actualité - Consistoire

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Histoire
d'une Juste
des Nations
Par Simone Veil
Israël :
Le Petit Prince
Actualité :
Un autre regard
sur l'Iran
Mémoire :
Les “revenants
dans la question”
Lettres :
Un kaddish
dans l'écriture
N°294 - OCTOBRE 2009 - 3€
M 01907 - 294 - F: 3,00 E
Arts : Dessiner l'indicible
3:HIKLTA=\UXUUU:?k@c@t@e@a;
N°294 - OCTOBRE 2009
AU SOMMAIRE D’
EXCLUSIF
4- "Soutenir et faire aboutir les projets du Consistoire"
Un entretien avec Brice Hortefeux
ACTUALITÉ
6- Un autre regard sur l'Iran par Jean-François Colosimo
11- Le petit prince d'Israël par Ami Bouganim
4
LA CHRONIQUE DE GUY KONOPNICKI
16- Réponse à un jeune juif…
11
ÉCONOMIE
19- Le FMI optimiste pour Israël par Philippe Meyer
LA VIE DU CONSISTOIRE - 20
6
MÉMOIRE
25- Une Juste des Nations en Pologne par Simone Veil
IN MEMORIAM
20
26- Les “revenants dans la question” par Henri Atlan
POLÉMIQUE
28- Les accusateurs accusés par Annie Lelièvre
OPINION
25
29- Personne n'a empêché pharaon par Paul Giniewski
HUMEUR
34
30- Interrogations par V.M.
COMMUNAUTÉS
32- Les vraies vocations de l'OSE Un entretien avec Roger Fajnzylberg
27
CHRONIQUE
34- Retour à la Maison de Vie par Albert Bensoussan
LES LIVRES
36- par Paul Giniewski et Francine Kaufmann
ARTS
40- Dessiner l'indicible par Maurice Arama
CINÉMA
41- Une raison de vivre face à la raison d'état par Elie Korchia
VERBATIM - 42
40
41
Edité par S.a.r.l. Information Juive
le journal des communautés
au capital de 304,90 €
INFORMATION JUIVE
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Anne-Julie Bémont, Albert Bensoussan,
Paul Giniewski, Hélène Hadas-Lebel,
Carol Iancu, Gérard Israël, André Kaspi,
Naïm Kattan, Elie Korchia, Odette Lang,
Annie Lelièvre, Daniel Sibony.
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Chroniqueur : Guy Konopnicki
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Les
manuscrits nonJUIVE
retenusJuin 2008 3
INFORMATION
ne sont pas renvoyés.
EXCLUSIF
UN ENTRETIEN AVEC LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR BRICE HORTEFEUX
“Le Consistoire compte parmi
les grandes institutions
de notre pays.”
Brice Hortefeux
Le 15 septembre dernier, le Consistoire Central et le Consistoire de Paris
invitaient le Ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux à la grande synagogue de la Victoire pour la
désormais traditionnelle cérémonie des voeux à la communauté juive de France (cf. le compte rendu
de cette visite p. 20). A l'occasion de la nouvelle année juive, le Ministre de l'Intérieur, en charge des
Cultes, a accordé à Information Juive un entretien exclusif où il revient sur la situation des juifs
de France, leurs préoccupations, et le rôle et la place qu'occupe l'institution consistoriale au sein
de la communauté juive et de la société française.
OOO I.J : Vous avez déclaré lors de votre
venue au Consistoire le 15 septembre pour
présenter vos vœux de bonne année à la Communauté juive que la lutte contre l'antisémitisme constituait pour vous un "engagement
de la République et un engagement personnel". Quel est votre sentiment depuis votre
récente arrivée place Beauvau sur l'état actuel
des tensions et des risques antisémites en
France ?
Brice Hortefeux : Tout d'abord,
permettez-moi d'insister sur une vérité :
l'antisémitisme est un poison. Il est la
négation même des valeurs de la
sortes. Il y a eu, ce mois-là, 50 actions
violentes caractérisées, contre une dizaine
en moyenne mensuelle les années
précédentes. Depuis lors, le niveau de ces
actes est encore élevé. Cela n'est
naturellement pas acceptable.
Chaque fois que de tels actes se sont
produits, j'ai donné des consignes les plus
fermes à l'ensemble des forces de sécurité
placées sous mon autorité afin que tous
les moyens soient mis en œuvre pour que
leurs auteurs soient interpellés et mis à
la disposition de la justice. De la même
L'antisémitisme est un poison. Il est la négation même
des valeurs de la République.
République. C'est une insulte à notre
société et aux valeurs qui la fondent.
Chaque fois qu'un citoyen, quelles que
soient ses origines ou sa religion, est
atteint dans son être, ses convictions ou
sa religion, c'est l'ensemble de la
communauté nationale qui s'en trouve
offensée.
Le Président de la République et
l'ensemble du gouvernement seront
toujours aux côtés de la communauté
juive pour combattre ces délits et ces
crimes. Au début de l'année, notre pays
a connu, hélas, une montée des actes
antisémites. En janvier 2009, on a ainsi
déploré 352 actes antisémites de toutes
4 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
manière, j'ai demandé au Préfet de Police,
dans l'agglomération parisienne, et à
l'ensemble des préfets de France, une
mobilisation totale des services de police
et de gendarmerie pendant la période des
fêtes. Enfin, j'accorde une attention
particulière au programme de sécurisation des bâtiments communautaires
auquel l'État a consacré près de 7 millions
d'euros depuis 4 ans et qui a, d'ores et
déjà, permis de sécuriser 349 bâtiments,
dont 107 écoles et crèches, 81 associations
et centres communautaires et 161
synagogues.
I.J : En tant que nouveau ministre en charge
des cultes, quel regard portez-vous sur la
situation des juifs de France et sur leurs
attentes ?
B.H. : Les juifs de France sont présents
sur le territoire national depuis plusieurs
siècles et ont toujours énormément œuvré
pour promouvoir les valeurs de la
République. Je sais que la deuxième
Intifada a fait naître, au début des années
2000, de nombreux doutes concernant
l'avenir des juifs en France, lorsqu'un
antisémitisme larvé a refait surface et que
les pouvoirs publics, à l'époque, n'avaient
peut-être pas suffisamment pris
conscience de l'ampleur du phénomène.
Je veux dire aujourd'hui à tous, et en
particulier à la jeune génération, que les
juifs ont bel et bien un avenir en France.
