Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de

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Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Comment des médecins hospitaliers
apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes
d’une enquête nationale
Madeleine Estryn-Behar, François Leimdorfer et Geneviève Picot *
■■ Introduction
Dans un contexte de changements rapides et profonds de l’organisation
hospitalière, comment des médecins salariés (hôpitaux publics et cliniques
privées) vivent-ils leur situation au travail ? Comment disent-ils leurs sentiments de satisfaction et d’insatisfaction dans leur pratique professionnelle ?
Dans quelle mesure ces sentiments reflètent-ils leur état de santé au travail ?
À partir de quels points de vue se placent-ils pour juger leurs conditions de
travail et de la qualité des soins qu’ils peuvent apporter ? Il est urgent d’en
rendre compte car on peut penser que leurs vécus, leurs jugements, leurs
discours vont influer à l’avenir sur leurs attitudes, et en particulier sur leur
pratique professionnelle vis-à-vis des malades, de l’équipe et de l’institution, et, au-delà, sur leurs décisions de rester ou de sortir du cadre hospitalier.
L’actualité sociale montre l’existence d’un profond malaise dans les hôpitaux. Celui-ci s’exprime, entre autres, par le mouvement récent des praticiens hospitaliers démontrant, s’il en est besoin, que la problématique de
la satisfaction professionnelle est devenue centrale, alors que la situation
démographique médicale et paramédicale est problématique (HOPE, 2004 ;
OCDE, 2009). Les problèmes rencontrés par ces professionnels, les modalités de prise en charge des patients et le système dans lequel ils évoluent
(démographie médicale, qualité des soins, sécurité, coûts) justifient une
attention particulière afin de les comprendre. En effet, au-delà des prises
de positions dans les médias, il n’y a pas eu en France, jusqu’ici, d’analyse
systématique permettant d’objectiver les éléments de la satisfaction et de
* M. Estryn Behar et G. Picot : unité PRESST-NEXT-SESMAT ; Coordination centrale de la
médecine du travail, Hôtel-Dieu, AP-HP.
F. Leimdorfer : Laboratoire Printemps, CNRS-université de Versailles - Saint-Quentin-en-Yvelines.
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l’insatisfaction des médecins au travail. Cette recherche 1 fait suite à un travail similaire conduit au niveau européen auprès de 39 898 paramédicaux
(enquête PRESST-NEXT : Estryn-Behar, 2008).
L’hôpital est confronté à des évolutions majeures conduisant à une transformation des rapports sociaux dans les équipes de travail (notamment la
répartition sexuée du travail) et des changements dans le contenu et l’organisation du travail (Picot, 2005 ; Acker, 2005). Les politiques publiques de
santé interviennent directement dans ces évolutions, impulsant une réorganisation des établissements de santé publics. Son impact sur le contenu du
travail a pu être sous-estimé, tant les changements de l’organisation du travail infirmier et médical (Picot, 2005 ; Cordier, 2008) que l’augmentation
des tâches administratives (Estryn-Behar, 2008), la fonctionnalité des systèmes choisis (Estryn-Behar, 1996 ; Estryn-Behar, 2009a) ainsi que les exigences et les attentes des patients pour l’amélioration de l’information et de
la qualité des prises en charge.
« L’accréditation » impulse la mise en place de protocoles, d’outils de traçabilité et de contrôle centrée sur les résultats. Or cette conception est en décalage par rapport à celle de la qualité des soins définie en termes de prise en
charge globale des patients, présente parmi les soignants. Pour les salariés,
« les normes de qualité se traduisent par une surveillance accrue de la hiérarchie » et un accroissement des contraintes de travail (Le Lan et Baubeau,
2004), ce qui rejoint les constats d’autres auteurs (Bué et Rougerie, 1999 ;
Estryn-Behar et al., 2001). Ces résultats convergent avec ceux de l’enquête
PRESST-NEXT qui a montré le lien entre l’insatisfaction de la qualité des
soins, l’insuffisance de qualité du travail d’équipe, l’épuisement professionnel et l’intention d’abandonner la profession (Estryn-Behar, 2008 ; EstrynBehar et Muster, 2007).
La densification des activités, liée en particulier à la diminution de la durée
de séjour des malades et des moyens humains – jugés insuffisants –, entraîne
en particulier une mutualisation des moyens (Gheorghiu et al., 2007). Or
cette mutualisation, conduisant à des changements très fréquents de poste
de travail, rompt les « collectifs de travail » qui ont, de tout temps, joué un
rôle majeur (Estryn-Behar, 1996).
La nouvelle gouvernance, qui a pour effet de redistribuer les pouvoirs au
sein des établissements, a fait l’objet d’une alarme lancée par l’ensemble des
dirigeants médicaux de l’Assistance publique, soulignant le risque d’aboutir à « un découragement de l’ensemble des personnels » (Cordier, 2008 ;
Lettre des présidents CCM, 2008).
1. Remerciements : enquête initiée et mise en œuvre par l’unité PRESST-NEXT-SESMAT
de la Coordination centrale de la médecine du travail de l’AP-HP (Estryn-Behar) et par un
comité de pilotage associant les représentants des syndicats de médecins et de pharmaciens
INPH, CPH, SYNPREF ainsi que de l’Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel hospitalier (ANMTEPH) et du réseau de soins palliatifs. Il nous faut particulièrement remercier les médecins et pharmaciens qui ont pris sur leur temps de répondre
à ce questionnaire, en particulier pour la richesse et l’abondance de leurs réponses aux questions ouvertes, souvent traversées par la passion…
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Ce contexte permet-il aux médecins de trouver satisfaction dans leur activité, de se sentir efficaces et fiers de la qualité de leur travail et des relations qu’ils nouent avec les autres soignants et avec les malades ? L’enquête
SESMAT (Santé et satisfaction des médecins au travail) permet d’apprécier les effets des changements en cours sur le travail et la pratique médicale hospitalière. Elle permet surtout de cerner les éléments de discours d’un
échantillon spécifique de médecins hospitaliers (sans doute motivés par la
question) sur ce qu’ils trouvent le plus pénible et sur ce qui leur permettrait
d’avoir une satisfaction professionnelle.
■■ L’enquête
Présentation
Notre étude concerne les médecins et pharmaciens travaillant en France ayant
une activité salariée, pour la plupart en milieu hospitalier. Un questionnaire
détaillé passe en revue les différents aspects des conditions de travail, leur
satisfaction et leur état de santé. Le questionnaire était disponible en ligne
entre avril 2007 et mai 2008, et les deux plus importantes associations de
médecins (Coordination des praticiens hospitaliers [CPH] et Intersyndicat
national des praticiens hospitaliers [INPH]) en ont fait la promotion. 3 196
médecins et pharmaciens – 90,3 % d’entre eux travaillant à plein temps à
l’hôpital – ont répondu et fourni des données utilisables. Il y a 39 389 praticiens hospitaliers recensés en France (33 835 à temps plein et 5 554 à temps
partiel 1) et 4 799 ont été informés de l’existence de notre enquête par le site
www.presst-next.fr/SESMAT/
Le taux de réponse sur cette population concernée est donc élevé (67 %),
mais il est important de garder à l’esprit que les médecins accédant à ce
site ne sont pas tirés aléatoirement dans la population des praticiens hospitaliers. On sait que l’accès à ce site se fait principalement par l’intermédiaire d’organisations syndicales de médecins, ce qui laisse penser que les
répondants à notre enquête sont particulièrement concernés par les questions abordées et y ont réfléchi. Par conséquent, notre échantillon n’est pas
représentatif de la population des praticiens hospitaliers. Cela n’est pas un
défaut de notre enquête, car nos analyses visent à comprendre différentes
positions discursives attestées sur les conditions de travail et la satisfaction
au travail de cette population particulière et non à donner un point de vue
représentatif de l’ensemble des médecins hospitaliers, comme le ferait une
enquête d’opinion.
