Plan phytoremédiation et métaux lourds

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Phytoremédiation
et
métaux lourds
27/05/2014
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SOMMAIRE
I- Les métaux lourds
1°) Définition
2°) Origines des métaux lourds
a) Les sources naturelles
b) Origines anthropiques
c) Exemples
d) Le cas de la contamination diffuse des eaux en France
3°) Comportement des métaux lourds dans les eaux
a) Spéciation
b) Mobilité
c) Phytodisponibilité et absorption
4°) Les risques
II- La phytoremédiation
1°) Définition
2°) Les différentes techniques
a) Phytostabilisation
b) Phytodécontamination
i ) Phytodégradation
ii ) Phytovolarisation
iii ) Phytoextraction
iv ) Rhozofiltration
3°) Exemple de dépollution hors site
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Introduction
Le sol et l’eau sont des ressources naturelles précieuses sur lesquelles se fondent la
durabilité de l'agriculture et la civilisation de l'humanité. Malheureusement, elles ont été
soumises à l'exploitation intensive et ont été sévèrement dégradés ou pollués par des activités
anthropiques. La pollution inclut des sources ponctuelles telles que des émissions et des
effluents issus des industries, des gaz d’échappements des véhicules et l’exploitation, fusion
des métaux ; des sources diffuses telles que des sels solubles (naturels et artificiels),
l'utilisation des insecticides/des pesticides, la disposition des déchets municipaux et
industriels dans l'agriculture, et l'utilisation excessive des engrais (McGrath et all., 2001 ;
Nriagu et Pacyna, 1988 ; Schalscha et Ahumada, 1998). Chaque source de contamination a ses
propres effets préjudiciables pour les plantes, animaux et finalement pour la santé des
personnes ; les rejets de métaux lourds dans les sols et les eaux sont cependant d’une grande
préoccupation du fait de leur persistance dans l'environnement et de part leur caractère
cancérigène pour les êtres humains. Ils ne peuvent pas être détruits biologiquement et sont
seulement transformés d'un état d'oxydation ou de complexe organique à un autre (Garbisu et
Alkorta, 2001 ; Gisbert et all., 2003). Par conséquent, la pollution par les métaux lourds
constitue une grande menace potentielle pour l'environnement et pour la santé des personnes.
Afin de maintenir une bonne qualité des sols et des eaux et les maintenir éloigné d'une
éventuelle contamination, des efforts continus ont été faits pour développer des technologies
qui sont faciles à utiliser et économiques. Les approches physico-chimiques ont été largement
utilisées pour remédier aux sols et eaux pollués, particulièrement à une petite échelle.
Cependant, ils éprouvent plus de difficultés pour une large échelle de remédiation en raison
des coûts élevés et des effets secondaires. L'utilisation des espèces de plantes pour le
nettoyage des sols et les eaux pollués appelées phytoremédiation a gagné un intérêt croissant
depuis la décennie passée, comme étant une technologie émergente rentable. Beaucoup
d'études ont été entreprises dans ce domaine durant les deux dernières décennies. De
nombreuses espèces de plantes ont été identifiées et examinées pour leurs caractéristiques
dans l'absorption et l'accumulation de différents métaux lourds. Des mécanismes d'absorption
de métaux aux niveaux de plantes entières et cellulaires ont été étudiés.
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I- Les métaux lourds
1°) Définition
Il existe plusieurs définitions des métaux lourds mais aucunes définitions scientifiques,
technique ou juridique qui soient unanimement reconnue.
 Certains auteurs définissent les métaux lourds comme les éléments métalliques ayant
une masse volumique supérieure à une certaine valeur (cette valeur minimale variant
entre 4000 kg/m3 et 5000 kg/m3 selon les auteurs).
 D’autres définissent comme métaux lourds les éléments métalliques compris entre le
cuivre et le plomb dans le tableau périodique des éléments (excluant donc le fer, le
chrome).
 Pour d’autres il s’agit de tous les éléments métalliques à partir de la quatrième période
du tableau périodique des éléments.
 Par confusion, compte tenu du caractère potentiellement toxique de composés de
certains des métaux lourds (mercure, plomb, cadmium en particulier), on inclut même
parfois dans la catégorie des métaux lourds certains éléments toxiques comme
l’arsenic (métalloïde), voire certains composés organiques. Il vaut mieux dans ce cas
parler d’« éléments traces ».
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89l%C3%A9ment-trace_m%C3%A9tallique
La classification en métaux lourds est d'ailleurs souvent discutée car certains métaux
toxiques ne sont pas particulièrement « lourds » (le zinc), tandis que certains éléments
toxiques ne sont pas tous des métaux (l'arsenic par exemple). Pour ces différentes raisons, la
plupart des scientifiques préfèrent à l'appellation métaux lourds, l'appellation « éléments en
traces métalliques » -ETM- ou par extension « éléments traces ».Ils sont présents à l'état de
traces (<0,1%) dans la croûte terrestre.
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Ces ETM sont présents dans tous les compartiments de l’environnement, mais en général en
quantités très faibles. Ils peuvent nuire aux organismes vivants à faibles concentrations et ont
tendance à s'accumuler dans la chaîne alimentaire.
On distingue deux groupes de métaux en relation avec la biologie.
- Cr, Al, As, Cd, Hg, Pb SONT NON-ESSENTIELS et TOXIQUES
- Fe, Zn, Mg, Mn, Cu… sont ESSENTIELS mais peuvent devenir TOXIQUES
lorsqu’ils sont présents en excès.
2°) Origine des métaux lourds
La pollution de l’eau et des sols par les métaux lourds est un enjeu mondial. En
Europe occidentale, 1 400 000 sites ont été affectés par des métaux lourds (McGrath et all.,
2001), dont plus de 300 000 ont été pollués ; les chiffres en Europe pourraient être beaucoup
plus élevés car les problèmes de pollution se posent de plus en plus dans les pays européens
central et oriental - (Gade, 2000). Aux Etats-Unis, il y a 600 000 champs agricoles qui sont
souillés par des métaux lourds et qui ont besoin d’être remis en état (McKeehan, 2000). Selon
des statistiques du gouvernement, les mines de charbon ont souillé plus de 19 000 kilomètres
de fleuves et rivières aux USA. Plus de 100 000 ha de cultures, 55 000 ha de pâturage et 50
000 ha de forêt ont été perdus (Ragnarsdottir et Hawkins, 2005). Le problème de la pollution
des sols est également un grand défi en Chine où un sixième des terres totales cultivables ont
été pollués par des métaux lourds (Liu, 2006). La pollution du sol et de l’eau est également
grave en Inde, au Pakistan et au Bangladesh où les petites unités industrielles déversent leurs
effluents non traités dans des drains de surface qui se répartissent près des champs agricoles.
