
Des réseaux et des hommes. Les Suds à l’heure des TIC
point de dominer l’économie de nombre de pays africains (Verick, 2006).
Cette économie populaire, différente du secteur marchand capitaliste et
du secteur étatique, se caractérise non par des investissements en
capitaux, mais par l’investissement de la force de travail dans de petites
entreprises ou des activités individuelles (Castel, 2007). Dans un pays
comme le Sénégal, si elle a pendant longtemps échappé à toute forme de
fiscalité, elle est, depuis la réforme du Code général des impôts de 2004,
soumise à la Contribution globale unique (CGU) et contribue dès lors au
tiers des recettes fiscales (Ndiaye et al., 2008). Se nourrissant de
l’excédent structurel de main-d’œuvre résultant de divers phénomènes
tels que l’urbanisation, l’exode rural, le chômage urbain, la faible densité
industrielle, etc., cette économie populaire constitue une véritable
« armée de réserve » (Ikonicoff et al., 1980) sur laquelle s’appuie le
secteur moderne afin de confiner l’emploi formel dans des limites
minimales et peser ainsi sur les salaires, les avantages sociaux et la
protection sociale. Elle a fortement progressé suite aux Politiques
d’ajustement structurel (PAS) imposées par les institutions de Bretton
Woods dans les années 1980 qui ont eu pour conséquences la fermeture
de nombreuses entreprises publiques, parapubliques et privées ainsi que
la diminution des effectifs de la Fonction publique dans le cadre du
programme des « départs volontaires » (Fall, 1993). Pendant des années,
les activités de l’économie populaire se sont partagées entre le commerce,
la production, le transport et le bâtiment. Cependant, forte de ses
capacités d’adaptation, elle a évolué en fonction de la conjoncture
économique et des orientations des politiques publiques ce qui lui a
permis de tirer profit des nouvelles opportunités offertes par la
libéralisation de l’économie, la globalisation des échanges ainsi que le
développement des TIC (Gaufryau et al., 1997).
1.1. Le catalyseur : l’autorisation de la revente de services
téléphoniques
Jusqu’au début des années 1990, l’économie populaire était quasi
absente du secteur des TIC au Sénégal. Il faut dire qu’à l’époque, le
niveau d’informatisation de la société était relativement faible, la
téléphonie mobile inexistante et le marché des télécommunications
n’avait pas encore été libéralisé. Les choses changèrent en 1993. La
Société nationale de télécommunications du Sénégal (Sonatel) autorisa la
revente de services téléphoniques dans des « télécentres privés » afin de
démocratiser l’accès au téléphone dans le cadre de sa politique de service
universel (Sagna, 2008). Il s’agissait d’un agrément la liant à une
personne physique ou morale en vue de l’exploitation d’un local d’une
superficie minimale de 12 m
2
, comprenant un dispositif de taxation et