Coordination d`abord Rien sans,l`URSS Le maillon

publicité
EN AVANT SOUS
LE GLORIEUX DRAPEAU
DE LA
RÉVOLUTION D'OCTOBRE
de la Révolution d'Octobre ». Sur quoi
certains experts l'ont négligé. D'autres
exégètes pressés ont conclu, après
l'avoir lu, que e Hanoi se ralliait à
Moscou ». En fait, ce rapport Le
Duan, d'une extrême subtilité doit
être décodé : il faut savoir le lire.
D'abord, on n'y trouve pratiquement pas de violences verbales et,
dans l'état actuel de la• pensée
marxiste militante, c'est rafraîchissant.
On en relève une pourtant à l'endroit
des « révolutionnaires petits-bourgeois
et des trotskistes provocateurs et saboteurs e. Souvenir, sans doute, de la
liquidation d'un groupe de trotskistes
vietnamiens, en 1945.
Le Duan — donc parti nordvietnamien — proclame sa « ferme
conviction que le marxisme-léninisme
est invincible, que la révolution mondiale et k communisme vaincront
certainement ».
Il fait ensuite une analyse du mouvement révolutionnaire mondial, il
salue, au passage, les Cubains, niais
sans insister : « En Europe comme en
Asie ou en Afrnérique latine, à Moscou, à Pékin, comme à Hanoi à
Pyong-yang, à Berlin comme à La
Havane, plus d'un milliard d'hommes
sont en train de Marcher vers le
ommunisme en empruntant différentes méthodes de progression. »
Après la récente réunion de
l'O.LA.S. à La Havane, certains observateurs avaient cru comprendre
qu'Hanoi appréuvait un « troisième
communisme » dont le slogan aurait
été « Ni Moscou ni Pékin >>. Le tc.Xte
de Le Duan montre qu'il en est rien.
Les Vietnam;ens ont, sans aucun
doute, une immense sympathie pour
les Cubains (au Sens propre de sympathie : souffrir avec), mais il est
clair qu'ils ne suivent pas ceux des
castristes qui se battent pour faire
triompher ce « troisiéine communisme ». Si ce dernier prenait corps
et s'opposait nettement à Moscou ou
• à Pékin, ii serait, aux yeux des Vietnamiens, un « fractionnisme ».
impérialistes bellicistes de déclencher
une nouvelle guerre mondiale en vue
d'un nouveau partage des marchés. »
Le problème fondamental de la
stratégie révolutionnaire globale est
celui de l'offensive ou de la défensive.
Sur les Soviétiques, le rapport Le
Duan contient des passages très positifs et d'autres courtoisement négatifs. D'une part, M. Le Duan souligne fortement que « soviétique née de la Révolution d'Octobre » est « la première base historique de la révolution mondiale ». On
peut distinguer non seulement le coup
de chapeau conventionnel aux Soviétiques mais aussi un discret rappel
aux Chinois : « Pays agricole arriéré,
l'Union soviétique est devenue un pays
industriel d'avant-garde. » Et « Elle
a créé les conditions nécessaires au
succès de la révolution dans toute la
série des pays européens et asiatiques. » Autrement dit: sans l'U.R.S.S.,
rien n'est possible.
;
«. Coordination
d'abord
J'évoquais un jour devant un haut
fonctionnaire nord-vietnamien la doctrine Castro-Guevaro-Debrayiste des
« Viêt-nams partout ». Il répondit :
« Nous sommes, bien entendu, en faveur de routes les actions menées
contre l'impérialisme américain. C'est
évident. Mais on ne fait pas des
Viêt-nams n'importe comment. »
Lorsqu'on annonça à Hanoi la
mort de « Che » Guevara; les journaux
lui rendirent un hommage chaleureux,
_mais ils ne s'étendirent pas sur ses
doctrines. L'expérience cubaine est
certainement importante aux yeux des
_ Nord-Vietnamiens, mais certaines
doctrines (universalisantes, qui se
réclament du castrisme) ne sauraient ,
:
Pai; e 18 27 décembre 1967
,-
Le maillon technique
M. LE DUAN, PREMIER SECRÉTAIRE DU PARTI COMMUNISTE VIETNAMIEN
Son rapport doit être décodé : il faut savqir le lire
pour les Vietnamiens, fournir les
bases d'une stratégie mondiale.
