D
ROIT NATUREL
ET
P
HILOSOPHIE POLITIQUE
Première partie : L’homme-citoyen
L’histoire commence en Grèce
- c’est en Grèce qu’apparaît la raison
o Athènes découvre la supériorité de la loi par rapport aux décrets et aux édits
loi = fondation rationnelle susceptible de faire l’objet d’un consensus
elle transcende tous les individus parce qu’elle est œuvre commune de la raison
à partir de la loi vont apparaître les notions de justice et d’injustice
c’est par la loi qu’Athènes se distingue des Cités barbares (régies par des rois proférant des
édits réputés d’origine divine)
o c’est en Grèce qu’apparaît la philosophie
contre la relativité de l’opinion sophistique
et sous forme de philosophie politique
I - Introduction : La Grèce classique
- 1. des bourgades
- 2. des familles, des clans, qui se rassemblent en Cités
+ une foule d’isolés : des Grecs qui appartiennent à d’autres familles, et des étrangers
= des Cités gouvernées par des rois = l’âge d’or
la propriété est encore indivise et les efforts pour la mettre en valeur sont communs
de petites Cités : une ville + la campagne environnante
tout le monde travaille sous le gouvernement débonnaire du roi-patriarche
la royauté n’est pas une monarchie en ce sens que la Cité n’est pas gouvernée par un seul
homme mais par des rois qui sont en fait des chefs de clan
la puissance des rois se mesure à celle de leur entourage
le roi le plus puissant est établi sur l’Acropole = Athènes
- 3. un jour, le roi-patriarche imagine d’augmenter sa propre autorité en incorporant tous les isolés à sa troupe
o le geste lui fut fatal : il provoqua la fureur des autres rois et conduisit à une transformation de la
royauté :
il y eut toujours un roi, mais il ne fut plus qu’un grand-prêtre (basileus)
à ses côtés s’installe le chef des armées (polémarque)
+ un magistrat (archonte) qui, en tant qu’arbitre suprême, incarne le Droit
o l’initiative malheureuse du roi avait révélé le danger potentiel que représentait la masse des isolés
par conséquent la réforme de la Cité sera principalement dirigée contre le peuple
toutes les précautions seront prises pour l’asservir
d’où une opposition dure et radicale entre les « bien-nés » et les isolés
autre malheur pour le peuple : l’apparition de la monnaie qui conduit à l’esclavage
on pourra vendre les Grecs pour dette
= âge de fer
= état de démesure absolue
danger de guerre civile => on promet des lois au peuple
- 4 . SOLON (v. 640-558) constate que la fortune sourit aux audacieux
o il a besoin d’audacieux pour réformer la Cité
il va remplacer l’aristocratie de naissance par l’aristocratie d’argent (oligarchie)
o mais il s’efforce aussi d’instaurer une justice droite
il parvient à faire triompher l’idée selon laquelle la loi jouit d’une supériorité décisive par
rapport à tous les décrets : en tant qu’œuvre de raison, elle vise à incarner un idéal de
justice
il instaure toute une série de lois consignées par écrit qu’on appellera Constitution
les riches supporteront de lourdes charges
les pauvres entreront à l’Assemblée et siègeront aux tribunaux
et comme ils sont plus nombreux, ils disposent de la majorité des suffrages
ce sont donc eux qui décident du sort de leurs concitoyens
il procède aussi à une réforme agraire qui réduit le pouvoir de la noblesse et des
propriétaires terriens et, en même temps, il amorce une émancipation des paysans
le peuple ne s’y trompe pas : il salue Solon comme le père de la démocratie
o après la mort de Solon s’installe un tyran
chef de bon sens qui ne règne pas par la terreur
sous son règne commence une ère de détente propice au mûrissement des idées de Solon
o une nouvelle figure va alors s’imposer : Clisthène va remodeler les structures de la Cité d’Athènes
dans la ligne de Solon
la loi doit être écrite et connue du public
=> égalité de tous devant la loi
instauration des ‘communes’ où se rassembleront tous les individus au statut social
différent => égalité des citoyens
transformation des Cités en ‘Républiques’ par institution d’une Assemblée
=> égalité des Cités
-
7
.
la démocratie est née à Athènes
o la démocratie demande la participation active de tous les citoyens
siéger aux Assemblées et aux tribunaux exige une certaine maîtrise de la parole
la parole va passer au premier plan
on n’éduquera plus les jeunes dans l’art de la guerre, mais dans l’art de la parole
=> apparition des Sophistes
o Sophiste = maître dans l’art de la parole et éducateur rétrib
tous les individus sont doués du pouvoir de parole
(ce qui correspond adéquatement à l’idée d’égalité démocratique)
les Sophistes ne considèrent que l’individu : ils refusent toute transcendance
=> « l’homme est la mesure de toute chose »
égalité ‘arithmétique’ : un citoyen = un citoyen, une opinion = une opinion
relativisme + utilitarisme + scepticisme
o le critère de toute valeur est maintenant l’utilité individuelle
o la passion devient le critère de toute action sociale et politique
- 8
.
