1- C’est quoi l’enquête EVE ? EVE est une enquête sur les EVEnements indésirables chez les femmes vivant avec le VIH. On parle ici « d’événements » plutôt que « d’effets » car nous nous intéressons aux impacts sur la qualité de vie plus large que l’effet seulement physique. Elle est née de la volonté de femmes lors d’une rencontre de Femmes Séropositives en Action (FSA) en 2011 de mieux documenter ce qu’elles pouvaient vivre. Femmes concernées et chercheurs ont travaillé ensemble pour élaborer un questionnaire. L’enquête a ainsi été réalisée en partenariat entre AIDES et l’Inserm. Une grille utilisée dans les essais thérapeutiques pour identifier les effets indésirables des traitements a été reprise et élargie (grille ACTG -AIDS clinical trial groups). Le recueil des événements indésirables ne portait pas sur les 4 dernières semaines comme cela était le cas dans la grille ACTG mais sur les 12 derniers mois. Ce choix a été fait car il s’agissait d’appréhender les événements indésirables peut-être moins fréquents (et qui n’aurait pas été observés lors des dernières semaines) mais pour lesquels l’intensité à certains moments et/ou la répétition pouvaient avoir un impact fort. Plus que l’effet en lui-même, c’est le lien entre événements indésirables et qualité de vie qui est ici étudié. Elle a été diffusée par Internet de septembre 2013 à septembre 2014. Elle s’adressait aux femmes atteintes par le VIH, qu’elles soient ou non sous traitement. 2- Pourquoi une enquête sur les événements indésirables chez les femmes ? Une des difficultés communément exprimées par un grand nombre de femmes rencontrées à AIDES concerne l’impact des effets indésirables du traitement et du VIH sur leur qualité de vie et leur insuffisante prise en compte par les médecins, et ce malgré les évidences scientifiques dont on dispose : les molécules sur le marché ne sont pas toujours adaptées aux spécificités physiologiques et métaboliques des femmes car elles sont développées sur un public majoritairement masculin, et de nombreuses études confirment que certains effets indésirables sont soit majorés chez les femmes, soit spécifiques, soit vécus différemment. EVE cherche à identifier les événements indésirables que vivent les femmes séropositives aujourd’hui (plus concrètement, lors de 12 derniers mois) et leurs impacts sur les différentes dimensions de la vie (vie sociale, professionnelle, affective et sexuelle, etc.) mais aussi à identifier les solutions mises en place pour contrer les difficultés vécues et à favoriser le dialogue entre patientes et soignants. 3- Pourquoi l’enquête ne s’adresse qu’aux femmes ? Pourquoi EVE ne cherche pas la comparaison entre femmes et hommes séropositifs ? De nombreuses données déjà existantes montrent que, comparées aux hommes, les femmes séropositives subissent des effets indésirables accrus ou spécifiques (voir rapport Morlat 2013, p. 127). Pour les femmes sous traitement, cela peut s’expliquer par le fait que le développement des médicaments se fait essentiellement sur des hommes et ne tient donc pas compte des spécificités biologiques féminines. EVE cherche à montrer le vécu aujourd’hui et en France des femmes séropositives pour, si nécessaire, permettre une amélioration des pratiques médicales et associatives. Rappelons également que EVE est née de la mobilisation de femmes concernées car elles ont souhaité que leur vécu soit entendu. Il sera toujours possible, dans un second temps, d’élargir l’enquête à l’ensemble des personnes vivant avec le VIH si cela apparait pertinent. Notons enfin que, pour recenser les événements indésirables, EVE utilise une grille standard (grille ACTG même si celle-ci a été modifiée notamment sur la temporalité du recueil de données) utilisée dans d’autres études dont VESPA 2. Cela permettra la comparaison avec d’autres études existantes. 4- Comment savoir si la cause des effets indésirables déclarés est bien le VIH ou ses traitements ? L’étude ne permet pas de dire si la cause de ces effets est le VIH et/ou les traitements. Ce n’était pas le but ! Ce qui nous intéressait ici c’était d’identifier ce que les femmes vivant avec le VIH ont vécu au cours des 12 derniers mois. Cependant, nous pouvons analyser les effets de l’âge, de la durée de vie avec le VIH et les traitements, et de l’indice de masse corporelle sur le ressenti des effets indésirables. Mais surtout, on sait que : • • • plusieurs études montrent que les effets indésirables des traitements et les complications associées sont plus marqués chez les femmes que chez les hommes ; les effets indésirables peuvent être liés directement au VIH et à ses traitements (physiologiquement) mais être aussi plus indirects (impact social de l’infection, impact des lipodystrophies, etc.) ; les femmes qui ont répondu au questionnaire considèrent que ces effets sont liés à leur infection : pourquoi mettre leur parole en doute comme c’est très souvent le cas ? Quand bien même certains effets auraient une origine éloignée du VIH, il est nécessaire d’adopter une approche globale de la santé ! Les médecins traitants des femmes vivant avec le VIH doivent tenir compte des difficultés vécues par leurs patientes qui impactent leur qualité de vie ainsi que les conditions de réussite de leur traitement. 5- Cette enquête est-elle généralisable ? L’échantillon de l’enquête est limité (315 répondantes) et n’est pas représentatif de l’ensemble des femmes séropositives en France, ce qui ne permet pas de généraliser ces résultats. De plus, il y a un biais de recrutement puisque les femmes se sentant particulièrement concernées par les effets indésirables ont certainement étaient plus nombreuses à répondre à l’enquête. Néanmoins, les résultats de l’étude montre que certaines femmes, et notamment celles rencontrées à AIDES, sont encore fortement affectées par le VIH et/ou leurs traitements. 6- Et maintenant ? Au niveau de la recherche, d’autres analyses plus approfondies vont pouvoir être réalisées dans les prochains mois. Pour cela, et selon les principes de la recherche communautaire, un groupe de travail avec des femmes concernées va être mis en place. Des comparaisons avec d’autres enquêtes (comme l’enquête nationale Vespa 2) seront intéressantes pour mieux appréhender nos résultats. Au niveau de l’action, un travail d’empowerment des femmes est toujours d’actualité. Il apparait nécessaire de les accompagner pour qu’elles soient en capacité de parler avec leurs médecins sur leur santé, sur les événements indésirables quel qu’ils soient, et de se faire entendre. Au niveau du plaidoyer, il est nécessaire de continuer à porter ces questions et ces résultats dans les instances de démocratie sanitaires pour que les revendications transforment les pratiques professionnelles !