Vendredi 3 avril 2015 Cancer colorectal Pr Alves, Dr Bouhier-Leporrier, Dr Beauplet TRAITEMENT DU CANCER COLO-RECTAL CHEZ LE PATIENT ÂGÉ Objectif: connaître les spécificités du traitement du CCR chez le sujet âgé Traitement de référence chez les patients âgés ? • Etudes d’enregistrement sur des patients sélectionnés Age; co-morbidités •Résultats pas toujours transposables à l’ensemble de la population • Etudes spécifiques nécessaires chez le sujet âgé •Certaines questions à reposer intensification; biothérapies; biologie •Déterminer des facteurs prédictifs efficacité; tolérance Les cancers digestifs sont fréquents chez les patients âgés Estimation FRANCIM 2010 Modifications pharmacologiques chez le sujet âgé 1. Modifications pharmacocinétiques Diminution du volume de distribution (BMI, Hb, Alb) Diminution de l’excrétion rénale (clairance créatinine) Variation du métabolisme hépatique (CP450) 2. Modifications pharmacodynamiques Diminution des capacités de réparation de l’ADN Diminution des réserves de cellules souches hématopoiétiques Réduction de doses Facteurs de croissance Renutrition Cancer colo-rectal du sujet âgé: tendance au sous-traitement Aparicio et al.Crit Care Oncol Hematol 2009 Evolution de la prescription de chimio adjuvante dans les stades III Mitry. Eur J Cancer 2005 Base de données de l’assurance maladie Tous les CCR diagnostiqués en France en 2009. N=41342; âge médian: 72 ans Doat S et al; European J Cancer; 2014 Chimiothérapie adjuvante Etude cas-témoins données de registre SEER 3357 cancers du colon stade III: Survie en fonction de la prescription d’une CT adjuvante par 5FU •Survie à 5 ans: 52,7% vs 40,7% Hazard ratio : 0,73 [ 0,65-0,82] •Faible variation selon l’âge: HR 75 ans: 0,73 HR 85 ans: 0,78 Comment sont sélectionnés les patients traités ? Biais ++ Monothérapie 5FU 7 essais randomisés: N: 3351 patients Stade II (47%) et III (57%) 15% >70 ans; 0,7% > 80 ans •HR survie globale: 0,76 (0,68-0,85) •Survie à 5 ans: 71 vs 64% •Pas d’interaction entre âge et efficacité du traitement Sargent D, NEJM 2001 Apport de l’oxaliplatine ? Absence d’amélioration de la survie globale après 65 ans. Andre et al, J Clin Oncol; 2009 Sous-groupe >70 ans 315 patients de 70 à 75 ans Folfox 4 vs LV5Fu2: DFS: HR: 0,93 (0,64-1,35) OS : HR: 1,10 ( 0,73-1,65) Tournigand C et al; J Clin Oncol 2012 Absence de bénéfice de l’oxaliplatine après 70 ans ? Base ACCENT, 3 études comparant l’oxaliplatine + 5fu vs 5fu seul ( MOSAIC, NSABP-C07, XELODA) HR: oxaliplatine+FP vs FP Mc Cleary J; JCO 2009 Pas de chimiothérapie pour les stades II après 70 ans ? Etude QUASAR chimiothérapie par 5FU stade II Analyse en fonction de l’âge Effet délétère de la chimiothérapie après 70 ans pour les stades II Recommandations TNCD www.tncd.org Pour les patients de plus de 70 ans STADE II Si facteurs de mauvais pronostic (T4, nombre de ganglions examinés inférieurs à 12, tumeur peu différenciée, invasion lymphatique, veineuse ou périnerveuse, perforation+/occlusion),tumeur MMS, pas de co-morbidités et bon état général: chimiothérapie par LV5FU2 à discuter STADE III chimiothérapie par LV5FU2 seul PRODIGE 34-ADAGE FFCD-GERCOR-UNICANCER-GERICO Adjuvant patients >70 ans, stade III Objectif : survie sans récidive à 3 ans: Groupe 1: +7% dans le bras oxaliplatine Groupe 2: + 15% dans le bras chimiothérapie Chimiothérapie des cancers métastatiques Bithérapie ? Thérapie ciblée ? Tolérance Oxaliplatine Tolérance Irinotécan Tolérance anti-EGFR Tolérance anti-VEGF Comment adapter les traitements? Chimiothérapies avec oxaliplatine Etude FOCUS 2 Phase III, patients fragiles ou âgés, n= 459; âge médian 74 ans (1): taux de réponse oxaliplatine vs pas d’oxaliplatine; p :0,0001 (2): « utilité (contrôle tumoral sans toxicité ) »oxaliplatine vs pas d’oxaliplatine; p=0,003 Pas de bénéfice en survie globale avec l’oxaliplatine P=0,07 pour la survie sans progression Etude FOCUS 2 Taux élevé de neuropathies sévères avec l’oxaliplatine Diarrhée et syndrome mains-pieds grade 3/4 supérieurs avec la capécitabine qu’avec le 5 FU IV. Action éducative vis à vis de ces toxicités. CHIMIOTHÉRAPIE AVEC IRINOTECAN Analyse poolée irinotecan vs 5FU • Analyse à postériori de 4 essais de phase III • 70-74 ans: n=414, 75-79 