après la mort de Périclès (429 av. J.C.) s’installe un état de guerre permanent
o les aristocrates reviennent au pouvoir
o ces aristocrates sont éduqués dans la nouvelle éducation qu’est l’art de la parole sophistique
o fort de cet art, les groupements aristocratiques (dirigés par des proches de Platon) contraignent
bientôt l’Assemblée à remettre sa souveraineté à un Conseil de Trente citoyens qui promettent
l’instauration
d’un ordre nouveau
o ces Trente citoyens reçoivent bientôt le nom de « Trente Tyrans »
- 9. les démocrates vont balayer les Trente Tyrans, mais la démocratie sort fortement ébranlée de ces
épreuves
o les Athéniens se méfient des beaux parleurs et autres novateurs
o => la condamnation de SOCRATE
- 10. fils d’une bonne famille d’Athènes, PLATON s’était attaché à Socrate
o il ne peut supporter que la ‘justice’ de la Cité condamne à mort le ‘juste’ Socrate
o la mort de Socrate = l’événement qui l’incite à entrer en ‘philosophie politique’
en philosophie en opposant la raison à l’opinion sophistique
et en politique en posant la question politique fondamentale : qu’est-ce que la justice ?, et
en y apportant une réponse
**********
1. 1. La République de Platon
- Platon vit à l’époque de la décadence de la Cité
- il veut réformer la vie politique de la Cité en accordant le pouvoir au savoir vrai
- si c’est essentiellement contre les Sophistes que se construit son œuvre
c’est parce qu’il a appris de Socrate que le dialogue ne se réduisait pas à une confrontation d’opinion mais
pouvait conduire à la découverte de la vérité
o à partir du moment où on ‘sait qu’on ne sait pas’, on peut quitter le niveau de l’opinion et découvrir
celui de la raison
raison qui n’est ni l’un ni l’autre des interlocuteurs
mais qui est le terrain commun qui leur permet de dialoguer
le dialogue se transforme en dialectique
- méthode dialectique : dialectique ascendante :
o quitter le niveau de l’opinion subjective pour remonter au niveau de la raison universelle
o passer du simple dialogue où s’affrontent les opinions à la dialectique où les interlocuteurs se
rencontrent au niveau de raison
o remonter de ce monde-ci au Monde des Idées : contempler les Idées pures
on part d’un fait
L
A
R
EPUBLIQUE
ou S
UR LA
J
USTICE
part de la justice humaine
qui n’est jamais parfaitement juste
mais l’injuste justice est l’occasion de penser la Justice vraiment juste
(l’Idée pure de justice, le juste-en-soi)
le philosophe-roi : celui qui, après un long apprentissage, sera parvenu à la
contemplation des Idées
=> l’importance de l’éducation
- le philosophe-roi (cf. l’allégorie de la caverne)
o le philosophe : celui qui est parvenu à contempler le Monde ordonné des Idées ordonné selon la
Justice (la justice est la vertu qui couronne, en les ordonnant, toutes les autres vertus)
o un philosophe-roi
le philosophe a contemplé la vraie Justice
il ne doit pas demeurer à contempler le Monde des Idées
il doit revenir dans ce monde-ci pour s’y efforcer d’instaurer la Justice, qu’il connaît, parce
qu’il l’a contemplée
Monde des Idées = un ordre ordonné et hiérarchisé : hiérarchie des Idées = le Juste
Cité + hommes = microcosmes
o des âmes inégales
o qui ne seront ‘justes’, vertueuses, que dans la mesure où elles occupent la
place, la fonction qui leur revient de par leur nature
sagesse – âmes d’or – philosophes
courage – âmes d’argent - guerriers, gardiens
tempérance – âmes de fer - travailleurs manuels
o des âmes complémentaires :
ordonnées l’une à l’autre selon leur vertu dominante
inégalité hiérarchisée = entraide = organisme unifié : la Cité
o la justice = rendre à chacun ce qui lui revient
= l’ordre de la Cité (microcosme)
+ vie heureuse pour l’homme vertueux : celui qui occupe la
fonction correspondant ‘naturellement’ à son type d’âme
- la Cité idéale de Platon = la République
o la Cité idéale de Platon est une Cité strictement ordonnée et hiérarchisée
o comment naît une Cité ?