Ils ne doivent en aucun cas abdiquer
devant la menace ou la violence car la
République, elle, n'abdiquera jamais
devant ceux qui trahissent ses valeurs et
protégera toujours ceux qui partagent son
idéal.
I.J : Quelle est, selon-vous, la place
et le rôle du Consistoire au sein de la
République ?
B.H. : Le Consistoire central et son
réseau de consistoires régionaux
comptent parmi les grandes institutions
de notre pays. Depuis plus de 200 ans,
leur histoire se confond avec celle de la
République. Ils sont pour l'État des
interlocuteurs à la fois incontournables,
stables et responsables.
EXCLUSIF
Ils permettent l'expression de l'unité et
de la diversité de la communauté juive,
une gestion adaptée du culte dans le
pratique apaisée du culte juif dans le
cadre de la République - je pense
notamment aux difficultés rencontrées
Je veux dire aujourd'hui à tous, et en particulier
à la jeune génération, que les juifs ont bel et bien
un avenir en France.
cadre offert par la loi du 9 décembre 1905
et, enfin, l'organisation de la représentation du culte juif auprès des pouvoirs
publics. En ce sens, le Consistoire central
et son réseau de consistoires régionaux
sont les témoins de l'engagement des
juifs de France dans le cadre politique et
civil de notre pays, sans reniement de
leur foi.
par certains étudiants pour concilier les
obligations liées à leurs études et celles
que leur impose leur foi - je plaiderai,
auprès des ministres de l'éducation
France, récemment créée au sein de la
fondation du judaïsme. Ce l'est aussi
pour le projet de centre européen du
judaïsme dont j'ai demandé qu'il soit
porté désormais rapidement à l'ordre du
jour d'une réunion interministérielle afin
d'en mesurer tous les enjeux.
I.J : Quel est votre message à la
communauté juive de France qui fête l'arrivée
de la nouvelle année ?
B.H. : Pour reprendre les mots de
Monsieur le grand rabbin de France,
I.J : Sur quels projets et dossiers
travaillerez-vous en priorité avec cette
institution dans les mois à venir ?
B.H. : Permettez-moi d'évoquer quatre
dossiers. Tout d'abord, le travail mené
pour stabiliser la réglementation
européenne relative à l'abattage rituel a
été fructueux. En 2006, Nicolas Sarkozy,
alors ministre d'État, ministre de
l'intérieur, s'était engagé, auprès du grand
rabbin de France, à en préciser les règles
juridiques afin de sécuriser les pratiques.
Comme Président de la République, il a
tenu ses engagements en faisant en sorte
qu'il existe des règles européennes qui
correspondent aux souhaits exprimés
par le Consistoire.
Je pense, ensuite, à la participation
active du Consistoire à la réflexion sur
les suites à apporter au rapport
Machelon, commandé par Nicolas
Sarkozy alors qu'il était ministre de
l'intérieur. S'agissant des édifices du
culte, une circulaire du ministère,
publiée en mai dernier, est venue
rappeler le droit applicable.
Le même travail a été mené pour
préciser les conditions de création des
carrés confessionnels au sein des
cimetières communaux, et il faut en
dresser, avec les préfets et les
collectivités locales, le bilan d'application sur le terrain.
Enfin, parce que je partage
l'attachement du Consistoire à une
Je m'attacherai autant que possible à soutenir
et faire aboutir les projets du Consistoire
nationale et de l'enseignement supérieur, pour la mise en place d'un
dialogue constructif avec les autorités
universitaires. En effet, je ne me résous
pas à ce que de brillants éléments soient
tentés d'abandonner leurs études en
France, pour cause de collusion entre le
calendrier universitaire et celui des fêtes
rituelles.
Par ailleurs, je m'attacherai autant que
possible à soutenir et faire aboutir les
projets du Consistoire. Ce fut le cas pour
la fondation du patrimoine juif de
Gilles Bernheim, je voudrais inciter tous
les "hommes et les femmes de bonne
volonté à faire tout ce qui est en leur
pouvoir pour construire en France la
fraternité entre tous ceux et toutes celles
qui y vivent, quelles que soient leur
religion, leurs convictions politiques et
leurs opinions ". Cette période des fêtes
de Tishri nous y invite, je crois, tout
particulièrement. Bonne année à toutes
et à tous !
Propos recueillis par
Philippe Meyer
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 5
ACTUALITÉ
UN ENTRETIEN AVEC JEAN-FRANÇOIS COLOSIMO
Un autre regard
sur l'Iran
C'est en spécialiste du fait religieux que Jean-François Colosimo étudie dans
le nouveau livre qu'il publie ce qu'il appelle " Le paradoxe persan "
(Editions Fayard. 19 E ). Pour les besoins de cette enquête, l'auteur s'est rendu
en Iran, aux Etats-Unis et en Israël et s'est entretenu avec des diplomates et
Jean-François Colosimo
des spécialistes à Harvard, à Tel Aviv mais également à Qom et à Téhéran.
Dans l'entretien qu'il nous a accordé, Jean-François Colosimo invite nos lecteurs à un regard différent
sur ce qui se passe aujourd'hui à Téhéran et sur la question de savoir où va l'Iran.
OOO I.J : Vous évoquez dans votre livre ce
que vous appelez " la fascination pour l'Allemagne nazie de l'Iran. Est-ce que cette fascination
explique l'antisionisme radical de Téhéran
aujourd'hui et son discours de la guerre ? A quoi
attribuez-vous la rhétorique violemment antisioniste du régime ?
Jean-François Colosimo : Il y a là deux
phénomènes bien distincts qu'on ne saurait
confondre. Lorsque Reza Pahlavi, un
colonel de la Garde cosaque, prend le
pouvoir et destitue l'ancienne dynastie des
Kadjars, dans les années 1920, il se donne
l'Iran est pris en étau entre la Russie, au
nord, et l'Angleterre au sud. Dans les
années 1930, en raison du pétrole, toutes
les puissances européennes se précipitent
à Téhéran qui joue de Berlin contre
Moscou et Londres. Il y va plus d'un
opportunisme tactique que d'une
soumission idéologique. Ou d'une
adoption de l'antisémitisme, inconnu dans
le sentiment populaire.
