DENUTRITION ET CANCER Pr Julien Mazières Unité d`Oncologie

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DENUTRITION ET CANCER
Pr Julien Mazières
Unité d’Oncologie Cervico-Thoracique
Service de pneumologie
Hôpital Larrey, CHU Toulouse
Introduction
La malnutrition atteint la majorité des patients porteurs d’une néoplasie. Il s’agit d’une
complication sous-estimée et négligée des traitements chirurgicaux et médicaux touchant de
plus en plus de patients. En effet les traitements antitumoraux s’adressent à des sujets souvent
âgés et fragiles, certains traitements de maintenance ou de thérapies ciblées s’administrent au
long cours et la gestion ambulatoire de la majorité des patients ne permet parfois pas d’assurer
une prise en charge diététique optimale.
La dénutrition est ainsi responsable d'une morbidité, en particulier infectieuse, accrue, et donc
d'une mortalité plus précoce. Ainsi, 5 à 20 % des patients atteints de cancer semblent décéder
directement de la cachexie en phase terminale du cancer.
Le suivi clinique et éventuellement biologique de l’état nutritionnel est un élément essentiel
de la surveillance post-opératoire, en cours de radiothérapie et entre les cycles de
chimiothérapie.
Les causes de la dénutrition
Les causes de la dénutrition chez le patient porteur d’un cancer bronchique sont multiples et
obéissent à différents mécanismes liés à la tumeur, à la réponse de l’hôte et aux traitements.
Un schéma résume la physiopathologie de la cachexie (figure 1).
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Figure 1.
La population à risque de dénutrition
Les principaux types de patients concernés sont :
- les patients atteints de tumeurs digestives, ORL et pulmonaires.
- les patients traités par chimiothérapie et souffrant de nausées, vomissements, douleurs
abdominales, mucite, infections, anorexie prolongée.
- les patients dont les champs d’irradiation incluent en partie le tube digestif
- les patients âgés ou ayant un état général altéré.
L’impact des traitements antitumoraux sur la nutrition
Chirurgie
Les actes chirurgicaux lourds, portant sur le tube digestif, entraînent une altération temporaire
des mécanismes du péristaltisme et de digestion responsables d’une carence d’apport.
De plus, l’acte chirurgical entraîne de nombreuses modifications métaboliques. On note une
élévation des dépenses énergétiques en post-opératoire avec augmentation des pertes azotées,
augmentation de la production de glucose, accélération de la lipolyse, augmentation de la
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protéolyse musculaire. De manière concomitante la synthèse des protéines inflammatoires est
augmentée. Les complications infectieuses, fréquentes, pérennisent cet hypercatabolisme.
Chimiothérapie
La chimiothérapie est très fréquemment associée à la perte de poids. En effet la majorité des
molécules utilisées ont un effet émétisant responsable d’une diminution d’apport alimentaire.
Ces traitements ont également une toxicité muqueuse responsable de mucite et de syndrome
diarrhéique pouvant être à l’origine de déshydratation et de dénutrition. Enfin, les
chimiothérapies favorisent les processus infectieux, sources d’hypercatabolisme.
Radiothérapie
La radiothérapie est responsable d’une atteinte directe des structures sensorielles
(radiothérapie ORL), sécrétoires (radiothérapie des glandes salivaires, du pancréas) et des
voies digestives (radiothérapie thoracique, oesophagienne, abdominale). La perte de poids
dans ce type de traitement doit être prévenue et surveillée attentivement.
Les conséquences de la dénutrition en cancérologie
La perte de poids est associée non seulement à une altération de la qualité de vie mais aussi à
une diminution de la survie.
Le retentissement de la dénutrition sur la qualité de vie des patients est bien démontré. Il
existe dans un premier temps une modification négative de l’image corporelle. De plus, la
dénutrition est associée à une duction des capacités fonctionnelles et du performance status
responsable d’une asthénie et d’une diminution des activités contribuant ainsi à une altération
de la qualité de vie.
La perte de poids est également un facteur reconnu de mauvaise réponse thérapeutique et
d’augmentation de la toxicité. Les complications post-opératoires sont plus fréquentes chez le
patient dénutri. Une perte de poids lors du traitement est associée à une moindre réponse à la
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chimiothérapie dans les cancers du sein. L’augmentation des complications et la moindre
efficacité de la chimiothérapie sont ainsi responsables d’une diminution de la survie chez les
patients dénutris. Ceci est bien démontré pour les cancers digestifs.
Nutrition en situation palliative
La prise en charge nutritionnelle se pose de manière cruciale lors de la phase palliative de la
maladie. La prise en charge nutritionnelle est alors définie comme un soin de support et
s'inscrit dans une prise en charge globale visant à maintenir ou restaurer le « bien-être » du
patient. Il est démontré que l'anorexie est un facteur de mauvais pronostic chez le patient
porteur de cancer évolutif au stade avancé.
Des conseils diététiques peuvent aider à l'enrichissement de la prise alimentaire et à la
meilleure gestion des symptômes gênant l'alimentation. Le maintien du plaisir éventuel de
l'alimentation orale est la priorité. La nutrition artificielle peut ralentir la dégradation
nutritionnelle, éviter la déshydratation et améliorer la qualité de vie de ces patients dont
l'alimentation orale adaptée est impossible. Dans nombre de situations, les bénéfices
symptomatiques ou fonctionnels sont à mettre en balance avec les effets néfastes d'une
technique invasive de nutrition artificielle. Lorsque l'espérance de vie du patient est inférieure
à 3 mois et l'atteinte fonctionnelle permanente sévère, la mise en route d'une nutrition
artificielle est plus discutée et doit être considérée au cas par cas.
Conclusion
L’approche nutritionnelle des malades porteurs de cancer doit être instituée et
poursuivie dans le cadre d'une prise en charge globale, pluridisciplinaire, visant à
l'amélioration de la qualité de vie ou des symptômes du malade. La démarche
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transdisciplinaire de l’oncologie moderne se doit d’intégrer l’évaluation et la prise en
charge nutritionnelle des patients avec la double récompense d’agir sur la survie et la
qualité de vie.
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