Dans ces pays les eaux d'égout brut sont souvent aussi employées pour produire des légumes
près des grandes villes.
Les métaux lourds qui ont été identifiés dans les environnements pollués sont principalement
As, Cu, Cd, Pb, Cr, Ni, Hg and Zn. Les métaux lourds contribuent par exemple pour 42%
dans la pollution d’une nappe phréatique en France.
a) Les
Les sols et les
naturellement des
de roches mère ou à des
atmosphériques. Le
employé pour désigner
métaux d'origine
mesure dans les sols et
dépend principalement
roche mère (Baize,
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sources naturelles :
sédiments contiennent
métaux dus à l’érosion
dépôts
fond géochimique est
la concentration en
naturelle que l'on
les sédiments. Il
de la composition de la
2000).
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b) Origines anthropiques
¤ L'activité minière et les fonderies
L’industrie métallurgique des métaux non-ferreux a été largement développée dans le
nord de la France. Dans cette région, 17 sites en activité ou en friche sont contaminés par le
zinc, le plomb et le cadmium (Thiry et Van Oort, 1999). Les métaux exploités sont
principalement présents dans le minerai sous forme de sulfures, tels que la sphalérite (ZnS) et
la galène (PbS), qui contiennent en impureté de nombreux autres métaux (Cd, Cu, et Ag entre
autres) et non métaux (principalement As). Cette exploitation a généré de grandes quantités de
scories et de débris de creusets, souvent encore très riches en métaux, qui étaient stockés à
l'air libre et sans précautions, conduisant à une contamination directe du site.
Sulfures métalliques
Abaissement pH
Désorption et mobilité cations métalliques
Eau, oxydation
¤ L’agriculture
De nombreux fertilisants organiques et minéraux employés en agriculture contiennent
des métaux.
- Les fumiers, et particulièrement les déjections de porcs et de volailles, contiennent
principalement du zinc et cuivre. En 1980, au Royaume-Uni, la teneur moyenne de ces
fumures était respectivement de
600 mg.kg-1 et 870 mg.kg-1, pour le zinc et le cuivre (Alloway, 1995).
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- Les boues urbaines qui proviennent du traitement des eaux usées contiennent du zinc, du
plomb, du cuivre, du chrome, et du cadmium. Malgré une nette amélioration de la qualité de
ces boues depuis une dizaine d'années, leurs teneurs en métaux sont estimées trop élevées
pour leur valorisation agricole (Baize, 1997).
- Les engrais à base de chaux peuvent s’avérer riches en plomb, et dans une moindre mesure
en zinc, cuivre et cadmium. Les engrais phosphatés contiennent également ces métaux, avec,
dans le cas des engrais naturels phosphatés, des teneurs en cadmium qui peuvent s’avérer
importantes (jusqu’à 170 ppm), selon leur provenance géographique. En France, les sols
agricoles en milieu rural (non contaminés par les activités industrielles), bien que très peu
pollués, ont des teneurs en cadmium souvent deux fois plus élevées qu'un sol similaire en
milieu forestier (Baize, 2000).
- Les pesticides sont également riches en métaux (Cu, As, Hg, Pb, Zn), comme par exemple
l'arsenate de plomb (PbHAsO4), qui a longtemps été employé. Les sels de cuivre employés
comme traitement fongicide sont à l'origine de la contamination en cuivre dans de nombreux
sols de vignobles (Chaignon, 2001).
Frédéric PANFILI, 2004 - Etude de l’évolution de la spéciation du zinc dans la phase solide
d’un sédiment de curage contaminé, induit par phytostabilisation. THESE, p7.
Il existe d’autres sources anthropiques tel que les activités industrielles (électronique,
peinture, traitement de surfaces…), domestiques et urbaines (combustion des énergies
fossiles, décharges, rejet des eaux usées), et militaires.
c) Exemples
Les sources de ces divers métaux lourds sont énumérées dans le tableau :
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Heavy
metals
As
Cu
Cd
Cr
Pb
Hg
Se
Ni
Zn
Sources
Semiconductors, petroleum refining, wood preservatives, animal feed additives, coal
power plants, herbicides, volcanoes, mining and smelting (Nriagu, 1994; Walsh et al.,
1979)
Electroplating industry, smelting and refining, mining, biosolids (Liu et al., 2005)
Geogenic sources (Baize, 1997), anthropogenic activities (Nriagu and Pacyna, 1988),
metal smelting and refining, fossil fuel burning, application of phosphate fertilizers,
sewage sludge (Alloway, 1995; Kabata-Pendias, 2001)
Electroplating industry, sludge, solid waste, tanneries (Knox et al., 1999)
Mining and smelting of metalliferous ores, burning of leaded gasoline, municipal
sewage, industrial wastes enriched in Pb, paints (Gisbert et al., 2003; Seaward and
Richardson, 1990)
Volcano eruptions, forest fire, emissions from industries producing caustic soda, coal,
peat and wood burning (Lindqvist, 1991)
Coal mining, oil refining, combustion of fossil fuels, glass manufacturing industry,
chemical synthesis (e.g., varnish, pigment formulation)
Volcanic eruptions, land fill, forest fire, bubble bursting and gas exchange in ocean,
weathering of soils and geological materials (Knox et al., 1999)
Electroplating industry, smelting and refining, mining, biosolids (Liu et al., 2005)
Mohammad Iqbal Lone, Zhen-li He, Peter J. Stoffella, and Xiao-e Yang, 2003 Phytoremediation of heavy metal polluted soils and water: Progresses and perspectives.
