Eutonie et respiration Glissons sur l’amusant « En Eutonie, on ne respire pas » pour trouver « En Eutonie, on ne s’occupe pas de la respiration », énoncé généralement comme une évidence par quelqu’un qui ne connaît pas l’Eutonie ou qui aurait encore quelques progrès à faire pour sa compréhension. Sous- entendu : -Il faut s’occuper de la respiration. Une méthode qui ne s’en occupe pas n’est pas une bonne méthode. -La méthode que je préconise s’en occupe ; c’est une bonne méthode. Superbe ! Et le petit eutoniste, tout honteux, se sent terriblement fautif…… « S’occuper de ». Si notre petit eutoniste, rassemblant son courage et cherchant à s’instruire, pose des questions simples et naïves, par exemple pourquoi ? ou comment s’en occuper ? il verra les Vérités précédemment assénées se déliter, non pas parce que le phénomène respiratoire ne mérite pas d’être pris en compte, mais parce que ses nombreux aspects et manifestations font que s’intéresser à l’un ou l’autre - si c’est nécessaire - n’a pas le même sens et ne comporte pas le même mode d’intervention. La respiration Je voudrais rappeler quelques caractéristiques de la fonction respiratoire en m’efforçant de rester simple sans être caricatural. Le but de la respiration, c’est de faire que l’oxygène de l’air extérieur soit livré aux cellules de notre organisme en état de le recevoir et de l’utiliser. Quelques conditions : - A partir des poumons, un sang effectuant bien sa tâche de transporteur d’oxygène et un état satisfaisant des parois cellulaires à travers lesquelles se font les échanges sont indispensables. - Au niveau des poumons, les échanges entre l’oxygène de l’air entrant et le transporteur sanguin sont tributaires de la surface et de la qualité du parenchyme pulmonaire. - Un thorax non enraidi et une bonne amplitude du jeu diaphragmatique sont de première importance. Leurs actions sont visibles. - Les commandes : involontaire et volontaire. Involontaire la plupart du temps, s’adaptant aux variations des demandes de l’organisme. Volontaire à certains moments, quand l’individu l’utilise pour des objectifs particuliers. Frontière pas toujours nette - ambiguë dans les situations émotionnelles – Ce que dit Gerda ALEXANDER – Le corps retrouvé par l’Eutonie – Tchou – 1977 – pp. 28, 29, 30 « Une fois supprimées les fixations du tonus musculaire, présentes chez presque tous les débutants, toute perception consciente d’une partie du corps agit non seulement sur le tonus, la circulation ou le métabolisme, mais aussi sur la respiration inconsciente. 1 Après la suppression des blocages du tonus et de la circulation dans le périnée, le diaphragme et les intercostaux, la capacité de la respiration à s’adapter instantanément au besoin d’oxygène du moment se trouve sensiblement améliorée. C’est peut- être par la respiration que l’unité psycho- somatique de la personnalité est le plus immédiatement reconnaissable et influençable. C’est pourquoi, dans le travail en Eutonie, le professeur observe constamment la respiration de l’élève……………………………………………………………………………………… L’action sur la respiration ne se fait pas par des exercices respiratoires directs mais, indirectement, en relâchant des tensions qui empêchent la plénitude de la respiration appropriée. ………………………………………………………………………………………….. Malgré la grande importance que nous attachons à la respiration, nous évitons d’en parler- surtout au début. Dans un groupe, lorsque le mot « respiration » est prononcé, la respiration de tout le monde est perturbée…………….. » Commentaire : Je n’ai pas cité le texte dans son entier, mais avec ces extraits, il me semble que l’essentiel est dit. Que cela ne vous empêche surtout pas de le lire et le relire…….. Il est vrai que cette notion « d’action indirecte » sur la respiration est quelque peu déconcertante. Elle est souvent peu repérable et mal comprise par quelqu’un qui n’accepte pas – ou ne peut accepter – les principes de l’Eutonie. Pour entrer dans cette façon de « penser » la respiration, il faut faire un sérieux plongeon dans le « sensible » et considérer que l’essentiel du fonctionnement de l’humain réside dans l’harmonie de l’ensemble de ses systèmes de régulation et d’action, d’ordinaire inconscients (heureusement, car s’ils étaient conscients, nous aurions l’esprit fort encombré…..) Ce qui ne diminue en rien notre souci de la qualité de la respiration mais nous incite à éviter des manœuvres intempestives. J’y reviendrai plus tard. Notons que cette façon d’aborder le corps constitue, de façon plus générale, une difficulté pour la diffusion de l’Eutonie dans une société où le « ça se fait » tient mal la route au milieu des machines qui font tilt- boum et de la foule de ceux qui pensent qu’agir se résume à faire et maîtriser. Réflexion : Petit eutoniste s’assied et se gratte la tête, signe que ses pensées ont du mal à s’ordonner. Ainsi : - G. A. situe la respiration au centre de nos préoccupations. Son observation suivie nous donne des renseignements sur « l’état » de nos élèves. Elle demande que l’on ne nuise pas à son auto- régulation tout en agissant sur les moyens et les conditions de son libre exercice. « Libre exercice ». Qu’est-ce que cela veut dire ? 2 Il se peut qu’à un certain moment, chez un individu, pour des raisons diverses, des régions plus ou moins étendues contribuant directement ou non au fonctionnement du « soufflet » respiratoire se trouvent enraidies, que l’équilibre tonique des groupes musculaires soit perturbé. L’idée, c’est que l’eutoniste peut intervenir pour rééquilibrer l’ensemble et que l’acte respiratoire retrouve son harmonie fonctionnelle. Nous ne manquons pas de moyens pour cela…… et cette démarche n’est pas réservée à la respiration. Petit eutoniste a l’impression d’y voir plus clair. Il bouge un peu dans son fauteuil et passe à une autre question. Beaucoup de méthodes « s’intéressent » à la respiration, avec leurs moyens et selon leurs propres perspectives. * Pour remettre en bonne activité le système respiratoire. * Pour le développer et le conditionner en vue d’une performance – respiration des nageurs, apnée prolongée…… * Pour accéder à une forme de spiritualité – cela depuis des millénaires. A partir de chacune d’elles, on pourrait développer une « pub comparative » exaltant ses mérites mis en valeur par la nullité des autres……..De beaux combats en perspective….et la certitude d’une incompréhension totale, chacun parlant d’une chose différente et voulant faire prévaloir son point de vue. Laissons cela. Petit eutoniste se dit que nous avons chacun une expérience, un vécu sur ce phénomène de la respiration en Eutonie. Les confier à tous en quelques lignes nous conduirait à mieux prendre conscience de la complexité du problème et peut- être, pour la pratique, esquisser quelques lignes directrices. Petit eutoniste voit déjà des dizaines de mails voltiger en tous sens……. Il se frotte les yeux en se demandant s’il ne rêve pas…. Vous savez, dans un fauteuil….. René Bertrand 5 Novembre 2010 René Bertrand : e-mail: [email protected] Notifications d’usage : Reproduction partielle ou intégrale possible, avec mention d’origine Texte publié sous la seule responsabilité de l’auteur et n’engageant pas l’Institut d’Eutonie 3