9 mm2
Figure 8. Angioscanner de l’IVA avec quantification des sténoses par des logiciels qui mesurent le diamètre et la surface de la lumière de l’artère.
– la sévérité des lésions : sténose réduisant le calibre
de 50, 75 ou 100 % avec étude de la collatéralité. La
quantification des sténoses se fait avec des logiciels qui
mesurent automatiquement le diamètre de la lumière du
vaisseau (figure 8).
L’analyse des lésions sera systématisée comme indiquée dans le tableau 3.
Tableau 3. Analyse des lésions coronaires observées
en tomodensitométrie
Type de lésions
Altérations pariétales
Sténoses
Occlusions
165
20
405
Analyse des lésions
Infiltration avec aspect rigide segmentaire ou diffus
Inégalités des bords dus à des plaques
athéromateuses
Ectasies globales ou segmentaires
Anévrisme(s) unique ou multiple(s)
Évaluation du degré de sténose
Longueur de l’occlusion
État du lit d’aval
Présence d’un thrombus
Présence d’une dissection
Collatéralité
Limites de la technique
Actuellement, elles dépendent de plusieurs paramètres :
– les problèmes d’acquisition, en particulier la synchronisation à l’ECG responsables d’artefacts cinétiques.
Une qualité d’image optimale est nécessaire ;
– la résolution spatiale, qui est encore insuffisante pour
une étude précise des lésions sur les artères distales en
particulier le dernier segment de la circonflexe et l’interventriculaire postérieure d’autant plus que l’artère est
infiltrée ;
– l’effet blooming, phénomène physique lié aux
rayons X qui tend à majorer la taille des structures très
denses. Cet effet est responsable d’une surestimation des
sténoses. Une étude récente comparant scanner et coronarographie a montré que lorsque la lumière n’est pas
dissociable de la plaque calcifiée, la probabilité d’une
sténose supérieure à 75 % est importante. Ainsi pour la
détection des sténoses calcifiées de haut grade au scanner,
la sensibilité est de 89,7 %, la spécificité de 76,7 % et la
valeur prédictive négative de 88,5 % [8].
Étude de la plaque athéromateuse
La composition cellulaire et biochimique de la plaque
athéromateuse constitue un facteur de risque majeur pour
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prédire le risque de survenue d’un syndrome coronaire
aigu. Dans les artères coronaires, les plaques dites vulnérables ou à haut risque tendent à être de petite taille, mais
leur contenu lipidique élevé les expose tout particulièrement à une rupture purement « passive » avec le risque de
rupture et de thrombose occlusive.
Le scanner permet de détecter facilement les plaques
non visibles en coronarographie en raison du remodelage
pariétal. Ces plaques ont une plus grande contenance en
lipides, avec une activité macrophagique supérieure à la
plaque à développement endoluminal. Ces lésions à risque auraient de plus une bonne réponse aux statines.
L’étude 2D est le seul moyen de dissocier la lumière de la
plaque athéromateuse responsable de la sténose en précisant sa nature avec l’espoir d’apporter un élément dans la
définition de la plaque à risque. À l’heure actuelle, on
peut définir 4 types de plaque en fonction de sa morphologie et de sa densité :
– la plaque molle non calcifiée riche en lipides (densité moyenne de 20 unités Hounsfield) est une structure
hypodense supérieure à la densité de la graisse périvasculaire. La sténose est excentrée. Les résolutions spatiales et
en densité permettent d’isoler au centre de la plaque une
zone moins dense à forte composante lipidique ;
– la plaque fibreuse est de densité supérieure (densité
moyenne de 84 unités Hounsfield), concentrique, entourant la lumière sténosée ;
– la plaque mixte excentrée présente une composante
interne hypodense et une composante calcifiée périphérique ;
– la plaque calcifiée a une densité supérieure à la
lumière (densité > 130 unités Hounsfield) avec souvent
un aspect de blooming accentuant sa taille. Elle est responsable d’une augmentation irrégulière de la taille de
l’artère par son développement externe.
Inventaire coronaire préopératoire
En un seul examen, le scanner étudie les lésions valvulaires et aortiques et contrôle la perméabilité des artères
coronaires avant une intervention chirurgicale comme un
remplacement valvulaire ou de l’aorte ascendante. La
coronarographie préopératoire peut souvent être évitée.