En matière de discours et concernant des questions ouvertes, ce qui est visé
n’est donc pas la représentativité du recueil, mais consiste à déployer un
1. Chiffres réactualisés en 2009 par le CNG, données SIGMED, http://www.cng.sante.fr
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éventail large de points de vue possibles sur un objet. D’une part, le discours est, on le sait, proliférant (Foucault, 1971), les énoncés infiniment
variables, donc difficilement classables en éléments simples de catégories
de contenu construites, celles-ci risquant d’ailleurs de refléter des catégorisations dominantes (Pêcheux, 1990) ; d’autre part, la relation entre une
énonciation particulière et la place sociale du locuteur (son statut, son rôle,
son sexe, son âge, sa position dans des activités, etc.), si elle n’est pas sans
rapport, n’est pas automatique. L’analyse des discours produits doit alors
s’attacher en tout premier lieu à dégager des constantes de sens, des « configurations discursives », qui sont, comme on le verra pour les plus importantes, en nombre limité. Il s’agit donc ici de dessiner l’espace des points de
vue les plus caractéristiques sur les thématiques proposées. C’est seulement
en second lieu que l’on pourra mettre en rapport, en tendance et en tendance
seulement, ces espaces de points de vue et de significations avec des caractéristiques sociales des locuteurs. Si la représentativité des répondants par
rapport à la population totale est souhaitable, elle n’est pas indispensable à
la mise au jour de ces configurations discursives, à condition toutefois que
le discours examiné soit suffisamment dense, ce qui est largement le cas ici.
Le questionnaire SESMAT a été adapté pour les médecins français à partir
du questionnaire NEXT (Hasselhorn et al., 2003 ; Estryn-Behar et al., 2007),
utilisé en France et dans dix pays européens auprès des soignants paramédicaux salariés. Il comprend 121 questions fermées et 5 questions ouvertes.
L’analyse des réponses aux questions fermées est en cours et fait l’objet
de plusieurs publications thématiques (Estryn-Behar et al., 2009b). Parmi
les 3 196 répondants à l’enquête SESMAT, 2 555 ont répondu à au moins
une question ouverte (78 %, ce qui donne un taux de réponse à au moins
une question ouverte de 52 % de la population ayant accédé au site). Il
s’agit de 2 371 médecins hospitaliers, de 98 pharmaciens hospitaliers et de
86 médecins salariés du travail et de santé publique non hospitaliers. Les
médecins hospitaliers représentent donc 92,8 % des répondants aux questions ouvertes et nous emploierons le terme « médecins hospitaliers » pour
décrire l’ensemble des répondants analysés, médecins et pharmaciens, hospitaliers ou non.
Soulignons que ces verbatim ont été écrits en ligne directement par les médecins eux-mêmes. Ce corpus de réponses libres, par sa longueur, sa précision et la qualité des réponses permet de cerner les motivations au travail
et les valeurs de ces médecins hospitaliers dans des conditions d’exercice
qu’ils jugent souvent pénibles.
La situation d’enquête et les questions ouvertes
Répondre à un questionnaire est une situation sociale d’interlocution particulière autour d’un acte de parole central : une question et une réponse
(ici en ligne et par écrit), engageant deux locuteurs, d’un côté un groupe
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Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
de chercheurs qui a préparé le questionnaire, de l’autre un individu parlant
à partir de sa place, de son statut et rôle et de son activité. Les questions
posées ouvertes que nous analysons ici étaient les suivantes :
« 122 [désormais 122a] : Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre travail de façon générale et dans votre discipline ? Expliquez :
122b : Qu’est-ce qui vous semble le plus pénible dans votre travail de façon
générale et dans votre discipline ? Expliquez : »
Ce qui est demandé aux répondants est un jugement – une appréciation par
rapport à un ressenti – appuyé sur leur expérience dans leur milieu de travail.
Les différents énoncés peuvent être envisagés comme des représentations
de ce ressenti. C’est une forme de prise de distance qui fait une synthèse ou
qui relève des éléments les plus typiques ou marquants de ce vécu.
Les deux questions posées demandent de faire un choix hiérarchisé parmi
plusieurs possibilités ouvertes non précisées (« le plus ») d’actes, d’activités, de situations, de relations, d’objets, de finalités, etc. Elles circonscrivent deux domaines :
– le « travail » (donc des activités dans des situations concrètes) « de façon
générale » (donc une synthèse ou des éléments marquants) ;
– et la « discipline » (donc un ensemble de discours et de pratiques socialement autonomisés).
Bien entendu, la « prise en charge » de la question peut être complète, partielle, déviante, différente ou négative.
■■ La méthode
Prendre les mots au mot
La méthodologie d’analyse lexicométrique, c’est-à-dire l’analyse statistique
des formes lexicales, permet d’aller au-delà d’une analyse de contenu qui
classerait intuitivement les énoncés et les mots, en s’appuyant sur un comptage rigoureux des formes simples ou combinées. Ainsi, par exemple, un
terme aussi polysémique que « travail » (une des formes les plus fréquentes
du corpus) est, dans la question sur le goût au travail, majoritairement le
« travail en équipe » alors qu’il figure comme « charge de travail » dans
la question sur la pénibilité. Une catégorie globale « travail » n’aurait pas
permis de prendre en compte cette particularité. Pour l’analyse des questions ouvertes, nous avons utilisé le logiciel Lexico (Lebart, Salem, 1988
et 1994 ; Leimdorfer, Salem, 1995) et le logiciel Alceste (Reinert, 1986 et
1993 ; Leimdorfer, 2009).
Toute analyse sociologique d’un corpus de textes pose l’hypothèse d’une
régularité des énoncés et des effets de sens produits pour des personnes dans
des situations sociales analogues ou proches. Pour aborder un tel corpus
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(ici l’ensemble des réponses à une question donnée), nous nous sommes
interrogés sur les mots utilisés dans les énoncés, en nous appuyant sur une
compréhension immédiate de leurs significations et en dégageant des régularités que l’on mettra en regard de caractéristiques sociologiques (âge, lieu
de travail, sexe, spécialité, etc.). Nous nous sommes limités ici à dégager
les grandes tendances des contenus des réponses ainsi que les spécificités
lexicales les plus caractéristiques des différentes catégories de locuteurs.
Nous avons constaté que la répartition par sexe, âge, spécialité et région de
la totalité de l’échantillon ayant répondu à au moins une question ouverte
diffère peu de la répartition donnée par la Drees.
Le développement de la statistique textuelle et des logiciels informatiques
d’analyse lexicométrique permet de faire des analyses de la distribution des
formes lexicales (les mots) d’un corpus et leurs associations.