En revanche, l'idéologie est constitutive
dans le cas de l'imam Khomeiny qui
innove. Khomeiny n'est pas un
Les dirigeants actuels savent, dans le même temps,
que toute attaque contre Israël reviendrait à la
destruction définitive de l'Iran. On est donc face à une
partie de poker menteur où le vrai risque est le
dérapage incontrôlé dans l'escalade.
pour modèle Atatürk et le kémalisme. Il se
réclame d'une sorte de nationalisme
autoritaire, laïcisé, occidentalisé et
moderniste. Avec, pour première
conséquence, la volonté d'éradiquer l'islam
et ce qu'il suppose d'orientalisation. C'est
l'époque des identités collectives
reconstruites. A l'instigation d'un historien
américain comme Pope, Pahlavi remonte
à Cyrus et Darius : la Perse devient l'Iran,
redevient la " Terre des Aryens " afin de
marquer sa différence d'avec le monde
arabo- musulman. Pour autant, ce n'est pas
cette mythification du passé qui explique
le rapprochement plus tardif avec
l'Allemagne nazie. Depuis le XIXe siècle,
6 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
représentant du chiisme traditionnel mais
l'inventeur d'un islamisme qui se veut
global. Sa première grande intervention
publique advient en 1948 pour condamner
l'instauration de l'Etat d'Israël. Ses disputes
avec le chah, Mohammed Reza, auront
pour principal motif dans les années 1960
la coopération alors soutenue entre
Téhéran et Tel Aviv. Le régime, après 1979,
amplifiera le mouvement, l'appuyant sur
un fort sentiment anti- américain. En
s'emparant de l'antisionisme qui constitue
un référent politique unitaire pour
l'ensemble arabo-musulman, principalement sunnite, la république islamique,
minoritaire et périphérique puisqu'elle est
à la fois perse et chiite, entend revendiquer
le leadership sur l'islamisme mondial. Pour
autant, là encore, le sentiment populaire
suit peu. Les Iraniens sont plutôt fiers au
contraire de leur communauté juive qui
bénéficie d'un plein droit de culte et
dispose d'un siège de droit au parlement.
I.J : Tout le monde convient que l'Iran
aujourd'hui n'est pas suicidaire. Mais ses
dirigeants ne seraient-ils pas irrationnels ?
J-F.C. : Pays clé entre l'Est et l'Ouest,
l'Iran, jaloux de son identité depuis trois
millénaires, a été soumis à une sorte de
colonisation rampante à partir de l'époque
moderne. Il en a retiré un complexe
obsidional et n'a cessé de vouloir recouvrer
les
attributs
de
sa
grandeur.
L'occidentalisation prônée par le Chah et
l'islamisation revendiquée par les
ayatollahs ne sont que les deux faces de
cette même quête. Le programme
nucléaire a d'ailleurs été entamé par
Mohammed Reza, dés 1960, avec l'appui
de Washington. Le refus qu'oppose
aujourd'hui la communauté internationale
à Téhéran tient d'abord à la nature
agressive et inquiétante du régime, mais
aussi aux risques de prolifération dans la
région. L'Arabie Saoudite, l'Egypte, la
Turquie s'armeraient également. Et, en
menaçant
régulièrement
Israël,
Ahmanidejad rend le problème encore plus
insoluble. Pour les Iraniens, cependant,
l'affaire est d'abord symbolique. La bombe
est le signe définitif de l'indépendance.
Un Iran plus démocratique ne renoncerait
pas forcément, pour autant, à chercher à
s'en doter. Le tournant autoritaire pris lors
ACTUALITÉ
des dernières élections ne laisse
malheureusement guère espérer de
compromis acceptable pour toutes les
parties en présence et une résolution
rapide de cette crise endémique depuis
vingt ans. Un scénario-catastrophe ne
semble cependant guère envisageable car
il enflammerait durablement la région, et
par delà, au moment même où Obama a
besoin d'un parfait statut- quo pour sortir
d'Irak où la majorité chiite s'est affirmée
comme dominante. Au contraire d'être
irrationnels, les dirigeants actuels, même
si leur rhétorique est apocalyptique, jouent
à fond des hésitations du camp occidental.
Ils savent, dans le même temps, que toute
attaque contre Israël reviendrait à la
destruction définitive de l'Iran. On est donc
face à une partie de poker menteur où le
vrai risque est le dérapage incontrôlé dans
l'escalade.
I.J : Vous semblez dire qu'il n'y a aucune
possibilité pour l'Iran de s'entendre avec Israël
parce qu'il s'agirait là alors de "l'abolition de
son acte fondateur". Que voulez-vous dire ?
J-F.C. : Ce n'est pas l'Iran qui ne peut
s'entendre avec Israël. Au contraire, suite
à l'alliance périphérique de Ben Gourion,
parti à la recherche d'alliés dans le
deuxième cercle concentrique autour
d'Israël, par delà le monde arabo- sunnite,
nommément la Turquie, l'Iran, l'Ethiopie,
Tel Aviv et Téhéran, sous le Chah, ont
étroitement collaboré. Le sentiment antiarabe de la Perse historique est en effet
une constante. Mais il en va tout
autrement pour le régime actuel qui a
prétention à une double hégémonie,
régionale et religieuse. Pour l'asseoir, il lui
faut endosser de manière maximaliste la
cause palestinienne, être jusqu'au-boutiste,
rester le dernier ennemi radical du
sionisme. L'islamisme de Khomeiny a
repris à son compte, après l'effondrement
du marxisme, l'idée d'être l'étendard de la
révolution mondiale. Or le conflit israélopalestinien cristallise les passions de
l'opinion mondiale comme pouvait le faire
autrefois l'Amérique latine.
Cette
assomption symbolique d'un messianisme
actif représentant la totalité des déshérités
ne
va
pas,
bien
sûr,
sans
instrumentalisation et une politique
d'intérêts immédiats. Y renoncer, ce serait
renoncer à la fois au sens même de la
révolution islamique et à la puissance
négative que garantit le rôle d'absolu
perturbateur.
8 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
I.J : L'Iran serait-il dans son principe même
un ennemi naturel d'Israël ?
J-F.C. : Non, il n' y a pas de sentiment
antisémite dans le peuple. Un
philosémitisme encore vivace existe même
chez certains intellectuels du pays. Les
juifs en Iran représentent la plus ancienne
communauté hébraïque du monde. Ils sont
les gardiens du tombeau d'Esther. Les
qu'une relation positive entre l'Iran et Israël
serait, d'un point de vue géopolitique, à
moyen terme, une possibilité tout à fait
réaliste.
I.J : Lorsqu'il est arrivé au pouvoir Khomeiny
avait déclaré que l'arme atomique était interdite
parce qu'impie. Il avait ajouté : " Elle représente
un péché impardonnable ". De plus, les fatwas
Il n' y a pas de sentiment antisémite dans le peuple.
