La planète des chrétiens - Hors-série n°19 47
de rideau ou iconostase, de séparation avec le
sanctuaire. De même pour la communion –qui
ne se retrouve pas sous la même forme dans les
liturgies orthodoxes– est composée de pain
azyme qui a exactement le même aspect que
l’hostie latine.
Les liens avec Rome
Les maronites ont noué avec Rome des liens
particuliers et sont en ce sens une exception par
rapport aux autres Églises d’Orient. Si l’Église
maronite fait remonter sa propre histoire au
VIIesiècle, avec l’apparition des premiers
patriarches, elle fait son entrée dans le giron de
Rome à la n du XIIesiècle (en 1182), voire plus
certainement dans les siècles suivants. En 1584,
le pape GrégoireXIII fonde à Rome le Collège
maronite visant à former les séminaristes venus
d’Orient et surtout à développer l’étude des
langues orientales en Europe. C’est le début de
ce que l’on appelle l’«orientalisme». Depuis
cette date, les liens ne cessèrent de se raermir.
Pour les autres Églises de l’Orient catholique,
cela s’est passé diéremment.
Leur histoire se rattache en eet à la signa-
ture, en 1536, du traité des Capitulations par
FrançoisIer et Soliman le Magnique. Outre
des considérations commerciales et poli-
tiques, ce traité conait à la France royale la
protection des chrétiens de l’Empire ottoman.
Cela s’eectuait non sans une certaine idée de
supériorité du christianisme occidental sur les
Églises d’Orient, considérées comme schis-
matiques et arriérées. Le premier patriarche
syriaque catholique fut par exemple consa-
cré à Alep en 1662 avec l’appui de la France,
par l’intermédiaire de son ambassadeur Fran-
çois Picquet. Les missions catholiques latines
se développèrent dans tout l’empire ottoman
pour ramener le troupeau égaré sous l’auto-
rité romaine. Leurs motivations se trouvaient
doublement justiées: améliorer les condi-
tions de vie de ces chrétiens vivant sur les
terres de l’Ancien Testament et développer
parallèlement l’inuence de l’Église de Rome
dans la région. Jusqu’à notre époque, ces
diérences se sont beaucoup atténuées, face à
l’adversité et à la tentation de l’exil.Q
Les voyageurs de la n du XIXesiècle,
qui découvraient pour la première
fois cette région du Sud-Est de la
Turquie, parlaient d’un «mont Athos
de l’Orient» pour décrire ce plateau
calcaire, surmonté d’une quantité
d’églises et de monastères des premiers
siècles du christianisme. En Syriaque
Tur Abdin veut dire:«La montagne
des serviteurs de Dieu.» Il s’agit d’une
province religieuse ancienne toujours
occupée en partie par des moines
et des villageois parlant une forme
d’araméen. Région enclavée dans des
collines à proximité du Tigre et de la
Syrie, elle forme toujours un endroit
à l’écart où se perpétuent la liturgie
et les rituels de l’Église syriaque. Si le
fond religieux s’attache d’une certaine
manière au vieux fond orthodoxe,
préchalcédonien en fait –en référence
au concile de Chalcédoine de 451– il
n’en demeure pas moins une exception
dans le paysage proche oriental.
Ce sont une poignée de moines qui
entretiennent la tradition dans des
édices superbes et méconnus où
tout chrétien peut se retrouver et
admirer la beauté des cérémonies
et de l’hospitalité monastique. Les
missionnaires dominicains ont bien
tenté certaines incursions au départ
de leur centre de Mossoul aux siècles
passés, mais sans réel succès. La
montagne sainte restant un havre pour
la liturgie d’Antioche.
Q LES DERNIERS ARAMÉENS DE TUR ABDIN
LA PLANÈTE DES CATHOLIQUES