L’analyse des questions ouvertes : utilisation
des logiciels Lexico et Alceste
Le logiciel Lexico permet de montrer les environnements textuels de mots
choisis (les « co-occurrences »), de calculer la fréquence des occurrences de
formes, la spécificité de leur fréquence par rapport à des variables connues
par les réponses aux questions fermées (c’est-à-dire la répartition non aléatoire des formes selon, par exemple, l’âge, le sexe, le locuteur, les périodes,
etc.). Cette spécificité, positive ou négative, indique que le terme apparaît
de manière non « banale », c’est-à-dire par écart significatif à la probabilité d’apparition d’une forme dans un ensemble (une partie) d’énoncés relatifs à une variable (âge, sexe, etc.), compte tenu de la longueur (le nombre
d’occurrences des formes) du corpus total et des parties délimitées par les
variables. Ces dernières sont, pour les questions ouvertes, les suivantes :
le sexe (masculin, féminin), l’âge (– 35 ans ; 35-44 ans ; 45-54 ans ; 55 ans
et + ), le type d’établissement (CHU, CHG, autre), le service hospitalier
(urgences, anesthésie-réanimation, chirurgie incluant l’obstétrique, médecine incluant la pédiatrie, longs et moyens séjours, psychiatrie, pharmacie,
médecine préventive, plateau technique), la région (Île-de-France, province).
Le logiciel Alceste constitue des classes (par classification hiérarchique descendante) d’énoncés (de longueur fixe en nombre de mots) qui partagent un
même vocabulaire spécifique de « mots pleins » (morphèmes lexicaux), les
« mots outils » (morphèmes grammaticaux) et les variables spécifiques étant
rapportés après regroupement de ces énoncés en classes. Alceste permet de
constater que des ensembles de mots forment en quelque sorte des « mondes
lexicaux » permettant de dégager des thématiques fortes pour l’ensemble du
corpus. L’intérêt de cette analyse est qu’elle regroupe des énoncés et des
mots non par affinité sémantique ou par précatégorisation de l’analyste, mais
par des opérations purement mathématiques et statistiques.
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Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Le logiciel Lexico effectue une partition « externe » du vocabulaire à partir
de variables sociodémographiques déclarées par les répondants. À partir de
cette partition, nous pouvons repérer des spécificités lexicales employées
par certaines catégories de médecins. En revanche, les classes d’Alceste se
dégagent par proximité lexicale des énoncés et permettent une sorte de partition « interne » du corpus. Cette partition fait ainsi apparaître des lignes
thématiques distinctes, pouvant caractériser certains groupes du corpus,
certaines réponses des médecins pouvant appartenir à plusieurs groupes.
Les textes réunis en corpus sont considérés comme une totalité fermée. Les
co-occurrences, les calculs se font à l’intérieur de cet ensemble mis à plat.
Ajoutons que les mots que nous allons examiner ne sont pas les réponses à
la question, mais font partie d’énoncés complets qui constituent les réponses
effectives.
Dans cette étude, nous avons souhaité restituer les thèmes dominants des
réponses des médecins hospitaliers. D’autres méthodes d’analyse de discours sont bien entendu possibles : analyses de l’énonciation, des actes de
parole, des catégorisations, des termes évaluatifs, des relations questionsréponses (cf. Leimdorfer, 2010, à paraître), etc., mais engagent vers d’autres
types d’études et de résultats.
■■ Les résultats
Le goût des autres
À la question 122a : « Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre travail
de façon générale et dans votre discipline ? Expliquez : », 2 520 médecins
hospitaliers ont répondu. Ces réponses se ventilent en plus de 47 000 occurrences pour environ 4 000 formes lexicales différentes : c’est donc un corpus
considérable. Nous allons examiner ici les formes dont les occurrences sont
les plus nombreuses afin de centrer l’analyse sur les données les plus significatives : travail, patient-e-s, équipe, contact, diversité et variété. Remarquons
que ces différents termes peuvent figurer dans une même réponse.
Les termes lexicaux
Les morphèmes lexicaux les plus nombreux (nombre d’occurrences > 100)
sont, par ordre décroissant de fréquence (cf. tableau 1) :
– Travail (986 occurrences) - travailler (88 occurrences) : c’est le mot le
plus fréquent de la question 122a, mais également de la 122b. Le mot le plus
associé à travail est équipe (près de 500 occurrences), lui-même très largement inclus dans cette série. On trouve également plusieurs occurrences
de travail en commun, en réseau, etc. Un premier ensemble de relations,
relativement univoque, est donc constitué par les collectifs de travail. Un
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deuxième réseau de relations réfère aux conditions de travail : condition,
ambiance, charge, temps, organisation du travail (~ 160 occurrences). Un
troisième ensemble est formé par la qualité du travail : intérêt, satisfaction,
variété, diversité (~ 110 occurrences).
– Patient-e-s (1 195 occurrences) est fréquemment associé à famille-s
(~ 100 occurrences), et dans une moindre mesure à : proches, équipe, personnel, travail. Mais, lorsqu’il s’agit de patients, c’est l’aspect relationnel qui
prime avant tout : avoir des contacts, des rapports, des relations (humaines),
des échanges avec les patients (+ de 800 occurrences). Ensuite apparaissent
l’apport, l’aide, le soin, le soulagement : apporter, aider, soigner les, améliorer l’état de, rendre des services, être utile aux patients (+ de 500 occurrences), etc. Puis nous trouvons le travail avec les patients : travailler avec,
prendre en charge, suivre les, s’occuper des patients (~ 500 occurrences), et
enfin l’explication aux, l’information et l’éducation des patients (~ 40 occurrences), et leur reconnaissance et leurs remerciements (~ 50 occurrences).
– Contact-s (636 occurrences), si l’on y ajoute les mots relation-s (353
occurrences), relationnel-s (56 occurrences) et rapport-s (57 occurrences),
totalise 1 102 occurrences. Il s’agit tout d’abord du contact et des relations
avec les patients (près de 600 occurrences), auxquels on peut ajouter ceux
avec : gens, famille, malade, enfant, parent-s, jeune-s, d’une part, collègues,
le personnel, agents, salariés, de l’autre, ou le « contact humain » en général.
– Variété-diversité : elles sont appréciées en tant que telles par les répondants (~ 70 occurrences). Ensuite la diversité-variété s’applique au travail
en général (près de 200 occurrences), aux activités (+ de 170 occurrences),
aux personnes (les patients ~ 150 occurrences), aux pathologies (~ 130
occurrences), aux contacts (~ 120 occurrences), aux disciplines (~ 65 occurrences), aux situations (~ 40 occurrences).