Un philosémitisme encore vivace existe
même chez certains intellectuels du pays.
Les juifs en Iran représentent la plus ancienne
communauté hébraïque du monde.
synagogues sont là, ouvertes, actives, de
même que les écoles de Talmud ou les
associations communautaires, caritatives
ou culturelles. Et, comme on vient de le
voir, l'antisionisme d'aujourd'hui ne fait que
de la république islamique condamnent sans
appel la bombe atomique. Que s'est-il passé
alors pour qu'aujourd'hui on en soit là ?
J-F.C. : La guerre avec l'Irak, et
l'utilisation d'armes chimiques par Saddam
Une vue de Téhéran
succéder au pro- sionisme d'hier. Si l'Iran
en venait à se reconnaître dans une
occidentalisation maîtrisée, une intégration
pacifiée à la mondialisation, il nouerait
forcément des relations de proximité avec
Israël, pour des raisons culturelles et des
motifs politiques assez évidents. Il est
d'ailleurs des nostalgiques de l'ancienne
alliance des deux côtés, même si l'heure
est à l'affrontement direct. Zbigniew
Brzezinski, l'ancien patron de la diplomatie
à la Maison blanche, et l'inspirateur de
Barack Obama m' a cependant affirmé
Hussein. Puis la menace que représente
le Pakistan nucléarisé pour toute la région.
Enfin, l'exception faite à l'Inde, à qui l'on
a accordé la bombe pour établir un
équilibre dissuasif, précisément, avec le
Pakistan. Téhéran regarde plutôt de ce
côté-là que de la Méditerranée. Mais pour
les Iraniens, c'est avant tout une question
de souveraineté et d'indépendance, de
statut de grande nation qui se nourrit de
leur peur ancestrale d'être dominés, leur
conviction d'avoir été humiliés, et leur
crainte de demeurer faibles, menacés.
ACTUALITÉ
Cette dimension de psychologie collective,
voire parfois de psychose, n'est pas le
moindre problème.
I.J : Vous rappelez dans votre récit que des
hommes comme Dick Cheney, Donald Rumsfeld
et Paul Wolfowitz, aujourd'hui opposants
farouches du programme nucléaire des mollahs
étaient ceux-là mêmes qui ont permis au Chah
d'accéder à l'ensemble du cycle nucléaire.
A l'époque les ambitions nucléaires de
l'Iran étaient vues avec sympathie par les
Occidentaux ?
J-F.C. : Oui. Le Chah était un grand
bailleur de fonds pour le complexe
militaro- industriel américain. C'est lui qui
a financé Eurodif et l'absence de règlement
du contentieux entre Paris et Téhéran
explique les vagues d'attentats et de prises
d'otages des années 1980. Sous le chah,
c'était l'époque du tout- nucléaire et on ne
pouvait rien refuser à l'Iran, bras armé de
l'Occident au sein du monde musulman.
Mohammed Reza entendait certainement
rester, à l'instar du Japon, une puissance
du seuil : être capable technologiquement
de passer du nucléaire civil au militaire
sans y passer immédiatement. Seul Israël
manifestait quelque inquiétude alors, mais
en sourdine. Les conservateurs américains,
après 1979, ont évidemment renversé la
perspective. Ils ont dés lors voulu
sanctuariser l'Arabie Saoudite, leur allié
contre les Soviétiques dans la guerre
d'Afghanistan et l'adversaire principal de
l'Iran. Mais l'attaque du 11 Septembre a
montré que le tableau était autrement
complexe.
I.J : Dans quel sens du chiisme qu'il est un
islam de la médiation ?
J-F.C. : C'est en effet un islam de
l'ouverture à l'histoire, à l'interprétation, à
la rédemption, à l'image, et à la femme.
Oui. Alors que les sunnites présentent la
parole du Prophète donnée
Une fois pour toutes, l'islam chiite n'est
pas dans la répétition du Coran, Il veut
ouvrir la Loi à d'autres dimensions:il en
propose une interprétation spirituelle
assortie d'une attente (" l'imam caché ").Le
chiisme ouvre l'islam sur la poésie,
l'imaginaire, l'extase,l'ivresse même. Il peut
même se révéler très casuistique, dans une
libre adaptation des pratiques aux
circonstances. Bref, il semble plus propice
à la modernité. Le fait, enfin, qu'il dispose
d'un clergé et d'une haute tradition de
philosophie spéculative renouvelée à
10 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
l'occasion des Lumières va dans ce sens.
Les mollahs de Téhéran ne sont pas les
Frères musulmans d'Egypte. Ils ont lu les
classiques et lisent ce qui se produit en
Occident. Quant au cinéma iranien, il est
le quatrième mondial, en volume et en
qualité. Le fondamentalisme n'a pas éteint
la civilisation persane. Et, d'ailleurs, la
sécularisation progresse. La révolution
islamique a provoqué l'apparition d'une
nomenklatura religieuse inflationniste.
C'est pourquoi l'Iran est plus une
"mollahcratie " qu'une théocratie. Ces
tentation fondamentaliste. Le paradoxe au
sein du paradoxe est que le chiisme luimême portait tous les ferments de la
réforme attendue, d'une alliance
renouvelée entre le Coran Et à la Cité.. Au
lieu de quoi, il s'est dénaturé en système
de pouvoir. Comme me le disait à Qom, la
Ville sainte, le Grand Ayatollah Sanei, une
figure toute spirituelle qui a rang de "
Source d'Imitation " : " Il temps que la foi
chiite soit redécouverte comme une foi ".
C'est en effet une urgence pour les
Iraniens, pour l'ensemble des musulmans,
Le fondamentalisme n'a pas éteint la civilisation
persane. Et, d'ailleurs, la sécularisation progresse.
enturbannés, que l'on trouve à tous les
niveaux de la société, sont plus des
fonctionnaires du culte que des témoins
de la grande tradition chiite. Avec pour
résultat une forme de désacralisation,
teintée de scandales et de corruption. Le
et pour le monde entier, c'est-à-dire aussi
nous- mêmes. Surtout, le peuple iranien
vient de montrer, au prix de son sang,
qu'on ne pouvait le réduire aux caricatures
habituelles. Qu'il a une véritable aspiration
à la liberté. Le mouvement démocratique
"Une nomenklatura religieuse inflationniste"
désenchantement du peuple iranien avec
l'islamisme tient aussi à son goût pour la
liberté de conscience.
I.J : Au terme de votre enquête, vous vous
demandez à quel Iran nous aurons affaire
demain. Quelle est votre réponse ?