ans: n=160; > 80: n=25 Résultats de l’essai FFCD 2001-02 Mitry et al, JFHOD 2013 Tolérance FFCD 2001-02 FFCD 2001-02 prédiction de la toxicité Des paramètres gériatriques prédisent la toxicité Aparicio T et al, JCO 2013 FFCD 2001-02: résultats survie Facteurs pronostiques Analyses multivariées exploratoires (Cox) Mitry et al JFHOD 2013 Chimiothérapie séquentielle: mono ou bithérapie ? Essai FOCUS Stratégie d’intensification progressive CCR M+ N=2135 LV5FU2CamptoFolfox LV5FU2Folfox/FolfiriFolfox/Folfiri Folfox/FolfiriFolfox/Folfiri Critère principal: temps jusqu’à échec des 2 premières drogues Seymour MT; Lancet 2007 Essai FOCUS Survie médiane: monothérapie continue: 13,9 mois mono puis chimio combinée: 15,1 mois combiné d’emblée: 15,9 mois Pas de différence significative Résultats similaires dans l’essai de Koopman Absence de bénéfice d’une chimiothérapie combinée d’emblée. La monothérapie reste une option pour les patients âgés présentant des métastases non résécables. Elle permet d’apprécier la tolérance dans cette population à risque en limitant les toxicités grade 3 et 4. PAUSE THÉRAPEUTIQUE Cancer colo-rectal avec métastases non résécables. Essai OPTIMOX 2: 6 cycles de Folfox suivis d’une pause thérapeutique ou d’une maintenance par LV5FU2 et réintroduction de la chimiothérapie par une bithérapie si progression (n=202) Survie globale : 19,5 mois vs 23,8 mois (NS) Essai COIN : Folfox ou Xelox jusqu’à progression ou pendant 3 mois suivi d’une pause thérapeutique si absence de progression. Survie globale identique dans les 2 bras. Qualité de vie meilleure en cas de pause. Moins de toxicité neurologique. CONCLUSIONS • Evaluation gériatrique si score G8 < 14. • Présentation systématique en RCP • Adapter le traitement au patient et à sa tumeur: Monothérapie possible par 5FU. Concept de pause thérapeutique. Bichimiothérapie si métastases symptomatiques ou potentiellement résécables. • Dès la prise en charge initiale: Mesures sociales Prise en charge des co-morbidités Correction d’une dénutrition. CAS CLINIQUE cancer du rectum chez une femme de 88 ans K Bouhier, A Alves CHU de CAEN HISTOIRE DE LA MALADIE • Me D, âgée de 88 ans • ATCD • HTA (Lisinopril) • Bronchite chronique (Bronchodual) • Rectorragies, troubles du transit • Coloscopie • Tumeur du moyen rectum de 10 à 15cm de la MA hémi-circonférentielle, franchissable • Biopsie : Adénocarcinome de type colorectal infiltrant moyennement différencié. Faites vous un bilan ? SI OUI LE(S) QUEL(S) BILAN • Écho-endoscopie • Présence de 2 adénopathies à 16 et 15 cms de la marge anale: une de 4.4 mm et l'autre de 5.7 mm, arrondies, hypoechogènes donc à caractère néoplasique. La lésion est étendue de 15 à 10 cms de la marge anale, sur une largeur de 23 mm et franchit à un endroit la musculeuse. Lésion du moyen rectum usT3N+ • TDM TAP : RAS IRM Quelle (s) stratégie (s) thérapeutique(s) ? • • • • • Chirurgie d’emblée Radio-chimiothérapie néoadjuvante ? Radiothérapie néo-adjuvante ? Chimiothérapie néo-adjuvante ? Abstention thérapeutique ? Impact de la radiothérapie néoadjuvante réduction significative du taux de récidive locale ! Overall survival at 2 years: 82% vs 81,.8% (NS) Essai Néerlandais Multicentrique randomisé Kapiteijn E, et al. N Engl J Med 2001. 8,2% P<0.001 2,4% Quel(s)s sont les risque(s) péri-opératoires pour la patiente pour la patiente ? • Faisabilité de l’intervention • Laparoscopie • Résultats opératoires • Mortalité • Morbidité Avant l’intervention AINS Après l’intervention Pendant l’intervention et chez les sujets âgés ? Efficacité de la réhabilitation rapide chez les sujets âgés sélectionnés Moins de confusion , de complications pulmonaires Durée d’hospitalisation réduite Stratégie thérapeutique • Radiothérapie courte • Schéma suédois • • • • • Intervention 8-10 jours après Préparation colique Immuno-nutrition 7 jours avant Cs stomathérapie Trajectoire • convalescence Suites opératoires • Adénocarcinome du moyen rectum T3N+. Radiothérapie selon un schéma suédois - sigmoïdo proctectomie coelio convertie anastomose latéro-terminale protégée par une colostomie • Morbidités • Iléus post-opératoire et infection urinaire • Sortie à J18 • Anatomo-pathologie • adénocarcinome colique moyennement différencié