Les données du scanner sont parfois suffisantes pour décider d’un pontage complémentaire dans le même temps
chirurgical. De la même façon, un scanner coronaire
peut-être réalisé dans le bilan préopératoire de toute chirurgie en particulier vasculaire chez les patients à risque
vasculaire [1].
MPVR
VR
Figure 9. Contrôle postopératoire d’un pontage coronaire de l’IVA et de l’artère marginale par segmentation de l’artère mammaire interne
gauche et anastomose en Y.
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Scanner cardiaque dans l’imagerie non invasive des artères coronaires
Contrôle des pontages coronaires
C’est une des meilleures indications du scanner (figure
9). En effet, nous avons réalisé une étude de 289 pontages
veineux ou mammaires chez 88 patients en contrôle postopératoire immédiat ou tardif. Dans 91 % des cas, le
scanner pouvait répondre sur la perméabilité du pontage,
la qualité de l’anastomose distale et du lit d’aval (données
personnelles). Pour la réalisation du scanner, il est souhaitable de connaître le montage chirurgical. En dehors d’une
surveillance régulière, ces contrôles sont indiqués lors de
la récidive de la symptomatologie angineuse, d’une dissection ou de lésions de l’aorte thoracique, avant réintervention (chirurgie valvulaire ou aortique) ou après échec
d’une coronarographie. On peut mettre en évidence une
hypoperfusion, une sténose, une occlusion, une dissection de l’anastomose proximale, et plus rarement une
complication anévrismale des pontages veineux.
Le scanner est utile dans l’évaluation préopératoire
avant monopontage par voie endoscopique et assistance
robotique. Le scanner permet le repérage de la mammaire
interne gauche (topographie et diamètre), ses rapports
avec l’IVA (distance, angle, obstacle, le repérage de
l’anastomose sur l’IVA (en aval de la lésion,
diamètre > 2,5 mm, calcifications, pont intramyocardique, qualité du lit d’aval et le repérage de l’espace intercostal. En postopératoire d’une chirurgie de l’aorte ascendante, le scanner contrôle le geste chirurgical et recherche
des anomalies des réimplantations des coronaires (fuite
anastomotique) et des lésions coronaires associées.
Contrôle de la perméabilité des stents
Cette indication est moins évidente. En effet, la recherche de resténose par hyperplasie intimale intrastent est
parfois délicate en fonction de la topographie, la taille et la
structure du stent. Pour le moment, en dehors d’un
contrôle systématique, devant des signes d’ischémie myocardique, on lui préfère d’emblée la coronarographie à la
fois diagnostique et interventionnelle. L’hyperplasie intimale d’une resténose se traduit par une hypodensité intrastent accolée à la paroi du stent hyperdense, responsable d’une lumière irrégulière de petite taille (figure 10).
Conclusion
1
2
Figure 10. Contrôle de la perméabilité de stent de l’IVA proximale (1)
montrant une hyperplasie intimale d’une resténose (une hypodensité
intrastent accolée à la paroi du stent hyperdense), responsable d’une
lumière irrégulière de petite taille (2).
ble les artères coronaires et les structures cardiaques.
Après une phase de mise au point technique, puis de
validation clinique, le scanner est devenu entre des mains
expertes un examen qui trouve progressivement sa place
parmi les différentes explorations cardiaques. Les indications se précisent et s’élargissent au fur et à mesure de la
diffusion du matériel et du temps consacré à la reconstruction.
La dernière génération de scanner, plus rapide, en
haute résolution, recule les limites potentielles de cette
exploration qui pourrait se substituer à terme à la coronarographie diagnostique et peut-être aux techniques d’imagerie isotopique, à la condition de réduire le nombre de
segments non vus et d’améliorer la valeur prédictive positive.
Références
Dans l’évaluation des cardiopathies ischémiques, le
scanner cardiaque est, à l’heure actuelle, la technique non
invasive la plus performante pour l’exploration des artères
coronaires, mais l’IRM progresse et il est difficile de prévoir laquelle de ces deux techniques s’imposera à long
terme [9].
La principale indication de l’IRM est l’étude de la paroi
à la recherche d’une viabilité-ischémie myocardique. Par
son acquisition volumique, le scanner est la technique
idéale pour explorer en ambulatoire de façon reproducti-
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IVA
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