J-F.C. : L'Iran, ce creuset et ce
laboratoire, qui a été le premier pays au
Proche- Orient à mener en 1905 une
révolution constitutionnelle, en 1953 une
révolution nationaliste, et en 1979 une
révolution islamiste, devrait être à l'avantgarde de la modernisation du monde
musulman plutôt qu'à la remorque de la
mêle les jeunes (60 % des Iraniens sont
nés après1979),les intellectuels,les femmes.
Un journal féministe est même devenu le
premier hebdomadaire du pays, lu y
compris par les hommes. Il y a des millions
de blogueurs iraniens qui sont au contact
du monde. N'oublions pas qu'il a fallu
vingt- cinq ans au mouvement populaire
pour vaincre le Chah. La fin de la
République islamique a commencé. D'où
sa virulence actuelle.
Il faut traiter fermement le régime, mais
il faut aussi faire confiance aux Iraniens,
et surtout aux Iraniennes.
ACTUALITÉ
Le petit prince
d'Israël
C
PAR AMI BOUGANIM
e fut un rude été. Il ne
passait pas un jour
sans un accident, un
meurtre, un viol. Une
cavalcade de l'horreur
qui très vite tourna à la
cavalcade du désespoir. On ne savait
comment priver les collégiens et les
lycéens en vacances de leurs bouteilles
de vodkas, on ne savait comment les
convaincre de rentrer leurs couteaux.
Des crimes gratuits, des crimes de
représailles, des crimes horribles. Sur
la promenade de Tel-Aviv, dans des
quartiers généralement tranquilles,
dans des milieux religieusement
sourcilleux. Ce n'était plus des
règlements de comptes entre criminels
ni des balles perdues, encore moins des
attentats. C'était un déchaînement de
violence sans précédent, me semble-til, dans les annales d'Israël. Nul n'était
épargné. Ni les vieux ni les jeunes ; ni
les médecins ni les patients. On avait
l'impression que chacun pouvait
s'improviser vengeur, que le crime
rodait dans l'air à la recherche de
criminels. Sans parler des procès. D'un
président de l'Etat. D'un Premier
ministre. D'un animateur de télé. Sans
s'attarder sur l'entrée en prison de deux
ministres, l'un des finances et l'autre de
la santé. On me dit que c'est pire
ailleurs, ça ne me console pas. En
revanche, oui, je trouve une consolation
dans la solidité des tribunaux qui ne se
laissent nullement intimider et jugent
un ancien président de l'Etat, des
ministres, de hauts fonctionnaires et
bientôt un ancien Premier ministre.
Ce pays, je le crains, est saturé de
haine. Malgré ses charmes, ses décors,
ses acquis et ses belles gens. Une haine
mutuelle, gratuite, inexpugnable. Peutêtre une conséquence de cette variété
de colère dont Nietzsche disait que les
Juifs étaient des artistes : " Ils ont
façonné la sainteté de leur Jéhovah en
colère d'après leurs saints prophètes en
colère . " Et ce serait cette haine latente
qui éclate par-ci par-là. Sur les routes.
Dans les bars. Sur les lieux de loisirs.
On ne cesserait de tenter de se corriger
les uns les autres. On arrête volontiers
Communiqué
Oren Tolédano, co-directeur de l'Agence juive
en France : “Notre objectif : aller à la rencontre
de tous les juifs de France”
En plus de la gestion de son département qui envoie chaque année 2000 juifs
de France en Israël, Oren Tolédano assure depuis quelques mois avec Daniel
Benhaïm, la co-direction de l'Agence juive pour Israël. Un emploi du temps
chargé que n'empêche pas le jeune homme de se lancer de nouveaux défis
comme " la caravane d'Avraham. Détails.
I.J : En quoi consiste la caravane d'Avraham avec laquelle
vous allez sillonner la France dans quelques jours ?
O ren Tolédano : C'est une grande opération
d'information et de sensibilisation à Israël. Notre objectif
n'est pas seulement de faire la promotion de la Alyah et
de renseigner les candidats. Ce que nous souhaitons c'est
d'aller à la rencontre de tous les juifs de France pour
échanger avec eux sur la question de notre réaction à
Israël. Israël a-t-elle encore besoin de nous ? Comment ?
Et nous juifs de France, comment, avons-nous besoin
d'Israël ?
I.J : Très concrètement, comment cela va se dérouler ?
O.T : A partir du 26 Octobre, nous allons à la rencontre
des juifs de France. La caravane fera escale à Strasbourg,
Rennes, Toulouse, Toulon, Lyon, Nants, Marseille sans
oublier Paris et la région parisienne. Dans chaque ville,
nous proposerons des conférences-débat avec des
personnalités comme Nissim Zvili, ancien ambassadeur
d'Israël en France ou encore Olivier Rafowicz, porte-parole
de l'Armée. Il y aura également Gilles Azoulay, psychiatre
de Tsahal. Notre objectif est simple : faire connaître Israël
et donner à réfléchir. Nous aurons également la présence
exceptionnelle de deux olims qui ont fait un beau parcours
en Israël. Un jeune de 16 ans, ex-Naalé qui a remporté
la deuxième place à un concours scientifique et un jeune
officier d'une unité d'élite de Tsahal.
I.J : Où vont se tenir ces rendez-vous avec la communauté ?
O.T : Dans les communautés justement. Nous avons
travaillé avec Joël Mergui, le président du Consistoire
central. Il sera d'ailleurs avec nous à quelques dates.
Propos recueillis par Alain Azria
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 11
ACTUALITÉ
sa voiture pour s'expliquer. En pleine
route, sans égards pour les piétons,
sans se soucier des voitures derrière.
On se donne mutuellement des cours
de bonne conduite que nul ne respecte
vraiment. Souvent le cours tourne à la
querelle sur les vertus respectives des
conducteurs, de leurs parents et de
leurs grands-parents. Souvent encore
la querelle dégénère en dispute sur les
mérites socioculturels des communautés respectives de chacun. Puis la
dispute tourne à la bagarre et l'on
oublie vertus et mérites. La meilleure
façon de se préserver d'on ne sait
quelles représailles est encore de se
taire. En toutes circonstances ; en tous
lieux. Ni reproche ni remarque. C'est
dire la désespérante volatilité de la vie.