Cela dit — et c'est valable pour
les Chinois comme pour les autres
— Le Duan souligne que « chaque
parti doit sauvegarder avec fermeté
son indépendance [...1 tout en respectant l'indépendance _ des partis
frères ».
Ce qu'il y a d'essentiel dans ce
rapport, c'est qu'il contient un appel
à l'union du camp socialiste : « La
situation mondiale exige de façon urgente la coordination ,des forces de
tout le camp socialiste.. Le problème
de la constitution de ce front est un
des problèmes fondamentaux de la
stratégie et de la tactique révolutionnaires. »
Ce document est aussi important
par ses silences que par ses affirmations : il ne contient aucune dénonciation des Yougoslaves. Ces derniers,
depuis longtemps damnés et condamnés par les Vietnamiens en tant que
révisionnistes, sont peut-être _considérés comme récupérables à long terme.
Le rapport Le Duane,..st en avance
sur la carte du monde en plusieurs
couleurs qu'on peut voir au Centre
de l'information de Hanoi. Sur cette
carte, la Yougoslavie impitoyablement coloriée en gris comme la
capitaliste Angleterre ou la République fédérale allemande
•Donc, « coordination », « front »
d'abord. Puis, à long terme, union et
réunion. Tactiquement, l'union est
réalisée au Viêt-nam. Ce n'est pas un
hasard si le texte de Le Duan fait
allusion au septième congrès de la
internationale en 1935, celui de
Dimitrov et de Togliatti, celui u.,.•
l'unité antifasciste, où l'on corrigea,
en partie, le coup de barre gauchiste
donné lors du précédent congrès.
Rien sans,l'U.R.S.S.
Comment analyser la situation
mondiale ? » demande Le Duan. Ni
comme les Soviétiques ni comme les
Chinois, répond-il, Et il explique les
divergences : «L'édification du socialisme est toute récente... Il en résulte nécessairement des tâtonnements, voire des erreurs. »
Cette phrase paraît destinée aux
Soviétiques comme aux Chinois. Le
Duan n'utilise jamais l'expression
« coexistence pacifique » qui est trop
nettement soviétique et qui, avec ses
relents de khrouchtchévisme, donne
l'idée d'une certaine passivité devant
« l'impérialisme américain ». Le Duan
ne parie pas, comme certains Chinois
paraissent parfois le faire, sur l'inévitabilité d'une guerre mondiale « Les
forces révolutionnaires et dé paix,
écrit-il, sont à l'heure actuelle suffisamment fortes pour empêcher les
D'autre part, M. Le Duan, faisant
peut-être allusion à la passivité de
certains Soviétiques, écrit : « La révolution n'est nullement en position
défensive, elle est en position offensive. »
Pensant à la rencontre de Glassboro et aux négociations soviéto-américaines sur le désarmement et lès
réseaux antimissiles, Le Duan dit ceci,
qui semble significatif : « Les Américains se sont servis de l'arme atomique comme d'un croquemitaine
pour intimider les peuples du
monde. » Or, en 1963, M. Le Duan,
premier secrétaire du Parti depuis
trois ans, eut avec M. Khrouchtchev
une explication orageuse à ce sujet.
Mais il n'adopte pas pour autant la
doctrine chinoise du « tigre de papier » américain.
Naturellement, les Chinois sont
salués : « La victoire gfrandiose de la
révolution chinoise libérant tout le
continent chinois a stimulé grandement le peuple vietnamien dans son
combat... »
Pourtant, à travers ce document,
on constate que le Parti vietnamien
se distingue du Parti chinois sur trois
plans :
1) Alors que les Chinois, comme
les Cubains, out tendance à présenter
les luttes à venir comme opposant
surtout les sous-développés aux pays
industrialisés, M. Le Drian insiste
sur « la révolution socialiste au sein
des pays capitalistes impérialistes ».
2) II attache aussi une très grande
importance à la révolution technique.
« un des maillons les plus importants
pour l'édification du communisme et
du socialisme ».
3) On peut se demander si M. Le
Duan ne cherche pas à freiner ce
qu'on pourrait appeler un paysanisme
Téléchargement