Encadré 1 : Termes lexicaux les plus nombreux, quelques
exemples
Femme, moins de 35 ans, CHG, province, urgences :
« Le contact direct avec le patient et le travail en équipe, travail très diversifié (régulation SAMU, SMUR, accueil urgences). »
Homme, moins de 35 ans, CHG, province, chirurgie :
« Le contact du patient, une confrontation à une situation à chaque fois différente, le travail en équipe et le partage des connaissances, pouvoir agir
de façon directe sur une pathologie donnée car je suis chirurgien. »
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Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Tableau 1 : Mots (morphèmes lexicaux) avec un nombre d’occurrences
supérieur à 90 dans le corpus des réponses à la question 122a : « Qu’est-ce
que vous aimez le plus dans votre travail de façon générale et dans votre
discipline ? Expliquez : »
986 travail
203 charge
136 soins
110 clinique
878 patients
200 relation
127 recherche
110 enseignement
588 équipe
174 être
126 collègues
110 temps
554 contact
172 prise
125 médecine
105 discipline
299 patient
171 pathologies
125 technique
99 intérêt
291 variété
153 relations
118 satisfaction
96 utile
280 diversité
147 activité
116 spécialité
95 aime
234 service
140 faire
111 urgences
94 malades
Les termes grammaticaux : l’exemple de « avec »
Sauf exceptions rarissimes, les mots les plus fréquents d’un corpus sont les
termes grammaticaux (« de », « le-la-les », « et », etc.). Dans ce corpus, la
très grande fréquence du connecteur « avec » (en septième position de fréquence) ne peut que retenir l’attention.
Il s’agit avant tout de « contact avec les patients » (ou de relations, de rapports avec les patients, les collègues, l’équipe, etc.), de « travail d’équipe
avec » ou de « travailler avec l’équipe ». Ainsi le mot « patient-e-s », mot plein
le plus fréquent, est associé dans près de 40 % de ses occurrences au mot
« avec », qui est également fréquemment associé à « malade-s », « enfant‑s »,
« famille-s ». Le mot « contact-s » précède dans près de 70 % des cas le mot
« avec », ainsi que le mot « relation-s » et « rapport-s ». Ils expriment par
excellence la multiplicité des interlocuteurs des médecins dans l’exercice
de leur activité (patients, collègues, paramédicaux...). Le mot « avec » est
donc associé à la plupart des termes les plus fréquents.
« Avec » permet également de cerner les désignations des groupes et professions avec lesquels les médecins entretiennent des relations privilégiées :
collègues, confrères, salariés, soignants, infirmières, ambulanciers, aidessoignants, personnels, agents, paramédicaux, professionnels ou équipe.
Quelques spécificités sociologiques des formes : le sexe et l’âge
Si les femmes comme les hommes mentionnent dans leurs réponses tous les
éléments que nous avons précédemment mis en évidence dans les résultats
globaux, il est cependant clair que les femmes médecins accordent préférentiellement une importance première aux rapports aux autres et à la dimension
humaine de l’activité médicale (cf. tableau 2). Les hommes, quant à eux, privilégient la technique, la réanimation, les responsabilités, l’enseignement.
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Il faut ici prendre en compte la surdétermination des caractéristiques des
hommes et des femmes, c’est-à-dire le fait que les femmes sont plutôt plus
jeunes, dans des spécialités particulières et dans des postes à moindres responsabilités. La domination de genre exerce des effets à la fois sur l’âge,
le type de discipline, les postes à responsabilités, ces différentes caractéristiques étant tendanciellement nouées. Le vocabulaire utilisé est donc à
interpréter à l’aune de ce croisement de facteurs.
Tableau 2 : Formes lexicales et segments les plus spécifiques positivement
selon le sexe dans le corpus des réponses à la question 122a : « Qu’est-ce
que vous aimez le plus dans votre travail de façon générale et dans votre
discipline ? Expliquez : » Femmes
Avec (690 occurrences + E06)
Hommes
Formes banales
Technique (82 occurrences
+ E06)
Patients (T = 878
occurrences)
Activité (92 + E05)
Patient (T = 299)
Pluridisciplinaire (36 + E03)
Urgence-s (107 + E03)
Équipe (T = 588)
La prise en charge (50 + E03)
Service (130 + E03)
Variété (T = 291)
La relation (61 + E02)
Soins (77 + E03)
Diversité (T = 280)
Travail (566 + E03) - travailler
(58 + E02)
Le contact avec les patients (80 Réanimation (37 + E03)
+ E02)
Enseignement (64 + E03)
Famille (37 + E02)
Responsabilités (28 + E02)
Enfants (41 + E02)
Relations (T = 153)
Contacts (T = 80)
Gens (36 + E02)
Aider (35 + E02)
Lecture :
– les chiffres entre parenthèses indiquent respectivement la fréquence de la forme dans la classe de la
variable et son degré de spécificité positive (ici du plus spécifique + E06 au moins spécifique + E02) ;
– la colonne regroupant les formes banales rassemble les morphèmes utilisés le plus fréquemment aussi
bien par les hommes que par les femmes.
En ce qui concerne l’âge, on remarque que les termes les plus fréquents du
corpus ont une spécificité négative chez les plus de 45 ans, et qu’en revanche
patients, travail, équipe, variété et diversité ont une spécificité positive chez
les moins de 45 ans. Il semblerait qu’une coupure s’instaure autour de la cinquantaine : avant, ce sont les contacts (dont les contacts avec les patients),
la variété, le travail (dont le travail en équipe) qui sont les termes spécifiques des réponses à la question 122a (cf. tableau 3).
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Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Tableau 3 : Formes lexicales et segments les plus spécifiques positivement
selon l’âge dans le corpus des réponses à la question 122a : « Qu’est-ce
que vous aimez le plus dans votre travail de façon générale et dans votre
discipline ? Expliquez : »
– 35 ans
Avec
35-44 ans
178 + E02
Travail
45-54 ans
55 ans et +
373 – E02
263 – E02
296 + E02
204 – E04
Patients
144 + E03
173 – E04
Patient
54 + E02
50 – E04
Équipe
99 + E03
Contact
105 + E05
Variété
51 + E02
Diversité
188 + E03
104 – E05
156 – E04
95 + E02
51 – E03
90 + E02
51 – E03
Lecture :
– les chiffres indiquent respectivement la fréquence de la forme dans la classe de la variable et son
degré de spécificité positive (ici du plus spécifique + E05 au moins spécifique + E02) ;
– les chiffres de spécificité négative (apparition moindre que la probabilité d’occurrence de l’ensemble
du corpus) vont ici du plus spécifique – E05 au moins spécifique – E02.
Les points de vue des médecins hospitaliers du corpus
sur ce qu’ils aiment le plus
On constatera que les deux analyses se rejoignent.
Le traitement du corpus par Alceste nous donne six classes d’énoncés et de
mots pleins spécifiques. Ces classes peuvent se regrouper en deux grands
ensembles (quatre classes opposées à deux classes). Le premier ensemble
(A) peut être synthétisé par le rapport au travail qui résume une posture fondamentale des médecins salariés du corpus. Il peut être détaillé en quatre
classes : la prise de responsabilité et les services ; le travail en service d’urgences ; la recherche et l’enseignement ; le travail en équipe. Le deuxième
ensemble (B) est centré sur deux classes : soigner et le sentiment d’être
utile, qui résument également une posture fondamentale, celle du rapport
aux patients et à la finalité de l’activité.
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RFAS 4 2010
Encadré 2 : Ce que les médecins aiment le plus,
quelques exemples
(Les mots pleins spécifiques de la classe sont en italique.)