Journal of Zhejiang University Science.
d) Le cas de la contamination diffuse des eaux en France
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Répartitions des sources de pollution pour quelques polluants
Durant des siècles, les teneurs en métaux dans le milieu naturel ont peu varié, mais
avec l'avènement de l'ère industrielle, les activités humaines sont devenues une nouvelle
source d'émission de métaux, les concentrant dans l'air (Nriagu, 1989), l'eau (Stumm et
Morgan, 1996) et les sols (Kabata-Pendias et Pendias, 1992; Alloway, 1995; Baize, 1997)
représentent un risque de contamination de la faune et la flore. Les sols et les sédiments
constituent naturellement les réceptacles de tous les polluants métalliques (et organiques). Les
métaux y sont plus ou moins fortement fixés sur les constituants secondaires des sols (argiles,
oxydes et hydroxydes (Fe, Mn, Al), matière organique). La toxicité des métaux dépend
évidemment de leur teneur dans le milieu, mais surtout de leur spéciation, i.e. leur forme
chimique, qui est elle-même conditionnée par les caractéristiques physico-chimiques et
minéralogiques du milieu. En effet, c’est la spéciation qui gouverne la mobilité et la
biodisponibilité d'un élément, c’est-à-dire « son aptitude à passer d'un compartiment
quelconque du sol à un être vivant (bactérie, végétal, animal, homme) » (Baize, 1997).
L’importance de la connaissance de la spéciation pour évaluer la toxicité potentielle d’une
pollution métallique est illustrée par l’étude de Cotter-Howells et Thornton (1991) qui a
démontré qu’une population d’enfants peut vivre dans un environnent fortement pollué en
plomb sans être contaminée par cet élément quand le métal est présent dans le sol sous forme
de pyromorphite (ou chloropyromorphite) (Pb5(PO4)3Cl), un phosphate de plomb très stable
(Ksp=10-84, Nriagu, 1984).
3°) Comportement des métaux et mobilisation vers les eaux
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a) Spéciation
Les métaux existent sous leur forme élémentaire dite métallique ou sous forme de
dérivés tels les sels, les oxydes ou les sulfures lorsqu'ils sont combinés avec certains éléments
non métalliques. Par un processus d'oxydation, le métal est transformé en cation (ion positif)
et se combine avec un anion (ion négatif). Exemple : attaque du mercure métallique (Hg) par
du soufre (S) pour donner du sulfure de mercure (HgS). Beaucoup de sels sont solubles dans
l'eau et c'est souvent sous cette forme que les métaux contaminent l'environnement et se
retrouvent, en final, dans l'alimentation. Les métaux peuvent également se combiner avec des
molécules organiques, c'est à dire contenant du carbone (carbone lié à lui-même et/ou à de
l'hydrogène comme dans les hydrocarbures) pour donner parfois des composés très toxiques,
tels les dérivés du mercure ou du plomb.
Les mécanismes d'action d'un élément minéral ou organominéral sur un organisme vivant ou
un écosystème sont liés à sa spéciation, c'est à dire aux formes chimiques sous lesquelles il est
présent et qui sont fonction des propriétés physicochimiques du milieu (état oxydo-réducteur,
pH ... ). Des analyses pratiquées sur des échantillons permettent ainsi de séparer, d'identifier et
de doser chacune des formes chimiques d'un même élément ce qui contribue à analyser et
prévenir leurs effets néfastes sur la santé.
Les variations des conditions du milieu modifient la distribution des ETM entre les phases
constitutives du sol. La mobilité des micro-éléments est définie comme leur aptitude à être
transféré vers des compartiments où ils sont de moins en moins énergiquement retenus, le
compartiment ultime étant représenté par la solution du sol (Juste, 1995).
La répartition d'un ETM dans les compartiments du sol ne demeure donc pas figée au cours
du temps. En permanence les éléments passent d’une forme à une autre sous l'influence de
modifications externes naturelles ou anthropiques (changements de pH, de degré d'aération,
de température, d'hydratation, d'environnement chimique, etc.).
b) Mobilité
La mobilité c'est l'aptitude d'un élément à passer d'un compartiment où il est retenu avec une
certaine énergie dans un autre, où il est retenu avec une moindre énergie.
Cette mobilité est dirigée par un certain nombre de facteurs et de conditions du milieu.
atctoxicologie.free.fr/archi/bibli/speciation.doc
¤ Le pH
La variation de pH (naturelle ou anthropique) semble être le facteur dont l'action sur la
mobilité des métaux est la plus déterminante. L'abaissement du pH favorise la mobilité des
ETM, notamment par mise en solution de sels métalliques ou destruction de la phase de
rétention. Inversement, l'augmentation du pH provoque l'immobilisation par formation de
composés insolubles ou accroissement de la capacité d'échange canonique. On notera
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cependant que certains ETM comme le bore obéissent moins strictement à ce type de
comportement ou, au contraire, comme le molybdène, l'arsenic, le sélénium présentent un
comportement opposé : leur mobilité augmente avec le pH qui est plus élevé en sols calcaires.
Ces fluctuations sont en partie expliquées par la prise de nutriments sous formes
cationique et ionique par les racines (Hinsiger, 1998 ; Hinsiger et al., 2003).
Afin de préserver un pH constant dans ses cellules (7,3), la plante libère des ions H + ou
absorbe des anions pour compenser les absorptions de cations, et libère des ions OH- et
HCO3- ou prélève des cations pour compenser la prise d’anions.
Par ailleurs, l’azote est un nutriment essentiel pour la plante qui le prélève facilement. Grâce
aux micro-organismes du sol, cet élément est prélevé sous forme anionique (NO 3-) et
cationique (NH4+). Ainsi, selon la forme azotée dominante dans le milieu, la rhizosphère sera
soit acidifiée, soit alcalinisée (Hinsiger et al., 2003 ; Straczek, 2003). L’azote est donc un
paramètre important expliquant les variations de pH et a donc un impact sur la mobilité des
métaux dans le sol.
Le milieu peut également être acidifié par une libération de CO 2 du à la respiration des racines
et des micro-organismes, dans la rhizosphère.
¤ Le potentiel d'oxydo-réduction
Le degré d'aération du sol est déterminé par les pratiques culturales (irrigation,
tassement par passage répété d'engin, apport de matière organique biodégradable donc
consommatrice d'oxygène) et par les événements climatiques (précipitations massives
entraînant des conditions hydromorphes). L'ensemble de ces facteurs favorise l'anoxie
modifiant ainsi la mobilité de certains ETM comme le manganèse et le fer dont les formes
réduites sont plus mobiles dans le sol que les formes oxydées. Outre l'influence directe du
potentiel rédox du milieu sur l'état d'oxydation des ETM et donc leur mobilité, ce facteur
intervient également sur les composants du sol qui fixe les métaux.
