Résumé de la conférence sur le cancer de la thyroïde Le 12 janvier 2016, le docteur Cécile Chougnet, de l’hôpital Saint-Louis a tenu une conférence d’une heure sur le cancer de la thyroïde. Le cancer de la thyroïde ne représente que 2% des cancers et est donc un cancer rare. Il y en a eu environ 8000 nouveaux cas en France en 2012. Cependant, étant donné qu’il touche volontiers des sujets jeunes, que plus de 90% des patients atteints survivent 10 ans et davantage, même s’ils ne sont pas guéris, il y a de nombreuses personnes impliquées. On estime à 70.000 la prévalence en France de personnes ayant été touchées par cette maladie, ce qui nécessite une activité médicale importante. Il existe 4 variétés de cancer de la thyroïde. Les formes différenciées, papillaires ou vésiculaires représentent 90% de ces cancers et seront traitées simultanément dans la conférence. Les deux autres formes, cancer anaplasique et cancer médullaire ne seront pas traitées dans la conférence, même s’il s’agit des formes les plus graves responsables de la majorité des décès par ce cancer. Le pronostic est en effet le plus souvent excellent avec plus de 80% de guérisons. De plus la majorité des formes non guéries sont sans menace vitale et compatibles avec une survie normale. Dans ce contexte, la tendance évolutive des recommandations émises par les experts internationaux pour la prise en charge des cancers de la thyroïde est dans le sens de l’allègement des traitements afin de protéger la qualité de vie des patients dont la survie prolongée est attendue. CHIRURGIE La chirurgie est le traitement curateur du cancer de la thyroïde. Sa qualité est nécessaire pour garantir les chances de guérison et elle doit être effectuée par un chirurgien expert de cette pathologie. Jusqu’en 2015, les recommandations internationales étaient l’exérèse de la totalité du corps thyroïde ainsi que des chaines ganglionnaires impliquées dans la maladie, près de la ligne médiane ou latérocervicales. Il y avait parfois plusieurs temps chirurgicaux pour être certain d’avoir réalisé cette recommandation, et en particulier d’avoir réalisé une exérèse tumorale complète et celle de tous les ganglions même non envahis par la tumeur. Aujourd’hui, d’une part parce que les moyens d’imagerie moderne, et notamment d’échographie, permettent de diagnostiquer de très petites lésions, inférieures à 2 cm (T1), d’autres part parce que l’on sait que la survie pourra être très prolongée en décennies après une chirurgie moins mutilante et même incomplète, on a souvent recours à une chirurgie plus conservatrice, tant pour le corps thyroïde que pour les aires ganglionnaires, notamment latéro-cervicales. Il n’y a plus de « règle » applicable à tous, chaque décision dépendant de chaque cas particulier, et prise avec l’expertise du chirurgien spécialisé. On prendra en compte notamment le risque de récidive, quantifié comme faible, moyen ou élevé selon la taille de la tumeur primitive, certains paramètres histologiques, les atteintes ganglionnaires et les lésions secondaires éventuelles. IODE 131 L’atome d’iode est indispensable pour fabriquer l’hormone thyroïdienne et le corps thyroïde capte à cet effet tout l’iode qui passe dans l’organisme. Les cancers différenciés de la thyroïde peuvent aussi capter l’iode. L’iode 131 radioactif permet alors a) de repérer par scintigraphie du tissu tumoral dans le cou ou à distance, b) de détruire par la radioactivité d’une part du tissu thyroïdien normal persistant après la chirurgie mais dont on souhaite la disparition, d’autre part de détruire du tissu tumoral résiduel où qu’il soit dans le corps à partir du moment où il capte l’iode (ce qui n’est pas toujours le cas dans les formes les plus évoluées). C’est pourquoi, classiquement, un traitement par l’iode 131 était le traitement de choix de la maladie métastatique si la tumeur captait l’iode, mais était aussi un traitement complémentaire de toute chirurgie à visée curative, aussi bien pour détruire du tissu tumoral persistant même imperceptible que du tissu thyroïdien normal résiduel, la disparition de tout tissu thyroïdien normal étant alors considérée comme indispensable. Dans ce domaine également, la règle universelle a disparu et l’indication d’iode radioactif postopératoire peut être récusée ou confirmée mais à une dose variable en fonction des facteurs de risque de récidive. Ici encore le traitement va être dorénavant individualisé, personnalisé (tableau). HORMONOTHERAPIE ET SURVEILLANCE La disparition de tout tissu thyroïdien du fait de la chirurgie éventuellement complétée par le traitement à l’iode 131 évoquée ci-dessus rend nécessaire une compensation thérapeutique par hormone thyroïdienne (levothyrox), l’organisme ne pouvant pas en être totalement privé. Cette compensation a aussi pour conséquence et objectif d’abaisser le taux de TSH, l’hormone hypophysaire stimulatrice de la thyroïde, qui pourrait stimuler la prolifération de cellules tumorales résiduelles. Naguère, on considérait qu’il valait mieux surdoser l’organisme en hormone, pour être sûr d’avoir un taux bas ou nul de TSH. Là encore, ce n’est plus considéré aujourd’hui comme une nécessité. Même si l’éradication de tout tissu thyroïdien n’est plus considérée comme impérative en particulier dans les formes à risque faible de récidive, la surveillance du taux de TSH et aussi de la thyroglobuline, protéine de transport de l’hormone thyroïdienne, font partie des paramètres pouvant être soumis à la surveillance. La surveillance des patients ayant été traités pour un cancer de la thyroïde les implique tous car même les risques faibles de récidive ne sont jamais nuls et peuvent se manifester après de très nombreuses années. Cependant, les modalités de surveillance, rythme des consultations médicales et des examens complémentaires éventuels doivent là encore être adaptés à chaque cas particulier et en fonction de la quantification du risque personnel de récidive, afin de ne pas imposer des contraintes trop pesantes a des patients jeunes ayant une longue espérance de survie et un risque faible de récidive ou d’évolution menaçante. CONCLUSION Le cancer différencié de la thyroïde est l’un des cancers les moins graves à ce jour. Les recommandations sur la prise en charge thérapeutique visent aujourd’hui à limiter autant que possible les effets secondaires du traitement ce qui nécessite l’adaptation du programme thérapeutique à chaque cas particulier.