Isotopie thérapeutique en endocrinologie L a spécificité thyroïdienne de la captation de l’iode a permis d’utiliser de longue date les isotopes radioactifs de cet alcaloïde pour le diagnostic et le traitement des affections de la thyroïde. Le premier aspect a vu son champ d’intérêt se réduire parallèlement à la mise à disposition du thérapeute de nouveaux outils d’investigation qui permettent d’apprécier plus finement la morphologie (échographie), la nature (cytologie) et la fonctionnalité (TSH dite ultrasensible) thyroïdiennes. L’espace de la scintigraphie diagnostique devrait donc essentiellement inclure les problèmes posés par les nodules thyroïdiens associés à un abaissement du taux de TSH plasmatique et au bilan d’extension des carcinomes thyroïdiens différenciés après thyroïdectomie totale. Dans ce dernier contexte, la détermination de la thyroglobulinémie après stimulation par la TSH humaine recombinante (rhTSH) pourrait se substituer à l’investigation isotopique, qui ne viendrait alors qu’en deuxième ligne si le taux de thyroglobuline en indique la nécessité, et remplacer avantageusement la classique méthodologie du sevrage en T4 pour le suivi et le traitement isotopique postchirurgical de ces carcinomes. L’article de C. Corone traite de cette approche avec la rhTSH en soulignant son intérêt (de confort et carcinologique), ses avantages et ses limites dans le cadre particulier du cancer différencié de la thyroïde. Dans le deuxième volet de ce dossier, S. Bardet fait le point sur les différents aspects de la prise en charge du cancer différencié de la thyroïde par l’iode 131, en 2004. Compte tenu de son pouvoir irradiant local et de sa spécificité de captation tissulaire, l’iode 131 reste l’isotope clef du traitement postchirurgical des cancers différenciés spécifiquement thyroïdiens. Des astuces technologiques permettent néanmoins d’utiliser ses propriétés irradiantes dans d’autres cadres pathologiques. L’exemple le plus démonstratif est celui de la métaiodobenzylguanidine couplée à l’iode 131, qui est utilisée à titre d’outil diagnostique ou d’agent thérapeutique dans plusieurs variétés de tumeurs neuroendocrines. La spécificité n’est plus apportée par l’isotope, mais par le véhicule métabolique auquel il est lié. Cette méthodologie, qui a pour objectif d’allier deux molécules, l’une irradiante, l’autre porteuse d’une spécificité, permet d’utiliser, ou d’offrir en perspective, de nouvelles armes thérapeutiques pour certaines tumeurs neuroendocrines. Cet aspect à la fois actuel et prometteur est exposé dans l’article de F. Borson-Chazot, troisième volet de ce dossier. Ainsi, si la chirurgie reste l’arme de première ligne pour les tumeurs malignes thyroïdiennes et celles du tissu neuroendocrinien, les modalités et la place occupée par l’approche isotopique, qui répond à une logique fondée sur une irradiation tissulaire spécifique (dont la puissance diffère selon qu’elle est utilisée pour le diagnostic ou la thérapeutique), se précisent, se diversifient et ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques. ■ J.M. Kuhn Service d’endocrinologie et des maladies métaboliques, CHRU hôpital Bois-Guillaume. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (VIII), n° 6, novembre/décembre 2004 et (IX), n° 1, janvier/février 2005 199