L`enseignement explicite

publicité
L’enseignement explicite
Annie Pourtier Conseillère pédagogique
Inspection de l’Education nationale de Bourgoin-Jallieu 1
Les pratiques d’enseignement en classe sont les premiers déterminants des
apprentissages. Les recherches sur les effets maîtres conduites dans les années 1960-1970 ont
démontré que les acquisitions des élèves dépendent de ce qui se passe dans les classes et
notamment des pratiques d’enseignement. Toutes les pratiques pédagogiques n’ont en effet
pas les mêmes effets sur les élèves.
Ainsi, les résultats des élèves peuvent-ils varier selon la classe dans laquelle ils sont scolarisés
et les pratiques pédagogiques sont-elles fréquemment associées à de meilleurs résultats. L’une
des dimensions de l’effet maître pourrait « résider dans le caractère plus ou moins explicite
de son enseignement. » (Bianco, M. Bressoux, P. 2009, P2). Face à cela, il
convient
d’identifier et de promouvoir des pratiques d’enseignement efficaces et efficientes au service
de la réussite scolaire de tous les élèves.
L’enseignement traditionnel majoritairement expositif décrit comme « reléguant les
élèves à un rôle passif, réduisant leur activité en classe à la mémorisation de données à
réciter à l’enseignant, et facilitant surtout l’acquisition d’habilités de niveau taxonomique
inférieur » est contesté par les chercheurs (Gauthier, C. Dembélé, M. 2004, P1). Pour autant,
il demeure une pratique dominante dans les classes.
L’enseignement direct ou explicite qui conçoit le savoir comme un processus en
construction se présenterait alors comme une alternative possible.
1
Dans les faits, l’enseignement « traditionnel » conçu comme l’enseignement magistral et
l’enseignement explicite sont à tort trop souvent associés. Des principes fondamentaux les
opposent pourtant.
Figure 1.
Enseignement
traditionnel
Enseignement direct
▪ Enseignement magistral
▪ Visée : transmission du contenu
▪ Objectifs non énoncés
▪ Activités faiblement structurées
▪ Engagement des élèves dans la tâche lors de la phase
d'exercices
▪ Feedback à la fin de la phase d'exercice
▪ Vérification de la compréhension à la fin de la phase
d'exercices
▪ Atmosphère favorisant le contrôle par l'enseignant du travail
de l'élève
▪ Démarche structurée et systématique
▪ Visée : compréhension et maintien en mémoire des notions et
des procédures
▪ Objectifs précisés et pratiqués
▪ Activités fortement structurées
▪ Haut niveau d'engagement des élèves dans la tâche
▪ Feedback immédiats lors de la phase de pratique guidée
▪ Vérification de la compréhension en cours de séquence
▪ Atmosphère favorisant le dialogue et la responsabilité
L’enseignement magistral repose sur la transmission directe de contenus d’enseignement.
L’enseignement direct explicite n’est, quant à lui, pas un simple enseignement traditionnel
dans la mesure où il n’est pas une simple transmission de contenu. Il prône la compréhension
des savoirs et des savoir-faire et leur maintien en mémoire. La pédagogie traditionnelle
n’autorisera une vérification de la compréhension de la matière enseignée que lors de phase
dite d’exercisation, l’enseignement explicite s’attachera à vérifier le degré de compréhension
de l’apprenant dans l’étape de la pratique guidée. L’enseignement direct explicite est donc
plus axé sur la vérification de la compréhension par des feedback réguliers, non pas au terme
de l’enseignement, mais tout au long de celui-ci, particulièrement lors de la phase guidée par
l’enseignant. Plus axé sur la compréhension, il se préoccupe d’énoncer et d’activer toute
information permettant aux élèves de se construire une représentation mentale adaptée de
2
l’apprentissage en développant ainsi leur compétence en matière de compréhension.
L’enseignement direct explicite doit en outre doter les élèves de stratégies et de procédures
nécessaires dans le traitement de tâches complexes. L’explicitation et l’enseignement des
stratégies et des procédures facilitera alors le traitement de la situation par l’élève. Plus
structuré, plus systématique il est donc plus axé sur le maintien en mémoire des notions et
procédures. Fortement orienté vers la tâche, il s’inscrit dans une atmosphère paisible qui
s’oppose à une atmosphère de contrôle.
