Réforme du mécanisme d`autorisation des médicaments de la

Réforme du mécanisme d'autorisation des médicaments de la
Direction générale de la protection de la santé
Position adoptée par le conseil d’administration de la Société canadienne du sida, septembre 1998.
La Société canadienne du sida (SCS) croit que la Direction générale de la protection de la
santé (DGPS) doit sans délai réformer son mécanisme d'examen des présentations de
drogues nouvelles (PDN) afin qu'il soit plus transparent, qu'il permette l'autorisation des
médicaments en temps plus opportun et qu'il remplisse mieux son obligation de rendre
compte au public. Le gouvernement canadien doit sans tarder affecter à la DGPS les
ressources dont elle a besoin pour remplir son mandat, soit de permettre aux Canadiens
d'avoir accès en temps opportun à des médicaments sécuritaires, efficaces et de grande
qualité.
La Société canadienne du sida demande au ministre de la Santé de prendre immédiatement
les mesures suivantes :
Modifier la politique actuelle en matière d'examen prioritaire afin qu'elle porte sur
tous les médicaments ayant le potentiel de combler les lacunes médicales dans le
traitement d'affections graves ou mortelles.
S'assurer que les différents volets d'une PDN soient étudiés simultanément
plutôt qu'un à la fois.
Rendre l'information non protégée sur une PDN accessible au public et indiquer
clairement, à la fin de l'examen de la PDN, les raisons qui ont motivé la décision
d'autoriser ou de ne pas autoriser la commercialisation du médicament.
Transformer les délais prévus d'examen des PDN en buts que le personnel est
tenu d'atteindre.
Affecter des crédits supplémentaires importants au programme Sécurité et
réglementation de produits thérapeutiques de la DGPS pour lui permettre de
mieux gérer le mécanisme d'autorisation des médicaments.
Exiger de la DGPS qu'elle collabore plus étroitement avec ses homologues des
États-Unis, de l'Union européenne et de l'Australie, dans le but d'échanger de
l'information sur des médicaments précis et de trouver des moyens novateurs de
simplifier le mécanisme canadien d'autorisation des médicaments.
Mettre sur pied un système intégré de surveillance postcommercialisation pour
tenir les dossiers à jour sur les effets secondaires des médicaments autorisés.
Contexte de l'énoncé de position
sur la réforme du mécanisme d'autorisation des médicaments
de la Direction générale de la protection de la santé
La réforme du mécanisme d'autorisation des médicaments : une question de
politique publique
Au début des années 90, divers intervenants s'interrogeaient sur la santé du mécanisme
canadien d'autorisation des médicaments et sur sa capacité de s'adapter à un environnement
réglementaire en pleine évolution. En 1992, le ministre de la Santé, Benoît Bouchard, avait
demandé à Denis Gagnon, un chercheur de l'Université Laval, d'effectuer un examen
approfondi du mécanisme canadien d'autorisation des médicaments. Le rapport du
chercheur, intitulé L'évaluation des médicaments : un travail de concertation, décrivait divers
problèmes et recommandait 152 mesures visant à les résoudre et, par le fait même, à
améliorer et à simplifier le mécanisme d'autorisation des médicaments au Canada.
La Direction des médicaments (maintenant appelée Sécurité et réglementation de produits
thérapeutiques [SRPT]) de la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) a mis en
oeuvre certaines des recommandations du rapport Gagnon, réformant ainsi plusieurs
éléments du mécanisme d'examen des présentations de drogues nouvelles (PDN). Elle a,
entre autres, élaboré un nouveau cadre pour l'homologation des médicaments. Le ministère
de la Santé a aussi collaboré avec l'industrie du médicament afin d'établir des échéances pour
l'examen des PDN et de mettre sur pied un programme de recouvrement des coûts en vertu
duquel les compagnies pharmaceutiques doivent payer des frais importants pour l'examen de
leurs PDN. Ces réformes ont rehaussé l'efficacité et la rapidité de l'examen des PDN.
Toutefois, de nombreux problèmes soulevés par M. Gagnon dans son rapport et lors
d'examens ultérieurs du système réglementaire canadien ne sont pas encore résolus et ont
une incidence croissante sur les personnes atteintes du VIH-sida. Malgré les efforts déployés
par la DGPS pour assurer le suivi des recommandations du rapport Gagnon, les dernières
années ont démontré que le mécanisme d'autorisation des médicaments est encore en proie à
la lenteur, à l'inefficacité et au manque de transparence. Le 28 avril 1998, la Société
canadienne du sida (SCS) et le Conseil canadien aviseur sur les traitements (CCAT) ont
diffusé un bulletin urgent de défense des droits qui décrivait ces problèmes et soulignait que
les deux organismes se voyaient forcés de porter la question à l'attention du public, vu
l'inaction de la DGPS.
