Une mutation sur le gène Lmna de la lamine A serait responsable

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Une mutation sur le gène Lmna de la lamine A serait
responsable du syndrome de Hutchinson-Gilford, ou
progeria, caractérisé par un vieillissement prématuré
Le syndrome de Hutchinson-Gilford, ou progeria, est une
maladie génétique extrêmement rare, mais très spectaculaire.
Sa prévalence serait de l’ordre de 1 pour 5 millions de
naissances, et seule une centaine de cas a été identifiée
jusqu’à présent. La progeria se caractérise par une
accélération des phénomènes de sénescence qui conduit à la
mort, souvent par maladie cardiovasculaire, autour de 13 ans.
Ces enfants présentent très précocement un vieillissement de
l’appareil circulatoire se traduisant par une rigidification des
vaisseaux, une insuffisance cardiaque et le développement de
la maladie athéromateuse. L’aspect de ces malades
correspond à celui d’un vieillard avec une perte prématurée
des cheveux, un amincissement de la peau, l’apparition de
rides, et une réduction de taille. Leur appareil locomoteur est
également touché avec une fragilisation du squelette et des
symptômes rhumatologiques. Le déterminisme génétique de
cette maladie restait jusqu’à présent inconnu.
Trois articles scientifiques ont été publiés presque
simultanément par des équipes différentes dans les revues
Science et Nature. Le premier d’entre eux par ordre
chronologique émane d’une équipe française, les deux autres
d’équipes américaines. Leurs résultats sont remarquablement
convergents.
Selon une approche maintenant classique de génétique
formelle, ces investigateurs ont mené une recherche de
polymorphismes sur des microsatellites dans des fibroblastes
prélevées chez des sujets atteints du syndrome de
Hutchinson-Gilford. Ils sont rapidement arrivés à
l’identification d’une mutation sur le chromosome 1 dans une
région contenant près de 80 gènes déjà connus. Parmi ceuxci, celui de la lamine A a particulièrement retenu leur
attention. La lamine A est une protéine de structure majeure
du noyau cellulaire codée par le gène Lmna. Elle est présente
sur la face interne de l’enveloppe nucléaire et assure la liaison
avec la chromatine. Elle participe aussi à la structure des
pores nucléaires et joue un rôle important dans la
reconstruction du noyau lors de la division cellulaire. Elle
serait également impliquée dans la régulation de l’expression
de certains gènes par l’intermédiaire de ses interactions avec
des facteurs de transcription. Des mutations de la lamine A
avaient déjà été mises en évidence dans différentes
pathologies neuromusculaires et cardiovasculaires.
Le séquençage du gène Lmna chez les enfants atteints de
progéria a permis de mettre en évidence une mutation
ponctuelle sur une base correspondant à la substitution d’un
résidu proline par une leucine en position 530. Ce trait
génétique est absent chez les parents de ces enfants, indiquant
que cette mutation n’est pas d’origine héréditaire mais
apparaît bien de novo.
Fort de cette découverte une équipe américaine a créé une
lignée de souris transgéniques porteuses de cette mutation. A
la naissance les souris homozygotes étaient semblables aux
animaux hétérozygotes. Dès les premiers jours, elles
montraient un retard de croissance marqué. De plus, ces
souris porteuses de la mutation avaient des signes de
vieillissement prématuré comparables à ce qu’on peut
observer dans le syndrome de Hutchinson-Gilford chez
l’homme, aussi bien au niveau de la peau que des os, du cœur
ou des muscles squelettiques. Elles décédaient au bout de 4 à
5 semaines, au lieu de 18 à 24 mois chez les souris témoins.
En quoi la découverte d’une mutation sur le gène Lmna de
la lamine A, au-delà de l’explication d’une maladie génétique
rare, nous éclaire sur les mécanismes physiologiques du
vieillissement ? On peut, par exemple, s’interroger à contrario
sur le taux d’expression de la lamine A chez les centenaires
ou toute personne présentant une vieillissement réussi. On
pourrait également tenter de corréler ces taux d’expression ou
les mutations somatiques de la lamine A à la longévité des
individus en général. Il n’est pas exclu enfin que le
vieillissement normal ne soit pas directement lié à l’action de
la lamine A. On notera par exemple que les sujets atteints du
syndrome de Hutchinson-Gilford, tout comme les souris
transgéniques porteuse de la mutation, ne présentent pas de
cataracte, d’augmentation du nombre de cancers ou de déclin
cognitif, autant de signes courants de sénescence chez
l’homme. Il est probable en revanche que cette découverte
permettra de progresser dans la recherche d’un mécanisme
plus général de sénescence lié à la multiplication ou la
réparation cellulaire.
Taux de survie des souris (en % de la population initiale)
Témoins
Transgéniques Lmna 530
10 jours
100
100
20 jours
100
80
30 jours
100
20
40 jours
100
0
B. Corman
Successful Aging Database
De Sandre-Giovannoli A, Bernard R, Cau P, Navarro C, Amiel J, Boccaccio I, Lyonnet S, Stewart CL, Munnich A, Le
Merrer M, Levy N. Lamin A Truncation in Hutchinson-Gilford Progeria. Science. 2003 Apr 17 (Epub ahead of print)
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A, Pak E, Durkin S, Csoka AB, Boehnke M, Glover TW, Collins FS. Recurrent de novo point mutations in lamin A cause
Hutchinson-Gilford progeria syndrome. Nature. 2003;423:293-298.
Mounkes LC, Kozlov S, Hernandez L, Sullivan T, Stewart CL. A progeroid syndrome in mice is caused by defects in Atype lamins. Nature. 2003, 423:298-301
©2003 Successful Aging SA
Af 139-2003
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