Les travaux de Brophy et Good et les travaux de Rosenshine font l’hypothèse que
l’enseignement direct a des effets positifs sur les acquisitions des élèves. Pour Good (1979),
cela signifie un enseignement actif (active teaching) qui suppose de la part de l’enseignant
qu’il formule et coordonne entre eux des objectifs d’apprentissage, qu’il évalue activement les
progrès des élèves et qu’il fasse fréquemment des présentations en classe en montrant aux
élèves comment réaliser le travail. A l’inverse, si l’enseignant ne présente pas activement le
contenu à étudier, s’il ne supervise pas le travail sur table des élèves, s’il ne rend pas les
élèves responsables en leur demandant de rendre compte de leur travail alors il ne s’agit pas
d’un enseignement direct.
Les différentes étapes de l’enseignement direct
 PHASE 1 : MISE EN SITUATION (5 minutes)
Après avoir identifié les objectifs d’apprentissage, l’enseignant présente aux élèves les
connaissances et les compétences essentielles à acquérir.
 PHASE 2 : MODELISATION (10 minutes)
L’enseignant expose longuement les notions essentielles à maîtriser.
 PHASE 3 : PRATIQUE GUIDEE (20 minutes)
Elle s’opère au niveau du groupe classe ou de groupes d’élèves plus restreints.
Les élèves, dirigés par l’enseignant, procèdent à des manipulations dans le cadre d’un
travail collectif, par groupe, individuellement
 PHASE 4 : PRATIQUE AUTONOME (20 minutes)
Ce n’est que lorsque les phases de modélisation et de pratiques dirigées ont permis une
maitrise suffisante de la notion, que les élèves procèdent à des exercices individuels.
Dans le cadre de l’enseignement direct, l’enseignant, après avoir identifié les objectifs
d’apprentissage, présente aux élèves les connaissances et compétences essentielles à acquérir.
Le goût pour les apprentissages dépend en effet du sens des savoirs et de celui du travail
scolaire, c’est-à-dire de la façon dont l’enseignant va concevoir les situations didactiques qu’il
3
proposera aux élèves et de la lisibilité qu’il voudra bien en donner (Perrenoud, P, 1985). Cette
première phase est nommée phase de mise en situation. Dans un second temps, l’enseignant
expose longuement les notions essentielles à maîtriser. Il s’agit de la phase de modélisation.
Dans un troisième temps, les élèves, dirigés par l’enseignant, procèdent à des manipulations
dans le cadre d’un travail le plus souvent collectif. Cette phase de pratique dirigée s’opère au
niveau du groupe classe ou de groupes d’élèves plus restreints. Ce n’est que lorsque les
phases de modélisation et de pratiques dirigées ont permis une maîtrise suffisante de la notion,
que les élèves procèdent à des exercices individuels dans le cadre d’une phase de pratique
autonome (Bissonnette, Richard & Gauthier, 2005).
Les activités proposées aux élèves sont très structurées et ponctuées de fréquents feedback
immédiats. Des révisions régulières, chaque semaine et pendant plusieurs mois, autoriseront
une automatisation des savoirs enseignés.
L’enseignement direct s’attache donc à promouvoir un engagement important des élèves dans
la tâche. L’enseignant, conscient des capacités limitées de la mémoire de travail des
apprenants, doit permettre d’une part aux élèves de se recentrer sur les informations les plus
importantes et s’assurer d’autre part que chacune des étapes du processus d’apprentissage est
maîtrisée avant d’en ajouter une nouvelle. Ainsi, l’apprentissage sera plus aisé dès lors que les
apprentissages précédents seront automatisés.
Figure 2.
Enseignement direct : les principes à respecter
▪ Ne passer à la phase suivante que s’il y a une maîtrise suffisante de la phase précédente
et tout particulièrement maîtriser la notion avant de passer à la pratique dirigée et à la pratique
autonome.
▪ Pratiquer des révisions régulières de la notion, hebdomadaires et mensuelles, afin
d’assurer une accessibilité ou une automatisation.
▪ Alléger la « mémoire à court terme » et favoriser le transfert à la « mémoire à long terme
»…
-
en insistant sur les éléments importants
-
en procédant par petites étapes dans le cadre d’un apprentissage très structuré
-
en faisant des rappels régulièrement, des feedback, des révisions
-
en mettant l’accent sur des objectifs académiques
-
en privilégiant un haut niveau d’engagement des élèves sur la tâche.
4
5
Téléchargement