Ensemble A
– La prise de responsabilités :
« sans création de postes médicaux en conséquence/je suis responsable
d’un pôle ce qui est passionnant. »
– L’urgence :
« l’activité chirurgicale proprement dite/rapidité fréquente de la décision/
action concrète au résultat/objectif rapidement constatable. »
– Recherche et enseignement :
« enseignement clinique auprès des externes infirmiers/utilisation de nouvelles techniques ou nouveaux médicaments » ;
« le caractère varié des tâches/salle consultation/formation des étudiants/
staffs/la possibilité d’associer activité clinique, recherche/ enseignement. »
– Le travail en équipe :
« contact individuel/restauration de l’autonomie du patient/responsabilité
travail d’équipe/travail intellectuel et manuel à la fois. »
Ensemble B
– Soigner :
« prévention des difficultés parents-enfants/instaurer une relation de confiance
entre les patients et le système de soins en pédopsychiatrie » ;
« la satisfaction de bien faire lorsqu’on a bien fait/le bénéfice que cela apporte
au patient et à son entourage. »
– Se sentir utile :
« apprendre tous les jours scientifiquement et humainement me sentir utile. »
La colère
À la question 122b : « Qu’est-ce qui vous semble le plus pénible dans votre
travail de façon générale et dans votre discipline ? Expliquez : », 2 555
médecins ont répondu.
Ce qui caractérise les réponses à cette question, c’est tout d’abord leur longueur. Le vocabulaire est plus riche, plus diversifié, pour caractériser par
exemple les relations avec l’administration. Les énoncés prennent souvent
la forme de petites narrations.
Le plus remarquable est l’émotion, la colère, la révolte qui surgit dans
nombre de réponses. Tout se passe comme si, à la question sur la pénibilité,
les instances à l’origine du questionnaire étaient prises comme interlocuteurs directs, témoins des problèmes. Les médecins répondants ne « mâchent
pas leurs mots » pour accuser, (dis)qualifier, se scandaliser, se révolter…
38

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Encadré 3 : L’expression de la colère des médecins,
un exemple
Homme, CHG, province, médecine, plus de 55 ans :
« […] l’inflation inutile des procédures administratives (démarches qualité
trompeuses, traçabilité aux dépens de l’intelligibilité, informatisation de mauvaise qualité mais obligatoire) […] la perte progressive du sens de l’humain
dans l’exercice de la médecine […] les injonctions contradictoires : travailler
bien en travaillant vite, travailler bien en dépensant peu, travailler vite malgré
l’inflation des paperasses. »
Reste que, au-delà de cette révolte manifeste, on peut repérer un certain
nombre de termes et de thèmes récurrents.
Les termes lexicaux et grammaticaux
Le premier mot de la réponse est très fréquemment un terme négatif, évidemment un effet de la question posée : inquiétude, démotivation, incertitudes,
irrégularité, manque, abus, lourdeur, stress, absence, difficultés, instabilité,
poids, mauvaise, ne pas, peu, pression, agressivité, charge, dénigrement,
gâchis, incompréhension, désorganisation, pénibilité, etc.
S’agissant des morphèmes grammaticaux, ce sont les termes spécifiques de
la question 122b : « non », « ne pas », « trop », « de plus en plus », qui sont les
plus intéressants. Ainsi « de plus en plus » est souvent associé à des charges
administratives et de travail de plus en plus lourdes, des difficultés de plus
en plus grandes, des relations avec des patients de plus en plus exigeants,
etc. Quoi qu’il en soit des diverses occurrences, « de plus en plus » marque
le vécu des transformations des conditions du travail, la progression des
difficultés de tous ordres.
Les occurrences des termes lexicaux les plus fréquents de la 122b sont :
travail, administration (-tif-ive-s), manque, temps, patients (cf. tableau 4).
39
RFAS 4 2010
Tableau 4 : Mots (morphèmes lexicaux) avec un nombre d’occurrences
supérieur à 100 dans le corpus des réponses à la question 122b : « Qu’est-ce
qui vous semble le plus pénible dans votre travail de façon générale et dans
votre discipline ? Expliquez : »
960 travail
202 médecins
117 part
706 manque
192 personnel
114 activité
551 temps
184 nuit
114 difficultés
517 patients
175 soins
114 médical
297 administration
171 hôpital
114 organisation
292 gardes
158 urgences
110 agressivité
276 reconnaissance
156 horaires
108 administratif
275 absence
150 collègues
107 médecin
268 service
148 relations
105 familles
262 administratives
137 moyens
103 patient
257 faire
136 administrative
103 pression
250 charge
136 heures
101 vie
243 tâches
132 contraintes
100 travailler
128 confrères
Lecture :
– les termes « administration » (297 occurrences), « administratives » (262 occurrences), « administrative » (136) et « administratif » (108) sont séparés par l’analyse des formes lexicales ; mais, mis ensemble,
on arrive à 803 occurrences, soit la deuxième occurrence après « travail » (960) ;
– outre ces 40 premières formes lexicales, la racine admin… se retrouve dans d’autres formes totalisant près de 900 occurrences.
Nous les examinons ci-dessous dans leurs environnements textuels :
– Travail (960 occurrences) : il s’agit tout d’abord de la charge de travail
dont il est dit fréquemment qu’elle est en augmentation, de la quantité, de
la surcharge, du surcroît ou du trop de, des conditions de travail ; il s’agit
ensuite du temps de travail, de son rythme, des horaires, heures et journées.
La pénibilité est évoquée, ainsi que la (non) reconnaissance ou le (non) respect. Trois thèmes émergent donc : la quantité de travail, le temps, la reconnaissance du travail. Le travail, nocturne, le nombre d’heures travaillées
ou travailler trop ainsi que le travail administratif sont largement évoqués.
– Administration-tif-ive-s (plus de 900 occurrences dont 803 dans les 40
formes lexicales les plus fréquentes) : les rapports avec l’administration
sont désignés par une grande richesse et diversité de substantifs et adjectifs, souvent peu amènes. Contrainte administrative, lourdeur, charge, pression, temps excessif passé au travail administratif ou à l’accumulation de
ces tâches. Une première thématique est retrouvée autour de l’attitude de
l’administration : manque de considération, non-respect, arrogance, conflits,
difficultés de dialogue ou de discussion, manque de compréhension, relations très difficiles, non-reconnaissance, mépris, harcèlement, hypocrisie,
40

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
agressivité, cécité incurable, etc. Une deuxième thématique est retrouvée
autour de l’incompétence ou de la lenteur de l’administration, son absence
de connaissance du travail des médecins. Une troisième thématique regroupe
des pratiques jugées négativement : ingérence, incurie, inertie, immobilisme, inaction, intrusion, manque de transparence, emprise de plus en plus
lourde, pesanteur, poids.
