Grippe A (H1N1) : Rester vigilant durant une pandémie

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JSCR 2009 • Volume 19, Numéro 234
EDITORIALCONSULTATION DE COULOIR
Grippe A (H1N1) : Rester vigilant
durant une pandémie
Entrevues avec les Drs Donald Low, Anthony Russell, Paul Haraoui, Janet Pope et Ted Ralph
Le 11 juin, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a
déclaré que l’infection par le virus de la grippe H1N1,
ou grippe porcine, avait atteint la phase de la pandémie,
ce qui oblige les rhumatologues à prendre une décision dif-
ficile. Continueront-ils à prescrire des médicaments
immunosuppresseurs même si ces traitements affaiblissent le
système immunitaire de leurs patients?
Les Drs Anthony Russell, Paul Haraoui et Janet Pope, dont
les opinions sont accompagnées de quelques commentaires
du Dr Ted Ralph, spécialiste des maladies infectieuses, exami-
nent cette question dans « Consultation de couloir » afin de
déterminer si les traitements et les interventions devraient
être modifiés durant une pandémie de grippe porcine et si
oui, de quelle manière. En outre, le Dr Donald Low, microbio-
logiste en chef à l’Hôpital Mount Sinaï à Toronto, énumère
les modalités de traitement et de prophylaxie qui con-
viendraient dans le cas des patients immunodéprimés durant
une éclosion de grippe causée par le virus H1N1.
La grippe porcine dans le monde
L’infection par le virus grippal H1N1, ou grippe porcine, a
semé le chaos dans le monde, au printemps et à l’été.
L’infection se manifeste par des symptômes comme la fièvre,
la fatigue, le manque d’appétit, la toux, les vomissements et la
diarrhée. Au 12 juin, on avait recensé au Canada plus de
3 500 cas de grippe H1N1 confirmée par des épreuves de
laboratoire; l’âge moyen des patients infectés était de 22 ans.
Parmi ces patients, 182 avait été hospitalisés et quatre étaient
décédés, selon Santé Canada. Le 15 juin, l’OMS a déclaré que
la grippe H1N1 était présente dans 74 pays; on avait recensé
près de 36 000 cas confirmés par les laboratoires et 163
décès dans le monde.
Il semble toutefois que les taux de mortalité reliés à la
grippe H1N1 soient, jusqu’à maintenant, semblables à ceux
attribuables à la grippe saisonnière si le nombre de décès dus
à ce virus continuait d’augmenter au rythme actuel, explique
le Dr Low. Au Canada, environ 20 000 Canadiens sont
hospitalisés pendant la saison annuelle de la grippe (de
novembre à avril) et on dénombre entre 4 000 et 6 000
décès selon la gravité de l’infection cette année-là. L’OMS
affirme qu’environ trois à cinq millions de cas graves et
250 000 à 500 000 décès sont signalés chaque année. Les
personnes âgées de plus de 65 ans et les enfants de moins de
deux ans sont le plus à risque.
Un virus inconnu
Au contraire de la grippe saisonnière, la grippe porcine com-
porte encore sa part de mystères, ce qui créerait une situa-
tion problématique durant une pandémie. « Par exemple, si la
pandémie évoluait selon le modèle classique, c’est-à-dire sur
six à huit semaines, un patient sous traitement immunosup-
presseur pourrait recevoir une prophylaxie par des antibio-
tiques ou des antiviraux durant cette période », de dire le Dr
Low. « Toutefois, ce virus, comme tout autre virus, a un com-
portement qui lui est propre. Il se pourrait donc que la
pandémie ne dure pas seulement six à huit semaines. Elle
pourrait durer, par exemple, 12 à 16 semaines et il serait alors
logique que le patient cesse de prendre son médicament
immunosuppresseur. »
Pourtant, tous les rhumatologues interrogés sur ce point
ont affirmé qu’ils n’interrompraient pas le traitement
immunosuppresseur chez leurs patients en cas de pandémie.
« À ce stade, force est de reconnaître que nous ne savons dans
quelle mesure cette grippe est plus grave [que la grippe
saisonnière]... Mais, je la considérerais comme toute autre
grippe, de façon sérieuse et appropriée », a répondu le Dr
Russell, rhumatologue (Edmonton).
Médecine préventive
Le Dr Haraoui, rhumatologue exerçant à Montréal, propose
quatre étapes clés pour aider à prévenir ou à limiter l’exposi-
tion au virus de la grippe porcine :
1. Expliquer aux patients qu’ils doivent considérer la
grippe H1N1 comme n’importe quelle autre infection et
réitérer le message que les patients traités par des
immunosuppresseurs, y compris les agents modificateurs
Les études à répartition aléatoire, à double insu, avec témoin placebo n’ont pas fourni de réponses définitives à
certaines questions cliniques importantes. La rubrique « Consultation de couloir » du Journal de la Société canadienne de
rhumatologie cherchera à résoudre vos plus épineux dilemmes par voie de consensus, en les soumettant à des experts.
