Histoires de héros : Horatius Coclès, Mucius Scaevola et Clélie Horatius Coclès Hendrik Goltzius (1558-1617), Horatius Coclès Cocles signifie en latin "le borgne". Selon la légende, la lance d'un Étrusque lui aurait fait perdre l'œil gauche. En 507 av. J.-C., les Étrusques du roi Porsenna prennent d'assaut le Janicule1 et menacent directement Rome. Le consul Valerius Publicola sort avec l'armée au secours des 700 colons du Janicule, et doit faire face à l'armée étrusque plus nombreuse. Suite aux blessures des deux consuls, les Romains prennent la fuite et se réfugient dans la Ville, et l'ennemi manque de faire de même, si trois hommes n'étaient pas restés en arrière pour défendre le seul accès à Rome, le Pont Sublicius, construit en bois pour être détruit en cas d'attaque. Ils barricadent le passage. Les trois hommes sont Horatius Coclès et les deux futurs consuls Spurius Larcius Flavius et Titus Herminius Aquilinus, qui se retirent bientôt. Horatius Coclès reste seul, contre l'armée ennemie, à défendre le Pont Sublicius, en attendant que ses concitoyens s'affairent à saboter le pont. Il résiste longtemps et lorsqu'il se voit sur le point d'être submergé par les ennemis, il s’écrie : "Père Tibre, je te supplie respectueusement de recevoir ces armes et ce soldat dans un flot bienveillant". Puis, il demande qu'on coupe le pont derrière lui et, ainsi tout armé, il plonge dans le Tibre. Malgré la grêle de traits qui s'abat sur lui, il rejoint les siens à la nage, sans dommages, après avoir accompli un exploit qui devait demeurer pour la postérité plus fameux que digne de foi. L'État récompense un tel acte de bravoure : il a sa statue au Comitium2 ; on lui donne tout le terrain dont il peut faire le tour en 24 heures avec une charrue. Les particuliers lui manifestent leur reconnaissance et s'associent aux honneurs officiels : malgré la disette, chacun se prive un peu et tire de ses provisions de quoi lui apporter quelque chose (argent, victuailles, etc.). D'après Denys d'Halicarnasse, une des blessures reçues lors de la défense du pont Sublicius le rend boiteux, et c'est la raison pour laquelle, malgré sa très grande bravoure, il n'a jamais occupé une quelconque charge militaire, et encore moins le consulat. 1 situé sur la rive droite du Tibre, au sud de la cité du Vatican, le Janicule est considéré comme la huitième colline de Rome (les sept collines de Rome sont: l’Aventin, le Cælius, le Capitole, l’Esquilin, le Palatin, le Quirinal et le Viminal) ; situé dans l'ager Vaticanus, le Janicule était parfois appelée Mons Vaticanus. 2 espace prévu pour les réunions publiques en plein air Anonyme, Horatius Coclès défendant le pont Sublicius (vers 1474) Tommaso Laureti (1530-1602), Horatius Cocles sur le pont de Sublician Charles Le Brun (1619-1690), Horatius Coclès au pont Sublicius Mucius Scaevola À peine la République instaurée, Rome se trouve à nouveau sous la menace. Les Étrusques, sous la conduite du roi Porsenna, marchent contre Rome pour rétablir sur le trône les Tarquins récemment expulsés. Après avoir repoussé la première attaque, les Romains se réfugient à l'intérieur de l'enceinte de Rome, et Porsenna commence le siège de la ville et installe son campement dans la plaine au bord du Tibre. Alors que le siège commence à durer et que la faim se fait sentir chez les Romains, le jeune patricien Mucius décide de s'introduire dans le camp ennemi et d'assassiner son roi. Pour éviter d'être pris pour un déserteur, il présente au Sénat sa décision et en obtient le consentement. Sous un déguisement, il pénètre dans le camp ennemi et s'approche parmi la foule qui se tenait près du tribunal du roi, mais, ne l'ayant jamais vu, et craignant que son ignorance ne le fasse découvrir en demandant où était le roi, il se trompe et tue l'homme qu'il pense être Porsenna. Aussitôt, il est arrêté et conduit devant le roi qui l'interroge. Loin d’être intimidé, Mucius répond et se présente comme citoyen romain et lui dit être là pour le tuer. Pour appuyer ses propos et punir par cette action son erreur dans le choix de la victime, il met sa main droite dans le feu d'un brasier allumé pour un sacrifice, et regardant Porsenna d’un visage ferme et d’un œil menaçant, il cherche à l’effrayer en disant "Vois, vois combien le corps est peu de chose pour ceux qui n’ont en vue que la gloire". Surpris et touché par cette scène, le roi ordonne qu’on éloigne Mucius du feu et lui rend sa liberté. Alors comme par Louis Pierre Deseine (1749-1822), reconnaissance, Mucius lui déclare que 300 jeunes Romains ont juré comme lui Mucius Scaevola être prêts à se sacrifier pour tuer Porsenna. Effrayé par cette révélation, Porsenna dépose les armes et envoie des ambassadeurs à Rome. Après cet exploit, et comme sa main droite était définitivement invalide, Caius Mucius reçut le surnom de Scævola, qui en latin signifie "gaucher". On donna pour récompense à Mucius des prés situés au delà du Tibre, et qui furent appelés de son nom prés Mutiens. Il obtint aussi l'honneur d'une statue consacrée à sa mémoire. Pierre-Paul Rubens (1577-1640), Mucius Scævola devant Porsenna Charles Le Brun (1619-1690), Mucius Scævola devant Porsenna Matthias Stom (1600-1649), Mucius Scaevola devant Porsenna Clélie Après la proclamation de la République et l'expulsion des Tarquins hors de Rome, ceux-ci se réfugient chez le roi étrusque Porsenna et le persuadent de combattre à leurs côtés pour les rétablir sur le trône. La guerre, d'abord à l'avantage de Porsenna qui prend le Janicule, se transforme en un siège interminable. Cependant, grâce à l'exploit de Mucius Scaevola qui suit celui d'Horatius Coclès, Porsenna décide d'entamer des négociations avec les Romains. Il en ressort que les Romains doivent fournir des otages en échange de la levée du siège. Clélie, otage romaine, s'échappe et traverse le fleuve à la nage, accompagnée d'autres jeunes femmes. Selon certains, elle a eu recours à un certain stratagème pour échapper à la surveillance des gardes. Voici le suivant : elle a demandé à se baigner dans le fleuve et une fois sur la berge, a refusé que les soldats la voient nue. Revenue dans Rome, elle n'y reste pas longtemps car Porsenna la demande avec d'autres femmes romaines, et les Romains acceptent pour ne pas rompre la paix. Elle est renvoyée, accompagnée par le consul Publicola, mais sur le chemin du camp étrusque, les Tarquins lui tendent une embuscade qui échoue. Cependant le roi étrusque, pris d'admiration pour son exploit, la congédie, lui offre un cheval de bataille et lui permet de prendre avec elle les otages qu'elle veut. Elle choisit les enfants, et les femmes, selon certains. Elle est acclamée pour son courage extraordinaire et une statue équestre lui est érigée sur la via sacra. L'acte d'héroïsme d'Horatius Coclès, suivi de ceux de Caius Mucius Scaevola et de Clélie, impressionnent si vivement Porsenna que, renonçant à son projet d'envahir Rome, le roi étrusque propose la paix. Filippo Lippi (1406-1469), La légende de Clélie Pierre-Paul Rubens (1577-1640), Clélie passant le Tibre Frans Wouters, Les Vierges de Rome (1650)