Ainsi en conditions d'aération satisfaisantes du sol, les composés ferriques et
manganiques sont très peu solubles et immobilisent donc les métaux qui leur sont associés. A
l'inverse, en conditions d'aération limitantes résultant par exemple du compactage ou de la
battance du sol, les composés du fer et du manganèse sont réduits et solubilisés ; ils libèrent
donc les éléments-traces qui leur étaient associés.
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Le pE est également lié aux plantes. La consommation d’O2 et la production de CO2
abaissent le potentiel redox au voisinage des racines.
Les travaux de Förstner (1985) résument le degré de mobilité relative des ETM en fonction du
pH et du potentiel rédox.
Effets du pH et du potentiel redox sur la mobilité des ETM du sol
¤ La température et l'humidité du sol
Elles jouent un rôle indirect en favorisant l'activité biologique du sol, et donc la
production de substances acides ou complexant issues de la biodégradation de matières
organiques. L'élévation de température agit directement sur la dissolution de composés fixant
un ETM, facilitant ainsi son absorption par la flore. L'humidité agit également directement
dans les processus de précipitation et de solubilisation. Par ailleurs, un excès d'hygrométrie
peut conduire à un défaut d'aération du sol, dont les conséquences ont été précisées plus haut.
¤ L'apport de matière organique
L'apport de matière organique permet d'immobiliser les ETM du sol qui ont pour elle
une grande affinité, mais la minéralisation ultérieure peut les remettre en solution, il ne s'agit
donc que d'une immobilisation temporaire.
Patrick PERRONO, 1999 - Les micro-polluants métalliques et les sols amendés par des boues
résiduaires urbaines. Mém. D.U.E.S.S., D.E.P., Univ. Picardie, Amiens.
Les conditions physico-chimique et biologique du sol conditionnent la spéciation des
métaux pouvant mener à une mobilisation et donc une potentielle solubilisation et
contamination de la nappe phréatique. Les facteurs liés au sol et biologique sont donc à
l’origine de la phytodisponibilité des éléments traces métalliques.
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c) Phytodisponibilité et absorption
La phytodisponibilité est la capacité des métaux à entrer dans la plante depuis le sol et
ainsi être disponible au sein de la chaîne alimentaire. Elle est la résultante d’un ensemble de
processus successifs qui participent au transfert de l’élément du sol vers la plante.
La phytodisponibilité s’élabore en trois phases :
entrée de l’élément dans la solution de sol, c'est-à-dire aux alentours des racines.
- transport de l’élément par diffusion (=prélèvement des éléments par les racines,
créant un gradient de concentration qui induit le sens de migration des ions vers la surface
racinaire) et/ou advection (=provoquée par la transpiration de la plante) vers les surfaces
racinaires.
prélèvement de l’élément par les racines en même temps que les substances
nutritives.
La paroi des cellules des racines est le premier obstacle que rencontrent les métaux
lourds. Or, rien ne les empêche de visiter les espaces intercellulaires du cortex. C’est donc à
cet endroit que les éléments trace métalliques ont tendance à s’accumuler en étant fortement
liés aux groupements carboxyliques des composés pecto-cellulosiques des parois. Puis, les
métaux peuvent pénétrer la paroi pecto-cellulosique en utilisant les mêmes voies que les
composés vitaux absorbés par la plante. A ce moment, la température joue un rôle très
important dans l’intensité du transfert dans la plante.
Certains métaux comme le cuivre, le cadmium et le mercure peuvent endommager la paroi
cellulaire en diminuant son étanchéité. Au contraire, le zinc, lui, protège les membranes
cellulaires contre l’oxydation.
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Une autre voie de pénétration de la plante se fait par les feuilles. En effet, les éléments
traces peuvent être absorbés par les parties aériennes des plantes à partir de dépôts
atmosphériques. Ils traversent alors la cuticule. Ainsi, l’incinération des déchets ménagers
constitue une véritable source de pollution pour les espèces environnantes.
Les contaminants peuvent également être apportés par des projections dues à l’érosion
hydrique et éolienne (Pinder et MacLeod, 1988). Les quantités de terres polluées retenues par
le végétal sont très importantes.
Ces phénomènes sont à l’origine d’une incorporation de métaux en quantités qui excèdent
largement celles prédites à partir de la seule absorption racinaire mesurée en conditions
contrôlées.
Une fois dans le cytoplasme des cellules des racines, les métaux sont complexés par des
ligands organiques ou précipités sous forme de granules.
La complexation est le moyen d’immobilisation dominante. Les métaux vont alors être
transférés dans les vacuoles qui permettent la séquestration des éléments toxiques pour la
plante, ou dans les parties aériennes.
Selon les espèces mais aussi selon les métaux, le stockage se fera majoritairement dans les
racines ou dans les feuilles.
La quantité d'ETM absorbée par une PLANTE est très variable. Elle dépend :
• de la famille et de l' ESPÈCE (maïs ≠ blé ≠ épinard, etc.)
• de la VARIÉTÉ (blé "Soissons" ≠ du blé "Trémie")
• de l'ORGANE considéré (grain, tiges, feuilles, racines...)
• des PROPRIÉTÉS NATURELLES du SOL où cette plante est cultivée (Granulométrie,
présence de calcaire, abondance des oxydes de Fe, Mn, etc.)
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• des PROPRIÉTÉS ACQUISES par le SOL suite aux pratiques agricoles successives
amendements, fertilisations) : le pH ou l'abondance de l'ion Cl-.
TROIS IDÉES à RETENIR :
• Il n'y a généralement aucune relation entre la TENEUR TOTALE d'un ETM dans le
SOL et sa TENEUR dans un ORGANE d'une PLANTE (Sauf cas de pollutions
massives) ;
• Outre la "spéciation", le principal facteur de mobilité et de phytodisponibilité est le pH
du sol (avec un seuil vers pH 6,5) ;
• D'autres facteurs jouent fortement : par ex. l'abondance et la nature des
oxydes/hydroxydes de fer et de manganèse (phases solides à fort potentiel de rétention
des métaux)…
INRA-CONTAMINATIONS des SOLS en ETM CONSÉQUENCES et DANGERS
4°) Les risques
Publié le 12 juin 2008 par Terredefemme
Aluminium, arsenic, beryllium, cadmium, cuivre, fer, plomb, mercure, nickel... La
présence de métaux lourds dans nos systèmes est très grave car ces métaux sont capables de
causer de graves problèmes de santé en interférant avec le fonctionnement biologique normal.