La SCS, le CCAT et le Réseau communautaire d'info-traitements sida (RCITS) ont aussi
commandé une étude détaillée sur le mécanisme actuel d'autorisation des médicaments. Le
document décrit les problèmes associés au mécanisme et propose une gamme de solutions
visant à réformer un système réglementaire se trouvant une fois de plus en état de crise.
Le mécanisme d'autorisation des médicaments : le point de vue communautaire
Notre analyse du mécanisme présentement en vigueur à la DGPS révèle que celui-ci est
encore en proie à la lenteur, à l'inefficacité et au manque de transparence. En moyenne, il
faut à la DGPS plus deux fois plus de temps pour autoriser un médicament anti-VIH qu'il en
faut à la Federal Drug Administration (FDA) des États-Unis, et beaucoup plus de temps qu'il
en faut aux organismes réglementaires de l'Union européenne, de l'Australie et d'autres pays.
Jusqu'à tout dernièrement, le Canada n'avait approuvé aucun nouveau médicament anti-VIH
depuis l'automne de 1996. Il en est résulté un engorgement du système qui compromis
l'accès de nombreux Canadiens à des médicaments qui sont disponibles dans d'autres pays
depuis des mois, voire des années. Le personnel de la DGPS n'arrive pas à respecter les
délais qu'il se fixe lui-même pour l'examen des PDN.
Aucun médicament anti-VIH n'a fait l'objet d'un examen prioritaire depuis l'automne de
1996 et, vu les critères restrictifs de la politique actuelle en la matière, il est improbable que
les médicaments anti-VIH seront admissibles à ce type d'examen. La politique de la FDA en
matière d'examen prioritaire, par exemple, exige simplement que le médicament « ait le
potentiel de combler les lacunes médicales dans le traitement d'affections ou de maladies »,
tandis que la politique canadienne exige que le médicament « soit beaucoup plus efficace ou
comporte beaucoup moins de risques que les traitements disponibles [...] pour une affection
ou une maladie que les médicaments commercialisés au Canada ne suffisent pas à gérer ». Il
s'agit là d'une définition beaucoup moins large. La politique canadienne reflète un manque de
compréhension des questions entourant le traitement de l'infection à VIH et contribue à la
lenteur du mécanisme d'autorisation.
Notre analyse a aussi révélé le manque de transparence et d'imputabilité à la DGPS. Une fois
la PDN remise à la DGPS, il devient presque impossible d'obtenir du personnel de la
Direction générale quelque renseignement que ce soit, y compris une estimation de la date à
laquelle l'examen sera terminé. Le personnel de la Direction générale explique le secret qui
entoure le mécanisme par son devoir de protéger l'information exclusive contenue dans les
PDN. Cependant, même les compagnies pharmaceutiques se plaignent de ne pas savoir où
en est l'examen de leurs propres PDN. La FDA, au contraire, effectue un examen public des
PDN, l'opinion des experts étant du domaine public. Il est clair que la transparence du
mécanisme de la FDA ne compromet pas la confidentialité des renseignements exclusifs.
La DGPS n'a pris aucun des moyens qui pourraient améliorer l'efficacité du mécanisme,
notamment les examens graduels permettant aux compagnies de présenter les données
scientifiques avant la date officielle du dépôt d'une PDN, les examens conjoints avec d'autres
organismes de réglementation et l'examen simultané plutôt que séquentiel de différents
volets de la même PDN.
Dans le cadre d'une réunion avec le personnel de la DGPS et les dépositaires d'enjeux, tenue
le 12 août 1998, les participants ont vite compris que plusieurs des problèmes étaient causés
par un manque de ressources au SRPT. Les importantes compressions budgétaires des
dernières années ont compromis la capacité du personnel de la DGPS de respecter ses
propres délais d'examen des PDN et de prendre les moyens nécessaires pour rehausser
l'efficacité du mécanisme. Le programme de recouvrement des coûts, qui devait compenser
pour la pénurie de ressources, n'a pas réussi à fournir les ressources nécessaires en présence
d'une charge de travail accrue et de la diminution des crédits publics. De plus, des
procédures comptables désuètes font en sorte que les fonds non dépensés provenant du
programme sont virés au poste des recettes générales à la fin de l'exercice, limitant ainsi
encore plus les ressources du mécanisme d'autorisation des médicaments.
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