1 Colloque de la SFA – consommation contrôlée – baclofène – mars

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Colloque de la SFA – consommation contrôlée – baclofène – mars 2012
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Vous trouverez ci-dessous un compte-rendu des évocations et réflexions survenues à la suite
des travaux de la Société Française d’Alcoologie les 22 et 23 mars 2012 à propos de la
consommation contrôlée d’alcool.
« Limites et conditions de la consommation contrôlée » par Pr. Jean Adès
La notion de consommation contrôlée remonte à 1962 (Davies – Arh.gen.psychiatry).
La question a toujours été débattue de savoir pour quels patients on peut l’envisager. Aucune
étude ne permet de trancher.
La consommation contrôlée est différente de la consommation contrôlée spontanée.
Celle-ci est une consommation prescrite par un médecin. Ces tentatives sont peu soutenues
par les études expérimentales alors que 62% (Luquiens, 2012) des alcoologues français y
recourent.
La consommation contrôlée suppose :
Le désir du patient et l’absence de motivation réelle à l’abstinence
L’impossibilité d’envisager l’abstinence malgré la découverte de la dépendance et sa
dramatisation (conduisant à la rechute)
un contrat explicite entre thérapeute et patient :
o Accompagné d’un objectif de réduction de la consommation
o Impliquant une alliance thérapeutique
o Le recours à une chimiothérapie anti-craving (comme avec le baclofène)
Quoiqu’il en soit, cette approche permet l’accrochage avec le thérapeute et constitue une
préparation psychologique à la décision de l’abstinence.
La consommation contrôlée spontanée existerait chez ceux qui se prétendent abstinents : 30%
des patients consommeraient de l’alcool en quantité modérée de façon occasionnelle ou
régulière. Cette consommation dissimulée ou avouée n’interfère pas avec leur qualité de vie.
Elle finit par faire partie d’un contrat tacite avec le thérapeute qui accepte cette consommation
dont le sujet semble avoir repris le contrôle.
« La consommation contrôlée : objectif acceptable par les membres de la SFA ? » par
Amandine Luquiens (2011)
L’Europe préconise l’abstinence totale depuis 2009. Cependant, la consommation contrôlée
est bien acceptée aux Etats-Unis (25%) et en Angleterre (75%).
Cette chercheuse a réalisé une enquête en 2009 en France adressée aux membres SFA.
Sur les 547 alcoologues de la SFA ayant répondu, 50% acceptent une consommation
contrôlée pour certains de leurs patients et 62% la pratiquent régulièrement.
La réussite serait surtout le fait de la qualité de vie améliorée qui en résulte (60%). Le succès
suppose une consommation contrôlée, cad pouvoir s’arrêter après un seul verre d’alcool.
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Compte-rendu par Thierry LOTTIN, CHS Notre Dame des Anges à Liège.
psycho@cnda.be
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« Quels sont les bénéfices de la réduction de la consommation et de l’abstinence ? » par
Dr G Brousse
Bénéfice commun : c’est la réduction d’une consommation excessive.
Bénéfices de l’abstinence :
Suppression du symptôme
Rendre visible la guérison
Accompagner le patient dans un cercle vertueux d’amélioration de la qualité de vie
Atteindre le point d’efficacité optimal et définitif du traitement
Sortir du leurre de la réduction au long cours
Ne pas poursuivre l’exposition du cerveau sensibilisé de façon irréversible (Reid et al,
2006)
Eviter d’exposer les patients à la prise d’alcool qui conduirait à la rechute (craving)
Réparation neuronale : la destruction neuronale est arrêtée et certaines études récentes
prétendent qu’il y aurait une certaine régénération neuronale !
Favorise le traitement des comorbidités psychiatriques : par exemple, en sachant que
l’antidépresseur n’est pas efficace si il n’y a pas abstinence préalable d’au moins 2
semaines.