Veuillez soumettre vos questions à l’adresse suivante : k[email protected].
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de la réponse biologique, et qu’ils doivent consulter un
médecin dès le premier signe d’infection. Ce message
doit être particulièrement renforcé dans le cas des
patients atteints d’affections concomitantes (maladie
pulmonaire obstructive chronique, diabète) ou des
patients traités par la prednisone. Ces facteurs de risque
ont été reliés à une incidence accrue d’infections graves
chez les patients traités par des modificateurs de la
réponse biologique. Les patients ne doivent pas cesser
de prendre leur médicament biologique parce qu’ils
craignent de contracter la grippe, mais seulement s’ils
sont infectés par le virus grippal.
2. Les patients doivent suivre les recommandations des
autorités de santé publique, qui pourraient par exemple
recommander de ne pas voyager dans les régions où la
maladie est endémique ou dans les régions touchées par
des éclosions importantes.
3. Si la pandémie devait toucher le Canada, les patients
devraient éviter de venir en contact avec les personnes
infectées et ils devraient appliquer les recommandations
d’hygiène de base (notamment, se laver fréquemment les
mains) après avoir été en contact avec d’autres person-
nes.
4. Recommander à tous les patients de se faire vacciner
contre la grippe saisonnière à l’automne et également
contre l’infection par le virus H1N1, si le vaccin est
disponible. Je recommande aussi la vaccination antip-
neumoccique pour tous les patients qui n’ont pas été
immunisés au cours des dernières années.
Le Dr Russell est également d’avis que les patients traités
par des immunosuppresseurs devraient être vaccinés avant
de recevoir ces médicaments. « Je ne crois pas qu’une
pandémie influerait sur la prise en charge clinique », dit-il,
« mais je recommanderais certainement à mes patients de se
faire vacciner contre la grippe porcine si le vaccin est
disponible et de prendre en outre toutes précautions perti-
nentes pour se prémunir contre l’infection. »
En rhumatologie, les patients sont plus à risque
La Dre Pope, rhumatologue (London), affirme que les
patients atteints de maladies rhumatismales ont un risque
accru d’être infectés par des bactéries et des virus communs
et de contracter d’autres infections contre lesquelles la plu-
part des gens sont immunisés (réactivation de la tubercu-
lose, histoplasmose, mycoses et pneumonie à P.carinii). « La
vaccination antipneumoccique suscite également un débat
dans notre population », ajoute-t-elle, « et on ne sait pas de
façon certaine si les patients qui souffrent d’un dysfonction-
nement de la rate, p. ex. dans le syndrome de Felty et le lupus
érythémateux disséminé s’accompagnant d’un purpura
thrombopénique idiopathique, devraient être vaccinés. »
La Dre Pope a également communiqué avec le Dr Ralph, spé-
cialiste des maladies infectieuses. « Il faut se fier au bon sens »,
note le Dr Ralph. « Vos patients de rhumatologie traités par des
modificateurs de la réponse biologique et d’autres immuno-
suppresseurs ont un risque accru d’infection, de toutes les
infections, peu importe qu’elles soient ou non épidémiques.
Ces patients sont dans la même situation que nos patients
infectés par le VIH et les patients traités par une greffe d’or-
gane, et il n’existe pas de lignes directrices universelles. »
Le Dr Low affirme que les rhumatologues devraient
informer leurs patients que le virus est présent dans la popu-
lation générale et qu’il est détecté principalement chez les
enfants. Si un membre de la famille est malade et présente
des symptômes de type grippal, les patients devraient garder
leurs distances. « Le simple fait de vraiment réduire au mini-
mum le contact avec une personne [infectée] est une recom-
mandation importante dans le cas des patients de rhuma-
tologie », ajoute le Dr Low. « Ces patients doivent se rendre
compte qu’ils sont à risque. Ils doivent éviter le plus possible
d’être en contact avec des personnes malades et si eux-
mêmes devenaient malades, ils devraient consulter un
médecin le plus rapidement possible. »
Conclusion
Les rhumatologues et leurs patients doivent demeurer vigi-
lants, surveiller toute infection possible et continuer de
prendre les mesures de prévention usuelles (lavage des
mains, se couvrir la bouche avec la main ou le bras en cas de
toux et d’éternuement). Bien qu’il reste beaucoup d’inconnu
à propos du virus H1N1, les patients et leurs rhumatologues
ne doivent pas céder à la panique et ils doivent se tenir infor-
més de l’évolution de la pandémie de la grippe porcine.
Élaboré grâce à une subvention sans restriction
à visée éducative de Pfizer Canada.
Ensemble, vers un monde en meilleure santéMC
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