Bien que l'on puisse les trouver dans des concentrations élevées dans le corps, un certain
nombre de ces métaux lourds (aluminium, béryllium, cadmium, lomb et mercure) n'ont pas de
fonction biologique connue.
D'autres (arsenic, cuivre, fer et nickel) sont jugés essentiels à faible concentration, mais sont
toxiques à des niveaux élevés.
De manière générale, les métaux lourds perturbent les fonctions métaboliques de base de deux
façons:
1. Tout d'abord, ils s'accumulent et perturbent la fonction des organes vitaux et des glandes
tels que le cœur, le cerveau, les reins, les os, le foie, etc
2. Deuxièmement, ils déplacent les nutritiments essentiels que sont les minéraux qui ne
remplissent plus leur fonction biologique. Par exemple, les enzymes sont des catalyseurs pour
la quasi-totalité des réactions biochimiques dans tous les processus du métabolisme. Au lieu
d'avoir du calcium dans une réaction enzymatique, du plomb ou du cadmium peut se trouver à
sa place. Les métaux toxiques ne peuvent remplir le même rôle que les minéraux essentiels,
par conséquent, leur présence perturbe l'activité enzymatique.
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Parce que leur impact se fait à un niveau si fondamental, les métaux lourds peuvent être des
facteurs causaux dans littéralement tous les problèmes de santé.
La réalité incontournable est qu'il est impossible à notre époque de ne pas être exposés aux
métaux lourds. C'est seulement une question de combien et à quelle fréquence.
La présence de métaux lourds dans les eaux ou les sols peut aussi avoir un impact écologique,
notamment sur les communautés bactériennes qui sont généralement plus sensible aux métaux
lourds que les plantes et aux animaux. Les impacts des métaux lourds sur les communautés
microbiennes peuvent intervenir sur la biomasse, la structure et sur l’activité enzymatique.
 Biomasse
Les métaux lourds sont réputés pour leur toxicité sur la plupart des microorganismes. Leurs
effets de dénaturation des protéines ou de destruction de l’intégrité de la membrane cellulaire
affectent la croissance, la morphologie et le métabolisme de ces microorganismes (Leita et al.,
1995). Ces altérations conduisent à des réductions de biomasse microbienne. De nombreuses
études montrent que la biomasse bactérienne d’un sol a tendance à diminuer suite à une
contamination par un métal.
 Structure de la communauté microbienne (génétique et fonctionnelle)
Le stress par les métaux lourds entraîne des modifications plus ou moins drastiques dans la
structure des communautés microbiennes. Les études de l’impact de métaux lourds sur la
diversité de la communauté bactérienne dans le sol ont montré surtout une influence négative.
L’ajout de métaux lourds entraîne donc la disparition des populations les plus sensibles et
subséquemment l’adaptation des populations les plus résistantes.
 Activité enzymatique
D’autres propriétés biologiques largement étudiées dans les études d’impact concernent les
activités enzymatiques, dont les activités respiratoires. L’effet néfaste des métaux lourds sur
les activités enzymatiques du sol a souvent été souligné. La sensibilité des activités vis-à-vis
des métaux peut dépendre du type d’enzyme. Les sols contaminés par les métaux lourds
peuvent perdre certaines de leurs propriétés biochimiques indispensables au bon
fonctionnement de l’écosystème.
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Origines et conséquences de la pollution de certains métaux lourds
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II- La phytoremédiation
1°) Définition
La phytoremédiation n'est pas un concept nouveau (WALTON et ANDERSON, 1992,
CUNNINGHAM et LEE, 1994) : il y a 300 ans, on utilisait déjà les plantes pour le traitement
de l'eau. Cependant, depuis le milieu des années 70, suite à différents rapports indiquant que
les pesticides persistent souvent plus longtemps dans les sols non végétalisés que dans les sols
végétalisés, la remédiation basée sur les plantes a été proposée pour les boues draguées et les
sols contaminés par les métaux et les toxiques organiques.
Au cours de l’évolution, les plantes ont développé des mécanismes pour s'adapter et se
multiplier dans des conditions hostiles (polluants, composés toxiques produits par d'autres
plantes, microorganismes...). Des plantes ont donc mis en place des mécanismes racinaires qui
immobilisent les métaux dans les racines et diminuent la translocation jusqu'aux feuilles où
les métaux seraient toxiques. D'autres plantes ont développé des mécanismes complexes pour
tolérer, absorber et transloquer des quantités significatives de métaux lourds. Ces stratégies
développées par les plantes vont leur permettre de résister en milieu contaminé et seront
exploitées dans la remédiation.
Du grec « phyto », plante et « remedium », corriger un méfait, remettre en état, la
phytoremédiation est une technologie en émergence basée sur l’utilisation de plantes
chlorophylliennes et de leurs microbiotes associés, d'amendement du sol et de techniques
agricoles pour éliminer, contenir ou rendre moins toxiques les contaminateurs
environnementaux (Bert et al., 1999). Sous ce nom générique, la phytoremédiation se décline
en deux stratégies de remédiation (Brooks, 1998 ; Bert et Deram, 1999 ; Raskin et Ensley,
2000) : la phytostabilisation et la phytodécontamination. Elle repose sur l’utilisation de
techniques visant à exploiter la capacité de certaines plantes à tolérer ou à accumuler des
métaux.
En phytoremédiation, la plante est utilisée comme "remédiateur" (NEWMAN, 1995).
CUNNINGHAM et LEE (1994) la décrivent en termes techniques afin de clarifier le concept
de phytoremédiation. Ainsi, la plante verte devient un système de pompage et de filtration
actionné par le soleil et qui a des capacités inhérentes d’absorption, de dégradation et
d’accumulation. Les racines sont des extracteurs d'exploration de la phase liquide qui peuvent
trouver, altérer et/ou transloquer des éléments et des composés contre des gradients chimiques
importants. Les plantes et leurs racines peuvent créer un environnement dans le sol riche en
activité microbienne qui peut changer la disponibilité des polluants organiques et en
augmenter la dégradation. Les surfaces des racines supportent des biofilms bactériens actifs
et des extensions fongiques qui augmentent significativement la surface de contact avec le sol
et les activités métaboliques.
Henri-Charles DUBOURGUIER, Daniel PETIT, Annabelle DERAM, Catherine LOGEAY,
2001 - Le phytomanagement, éléments de synthèse. Les cahiers techniques, p25.