Encadré 4 : Termes lexicaux : « administration »,
quelques exemples
Homme, 45-54 ans, CHG, province, service non précisé :
« Le poids terrible de notre administration, le déséquilibre entre leur rythme
et le nôtre, le manque de considération pour les agents qui sont auprès des
patients et le mépris des administratifs pour le corps médical qui est, comme
chacun le sait, le responsable de tout ce qui ne va pas dans le monde de la
santé. Les consignes, règlements, déclarations, audits évaluation et autres
inventions hiérarchiques qui nous empêchent de faire le travail que nous
avons été formés à faire. »
Femme, 35-44 ans, CHU, IDF, médecine :
« Les pressions administratives, la volonté de diminuer les consultations, leur
qualité, le temps accordé aux familles, les réévaluations régulières avec ajustement de traitement, l’organisation du maintien à domicile. La quantité opposée à la qualité du travail, la maladie grave, la mort ne sont plus admises à
l’hôpital, fait penser l’hôpital comme un énorme service d’urgences où tous
ceux admis rentrent chez eux guéris. »
– Manque-s (712 occurrences), auquel on peut ajouter absences-s (280
occurrences) : le manque de sommeil apparaît comme un facteur de pénibilité spécifique. Des éléments matériels ou de locaux sont cités ainsi que
le manque de lits ou de places et, de façon générale, le manque de budget
ou de moyens. Le manque de personnel concentre le plus de plaintes : en
général ou spécifiées (personnels paramédicaux, infirmiers, cadres, médecins et internes). Mais ce sont surtout les aspects qualitatifs et relationnels
qui ressortent au premier plan (315 occurrences) : le manque et l’absence
de reconnaissance et de considération, de l’administration, des patients ou
des autres médecins. Le manque ou l’absence de coopération, de communication, etc., qui réfèrent plus au travail d’équipe, est également une thématique importante. Le manque de temps est cité 118 fois en lien avec des
préoccupations sur la qualité des soins, sur la vie personnelle : travailler la
nuit, la judiciarisation, le manque de temps à consacrer à chaque patient.
41
RFAS 4 2010
Encadré 5 : Termes lexicaux : « manque », quelques exemples
Femme, CHU, Île-de-France, anesthésie-réanimation, 45-54 ans :
« Physiquement et moralement : le travail sur 24 heures, jour + nuit, le travail jours fériés et week-ends, les contraintes physiques, les plages horaires
non compatibles avec une vie familiale et personnelle, l’impossibilité de s’alimenter correctement ; intellectuellement : le manque de temps pour se tenir
à jour (lectures médicales). »
Femme, 55 ans et plus, CHU, province, médecine-pédiatrie :
« La dégradation des conditions de travail de l’ensemble du personnel : […]
périodes prolongées de manque de personnel infirmier avec une charge de
travail insupportable pour ceux qui restent et l’absence de venue des cadres
de santé supérieurs pour au minimum constater la réalité et soutenir moralement le personnel ; la destruction délibérée par la direction des soins du
“cahier des soins” qui dans notre service d’enfants était un outil incomparable et validé pendant des années pour permettre aux trois grandes catégories de personnel : les médecins, les infirmières et les aides-soignantes,
de […] tout savoir d’un enfant […]. Cette volonté de détruire sans aucune
concertation quelque chose qui marchait bien par quelque chose qui n’est
absolument pas assimilé par le personnel : les transmissions ciblées. »
– Temps (551 occurrences) : le manque, l’insuffisance de temps, est le ressenti principal. C’est également le temps de travail consacré aux patients (trop
court), aux activités administratives (trop long), ou trop important en général.
– Patient-e-s (630 occurrences), malade-s (101 occurrences) : le rapport
aux patients (la dégradation du temps consacré à la prise en charge, au soin,
etc.) et très fréquemment l’attitude de ces derniers (agressivité – plus de 100
occurrences –, non-reconnaissance, exigence, etc.), mais aussi leur nombre
croissant sont ici des thèmes majeurs.
Encadré 6 : Termes lexicaux : « temps » et « patients »,
quelques exemples
Femme, 35-45 ans, établissement, service et région non spécifiés :
« Temps consacré à chaque consultation de patients beaucoup trop court. »
Homme, 45-54 ans, CHU, province, médecine :
« […] la surenchère de contrôles inutiles, d’audits contradictoires, d’accréditations plus ou moins fantaisistes, de rapports multiples et variés demandés qui par l’ARH, la DRASS, la CPAM, la DHOS… dont le résultat ultime
est essentiellement un détournement du temps médical vers des activités
administratives stériles qui ne débouchent pour la plupart sur rien de tangible. L’inertie administrative et l’absence de réactivité, voire l’incompétence
de la technostructure hospitalière. »
Homme, – de 35 ans, CHG, province, service non spécifié :
« L’agressivité des patients, le contact perpétuel avec la mort et l’absence
de suivi, rapport émotionnel avec les familles et les patients. »
Bien d’autres thèmes importants auraient pu être ici abordés, par exemple
la pression médico-légale, la judiciarisation, les réformes, la norme T2A 1,
citées dans de nombreuses réponses (entre 20 et 40), etc.
42
1. T2A : tarification à l’activité.

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Quelques spécificités sociologiques des formes
En Île-de-France, ce sont surtout l’absence de tous ordres (de reconnaissance, de personnel, de soutien, de motivation, etc.), le manque de personnel, la charge de travail, dont les tâches administratives, et le manque de
temps qui sont les termes les plus spécifiques. En province, il s’agit des
astreintes, des relations avec les confrères, avec les chirurgiens, les conditions de travail des urgences.
Trois services marquent des spécificités de réponses sur la pénibilité très
importantes, et donc très significatives :
– en anesthésie-réanimation, ce sont de loin les gardes (dont de nuit) et
le rapport aux chirurgiens, puis le rapport aux collègues et les horaires, le
stress, le poids de la hiérarchie et de l’administration ;
– en service d’urgences, ce sont d’abord l’agressivité des patients, le travail (dont de nuit), son rythme et sa charge, les horaires (dont l’absence de
week-end), puis l’inadaptation et l’insuffisance des locaux, les relations
avec les confrères ;
– en médecine préventive, c’est essentiellement le statut de la médecine et
du médecin du travail (et sa non-reconnaissance) qui fait l’objet des énoncés des praticiens.
Les femmes soulignent essentiellement le manque de temps en général et
celui passé avec les patients et pour la vie de famille, alors que les hommes
se plaignent des rapports à l’administration et de son poids « de plus en
plus » important (ainsi que l’augmentation de la charge de travail, de l’exigence des patients, de leur nombre, etc.).
Le vocabulaire spécifique des – de 35 ans porte sur la vie de famille, le temps
passé, les horaires et le rythme de travail, mais également sur l’agressivité
des patients. Les 35-45 ans spécifient le manque de reconnaissance et de
considération, alors que les 45-54 ans marquent les problèmes de la permanence et de la qualité des soins, le manque de temps, les rapports aux chefs
de service, les contraintes et les astreintes. Les + de 55 ans marquent les
pressions de tous ordres, dont la (sur)charge de travail et celle des tâches
administratives.
Les points de vue des médecins du corpus sur ce qu’ils trouvent
le plus pénible
Alceste dégage cinq classes d’énoncés de taille à peu près égale dont une
est opposée aux quatre autres, ces dernières étant appariées deux à deux.
La thématique lexicale de la classe opposée aux quatre autres porte sur la
lourdeur des gardes et des astreintes, leurs effets physiques et psychologiques et sur la vie personnelle et familiale des médecins. Le point de vue
différencie la vie professionnelle de la vie personnelle.
Le premier ensemble (A) de classes reliées entre elles porte sur la difficulté
de faire son métier, par des contraintes externes, soit de l’administration et
43
RFAS 4 2010
des tâches afférentes, soit des conditions du travail. Il est interne à la profession de médecin. La première thématique porte sur les charges et contraintes
administratives, obstacles à l’accomplissement du métier. La deuxième thématique est centrée sur la difficulté de soigner et de faire son métier dans
les conditions actuelles de travail.