de la multiplicité des besoins et de la division des tâches
=> les hommes s’associent pour s’entraider
une fois les besoins nécessaires satisfaits apparaissent les besoins superflus
=> discordes, disputes et guerres
nécessité d’instaurer un ordre de guerriers-gardiens de la Ci
le « communisme » de Platon
o communauté de biens
o communauté des femmes et des enfants
+ recours au « mensonge politique »
o juste parce que nécessaire au maintien de l’ordre dans la Cité
o une Cité idéale :
irréalisable dans ce monde-ci qui ne
peut réaliser qu’une justice imparfaite
Modèle vers lequel doit tendre le philosophe-roi = un idéal qui pousse à l’action
Modèle qui permet de juger des Cités réelles => la critique des Cités historiques
en examinant l’histoire de la Grèce, Platon y découvre une logique de la décadence
« âge d’or » = la royauté
suivi de 4 régimes décadents
o la timocratie (pouvoir des guerriers)
o l’oligarchie (pouvoir de l’argent)
o la démocratie (pouvoir du peuple)
o la tyrannie (pouvoir despotique d’un seul homme)
Platon procède alors à sévère critique de la démocratie
o confrontation ‘sophistique’ des opinions = violence et discorde
o égalité arithmétique = anarchie
o opinion + égalité arithmétique => tyrannie
trop de liberté tue la liberté
**********
1. 2. La Politique d’Aristote
- la situation politique d’Aristote est différente de celle de Platon
o Platon = un aristocrate athénien qui vit à l’époque de la décadence d’Athènes
o Aristote = un macédonien qui vit à l’époque de la disparition d’Athènes
les conquêtes d’Alexandre le Grand (roi de Macédoine dont Aristote fut le précepteur) vont
instaurer un Empire dans lequel les Cités n’auront plus leur place
- Aristote = élève ‘infidèle’ de Platon :
o Platon veut nous élever à la contemplation du Monde des Idées
Aristote ramène les idées dans les mots et dans les choses ; il ramène le regard du philosophe sur
terre
o le discours de Platon prenait la forme d’une dialectique ascendante
celui d’Aristote sera descriptif et discursif
il ne s’agit plus de voir mais de concevoir
il s’agit de découvrir, par le langage, l’essence cachée des choses
il s’agit de travailler et non plus de contempler
l’homme est doué de raison : intelligence (en puissance)
le monde est ordonné : intelligible (en puissance)
l’homme peut connaître le monde : acte de l’intelligence (travail)
tel est le réalisme d’Aristote qu’on opposera à l’idéalisme de Platon
- Aristote constate, lui aussi, le désordre dans lequel se trouve la Cité
il veut, lui aussi, sauver la Cité
et il veut, lui aussi, la sauver par la philosophie : le recours à la raison est le seul moyen
à condition cependant qu’on l’adapte aux exigences de ce monde-ci
au lieu de chercher à construire le modèle d’une Cité idéale
Aristote va s’efforcer de sauver la Cité qui existe
il s’intéresse aux différentes Constitutions ; il les critique
il s’y intéresse surtout pour analyser le genre de vie qu’elles déterminent
car ce qui intéresse avant tout Aristote, c’est l’homme
l’homme irréductible au citoyen
- l’homme
o « animal communautaire (comme beaucoup d’animaux)
o « animal rationnel » (la différence spécifique qui fait de lui un homme : la raison)
o « animal politique par nature » (c’est dans la Cité qu’il réalise le plus parfaitement sa nature
d’animal communautaire et rationnel)
animal social, animal rationnel, animal politique par loi naturelle
la loi naturelle c’est la justice générale inscrite au cœur de toutes les choses (non écrite)
mais il y a, dans la nature (par loi naturelle) des zones d’indétermination
c’est dans ces zones que va pouvoir s’insérer la raison humaine
=> liberté de l’animal rationnel – liberté d’un animal politique
‘justice légale’ : lois écrites par l’homme
lois humaines qui ne seront justes que dans la mesure où elles s’inscrivent dans la
droite ligne de la justice générale
juste = le « juste milieu » entre loi naturelle et situation concrète
vertu de prudence
- L
A
P
OLITIQUE
va examiner l’« animal communautaire » qu’est l’homme
o Aristote commence par le commencement : la maisonnée
première communauté naturelle
un chef de famille despotès autour duquel s’ordonnent trois relations inégales
relation conjugale
relation père – enfant
relation maître – esclave
trois relations inégales mais naturelles donc essentiellement justes
elles s’exercent par conséquent au bénéfice des deux parties
o il passe ensuite à la Cité
la Cité, c’est la communauté ultime car c’est là que l’homme réalise le plus parfaitement sa
nature d’animal communautaire et rationnel
le citoyen, c’est celui qui participe activement au gouvernement de la Cité
seul le chef de famille est citoyen : c’est donc lui qui possède le plus parfaitement
la raison, c’est lui qui réalise le plus parfaitement sa nature d’animal rationnel et
communautaire
=> les relations inégales entre le chef de famille (despotès) et sa femme, ses
enfants, ses esclaves
o Aristote procède alors à une étude comparative des sociétés et des systèmes politiques
il reprend, à sa manière, la classification platonicienne
il ne s’agit plus d’énoncer une logique de la décadence
mais de constater qu’il existe trois bons régimes qui, chacun, peut se pervertir en
mauvais régime à partir du moment à ceux qui gouvernent ne le font plus dans
l’intérêt de la Cité mais dans leur intérêt propre
o monarchie → tyrannie (pouvoir d’un seul)
o aristocratie → oligarchie (pouvoir d’une classe privilégiée)
o
république → démocratie (au sens péjoratif de démagogie)
quel sera le meilleur régime ?
en droit, le meilleur régime est la monarchie
o mais une monarchie ‘prudente’ gouvernant comme le père de famille
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