PÉRISCOPE Forum Med Suisse 2006;6:1064 1064 Périscope Isaac Starr, l’un des médecins survivants de la pandémie de grippe de 1918, a écrit en 1976: «Il y a de bonne raisons pour qu’une future épidémie d’influenza […] n’ait plus qu’une mortalité minime ou nulle.» Plus personne ne le croit aujourd’hui. Sur 218 patients, 124 sont déjà décédés. Le virus de la grippe aviaire a montré qu’il peut contaminer des gens, que pratiquement tous sont «immunologiquement naïfs» et que sa mortalité est élevée. Manque encore la transmission d’homme à homme – une seule mutation y suffirait. Notre espoir repose sur des vaccins (toujours insuffisants), des antiviraux (qui doivent encore faire leurs preuves) et le «social distancing» (isolement scolaire, au travail, à domicile, etc.). L’hiver prochain viendra, c’est sûr. – Bartlett JG. Planning for avian influenza. Ann Intern Med. 2006;145:141–4. Le traitement antirétroviral hyperactif (HAART) a certes permis une survie sans sida – mais au prix d’effets indésirables et de coûts progressifs. L’interruption du HAART diminue les deux, les coûts et les effets indésirables. Mais qu’en est-il de l’immunosuppression et de la résistance? 430 patients ayant des lymphocytes T CD4 positifs >350 /µl et une charge virale <50 copies /ml ont reçu un traitement continu ou intermittent programmé. Ce dernier a permis d’économiser 61,5 % de médicaments, a donné <50 copies de VIH /ml et il n’y a eu aucun problème définissant le sida. Diarrhée, neuropathie et candidoses ont été plus fréquentes sous traitement continu, de même que les CD4 et les manifestations VIH mineures. – Renouveau d’un traitement anti-VIH sans effets indésirables et meilleur marché? – Ananworanich J, et al. CD4-guided scheduled treatment interruptions compared with continuous therapy for patients infected with HIV-1. Lancet. 2006;368:459–65. Histoire de la médecine: Charles Quint, roi du Saint-Empire romain germanique (et Charles Ier d’Espagne) a été l’un des plus puissants monarques de tous les temps – territoires d’Europe, d’Asie et d’Afrique, des Aztèques au Mexique et des Incas au Pérou. Mais il souffrait depuis ses 28 ans de violentes douleurs arthritiques, qui pourraient bien avoir influencé ses décisions. Goutte? Comment le prouver? Tout simple: la phalange distale de son 5e doigt – conservée dans un récipient spécial – a été réhydratée, une partie paraffinée et examinée au microscope et en partie trempée dans un réactif pour acide urique → Goutte, cela se confirme! Démission en 1556, décès en 1558, peut-être de malaria. Elle est toujours là! – Ordi J, et al. The severe gout of holy Roman Emperor Charles V. N Engl J Med. 2006;355: 516–20. Mobilité, attention: au moins deux personnes sont mortes en Albanie suite à une morsure de la veuve noire (Latrodectus tredecimguttatus ou marsans). Deux autres seraient également décédées à cause de la «veuve noire». Les morsures d’araignées ne sont pas rares du tout en Albanie: les premières remontent à 1999; en 2001, 70 cas ont été déclarés et 136 sont maintenant enregistrés; 99 ont dû être hospitalisés. Les températures élevées ont réalisé des conditions d’existence parfaites pour cette araignée noire et le trafic maritime – c’est du moins l’argument des Albanais – a introduit ces arachnides. La Croatie a commandé 100 doses d’antidote. – Hoxha R. Two Albanians die from black widow spider bites. BMJ. 2006;333:278. Existe-t-il une association? Un Somalien de 66 ans émigré aux Etats-Unis depuis deux ans, se présente avec fatigue, perte pondérale et prurit. Le laboratoire donne des tests hépatiques perturbés: anticorps IgG antihépatite A et B, anticorps antihépatite C et anti-ARN du virus de l’hépatite C, a-fœtoprotéine nettement augmentée. VIH négatif. Mais cet homme n’a aucun facteur de risque, pas de transfusion sanguine, pas de drogues, pas de promiscuité sexuelle, pas de tatouage, pas d’hémodialyse, etc. La TC abdominale montre une masse au niveau du hile hépatique, dont la biopsie révèle un hépatocarcinome. D’où cet homme tient-il son virus de l’hépatite C? (Pour la solution voir ci-dessous) Moxibustion! Il se brûle depuis longtemps à différents endroits de son corps et se taillade les poignets et l’abdomen avec des objets tranchants non stériles, pour «évacuer le mauvais sang» (scarification). Pratiques culturelles «innocentes», en Afrique et en Asie surtout, pouvant avoir des complications médicales non négligeables! – Bardia A, et al. Scarring moxibustion and religious scarification resulting in hepatitis C and hepatocellular carcinoma. Lancet. 2006;367: 1790. Information des patients – pas si simple! 43 femmes enceintes avant leur premier accouchement, 40 accompagnants, 42 sagesfemmes et 41 obstétriciens ont dû estimer la probabilité d’un syndrome de Down sur la base d’un test positif qui leur a été fourni avec toutes les informations importantes. 86% des réponses ont été fausses (43 % des médecins ont répondu juste, 0 % des sages-femmes, 9 % des femmes enceintes). Présentée comme «incidence», il y a eu plus de réponses justes que de «probabilité». Mais seuls les médecins ont fait la différence. La plupart des personnes qui ont répondu ont été très sûres de leur réponse (fausse)! – Que doivent penser les patientes d’une information que même pas la moitié des médecins peuvent donner correctement? – Bramwell R, et al. Health professionals’ and service users’ interpretation of screening test results. BMJ. 2006;333:284–6.