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2°) Les différentes tecniques
a) La phytostabilisation :
Il s’agit de l’utilisation des plantes (avec ou sans apport d’amendement immobilisateur
de métaux ou de fertilisants) pour diminuer la fraction biodisponible des métaux dans le
sol (diminuer la mobilité ou biodisponibilité) et stabiliser la matrice du sol. (Stabilisation et
séquestration des polluants du sol) ; cette méthode est basée sur les échanges entre le sol et les
racines. Les plantes utilisées pour le couvert végétal sont des plantes tolérantes ou
hypertolérantes aux métaux, c’est-à-dire qu’elles ont la capacité de survivre et de se
reproduire sur des sites toxiques ou hostiles pour la plupart des autres plantes, de part les
quantités élevées d’un ou plusieurs métaux contenues dans le sol.
C’est la méthode la plus appropriée pour des polluants relativement peu mobiles sur de
vastes zones contaminées, mises à nu par la trop forte phytotoxicité du substrat (Cunningham
et al., 1995) et pour lesquelles la contamination est trop importante pour pouvoir être traitée
dans un délai raisonnable par phytoextraction (Marseille et al., 2001) Elle peut fournir une
couche végétale épaisse qui réduit l’érosion et le lessivage du sol, et limite l’envolement de
particules contaminées, première cause de contamination via contact cutané et inhalation) des
personnes vivant aux abords de sites pollués ((Leroyer et al., 2000; Leroyer et al., 2001)
Les parties aériennes des plantes limitent physiquement les entrées d’eau dans le sol, et
les racines absorbent l’eau du sol avant d’en relarguer une partie dans l’atmosphère par
évapotranspiration. Cela permet de réduire les percolations d'eau et ainsi de diminuer la
lixiviation des métaux (Cunningham et al., 1998). Les plantes participent également à
l'immobilisation des métaux en les précipitant dans les racines (Mullins et al., 1985; Sarret et
al., 2001) et sur les racines (Laperche et al., 1997; Cotter-Howells et al., 1999), et en
modifiant la physico-chimie du sol (Hinsinger, 1998) ( les plantes et les micro-organismes qui
leur sont associés absorbent et exsudent une grande variété d’ions et de molécules, ce qui
induit dans la rhizosphère (le sol environnant des racines) des conditions drastiquement
différentes du reste du sol.).
Voici les facteurs de stabilisations liés aux plantes :
• Le potentiel redox : il est également lié aux plantes. La consommation d’O 2 et la production
de CO2 abaissent le potentiel redox au voisinage des racines.
• Les exsudats racinaires : les racines libèrent des molécules organiques de faible masses
molaire dans la rhizosphère. Il s’agit de sucre, d’acides organiques, d’acides aminés (oxalate,
malate,…), des phénols et de macromolécules telles les polysaccharides et les protéines
(Marschner, 1995). La composition en exsudats dépend à la fois de l’espèce végétale mais
aussi de la disponibilité en éléments nutritifs dans le sol.
Ces exsudats sont de différents types :
-mucilage : le mucilage est une substance gélatineuse qui agit comme lubrifiant en
facilitant la pénétration de la racine dans le sol durant sa phase de croissance. Les protéines de
ce mucilage sont capables de complexer les métaux (Morel et al., 1986). Morel et al ont
d’ailleurs réalisé une étude sur le maïs, permettant de classer les métaux en fonction de leur
affinité pour le mucilage : Pb›Cu››Cd›Zn. Cette substance peut limiter les transferts de
métaux dans la plante et réduire leur mobilité dans la rhizosphère.
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-Petites molécules organiques : elles jouent un rôle important dans la nutrition de la
plante. Ainsi, une pénurie de nutriments entraîne une libération de ces substances pour que la
plante puisse s’approvisionner à partir d’éléments du sol (Zhang et al., 1989 ; Marschner,
1995 ; Zhuang et al,. 1997 ; Kirk et al., 1999).
Exemple : les plantes peuvent exsuder des composés phénoliques pour mobiliser le fer ; ces
molécules ont également une affinité pour le zinc, le plomb et le cuivre.
• Les associations micro-organismes/racines : la présence de carbone autour des racines attire
les micro-organismes du sol à la surface de celles-ci : c’est l’effet rhizosphère. Il est plus
important lors de la croissance de la plante durant laquelle les micro-organismes interviennent
et la favorisent par la production de substances de croissance et la modification du statut des
éléments autour de la racine (minéralisation, complexation, changement de pH…). Ces
processus modifient la solubilité des éléments traces métalliques au sein de la rhizosphère.
La mycorhization (bactéries et champignons) semble diminuer fortement l’absorption des
métaux par la plante dans un sol pollué.
•L’espèce végétale : les différentes variétés de plantes ne réagissent pas de la même façon face
aux métaux lourds.
Il n'y a pas de diminution des polluants, mais les risques pour la santé et l'environnement
sont réduits à un niveau acceptable ; les plantes étant tolérantes non accumulatrices, les
métaux n'entrent pas dans la chaîne alimentaire. L’inactivation des contaminants, les intrants
d’éléments par la biomasse et l’abri du couvert végétal pionnier favorisent la reconquête
rapide du milieu par d’autres espèces végétales volontaires et l’installation d’animaux. Il en
résulte une nouvelle biodiversité des espèces à même de favoriser la renaissance
d’écosystèmes. , la phytostabilisation est une technique plus prometteuse pour la réhabilitation
des sols très pollués.
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b) Phytodécontamination
La phytodécontamination est un phénomène de dépollution des sols et des eaux par les
plantes qui consiste en la réduction de la teneur des polluants du sol. Il existe différents types
de phytodécontamitnation qui peut se faire via plusieurs mécanismes :
- La phytodégradation
- La phytovolatisation
- La phytoextraction
- La rhizofiltration
i ) La phytodégradation
La phytodégradation est un mécanisme qui ne va transformer que les composés
organiques polluants en substances moins toxiques (via des réactions enzymatiques). Donc
dans le cas de notre étude on ne va pas développer d’avantage ce phénomène.
Schématisation générale de la phytodégradation
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ii ) La phytovolatilisation
La phytovolatisation est un procédé qui va permettre, par l’intermédiaire des plantes,
de transférer les métaux de la lithosphère vers l'atmosphère après transformation sous forme
volatile. En effet, les racines de certaines plantes ont la capacité d’absorber les métaux
présents en solution, de les transporter vers les feuilles, et sont capables de les volatiliser par
les stomates (orifice de petite taille présent dans l'épiderme des organes aériens des végétaux
qui permet les échanges gazeux entre la plante et l'air ambiant et permet aussi la régulation de
la pression osmotique) après une modification de leurs métabolismes.
