Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIX - n° 8 - octobre 2015
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Éditorial
tiques sont à formuler pour l’évaluation de l’impact
des médicaments (voir “Médicaments et fonction thy-
roïdienne : des interactions complexes”, pp. 224-9).
S’il est une évidence de l’influence de l’environnement
sur la thyroïde, c’est bien l’effet de la charge iodée.
Historiquement, la reconnaissance tardive des états de
carence iodée sévère a constitué un événement consi-
dérable pour les populations des Alpes, des Andes, de
l’Afrique équatoriale et subtropicale et de l’Amérique du
Sud, qui souffraient dramatiquement du crétinisme et
des goitres endémiques. Ailleurs a été prise en compte
l’influence délétère du déficit iodé modéré, contribuant
à la goitrogenèse, à la nodulogenèse thyroïdienne, à la
prévalence accrue de cancers thyroïdiens moins diffé-
renciés, au déficit intellectuel de l’enfant. Sous l’influence
de fortes personnalités (John Dunn aux États-Unis,
François Delange en Europe) et de plusieurs organismes
(Organisation mondiale de la santé, Conseil international
de lutte contre les troubles dus à la carence en iode
[ICCIDD]) est née une prise de conscience au niveau
des États de la nécessité de corriger la déficience iodée.
Celle-ci est maintenant obtenue chez plus des 2/3 de la
population mondiale, le déficit continue à se réduire, et
l’on observe même dans certaines contrées une légère
surcharge iodée (4). En l’affaire, l’homme a amélioré
l’environnement et réduit les risques thyroïdiens. Pour
autant, les goitres n’ont pas été éradiqués, et la situation
du déficit iodé des femmes enceintes reste pour l’instant
très imparfaitement résolue.
On ne peut non plus passer sous silence l’extraordinaire
capacité que manifestent les espèces à s’adapter aux
modifications de l’environnement. La vie, dit-on, naquit
en milieu marin, là où la température et la disponibilité
de l’iode sont constantes. Lorsque la vie s’aventura sur
terre, il fallut bien s’adapter pour disposer en perma
-
nence d’iode et d’hormones thyroïdiennes, indispen-
sables à la thermorégulation et à l’homéothermie.
Ainsi s’explique sans doute l’originale structure vési-
culaire de la thyroïde où le produit de sécrétion est
stocké et en permanence disponible. Le goitre lui-même
est apparu comme une modalité adaptative, majorant
la capacité de concentration de l’iode et de stockage
hormonal. De même, le degré de pigmentation cutanée
s’est adapté au niveau d’ensoleillement.
En définitive, en la matière, la thyroïde apparaît
d’abord comme la victime de sa capacité à être éva-
luée, morphologiquement et fonctionnellement,
bien mieux que toute autre glande endocrine, ce qui
l’a placée comme la cible privilégiée des polluants.
Pourtant, les atypies observées n’ont pas nécessaire-
ment l’évidence d’effets indésirables, ni pour la thy-
roïde elle-même ni pour l’individu. Les évaluations
doivent être poursuivies.
La correction progressive de la carence iodée, au cours
des dernières décennies, démontre bien que les progrès
des connaissances et la meilleure maîtrise de l’envi-
ronnement par l’humanité représentent un gain pour
la thyroïde.
Jean-Louis Wémeau
(CHRU de Lille)
Rachel Desailloud
(CHU d’Amiens)
1.
Brucker-Davis F, Hiéroni mus S,
Fénichel P. Thyroïde et environ-
nement. Presse Med. Accepté
pour publication.
2. Pearce SH, Brabant G, Dun-
tas LH et al. 2013 ETA Guideline:
management of subclinical
hypothyroidism. Eur Thyroid
J 2013;2(4):215-28.
3. Desailloud R, Wémeau JL.
Faut-il craindre le perchlorate
dans l’environnement ? Presse
Med. À paraître.
4. Andersson M, Karumbuna-
than V, Zimmermann MB.
Global iodine status in 2011
and trends over the past decade.
J Nutr 2012;142(6):744-50.
Références
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