Pour le deuxième ensemble (B) de deux classes reliées, il s’agit des relations avec les patients et les collègues, leur agressivité et leur manque de
reconnaissance. La situation est interne au contexte de l’exercice hospitalier : en général, en consultation ou en urgences. La première thématique
est centrée sur le manque (de matériel, de place, de personnel, etc.) et sur
l’agressivité des patients, des familles, des confrères. La seconde thématique est centrée sur l’absence de reconnaissance et les conflits avec collègues, hiérarchie, chefs, etc.
Encadré 7 : Quelques exemples d’énoncés
(Les mots pleins spécifiques de la classe sont en italique.)
Vie professionnelle et vie familiale
« Le rythme des astreintes et l’impossibilité d’avoir un repos de sécurité
après les astreintes pénibles du week-end, parfois quatre heures de repos
en deux jours avec reprise des activités le lundi. »
« Fatigue, privation de week-ends en raison des gardes, les miennes et
celles de mon mari, sacrifice de la vie de couple, de famille, enfants, des
loisirs et amis. »
Ensemble A : le travail médical
– Les rapports à l’administration :
« une pression administrative monstrueuse : enquêtes, protocoles, procédures, réunions, commissions, sous-commissions empêchent une véritable
concertation médicale, un esprit de corps » ;
« le poids croissant des impératifs administratifs et économiques sur les
décisions de santé et l’accroissement des réunions, pseudo-débats et commissions stériles. »
– Faire son métier :
« savoir d’avance qu’on ne pourra pas faire ce qu’il faut pour tout dans le
temps imparti, ne jamais avoir la satisfaction du travail bien fait, ne jamais
avoir le temps de creuser les questions » ;
« je suis de moins en moins certaine que l’on me demande de soigner des
enfants. On me demande de faire des actes et de ne pas coûter trop cher. »
Ensemble B : les relations
– L’agressivité :
« agressivité des consultants aux urgences, manque de lit dans les structures d’aval. »
– La reconnaissance :
« mauvaise reconnaissance de la profession par la direction et certains
confrères. Difficultés de communication avec le responsable hiérarchique. »
44

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
■■ Discussion : pour une politique de l’organisation
du travail médical à l’hôpital
Que nous apprennent les réponses des médecins hospitaliers quant à leurs
conditions de travail telles qu’ils les vivent et les ressentent ? Dans quelle
mesure peut-on en inférer des propositions pour une meilleure organisation
du travail à l’hôpital ?
Les réponses des médecins du corpus soulignent leur appréciation de leur
rapport au travail, à l’activité, autour de cinq catégories de contenu, en
ordre décroissant : le travail en collaboration (à rapprocher du rapport aux
collègues et à l’équipe) ; le mode de travail : diversité, autonomie, responsabilités ; les actes et leur finalité (soulager, guérir, soigner, etc.) ; les techniques et processus ; la discipline exercée, recherche et enseignement, etc.
La place centrale du travail d’équipe est également fondamentale dans les
réponses aux questions fermées : la qualité du travail d’équipe apparaît
pour les médecins répondants comme un facteur majeur (odds ratio ajusté
3,92) quadruplant presque l’intention déclarée d’abandonner sa profession
(Estryn-Behar et al., 2010).
Nous avons constaté le caractère exceptionnellement fréquent du mot « avec »
comme caractéristique du goût de la relation aux autres manifesté par ces
médecins et tout particulièrement par les femmes jeunes, de plus en plus
présentes dans la profession.
Nous avons été frappés par la place majeure de la pénibilité associée à l’évolution des rapports avec l’administration, à la difficulté de soigner dans les
conditions de travail actuelles, l’agressivité des patients et le manque de
considération des collègues ainsi que la fatigue engendrée par les gardes qui
entravent l’équilibre vie de famille/vie de travail. De même, les réponses aux
questions fermées montrent que le burnout est le second facteur de risque
pour l’intention d’abandonner sa profession de ces médecins salariés français. De plus, les relations interpersonnelles, le harcèlement par les supérieurs, la crainte de faire des erreurs et le déséquilibre travail/famille sont
associés avec l’intention d’abandonner sa profession.
Dans quelle mesure les énoncés des questions ouvertes produits par ces
médecins salariés, leurs réponses aux questions fermées correspondent aux
pratiques et comportements observés par d’autres méthodes ?
Le ressenti de ces médecins est corroboré par les observations ergonomiques de journées complètes de travail de médecins que nous avons pu
conduire (Estryn-Behar et al., à paraître). Ces observations montrent comment l’aménagement des locaux, permettant ou non les lieux de parole, et
l’organisation du travail, permettant ou non les temps de parole entre des
soignants de diverses professions, habitués ou non à travailler ensemble,
favorisent ou entravent le partage des informations. Ces observations mettent aussi en parallèle le temps d’échange des infirmiers(ères) avec les médecins et celui qu’ils ou elles peuvent avoir avec les malades pour expliquer et
45
RFAS 4 2010
accompagner les soins (Estryn-Behar et al., 2009a). Nous avions déjà souligné, à partir de nos observations ergonomiques et d’une synthèse bibliographique, que, lorsque les conditions du partage pluridisciplinaire (temps,
lieux…) ne sont pas réunies, la souffrance devant la dégradation des relations avec les membres de ce qui n’est plus une équipe et avec les malades,
qui protestent d’être mal informés, devient criante (Estryn-Behar, 1997).
De même, une étude allemande a pu mesurer le temps consacré aux différentes tâches par vingt-cinq pédiatres suivis pendant cinq mois (Mache et
coll., 2010). Le temps moyen de travail était de 9 heures 18 minutes par
jour. Les pédiatres en passaient la plus grande partie en réunions (29,8 %
du temps), en tâches indirectes : lettres et notes diverses y compris administratives (17,5 %), écritures liées aux soins et documentation (12,7 %)
mais aussi travail infirmier, marches, attente de dossiers, problèmes informatiques et autres. En contraste, le temps consacré directement aux patients
était réduit : examens cliniques (9,2 %), dialogues avec les enfants ou les
familles (4 %). Les auteurs concluent sur une évidence : les pédiatres consacrent peu de temps direct aux patients, ce qui retentit sur la qualité des soins.
Comment évaluer ces réponses par rapport aux changements sociologiques,
politiques, professionnels et institutionnels dans l’hôpital ?
Le besoin de stabilité des équipes pluridisciplinaires est sous-estimé dans
les changements à l’œuvre dans l’hôpital. Il en est de même de leur nécessaire implication dans une éducation thérapeutique et un accompagnement des patients personnalisés. Les indicateurs de qualité et de sécurité
des soins annuels, demandés actuellement (taux d’infection nosocomiale,
durée moyenne de séjour...), diffèrent de ceux de l’efficacité à moyen
terme, tel le pourcentage de rechutes ou de réhospitalisations évitables par
une meilleure observance d’un traitement auquel le patient adhère pleinement. Parmi les principales nouveautés de la loi Hôpital, patients, santé et
territoires (HPST), on retrouve une gouvernance « entrepreneuriale » (organigramme, statut, comptes certifiés, équilibre, intéressement). Cette gouvernance place la reconnaissance plus au niveau salarial qu’au niveau de
l’estime des collègues.
Le rapport de l’IGAS sur le bilan de l’organisation en pôle est plus positif (www.ladocumentationfrancaise.fr/rapportspublics/104000246/index.
shtml) que l’appréciation portée par les médecins répondants à notre enquête
concernant les relations avec l’administration. Cependant, il pointe la timidité des délégations de gestion et de moyens par les directions.