Cependant, seul le sélénium et le mercure peuvent être volatilisés par cette méthode.
Le processus de métabolisation par les plantes de différentes espèces minérales ou organiques
de Sélénium (séléniate : Se(VI), sélénite : Se(IV) et Sélénio-méthionine : Se-Met) en
Sélénium gazeux (dimethylselenide : DMSe) est un moyen important d'enlever le sélénium
des environnements contaminés.
Le sélénium est métabolisé par les enzymes de la voie d’assimilation du sulfate, c'està-dire que le Sélénium se volatilise grâce aux mêmes enzymes et aux mêmes processus que
les sulfates.
Modèle de prélèvement et métabolisation du sélénium
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De nombreuses voies et précurseurs peuvent expliquer la volatilisation du DMSe des sols par
différentes plantes.
D’après l’étude de Tyre D. Grant et al. une proportion importante de sélénium est
rejeté par Brassica juncea (plante de moutarde indienne) sous forme volatile dans
l’atmosphère, mais cette quantité volatilisée dépend de la forme sous laquelle se trouve le
sélénium. En effet, les résultats obtenus par cette étude prouvent que le pourcentage de
sélénium volatilisé est nettement plus important lorsque la plante assimile SeMet plutôt que
les sources de sélénium inorganique. Ceci s’explique car le SeMet est plus facilement
disponible pour la méthylation de Se-méthyl sélénométhionine (SeMMet), qui est un
précurseur de DMSe, que les autres espèces de sélénium. Cette méthylation se produit grâce à
un groupe de donneur de méthyle (S-adénosylméthionine) et par l’intervention de l’enzyme
méthionine méthyltransférase (MMT).
Ensuite, au niveau de la partie supérieur de la plante, la production de DMSe volatil
pourrait passer par la formation du diméthylsélénonium propionate suivi de l’action d’une
autre enzyme, la DMSP lyase, soit par l’action direct de l’enzyme méthylméthionine
hydrolase (voire figure).
Les espèces formées par le processus de phytovolatilisation est principalement le
diméthylsélénide (DMSe) et le diméthyldisélénide (DMDSe) qui sont 500 à 700 fois moins
toxiques que le sélénium sous forme inorganique.
Chemin de volatilisation du Se dans les plantes
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Le mercure, quant à lui est volatilisé après réduction (Zayed et al.,
1998 ; Ann Peer et al., 2005). Une fois dans l’environnement, le Hg2+ (relargué par des
sources anthropiques) va être transformé par les bactéries sulfato-réductrices en
méthylmercure, composé extrêmement toxique, qui s’accumule dans la chaîne alimentaire.
Dans leur étude, Meagher et al., ont mis en évidence, par une voie bactérienne, la
conversion du méthylmercure en mercure élémentaire volatil dans les plantes. Ce chemin, qui
se trouve dans de nombreuses bactéries gram-négative, implique l’action successive de deux
enzymes. La première est l’organomercuriel lyase (codée par le gène MerB), qui convertit le
méthylmercure en Hg2+. La deuxième enzyme est la mercurique réductase (codée par le gène
MerA), qui réduit Hg2+ en mercure élémentaire utilisant NADPH et FAD comme donneur
d’électron. NADPH et FAD sont des transporteurs d’électrons mobiles qui se
déplacent librement dans le cytoplasme et relient les voies métaboliques
et les chaînes de transport d’électrons membranaires.
Ainsi, une grande quantité de mercure est vaporisée suite à ce
processus car le mercure élémentaire est très volatile.
Voie de la volatilisation du mercure dans les bactéries
Néanmoins, cette technique n'est pas totalement satisfaisante car si elle décontamine
les sols, elle libère dans l'atmosphère des substances parfois toxiques susceptibles de
contaminer de nouveau le sol ou tout autre chose (eaux, nourritures animales et humaines,
cultures…etc.).
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iii ) La phytoextraction
La phytoextraction est une technologie in situ liée aux plantes qui sont capables
d’absorber les métaux lourds par leurs racines et de les transporter ensuite vers les parties
aériennes. Les tiges et feuilles sont alors récoltées et éliminées des sites pollués.
Il existe deux méthodes de phytoextraction afin d’éliminer les métaux lourds :
- La phytoextraction naturelle ;
- La phytoextraction assistée par des chélateurs.
La phytoextraction naturelle consiste à utiliser des plantes dites « hyperaccumulatrices » qui
ont la faculté d’extraire naturellement les polluants du milieu environnant et de les
concentrer dans les parties aériennes ou racinaires sans présenter de signes de
phytotoxicité. Cette stratégie se base sur des propriétés physiologiques et génétiques
particulières à ces plantes pour induire l'extraction des métaux lourds du sol.
Le degré d’accumulation des métaux lourds est souvent de 1 à 5 % du poids sec (Ilya Raskin
et al.). Grâce à la photosynthèse, ces plantes peuvent être considérées comme de véritables
pompes solaires à produits toxiques. Thlaspi caerulescens, par exemple, est une métallophyte
(plante capable d’accumuler des éléments traces) capable d’accumuler dans ses parties
aériennes des quantités de zinc pouvant représenter 1,7% de la masse sèche des feuilles.
D’autres plantes sont capables de concentrer des quantités importantes de Cd, Pb, Ni…
Figure : Principe de la phytoextraction. Ce schéma illustre l’assimilation des
contaminants (C) contenus dans un substrat par les racines de la plante et le
mouvement des contaminants des racines vers les parties aériennes de la
plante, Stéphanie HUGUET (2009)
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La phytoextraction assistée par des chélateurs permet à des plantes non
hyperaccumulatrices, mais de biomasse importante, d’absorber des
teneurs élevées en métaux. Pour ce type de plantes il est nécessaire
d’appliquer sur le sol des agents chélateurs afin de les rendre plus biodisponible. En effet un
obstacle majeur au développement de la technologie de phytoextraction est la faible
biodisponibilité des métaux lourds. Par exemple, le Pb est un des polluants les plus importants
de l'environnement, mais est extrêmement insoluble et n'est généralement pas disponible pour
l’absorption par les plantes à un pH normal. Donc l’application d’agents chélateurs comme
l’EDTA est particulièrement efficace pour faciliter la phytoextraction de Cd, Cu, Ni, Pb et Zn,
puisqu’il agit en complexant les métaux présents en solution.
