Journal Identification = PNV Article Identification = 0420 Date: September 3, 2013 Time: 1:43 pm
Éditorial
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2013 ; 11 (3):273-4
Votre foi est grande, Scholar Quaerit. Rares sont ceux qui
tirent les lec¸ons de leur expérience, et plus rares encore
ceux qui apprennent des erreurs des autres.
JE Modesitt Jr. Scholar
La prise en charge active des patients atteints de MA
ne s’est développée qu’à partir des années 1980,
avec l’apparition de médicaments potentiellement
actifs. Les premières interventions non médicamenteuses
à visée cognitive ont d’abord concerné le langage et les
orthophonistes. Ces interventions se sont développées
progressivement, notamment avec la constatation de la
relativité des bénéfices apportés par les médicaments, et
sont largement orientées vers des interventions à visée
cognitive et/ou psychologique, impliquant de plus en plus de
psychologues. Les interventions visant à soutenir ou amé-
liorer la cognition par des intervention individuelles ou en
groupe concernent la cognition en général ou plus spéci-
fiquement la mémoire. Jennifer Lalanne et Pascale Piolino
font ici le point sur les interventions destinées plus particu-
lièrement à améliorer la mémoire puisque les troubles de
mémoire sont au cœur de la maladie d’Alzheimer (MA). Les
troubles de la mémoire autobiographique, à laquelle s’est
consacrée Pascale Piolino avec son équipe, constituent un
axe majeur de notre identité. Le modèle de Conway qui
a inspiré ces travaux, est particulièrement intéressant par
la mise en lien des phénomènes cognitifs et affectifs. La
distinction entre les diverses interventions non médicamen-
teuses oppose habituellement les interventions selon leur
objectif (troubles cognitifs vs troubles affectifs), leur tech-
nique (prise en charge de groupe ou individuelle). En réalité,
ces interventions s’inscrivent dans une conception géné-
rale de la maladie et des patients. Deux types d’approche
peuvent être schématiquement distingués : l’approche tra-
ditionnelle est médicale et centrée sur la maladie et ses
troubles, l’autre, plus psychologique met l’accent sur les
troubles psychologiques et relationnels du patient. Dans
la première approche, les troubles cognitifs sont considé-
rés comme dépendant directement du siège des lésions
et indépendants de la personnalité du patient comme de
l’entourage. La perte d’autonomie est alors la conséquence
directe des troubles cognitifs et les variations constatées
entre les patients trouvent leur explication dans des fac-
teurs génétiques ou une plus ou moins grande «réserve
cognitive ». Le traitement pharmacologique est ici privilé-
gié et les interventions non médicamenteuses n’ont qu’un
rôle d’adjuvant : elles privilégient l’amélioration des per-
formances cognitives par des méthodes qui se veulent
objectives et quantifiables, qu’elles soient appliquées en
individuel ou, pour une plus grande commodité, en groupe.
Un des problèmes majeurs rencontrés dans cette approche
est que les bénéfices cognitifs observés résultent d’une
comparaison de moyennes et ne sont pas uniformément
applicables à un individu ; d’autre part, ils ne sont pas
transposables dans la vie quotidienne. Les bénéfices obte-
nus portent, en fait, bien souvent sur le retentissement
affectif, indépendamment des techniques utilisées, ce qui
montre l’importance de la prise en charge des patients,
ce dont témoigne également l’effet placebo observé dans
les essais des médicaments. Dans les années 1990, une
autre conception de la MA s’est progressivement dévelop-
pée sous plusieurs influences : progressivement l’optique
de la prise en charge cognitive a évolué vers une approche
de réhabilitation c’est-à-dire axée sur les difficultés que
le patient rencontre dans la réalité et non sur les perfor-
mances. Par ailleurs, Tim Kitwood et l’équipe de Bradford
au Royaume Uni [1] ont proposé une «nouvelle culture de
la démence »décrivant la MA comme un handicap dont les
conséquences dans la vie quotidienne sont largement le fait
de la qualité de la prise en charge par l’entourage (profes-
sionnel et familial). L’autonomie devient ainsi relationnelle
et non liée aux seuls déficits du patient. Les associations
de famille, de leur côté, ont mis l’accent sur le respect de
la personnalité et de l’estime de soi du patient, plus que
sur les performances cognitives. Enfin, les travaux de cer-
tains psychanalystes en France ont souligné la permanence
de la vie psychique du patient tout au long de la maladie,
et donc l’importance de la personnalité du patient et de sa
relation avec l’entourage, dans la survenue et la phénomé-
nologie les manifestations de la maladie comme dans ses
conséquences (voir par exemple [2]). Le terme général de
prise en charge centrée sur le patient devient ici une prise
en charge spécifique de l’individu concerné ce qui montre
l’importance du travail sur la mémoire autobiographique.
Dans le même registre, l’article de Floriane Delphin-
Combe et al. présente un exemple de l’intérêt d’une prise
en charge sociothérapeutique des troubles psychocompor-
tementaux qui s’inscrit dans la perspective d’un travail de
groupe et de l’approche neuropsychiatrique traditionnelle.
Les troubles psychocomportementaux sont ainsi décrits
doi:10.1684/pnv.2013.0420
Pour citer cet article : Derouesné C. Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2013; 11(3) :273-4 doi:10.1684/pnv.2013.0420 273
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