Comment prendre en compte le discours de ces médecins sur leur vécu dans
les réorganisations en cours ?
Face aux problématiques de risques psychosociaux auxquelles sont confrontés les milieux professionnels et aux obligations des employeurs à la protection de la santé physique et mentale de leurs employés, diverses propositions
visent à dépister et à offrir des prises en charge thérapeutiques aux salariés
en souffrance ou des formations à la gestion du stress (Roy, 2009). Dans
46

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
une autre démarche, les médecins du travail, comme les spécialistes de
psychodynamique du travail, ont depuis longtemps attiré l’attention sur les
risques que comportent certaines organisations du travail (Dejours, 2000 ;
Clot, 2006 ; Huez et al., 2008).
Pourtant, devant la pénurie de soignants que rencontrent certains pays à
hauts revenus, des propositions de flexibilité des affectations se sont développées. Cependant, ce choix de flexibilité omet la difficulté d’obtenir soutien et estime de supérieurs et de collègues avec lesquels on ne travaille
qu’occasionnellement (McHugh, 1997 ; Kane-Urrabazo, 2006). La mutualisation des moyens, avec polyvalence des soignants paramédicaux sur les
cinq ou six disciplines d’un pôle, ne risque-t-elle pas d’aggraver le stress
psychosocial et d’augmenter la fréquence du burnout, si l’on se réfère aux
modèles explicatifs du stress les plus acceptés ? La collaboration entre médecins et paramédicaux ne risque-t-elle pas d’être plus tendue, aggravant le
stress des uns et des autres ? Réduire ce que les médecins et les soignants
paramédicaux aiment et augmenter une formalisation coupée des besoins
de soins relationnels développés avec les patients et les familles ne peuvent que générer souffrance et épuisement professionnel, quand ce n’est
pas abandon du métier.
Ces questions qui tournent autour du respect des salariés et de la qualité
des soins qu’ils souhaitent dispenser en équipe expliquent le malaise et la
révolte de certains médecins : ils tirent actuellement la sonnette d’alarme
devant le trop de formalisation et de protocolisation. Ces dernières se font
au détriment de la valorisation de l’initiative de communautés thérapeutiques pluridisciplinaires centrées sur les besoins des patients, dont on évaluerait l’efficacité à moyen terme et non à court terme.
47
RFAS 4 2010
Annexe : Mise en perspective des réponses aux
questions ouvertes par rapport aux questions fermées
Les 1 924 médecins et pharmaciens hospitaliers de l’échantillon tiré au sort
selon la méthode des quotas sont 17,4 % à penser au moins chaque mois à
abandonner leur profession.
Ces médecins hospitaliers restent cependant extraits de la base de données
totale des répondants volontaires à SESMAT (cf. « L’enquête » supra), dont
les résultats sont très voisins. Parmi eux, 16,5 % pensent au moins chaque
mois à abandonner.
Le questionnaire de Copenhague (CBI) a permis de mesurer un épuisement
professionnel élevé (score supérieur ou égal à 3 sur une échelle de 1 à 5)
chez 42,4 % de ces médecins hospitaliers répondants aux quotas de répartition français et 42,7 % parmi la totalité de la base de données de SESMAT.
Les répondants ayant une fréquente intention d’abandon ont bien plus souvent un score de burnout élevé. Des relations interpersonnelles tendues,
une mauvaise qualité du travail d’équipe, un sentiment de harcèlement par
les supérieurs au moins mensuel, la crainte fréquente de commettre des
erreurs et un ratio effort/récompense inadéquat ou déséquilibré sont liés au
burnout dans cet échantillon. Une sélection de questions fermées concernant plus spécifiquement les thématiques des questions ouvertes est présentée ci-dessous :
Scores établis
à partir des réponses
aux questions fermées
Influence au travail
(Degré auquel un médecin a de
l’autonomie et de l’influence dans la
prise de décision au travail ; version
suédoise modifiée du Demand-Control
Questionnaire, Theorell et al., 1988)
Score de pression temporelle ou demande
quantitative
(Charge quantitative de travail, intensité
du travail, pression temporelle du
Copenhagen Psychosocial Questionnaire
[COPSOQ] ; Kristensen et al., 2005)
Élevée
Moyenne
Faible
Score de qualité de travail d’équipe
(Satisfaction du soutien de l’équipe, de
la circulation de l’information et des
possibilités de discussion)
Élevée
Moyenne
Mauvaise
N
Détendues
Tendues
N
Score de relations interpersonnelles
(Qualité perçue des relations sociales
entre les médecins et les autres groupes
professionnels)
48
Échantillon avec
conforme Total des
Modalités quotas
à la répartition répondants
française
N
Faible
Moyenne
Élevée
N
52,3 %
32,3 %
15,4 %
51,9 %
33,6 %
14,5 %
1 911
3 196
8,5 %
45,7 %
45,8 %
8,3 %
47,0 %
44,7 %
1 892
3 150
31,6 %
44,9 %
23,5 %
1 825
68,2 %
31,8 %
1 624
37,5 %
37,0 %
25,5 %
3 101
70,3 %
29,7 %
3 070

Comment des médecins hospitaliers apprécient leurs conditions de travail.
Réponses aux questions ouvertes d’une enquête nationale
Scores établis
à partir des réponses
aux questions fermées
Échantillon avec
quotas
conforme Total des
Modalités à la répartition
répondants
française
Détendues
Qualité des relations avec l’administration Tendues
N
Élevé
Score de soutien des supérieurs
Faible
N
Rare
Mensuel
Harcèlement par les supérieurs
ou plus
N
Rare
Violence de la part des patients
Mensuelle
ou des familles
ou plus
N
Faible
ou moyenne
Crainte de commettre des erreurs
Forte
N
Bon
Ratio effort/récompense
(Un ratio proche de zéro indique une
Moyen
relation favorable entre les efforts faits et
les récompenses reçues. Un ratio supérieur Inadéquat
à 1 indique que les efforts faits ne sont Déséquilibre
pas contrebalancés et légitimés par une
reconnaissance suffisante ; modèle effort/ N
récompense de Siegrist [1996])
< 35 heures
35 heures ≤
45 heures
Durée de travail hebdomadaire
45 heures ≤
50 heures
50 et +
N
Bas
Score de conflits travail/famille
Moyen
(Conflit perçu entre les demandes du
travail et de la vie privée ; Netemeyer, Élevé
Boles and McMurrian [1996])
N
59,8 %
40,2 %
1 885
45,8 %
54,2 %
1 820
81,2 %
58,0 %
42,0 %
3 118
49, 7 %
50, 3 %
3 001
86,8 %
18,8 %
13,2 %
1 877
72,5 %
3 148
70,5 %
27,5 %
29,5 %
1 895
3 119
41,8 %
40,4 %
58,2 %
1 919
13,4 %
33,1 %
31,6 %
22,0 %
59,6 %
3 157
14,4 %
32,1 %
31,9 %
21,6 %
1 782
3 060
8,8 %
8,4 %
19,8 %
17,5 %
21,5 %
23,0 %
49,9 %
1 592
23,5 %
33,2 %
43,3 %
1 910
51,0 %
2 582
21,9 %
32,9 %
45,2 %
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