infiltrant la sous-muqueuse. Présence d'emboles vasculaires. Absence d'engainement péri-nerveux. Absence de métastase ganglionnaire (0N/16). Budding au front d'invasion. Limites d'exérèse indemnes de néoplasme (MC : 10 mm, MD : 35 mm). Stade pTNM selon l'UICC 2009 : pT3 N0 A distance Fermeture de la colostomie par voie élective à 3 mois Suites simples En conclusion • L’âge n’est pas une contre-indication • Projet thérapeutique • Y compris chirurgical lourd • Évaluation sérieuse des comorbidités • Progrès • Prise en charge multi-modale • Chirurgie mini-invasive Prise en charge péri-opératoire du Cancer colorectal Discussion Prédire le risque opératoire chez les personnes âgées • Dans une population de personnes âgées de 74 ans (±6) • la mortalité après chirurgie majeure à 6 mois est de 15% • facteurs prédictifs gériatriques préop Robinson TN, Redefining geriatric preoperative assessment using frailty, disability and co-morbidity. Ann Surg. 2009 Sep Prédire le risque opératoire chez les personnes âgées Méta-analyse: 54 articles publiés entre 2000 et 2013 (60 ans et +) évaluant l’impact des facteurs gériatriques sur la mortalité: 10% à 40% si déficit cognitif (adjusted [HR]= 1.26 [95%CI, 1.06-1.49] to 5.77 [95%CI, 1.5521.55]), 10% à 17% si malnutrition (adjusted [OR]= 0.88 [95%CI, 0.78-1.01] to 59.2 [95%CI, 3.6-982.9]), 11% à 41% si vit en EHPAD (adjusted OR= 1.5 [95%CI,1.02-2.21] to 3.27 [95%CI, 2.81-3.81]) ou sur les complications post-op (confusion, entrée en institution, déclin fonctionnel). Déclin cognitif préop est associé à la survenue d’une confusion post-op (adjusted OR= 17.0; 95%CI, 1.2-239.8; P < .05). Preoperative assessment of the older patient: a narrative review. JAMA . 2014 May. Oresanya B Prédire le risque opératoire en oncogériatrie • Etude PACE: prospective sur la morbimortalité à J30, incluant des patients âgés opérés d’un cancer du sein, colorectal, gastrointestinal et autres, acceptant une évaluation préopératoire • 33% de complications Preoperative Assessment of Cancer in Elderly patients: a pilot study. Support Cancer Ther. 2003 Oct Audisio RA Prédire le risque opératoire en oncogériatrie • Importance d’études spécifiques sur: • la morbimortalité mais aussi la qualité de vie; • l’évaluation préopératoire prédictive (outil), pour adapter la chirurgie PREOP study: Preoperative Risk Estimation for Onco-geriatric Patients (2010) évaluant le GFI, Ves-13 et TUG comparés au outils PACE • Importance de la collaboration avec gériatres, anesthésistes-réanimateurs, cardiologues The surgical management of elderly cancer patients; recommendations of the SIOG surgical task force. Eur J Cancer. 2004 May. Audisio RA, et al Perspectives Première reco ERAS 2005 en chirurgie colique: Fearon et al 6 recommandations de bonne pratique récentes dont 3 en chirurgie digestive: • Reco françaises en Colorectale: SFAR/SFCD 2014 • Reco internationales ERAS: 2012 Guidelines for Perioperative Care in Elective Colonic Surgery, Rectal/Pelvic Surgery, for Pancreaticoduodenectomy Recommandations fortes +: do • Préop: info patient, absence de jeûn total (solide 6h avant, eau 2h avant), nutrition (cardohydrates) • Perop: Prévention hypothermie, antibioprophylaxie, laparoscopie, remplissage vasculaire, prévention Nausées-Vomissements Post-Op, prévention thrombose (haute dose héparine) • Analgésie péridurale thoracique per-op (associée à l’AG); poursuivie en post-op (J2) pour la prévention de l’iléus et promotion de la motilité gastrointestinale, efficacité antalgique associée au paracétamol • Post-op: • Ablation de SU 24-48h • Nutrition: compléments nutritrionnels oraux précoces <24hs • Mobilisation rapide: lever 2h/jour J1, 6h/jour J2 Recommandations fortes -: do not • • • • • Prémédication sédative Préparation colique Laisser le tube nasogastrique post-op Drainage abdo non recommandé Naloxone Conclusion sur la CHIRURGIE colorectale • Si possible programmée: Actions d’information pour favoriser le diagnostic précoce, et limiter les formes compliquées • Anticiper les complications en identifiant les patients à risque, optimisation pré-op • Chirurgie mini-invasive (laparoscopie) • Réhabilitation post-opératoire avec Analgésie PériDurale Thoracique (et autres reco HAS)