L'incurie de la police
Tous les secteurs de la population
seraient touchés. Les ultra-religieux
pour lesquels l'Etat existe de moins en
moins. Les Arabes qui attendent la
disparition de l'Etat. Les laïcs qui
lorgnent New York et Wellington. La
violence guetterait partout. On n'est
jamais sûr qu'on ne sera pas agressé.
Chez soi sinon dans la rue. Les
pouvoirs publics se révèlent impuissants. Dans tous les domaines. On
incrimine l'alcool. L'incurie de la police.
Le soleil. On assiste même au plus
grégaire des racismes de la part des
directeurs des écoles religieuses de
Pétah Tikva qui refusent d'admettre des
enfants éthiopiens ou des directeurs
ultra-religieux qui séparent - par un
mur, des entrées séparées, des tenues
scolaires de couleurs différentes - entre
fillettes ashkénazes et orientales. On
ne se décide pas à déceler dans cette
cavalcade de la violence les signes
d'une déliquescence généralisée. On
veut encore espérer, on persiste à
souligner les acquis. Les petits coins de
paradis dans les moshavim et les
kibboutzim. La vibration de Tel-Aviv.
L'ingéniosité poétique et technologique.
La quête de tout et de rien qui s'illustre
dans la quête de Dieu. Pourtant, l'Etat
gouverne de moins en moins , dans
tous les secteurs. " Les Juifs ", me disait
Tobie Nathan avant de quitter Tel-Aviv
dont il était passionné, " ne se sont
donné un Etat que pour mieux se
prouver qu'ils ne peuvent vivre
12 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
ensemble et qu'ils ne se supportent que
dispersés parmi les nations ". Il a
marqué une pause avant d'ajouter : "
Mais là, ce sont les nations qui ne les
supportent pas. " Pour une contrée qui
se pose en Terre promise, on
conviendra avec moi, que c'est un peu
trop. Pour ne point parler de Royaume
de Prêtres et de Nation sainte.
Puis est venu le crash de l'avion qui
a coûté la vie à Assaf Ramon. C'est
comme si chaque fois qu'on se sent
débordés par les événements, qu'on
nourrit des doutes, que ça part dans
tous les sens et qu'on désespère de la
situation, on se donne une nouvelle
légende. On en a besoin pour arrêter
la cavalcade des menaces, des meurtres
et des accidents et pour nous rassurer
grand désarroi que les belles paroles
sur la douleur commune ne dissipent
pas. Les légendes aussi ne persistent
pas. Elles passent avec les jours qui se
chevauchent on ne sait vers où ni vers
quoi. On a besoin de savoir pourquoi.
Un besoin pressant. Une communauté
de destin fondée sur la seule douleur
commune ne résistera pas aux menaces
de déliquescence dont les signes
précurseurs sont décelables un peu
partout.
Le berceau de la bravoure hébraïque
Ilan Ramon (1954-2003) est un héros
national. C'était un pilote de chasse
courageux et miraculeux. Il échappe à
deux reprises à des accidents d'avions.
En 1981, il participe au bombardement
de la centrale nucléaire en Irak. Puis il
Assaf Ramon
sur notre sort. On pleure, on se recueille
et on repart, plus ou moins réconciliés
les uns avec les autres. Ces légendes
ne sont pas moins vitales que les
hantises. On n'arrête pas du reste de
passer des unes aux autres en un
balancement perpétuel entre deux
variétés de douleurs : la douleur
cathartique et la douleur accablante.
On aurait besoin de l'une pour écarter
l'autre. Les unes et les autres n'en
concourent pas moins à tresser un
est choisi pour être le premier
astronaute israélien, membre de
l'équipe du Columbia. Quand le
vaisseau est enfin autorisé à prendre le
vol, Ramon prend avec lui nombre
d'articles qui témoignent de son amour
d'Israël. Une série de petits drapeaux
retraçant son parcours jusque-là, du
drapeau de sa ville natale Ramat Gan
à celui du lycée Blich. Des objets
particulièrement emblématiques : de
minuscules rouleaux de la Loi ; le
ACTUALITÉ
dessin d'un enfant de Terezinstadt
représentant la terre vue de la lune à
propos duquel il avait déclaré : " Je
prends avec moi son imagination et son
esprit " ; une lettre de son compagnon
d'armes, Ron Arad, disparu en captivité
chez les chiites au Liban ; une série de
mezuzot. C'était le premier astronaute
d'un peuple d'astronomes qui n'avaient
cessé, pendant trois mille ans, de
mesurer la distance entre la terre et le
ciel à la recherche de leur Maître.
Ramon était chargé de plusieurs
missions dont la principale consistait à
mener des recherches sur les grains de
poussière qui viennent du Sahara, portés
par le vent, et couvrent le ciel au-dessus
d'Israël pour comprendre leur influence
sur le taux des précipitations - une
mission pour le Petit Prince d'un Israël
tant soucieux du niveau des eaux dans
le lac de Tibériade. Pendant quinze
jours, il tient le pays en haleine. Il
l'associe à son émerveillement, à ses
émotions et à ses recherches. C'était
l'astronaute d'Israël et ce titre réclamait
de lui d'être son guide dans les cieux. Il
ne mange pour la circonstance que de
la nourriture casher. Le vendredi soir, il
allume des bougies. Au bout de quinze
jours dans l'espace et alors qu'il se
enterrés les Dayan, dans la vallée de
Jezréel, le berceau de la bravoure
hébraïque. Un peu partout dans le pays,
des écoles, des parcs, des institutions,
des rues portent son nom. Un astéroïde
aussi. Ce n'est pas tant sa prouesse
Il était l'ambassadeur de l'Histoire auprès de
l'Espace, il est mort après avoir présenté ses
lettres de créance. Il a prié Dieu du dessus et du
dessous de la voûte céleste, il a vu la Terre
promise d'en haut, peut-être avec le regard de
Moïse, il s'est arraché à la gravité de la terre pour
aller bénir les cieux.
disposait à atterrir, le vaisseau spatial se
dissout en entrant dans l'atmosphère et
Ilan Ramon est entré dans la légende.
C'était le 1er février 2003. On l'a enterré
dans le petit cimetière de Nahalal, le
premier moshav du pays, celui où sont
d'astronaute qu'on a voulu perpétuer que
son souci de tresser son odyssée dans
l'espace avec celle de son peuple. Il était
l'ambassadeur de l'Histoire auprès de
l'Espace, il est mort après avoir présenté
ses lettres de créance. Il a prié Dieu du
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 13
ACTUALITÉ
dessus et du dessous de la voûte céleste,
il a vu la Terre promise d'en haut, peutêtre avec le regard de Moïse, il s'est
arraché à la gravité de la terre pour aller
bénir les cieux.