Bénéfices de la réduction de la consommation :
Diminuer les risques de la consommation excessive
Serait plus préconisé pour le cœur (un verre de vin par jour…)
Permet d’inclure un maximum de patients dans un processus de soins plutôt que rien
du tout (30% refuse tout soin si l’abstinence est exigée). La réduction est une étape
dans le changement (Miller et al). Il s’agit de leur proposer un traitement en étapes
la première étape est la réduction et l’abstinence une future étape.
Penser autrement l’amélioration : la qualité de vie peut s’améliorer sans l’abstinence
C’est une autre forme de réhabilitation.
Accepter la réduction est accepter une position réaliste qui tient compte du quotidien
des gens
Conclusions :
Adamson et Sellman en 2001 : ceux qui continuent à consommer de manière contrôlée ont
d’aussi bons résultats que les abstinents.
Ambrogne (2002) a fait un relevé des études qui montrent qu’il n’y a pas de différence entre
les deux approches.
Les femmes semblent préférer l’abstinence.
La position actuelle semble : réduire la consommation d’alcool pour finalement arrêter quand
la personne dépendante y est décidée ; autrement dit, l’accompagner dans la réduction tant
qu’il n’est pas prêt à l’abstinence d’alcool…
Donc, la réduction de la consommation serait un objectif intermédiaire.
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« Abstinence, incontournable dans le traitement de l’alcoolodépendance ? » Michel
Reynaud
Cela pose la question de savoir à partir de quand il y a dépendance nécessitant abstinence…
Abus et dépendance ont disparu du DSMV. On parle de « Alcool use desorders » où il est plus
question d’intensité différenciée selon 11 critères ; la notion de craving est un de ces critères.
On est passé d’une approche catégorielle (abus ou dépendance ?) à une approche
dimensionnelle (multicritères).
En France, 8 à 10% des alcolodépendants auraient accès aux soins ! Ce serait en partie au
fait que les soins supposent la condition indispensable de l’abstinence pour le traitement.
Aux E-U, seulement 25% des praticiens prônent la consommation contrôlée alors que le
concept de consommation contrôlée est issu de ce pays (Sobell et Sobell, 1977) mais les
Alcooliques Anonymes sont très puissants là-bas et cela pourrait expliquer grandement ce fait.
Permettre la consommation contrôlée plutôt qu’exiger l’abstinence permet une économie en
termes de bénéfices pour la santé dans la mesure l’accès aux soins est élargi à ceux qui
refusent l’abstinence.
Il serait établi qu’un grand nombre de personnes dépendantes de l’alcool sortiraient
spontanément de leur dépendance (après 20 ans, 40% en sortent et reviendraient à une
consommation modérée)…
Discussion
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Que retenir et conclure de ces échanges à propos d’un traitement de l’alcoolisme par le
recours à une consommation d’alcool contrôlée ?
Ce débat à propos de l’abstinence et de la réduction de la consommation d’alcool n’est pas
clos. Au contraire, il est plus ouvert que jamais. Longtemps sujet tabou, la consommation
contrôlée pour des personnes ayant été dépendantes est de plus en plus fréquemment abordée
ouvertement par l’alcoologue et son patient.
Cette ouverture accroît en fait le panel thérapeutique à disposition du patient et du praticien.
Elle facilite l’accrochage relationnel et l’accès aux soins, particulièrement avec certains qui
refusent l’abstinence. Surtout, elle permet au patient et au médecin de sortir de la relation de
mensonge dans laquelle finit par tomber la personne dépendante d’alcool (qui minimise ou
cache ses consommations d’alcool à son médecin ou à son entourage par ex). Dès que le
patient se sent autoriser à parler en toute confiance de sa consommation avec son thérapeute,
un grand pas vers le changement et l’amélioration de la qualité de vie est accompli.
C’est dans le décours de cette relation de confiance que les deux partenaires pourront évaluer
ensemble dans quelle mesure la personne peut contrôler sa consommation, quitte à découvrir
par l’expérience que le seul contrôle possible suppose pour le patient la consommation par le
zéro absolu, cad l’abstinence totale et définitive d’alcool.
De plus, quand la relation de confiance existe et que patient et alcoologue ont établi une
relation de partenariat dans la recherche de la maîtrise de la consommation d’alcool, l’accord
et l’évaluation régulière de l’objectif à atteindre deviennent possibles.
