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Chéloniens 3 • septembre 2006 •
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• Chéloniens 3 • septembre 2006
sède l’avantage de conserver le terreau très humi-
de. Le contenu d’une bouteille d’eau est versé sur
le substrat en même temps que les opérations de
vaporisation. La coupelle d’eau est suffisamment
large pour permettre aux tortues de s’y baigner. En
revanche, sa profondeur d’eau n’excède pas 3 à 4
centimètres. Pour éviter une évaporation trop rapi-
de, le bac d’eau n’est pas placé sous le spot mais
à l’écart. La mise à disposition de nombreuses
cachettes est très importante pour cette espèce
particulièrement discrète : tas de feuilles sèches,
foin, plantes artificielles, bac en plastique retourné
sont autant de possibilité que les tortues utilisent
pour préserver leur tranquillité. Les tortues sont
maintenues toute l’année en terrarium. Il est possi-
ble de les sortir pendant la période estivale dans
un enclos soigneusement aménagé. Il faut absolu-
ment éviter de déplacer les tortues pour de cour-
tes durées (une journée par exemple). Dans ce
cas, le déplacement s’avère plus stressant que
bénéfique. L’idéal est de les élever dans une serre
chauffée qui possède un parc extérieur. Ainsi, les
animaux peuvent aller et venir librement en fonc-
tion de la saison sans pour autant être manipulés.
2.3 Alimentation
Dans la nature, Kinixys belliana nogueyi est omni-
vore. Son régime alimentaire varie en fonction de la
saison. Elle se nourrit de plantes, fruits, baies,
champignons et divers invertébrés (Luiselli, 2003 ;
Maran, 2004). En captivité, la fréquence de la dis-
tribution de la nourriture et le type d’aliment propo-
sé dépend étroitement de la saison considérée.
Kinixys belliana nogueyi s’alimente beaucoup en
saison des pluies. A cette période, les tortues sont
nourries deux à trois fois par semaine avec des
végétaux, fruits (davantage de fruits de saison),
champignons, escargots, vers de terre et souri-
ceaux. La consommation de proies vivantes au
tout début de la saison humide a une influence
décisive sur la reproduction de l’espèce. Elle per-
met aux tortues d’optimiser leur réserve énergé-
tique (indispensable aux efforts reproductifs des
semaines à venir) et d’assurer également pour les
femelles la production d’œufs correctement calci-
fiés. En période sèche, les animaux mangent peu
ou pas tout. Ils sont nourris tous les trois jours à
base de végétaux (endives, trèfles, pissenlits, laite-
rons, plantain), de fruits (bananes, melons, pêches,
fraises, poires etc.…) et de champignons (champ-
ignons de Paris et pleurotes). L’alimentation carnée
(escargots, vers de terre et souriceaux) est distri-
buée une fois tous les quinze jours. Des os de sei-
che sont laissés dans le terrarium en permanence
à disposition des tortues. Aucun complément
minéral ou vitaminique n’est distribué dans l’ali-
mentation.
En phase d’acclimatation, il est relativement diffi-
cile de faire accepter aux tortues des plantes sau-
vages (trèfle, plantain, pissenlit…). Cependant,
après quelques semaines de captivité, elles finis-
sent par les manger. La salade et les fruits sont
distribués en petites quantités et de manière
occasionnelle car ils sont la cause de diarrhées
difficiles à soigner.
L’observation des habitudes alimentaires de nos
tortues en captivité souligne leur tendance à
apprécier un seul type d’aliment (champignons,
tomates ou fruits). Ces préférences sont suscepti-
bles de leur occasionner de sérieux problèmes de
santé car ces aliments sont d’un point de vu nutri-
tionnel peu équilibrés. L’alimentation doit être la
plus variée et la plus saine possible. Une liste de
végétaux recommandés pour cette espèce est
mentionnée par Van Pelt & Van Putten (2006).
La distribution d’aliments carnés engendre une
agressivité entre les adultes présents dans le
même terrarium. Les morsures sont fréquentes et
localisées sur les membres et la tête. Une sur-
veillance des animaux est nécessaire et si leur
ardeur belliqueuse persiste, une disposition simple
consiste à les séparer et à leur proposer des
rations individuelles.
3. Résultats
3.1 Comportement
Espèce craintive et discrète par excellence, la
Cinixys de Bell de l’Ouest est principalement acti-
ve le matin et en soirée. Entre ces deux pics d’ac-
tivité intense (thermorégulation, recherche de la
nourriture et accouplement), elle demeure immobi-
le sous un tas de feuilles sèches ou dans sa
cachette. Elle s’expose uniquement pour se chauf-
fer sous la lampe et s’alimenter. Dérangée, elle ren-
tre complètement la tête et les membres dans sa
carapace. Elle défèque et produit ainsi une odeur
nauséabonde sensée décourager les prédateurs
potentiels. Elle sort de sa torpeur passagère sous
l’effet d’une augmentation de l’hygrométrie notam-
ment lorsque le terrarium est vaporisé d’eau tiède.
L’introduction d’un aliment mobile (vers de terre,
escargots) ou inerte mais appétissant (morceau de
tomate) provoque aussi une réaction quasi immé-
diate : elle quitte son abri et se précipite sur sa
proie. Elle se baigne régulièrement.
Pendant la période d’estivation, les tortues ne
bougent pas et ne s’alimentent pas pendant une à
deux semaines d’affilée. De temps en temps, elles
sortent, grignotent un aliment et boivent longue-
ment avant de rejoindre leur cachette. Les tortues
qui estivent ont toujours un point d’eau à disposi-
tion. L’hygrométrie du terrarium est élevée grâce à
la présence d’un bac d’eau. Dans la nature,
Kinixys belliana nogueyi estive en s’enterrant dans
un endroit abrité et humide de manière à éviter au
maximum une déshydratation qui pourrait lui être
fatale. En captivité, il faut donc veiller à ne pas sou-
mettre les animaux en estivation à une atmosphè-
re trop sèche.
Il existe une hiérarchie dans le groupe qui se traduit
par la domination d’un ou plusieurs individus. Ce
phénomène est particulièrement marqué dans l’un
des groupes constitué uniquement de femelles. Si
ces dernières s’alimentent en même temps, il est
particulièrement difficile pour la plus dominée d’ac-
céder à la nourriture. Elle est obligée d’attendre le
départ des autres femelles ou de se contenter d’un
aliment trouvé à l’écart du groupe. D’où l’impor-
tance de disperser la nourriture à différents
endroits dans le terrarium de manière à offrir la
possibilité à toutes les tortues de s’alimenter cor-
rectement.
Cette hiérarchie peut être momentanément remise
en cause. Une femelle et un mâle dominant ont été
déplacés en même temps dans un nouveau terra-
rium. Au cours des premiers jours, la femelle se
montre très agressive et dominatrice vis-à-vis du
mâle. Elle le poursuit, lui mord les pattes (le mâle
perd quelques écailles) et lui inflige des coups de
carapace. Au bout d’une semaine, cette agressivi-
té a cessé.
Pour assurer leur domination, les mâles se battent
également entre eux. Ces affrontements se termi-
nent le plus souvent par des simulations d’accou-
plement mais ils peuvent être très violents (blessu-
res importantes) en période de reproduction. Il est
préférable d’élever séparément les mâles pour évi-
ter aux dominés un stress prolongé.
Les femelles se baignent
longuement pendant
les jours qui précédent
la ponte.
Photo Marc Asensio.