Sept ans plus tard, en septembre 2009,
son fils Assaf, qui a voulu perpétuer son
souvenir en prenant sa relève, est
devenu pilote de chasse à son tour. Il
manque de s'écraser une première fois,
la seconde a été fatale. Son avion s'est
brisé en mille et un morceaux. Il est
enterré dans la légende aux côtés de son
père. En présence du président de l'Etat,
du Premier ministre, des membres du
gouvernement, de l'état major au grand
complet. De " la grande famille de
l'armée de l'air ". On parle de " drame
israélien " et du " douloureux tribut à une
terre chérie ". De nouveau, on a exhumé
le pathos sentimental et patriotique des
grands jours de deuil national. Les
moments de gloire et les moments
d'accablement. Devant les tombes
ouvertes où l'on ensevelit de jeunes
promesses. De la langue de bois plus ou
moins poétisée. Sûrement sincère. Sortie
de cœurs désarmés par le destin dont
on ne sait qui l'aiguille et quelles sont
ses considérations. Là haut, dans les
cieux, sillonnés par les avions, les anges
et les âmes. On est triste mais la tristesse
n'a jamais rien résolu, elle ne fait que
sécréter la tristesse. Rona, l'épouse et la
mère endeuillée, contrainte de céder à
son fils le tombeau qu'elle se réservait
aux côtés de son mari, n'a eu d'autre
choix que de déclarer : " Je suis prise
dans un piège, Assaf mon petit, c'est ma
tombe, c'est ma place, vous étiez censés
m'enterrer vieille et courtoise, avec un
million de petits-enfants derrière-moi.
Je suis tellement en colère. On m'a
promis de veiller sur Ilan, on m'a promis
de veiller sur toi. "
Sinon, on ne se posait pas trop de
questions ; on se l'interdisait. Ni sur le
concours des circonstances qui a conduit
à ce drame ni sur les conditions de
l'accident. Peut-être le Petit prince
héritier ne présentait-il pas les qualités
requises pour devenir pilote de chasse
; peut-être ne l'a-t-on déclaré major de
sa promotion que pour embellir la
légende. On était du reste tellement fier
de voir le fils d'Ilan Ramon assurer la
relève qu'on a autorisé les caméras à
montrer son visage alors que la censure
interdit de montrer les traits des pilotes.
C'est même le président de l'Etat qui lui
a remis ses ailes alors que dans son
cœur, dira-t-il plus tard, résonnait
l'intervention de Dieu pour arrêter la
main d'Abraham s'apprêtant à sacrifier
Isaac : " Ne porte pas la main sur ce
jeune homme " (Genèse 22, 12 ). Pérès
a su trouver les mots pour associer la
nation entière au drame et pour le
restituer à son registre tout personnel :
" Je sais que n'ont pas encore été créés
les mots qui peuvent guérir, ne sont pas
encore nés les propos qui peuvent
consoler, quand toute une nation, tous
ses citoyens pleurent aujourd'hui, l'un
sur l'épaule de l'autre. Ces [larmes] ne
remplacent pas les battements du cœur
quand on entend les pas du fils rentrant
à la maison de sa base militaire pour le
week-end. Ils ne comblent pas l'absence,
le lit vide, l'armoire où est remisée la
chemise avec les ailes de pilote, le rire
qui retentit dans la maison, l'étreinte et
le baiser. Le bienvenue et le au revoir. "
Les tombes de Nahalal recèleraient
autant de légendes, presque toutes. Le
petit cimetière figure dans le circuit qui
conduit au cimetière des kabbalistes à
Safed, où sont enterrés R. Isaac Louria
et ses disciples, de même qu'au
cimetière de Kinneret, surplombant le
lac, où sont enterrés le doyen des
pionniers, A. D. Gordon et la poétesse
Rahel (Bluwstein, 1890-1931). Dans tous
ces cimetières, les visiteurs laissent leurs
vœux ou leurs hommages. C'est comme
ça, ça durera peut-être. Je ne sais quoi.
Cette poésie qui s'insinue dans le deuil
qui, lui aussi, est condamné à passer. On
a enterré Assaf aux paroles d'un chant
de Shlomo Artsi ; on avait enterré Ilan
aux paroles d'un chant de Rahel :
Entends-tu ma voix, au loin,
m'entends-tu, qui que tu sois,
voix qui crie, voix qui pleure,
voix qui te transmet,
à travers temps,
ses salutations.
Ilan Ramon
14 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
Dans un petit cimetière pastoral
surplombant la vallée de Jezréel…
A.B.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 15
LA CHRONIQUE
Réponse à un jeune juif
né après la chute du mur
V
ingt ans depuis la chute
de ce foutu mur de
Berlin…
Jusque-là
j'avais aimé l'Allemagne
de la même manière
que François Mauriac,
qui l'adorait au point d'être heureux qu'il
en existe deux. Le triomphe de la
démocratie était un bonheur, mais il était
difficile de ne pas frissonner en
entendant la foule scander Wir sind ein
Volk, nous sommes un peuple, un seul
peuple. Les grandes perspectives du
Berlin impérial n'étaient plus coupées
par le béton et les barbelés, aujourd'hui
encore je cherche les traces de cet autre
monde en marchant dans la Friedrich
Strass sans être interrogé par les Vopos
de Check Point Charlie.
Vingt ans… J'ai longtemps voyagé en
pays aujourd'hui disparus, la République
Démocratique
Allemande,
la
Tchécoslovaquie, la Yougoslavie et, bien
sûr, l'URSS.
En septembre 1989, je rentrais d'un
tournage en Tchécoslovaquie, les murs
de Prague n'étaient pas encore repeints,
une de ces écoles de commerce, dont les
diplômes
rassurent
les
chefs
d'entreprises, parce qu'ils attestent des
limites d'un savoir réduit à quelques
techniques de vente.
Le développement des études
commerciales est pour moi une énigme.
Pour ma génération, les études étaient
le moyen d'échapper au commerce.
Nous venions d'un petit monde de juifs
immigrés qui n'avaient pu faire d'études,
parce qu'ils devaient travailler tôt pour
vivre et que la guerre n'avait pas tardé
à les rattraper. Le mot commerce me
renverra toujours l'image d'une vieille
bagnole bourrée de schmatess à vendre
sur les marchés. Les boutiques, les
vitrines à décorer. Confection, cuir et
fourrure. Traites et morte saison ! Tout
ce que nous étions pressés de fuir dans
les études et l'engagement politique.