Dans le cas de Pinus radiata :
[Pb] dans les parties
aériennes
naturellement
ajout de 500 µM de Pb et de 0,5 mM
d'EDTA
60-80 mg.kg-1
300-400 mg.kg-1
Dans le cas des feuilles d’haricot (Phaseolus vulgaris L.) :
naturellement
[Pb] dans les parties aériennes 60-80 mg.kg-1
ajout de 200 µM de PbEDTA
> 928 mg kg-1
Geebelen et al. (2002)
L'ajout de chélateur n'influence pas seulement l'absorption racinaire mais aussi la
translocation du contaminant des racines vers la partie aérienne. Par exemple l'ajout de DTPA
dans la solution nutritive contaminée avec du plutonium provoque une augmentation de la
translocation de 75 % chez la moutarde indienne (Brassica juncea) et de 65 % chez le
tournesol (Helianthus annuus) (Lee et al., 2002).
Les pollutions aux métaux lourds tels que le cadmium, le zinc et le plomb se prêtent bien à la
phytoextraction assistée par des chélateurs. Cette stratégie de bioremédiation est plus efficace
si l'élément métallique est initialement peu biodisponible, et donc faiblement phytotoxique,
permettant ainsi le développement de plantes à forte biomasse avant d'appliquer le chélateur
et d'induire la phytoextraction. Le type de chélateur est fonction du métal ciblé : l'EDTA pour
le plomb, le DTPA pour le plutonium, l'EGTA pour le Cd (Blaylock et al., 1997 cité par Salt et
al., 1998).
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Phytoextraction induite par un chélateur, la ligne en pointillé représente la croissance de la
tige et la ligne pleine représente l'absorption des métaux lourds au cours du temps
(Salt et al., 1998).
Cependant, la haute solubilité dans l’eau de certains complexes chélateurs peut
entrainer les métaux vers les couches plus profondes du sol et ceci constitue un risque
potentiel important de contamination de l’eau et des estuaires. De plus, le chélateur peut se
lier avec les éléments nutritifs (Ca, Fe, Mg) qui pourront dès lors être aussi sujet au lessivage
et provoquer ainsi des carences minérales chez la plante (Whu et al., 2004).
Recyclage de la biomasse issue de la phytoextraction
Un des aspect à prendre en compte lors d'un processus de phytoextraction est le traitement de
la biomasse générée par la récolte des plantes. Sans ce traitement final, la phytoextraction ne
ferait que déplacer la pollution d'un compartiment de la biosphère à un autre. Il est bien sur
évident que ces plantes ne peuvent être misent en décharge, ni être épandues sur les terres
agricoles, ni même servir d'alimentation pour le bétail. En effet, en se dégradant les plantes
libéreraient les métaux lourds accumulés lors de leur vie.
Donc la biomasse contaminée est fauchée et exportée afin de servir de comme combustible
dans des incinérateurs à haut rendement. Puis la purification de la fumée d'incinération, de
dioxines et des vapeurs de métaux lourds (formés lors de la pyrolyse) permet de réduire
considérablement la concentration en polluant relargué dans l’environnement. De plus le
volume de cendres contaminées à mettre en décharge est considérablement réduit par rapport
au volume de biomasse initiale.
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iv ) La rhizofiltration
La rhizofiltration utilise les plantes terrestres capables de développer leur système
racinaire dans les eaux polluées. C’est une combinaison de la phytoextraction et
de la phytostabilisation. L’adsorption, l’absorption ou la précipitation des
métaux toxiques par les racines jouent un rôle clef dans cette technique et
en conséquence, d’importantes surfaces de racines sont requises. Plusieurs
espèces aquatiques ont été identifiées et testés pour la phytoremédiation des métaux lourds
provenant de l'eau polluée. Les racines de la moutarde de l'Inde sont avérées efficaces dans
l'élimination du Cd, Cr, Cu, Ni, Pb et Zn, et le tournesol peut éliminer Pb, U, Cs-137 et Sr-90
à partir de solutions hydroponiques (solutions hors-sols).
Lors de l'étude menée par l'équipe de Viatcheslav Dushenkov, des graines B. juncea ont été
semées sur un milieu nutritif dans un environnement artificiel le plus homogène possible.
Après 4 ou 5 semaines, les jeunes plantules (plantes qui viennent de germer) sont introduites
dans une solution contenant du plomb.
Effets de diverses concentrations de plomb en solution
sur son extraction par les racines de Brassica juncea
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Les résultats de l'expérience montrent que le taux de Pb retiré de la solution par les
jeunes plantes dépend de la concentration initiale en plomb et révèle un déclin monotone avec
le temps. Plus la concentration initiale en plomb est faible, plus l'extrait sera rapide.
L'analyse des racines de B. juncea exposés au Pb a montré la formation de précipités dans les
parois cellulaires qui contenait des quantités importantes de Pb carbonatés. Et par une étude
microscopique il a également été montré (Raskin et al.) que l'analyse des racines de B. juncea
exposés à une solution de Pb(NO3)2 a révélé que le Pb est principalement lié à des groupes
carboxyle. Ces processus biologiques comprennent l’absorption intracellulaire, le dépôt
vacuolaire et la translocation vers les pousses.
Ces plantes sont utilisées plutôt pour nettoyer les eaux souterraines contaminées que
les sols. Il existe deux types de méthode de décontamination des eaux contaminées par
rhizofiltration. Soit les plantes sont cultivées dans des serres, dont leurs racines baignent dans
l'eau polluée qui provient d’un site voisin. Soit elles sont plantés directement dans la zone
contaminée.
Une fois arrivé à saturation les plantes sont récoltées puis traitées de la même méthode que
précédemment.
Tableau récapitulatif des méthodes de la phytoremédiation
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3°) Exemple de dépollution hors site :
Un premier centre «hors site» de dépollution par les plantes vient d'ouvrir sur 104 hectares à
La Brosse-Montceaux (Seine-et-Marne). Baptisé «Bioferme», il devrait traiter, chaque année,
50 000 tonnes de matières polluées. Pour l'instant, il s'agit essentiellement de boues chargées
en matière organique, transformées en terreau et en biomasse par les jardins filtrants.
Emmanuelle Lesquel, 2009 - La phytoremédiation, un procédé prometteur. Conseil
général de la Vendée - Service documentation.
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