De ce fait, lorsque le patient aura découvert par l’expérience (essais et erreurs) avec son
médecin que l’abstinence est la seule voie de salut pour lui, il pourra être sensibilisé à la
distinction à réaliser entre recherche de l’abstinence d’alcool et intention de s’abstenir
d’alcool. En effet, dès cette distinction intégrée avec l’aide de son médecin, la personne peut
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Compte-rendu par Thierry LOTTIN, CHS Notre Dame des Anges à Liège.
psycho@cnda.be
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apprendre à réagir de manière constructive dès qu’il consomme de nouveau l’alcool : appeler
à l’aide son médecin au plus vite en cas de rechute. Cet apprentissage lui permet de
progressivement se déculpabiliser de la rechute (qui est de toute façon attendue), d’éviter les
conséquences catastrophiques d’une rechute qui s’étale dans le temps et, in fine, de parvenir à
la maîtrise de sa consommation d’alcool. D’une certaine manière, cette intention de s’abstenir
d’alcool le plus longtemps possible et d’appeler à l’aide un professionnel au plus vite,
constitue l’application d’un des principes fondamentaux du modèle des Alcooliques
Anonymes qui prône « vingt-quatre heures à la fois ! ».
La consommation contrôlée telle qu’envisagée dans ce colloque laisse planer le doute sur la
manière dont on peut la proposer à la personne demandeuse. Sans précision, elle revient à
proposer une consommation modérée à laquelle très peu ou pas de personnes qui ont été
dépendantes de l’alcool peuvent encore prétendre.
Par contre, il est une définition stricte de la consommation contrôlée en tant que traitement de
l’alcoolisme. En tant que traitement, la consommation contrôlée est une consommation
prescrite par le thérapeute en accord avec le patient. Au sens premier du terme, il s’agit d’une
prescription d’alcool au même titre que le médecin prescrit un médicament. Par exemple, le
médecin prescrira une bière par jour pendant le repas du soir ; ce qui signifie de la prendre
uniquement à ce moment précis et de boire une seule bière, pas deux, mais aussi la boire
même si un soir il n’y a pas d’envie de la prendre! Le caractère obligatoire et contraignant de
la prescription doit être respecté au même titre que pour tout médicament.
Cette consommation contrôlée thérapeutique fonctionnera d’autant mieux que la personne
réunit les conditions suivantes :
Moindre gravité de la dépendance du patient
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Précédé par un sevrage et une période d’abstinence (la plus longue possible). A noter
que le baclofène, de par son effet anti-craving, permettrait d’envisager cette approche
de consommation contrôlée sans sevrage !
Suivi régulier par un professionnel
Implication personnelle du patient (par ex, carnet de self-help ou participation
régulière à un groupe d’entraide comme les AA ou Vie Libre, etc.)
Capacité à la compliance (par ex, personnalité obsessionnelle)
Précédé d’un parcours de soins qui montre le désir du patient de reprendre le contrôle
de sa vie. Le fait d’avoir déjà mis en place dans sa vie des éléments signifiant le
changement psychothérapeutique et mettant en évidence l’amélioration de sa qualité
de vie sont un plus également !
En guise de conclusion, cette attention renouvelée sur le traitement de l’alcoolisme par la
consommation contrôlée d’alcool a le mérite de remettre en cause le tabou de l’abstinence.
Cependant, cette focalisation sur le produit alcool pourrait conduire certains à perdre de vue
que les patients hospitalisés et dépendants de l’alcool, s’ils souhaitent maîtriser leur
consommation d’alcool, ont avant tout besoin de se soigner et se centrer sur leur mal-être
plutôt que de réduire leur attention à arrêter la consommation d’alcool…
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Sanchez-Craig, M., Annis, H. M., Bornet, A. R., & MacDonald, K. R. (1984), “Random assignment to abstinence
and controlled drinking: Evaluation of a cognitive-behavioural program for problem drinkers”, Journal of Consulting
and Clinical Psychology, 52, 390-403.
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