L’histoire
Sacrée Mariette, la bonne d'Ariane ! Elle raconte en brillant l'argenterie ce qu'elle
vit de sa place de domestique : elle voit tout, elle sait tout. Elle est profondément
humaine, son langage est cocasse. Elle a vu grandir Ariane, la voit comme sa fille
et suit l'évolution de sa passion pour Solal tout en livrant ses réflexions sur la société...
Et de plus, elle chante. L’écriture majestueuse et drôle d’Albert Cohen se prête au
théâtre : le soliloque est aussi une adresse à sa soeur, à Ariane, au monde, donc à
nous.
Extraits
… donc, comme je vous disais de l’ouvrage j’en ai battu, allez il y a pas beaucoup
de jeunettes qu’elles en auraient fait autant comme la vieille Mariette que pour-
tant elle a pas toujours été vieille allez, petite et boulotte que je suis maintenant et
des rides qu’on dirait que je suis une pomme oubliée à la cave vu que soixante
ans et plus,…
… ce qui faudrait moi je le sais, mais le gouvernement ils sont trop occupés à faire
leur beurre, ce qui faudrait à mon idée c’est qu’y ait des petits, d’accord, mais
ayant de quoi vivre en bonne vieillesse, et puis des moyens, d’accord aussi, ça fait
marcher le commerce, mais pas des gros gros avec des sous à savoir pas qu’en
faire, Agha Khân et miyardaires d’Amérique, et princesses de ci et de ça qu’on
voit sur les illustrés, ayant tout de trop, colliers et perles précieuses, et si on les vole
s’en foutent, rigolent d’un air de dire moi ça me fait rien vu que j’ai de quoi et je
m’en rachèterai d’autres, toujours à danser, montant à cheval d’un air de dire
tout m’est dû, que c’est un crime devant Dieu bien plus qu’un voleur, vu que sou-
vent c’est pas sa faute le pauvre, sa jeunesse de misère et le père toujours noir
rentrant le soir en brutalité, tandis que les princesses qu’est-ce qu’elles ont fait de
mérite dans la vie sauf que le roi une nuit il a carambolé la reine, et total tout est
dû à mademoiselle la princesse,…
L’auteur, Albert Cohen
Albert Cohen est né à Corfou (Grèce) en 1895 dans une famille de commerçants
juifs qui émigre à Marseille en 1900. Il y devient l’ami de son condisciple Marcel Pa-
gnol, puis rejoint Genève en 1914 où il obtient une licence en Droit. Ottoman de
naissance, il est naturalisé Suisse en 1919. En 1925, il est délégué du mouvement
sioniste auprès de la Société des Nations et entre au Bureau International du Travail.
Sa carrière de diplomate se poursuit notamment pendant la Seconde Guerre Mon-
diale dans le gouvernement du Général de Gaulle à Londres ; en 1945, il est nommé
conseiller juridique au Comité intergouvernemental pour la protection des réfugiés,