Déterminer la dose optimale
Idem pour les reins qui permettent son élimination. Chez l'enfant, elle peut être de 10 à 20
fois plus lente, exposant plus longtemps son organisme au produit. L'étude de phase I
présentée par un médecin de Gustave-Roussy, pour évaluer la toxicité de l'association à la
chimiothérapie standard du Tasigna de Novartis, chez les jeunes patients atteints de gliome
en rechute, illustre bien ce point. Le traitement a été supporté et l'essai va être étendu à
l'échelle européenne pour déterminer la dose optimale.
« Les enfants se distinguent aussi des adultes par le fait que leurs tumeurs sont différentes
», explique Gilles Vassal. Dans ce cas, il faut « inventer » les traitements. C'est ce qui a été
tenté dans l'essai AcSé crizotinib présenté à l'Asco. Le crizotinib est un médicament de
Pfizer contre le cancer du poumon - nom commercial, Xalcori. Il n'y a pas de cancer du
poumon chez les enfants, mais différents cancers qui présentent les mutations génétiques
ciblées par Xalcori. Parmi les 11 enfants de 3 à 16 ans en échec thérapeutique sélectionnés
sur le profil génétique de leur tumeur, inclus dans l'essai, cinq ont répondu au traitement par
Xalcori plus de six mois.
Cet essai soutenu par l'Institut national contre le cancer et Unicancer montre que la
recherche académique joue un rôle clef en oncologie pédiatrique, les laboratoires se
contentant alors de donner la molécule. Les cancers de l'enfant étant rares, les industriels ne
peuvent pas rentabiliser le coût de développement d'un médicament. D'où l'idée d'un
règlement européen sur les médicaments pédiatriques.
Un plan « d'investigation pédiatrique »
Il impose depuis 2007, aux laboratoires pharmaceutiques, la soumission aux autorités de
santé d'un « plan d'investigation pédiatrique » si le type de cancer visé existe aussi chez
l'enfant. En contrepartie, le laboratoire obtient une extension de six mois de son brevet. Et, si
le laboratoire reprend une molécule tombée dans le domaine public pour l'adapter à la
pédiatrie, il bénéficie d'une protection de dix ans.
« L'adoption de ce règlement a vraiment débloqué la situation », explique Gilles Vassal. Et si
certains laboratoires se contentent du minimum légal, d'autres comme Roche, Celgene,
AstraZeneca, BMS ou Amgen vont au-delà, y trouvant un supplément d'âme pour motiver
leurs équipes.
Roche s'engage dans la cancérologie pédiatrique
Présentés à l'ASCO, les résultats positifs de l'essai de Phase III qui a testé chez 310 jeunes
patients atteints de lymphome de Burkitt, un traitement combinant une chimiothérapie
conventionnelle et un produit de thérapie ciblée de Roche le Mabthera, illustre l'engagement
du laboratoire suisse en cancérologie pédiatrique. Le groupe, qui a constitué une équipe de
35 personnes basée à San Francisco, dédiée à la R&D en cancérologie pédiatrique a inclus
1900 jeunes malades dans 45 études cliniques dont 10 en France avec 300 patients. « Nous
sommes ainsi partenaires du projet eSMART monté par l'INCA dans la cadre du Plan
Cancer qui vise à proposer une thérapie ciblée en fonction du profil génétique des tumeurs
», explique Raphaël Rousseau qui dirige la R&D de Roche en oncologie pédiatrique.
Catherine Ducruet