Dans ce monde-là, le communisme
était l'horizon de beaucoup de juifs. Il
ne s'exprimait pas seulement par la
présence de nombreux juifs dans les
cellules du PCF. Le sionisme lui-même
était associé à un rêve égalitaire et
Le mot commerce me renverra toujours
l'image d'une vieille bagnole bourrée de schmatess à
vendre sur les marchés.
les touristes ne se bousculaient pas
devant la tombe du Maharal. Ma
dernière fille est née à ce moment-là.
Nous avons donc fêté ses vingt ans.
Il y avait, parmi ses copains, un jeune
juif plutôt sympathique. Tard dans la
soirée, il m'a interpellé avec toute la
fougue de sa jeunesse, en me sommant
de m'expliquer sur une monstruosité
dont il avait entendu parler. À en croire
la rumeur, j'avais appartenu au Parti
communiste. Je me sentais piégé
comme Elia Kazan, contraint de
s'expliquer devant le FBI longtemps
après son exclusion. Ma posture était
d'autant plus fâcheuse que ce jeune
homme parlait avec une assurance
justifiée par l'étendue de son inculture.
Si j'ai bien compris, il est étudiant dans
16 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
collectiviste. Peut-être aurais-je dû dire
d'abord ceci à mon jeune contradicteur.
Lui dire ce qu'éprouvent ces pionniers
à la retraite que je rencontre en Israël.
Ou encore, ces camarades de mon âge
qui étaient partis au kibboutz, à la fin
des années 60. Il leur semblait alors
impensable que des juifs connaissent la
misère sur leur propre terre, que le
système économique d'Israël soit aussi
cruel que ceux des pays de la diaspora.
Ils croyaient que les principes d'égalité
et de solidarité s'imposeraient
naturellement dans un État juif. Ces
sionistes étaient aussi communistes que
nous. Parce que le judaïsme se trouve
être l'origine spirituelle du communisme,
ne serait-ce que par le rappel quotidien
de l'esclavage d'Égypte.
J'aurais peut-être dû commencer par
là pour répondre à ce jeune juif, qui, s'il
est dépourvu de culture politique
contemporaine, a tout de même appris
que le peuple juif avait été esclave en
Égypte, qu'il remercie chaque jour la
main puissante par laquelle les enfants
d'Israël ont été libérés de l'esclavage
pour devenir des hommes libres.
Avant les humiliations, l'antisé-mitisme,
la misère qui ont conduit les juifs à
s'enflammer pour le socialisme, à former
les premier cadres du parti bolchevick,
il y avait cette scène primitive de
libération des esclaves. Cette prière
répétée pendant des siècles par les
ancêtres de Trotski, Zinoviev, Kamenev,
London, Kriegel, Krasucki, Konopnicki,
et tous les autres.
L
e communisme était, aussi, une
histoire juive. J'ai tout de même
pu recommander un film récent à
mon jeune interlocuteur. L'affiche Rouge
de Robert Guédiguian. Je suis né de
cette histoire, celle de deux juifs, mon
père et ma mère, qui s'engagèrent,
comme les Rayman, Elek, Schapiro,
Boczow, dans les organisations
communistes pour combattre l'occupant
nazi. À ce moment-là, une relation forte
s'est nouée entre le parti communiste et
les juifs de France. Cette relation a
perduré, dans les grandes villes et les
quartiers populaires de Paris. Elle s'est
défaite à mesure des chocs et des
ruptures, des procès antisémites, qui
visaient des juifs communistes de
Moscou, Prague et Budapest. Le
sentiment de solidarité avec Israël s'est
ensuite affirmé, il était assez puissant
chez tous les juifs, y compris les anciens
dirigeants communistes, pour provoquer
la rupture avec l'URSS et le parti qui,
sur ce point, était totalement aligné sur
Moscou. Mais l'histoire demeure. On ne
peut comprendre les engagements de
1942 en jugeant les hommes sur la base
des idées qui se sont formées après
1967, ou, pis encore, dans les années de
déclin du monde communiste.
La quasi-disparition de la chronologie
DE GUY KONOPNICKI
dans l'enseignement de l'histoire la rend
indéchiffrable. Ce jeune homme sait
vaguement que Staline était un monstre.
Il avait déjà assassiné beaucoup de juifs
en 1945, il avait même commencé par
les anciens dirigeants de la Révolution,
a continué par les écrivains, les
intellectuels, les militants juifs polonais
réfugiés en URSS. Mais en 1945, pour
la majorité des juifs, il était le vainqueur
de Stalingrad, il avait écrasé le nazisme
et l'Armée Rouge était entrée dans
Berlin. Pour les juifs qui sortaient de la
guerre et recherchaient ce qui restait de
leurs familles, l'ennemi absolu ce n'était
pas l'URSS mais l'Angleterre, qui
interdisait l'accès de la Palestine,
parquait les réfugiés dans les camps à
Chypre. L'Angleterre qui emprisonnait
et condamnait à mort les combattants
sionistes.
C
es gens ne pouvaient penser en
s'appuyant sur ce que tout le
monde sait aujourd'hui de
Staline, de l'URSS et du communisme.
Sait ou croit savoir ! Ce jeune juif qui
m'a interpellé a été nourri d'une soupe
fadasse qui remplace les livres d'histoire,
les romans et les films, tout ce qui nous
permet de comprendre le passé, de le
découvrir sans cesse, à chaque nouvelle
lecture. Je commence à dater. Je
m'alimente toujours de lectures, de livres
et de journaux, et je dois m'expliquer
devant une nouvelle génération nourrie
de ce concentré d'histoire servi à toute
vitesse dans les journaux télévisés, de
cette somme d'idées reçues qui finissent
par se transformer en doctrine
obligatoire de la modernité.
Berlin-Est, un vieux juif allemand, exclu
du PC, auquel il avait adhéré en 1932
en faisant le coup de poing avec les
chemises brunes de Goebbels…
Manfred, un vrai " yeke ", un juif de
Berlin, qui se souvenait de la splendeur
de cette grande synagogue dont la RDA
avait reconstruit la façade sur
Oranienburg strasse. Manfred, réfugié
en France en 1935, s'était engagé en
1939 dans la Légion étrangère. Après la
débâcle de 40, il avait pu s'embarquer
pour l'Afrique du Nord. Il avait combattu
de Lybie en Italie, il était revenu une
première fois, en Allemagne, en soldat
français… Sa famille exterminée, il ne
parvenait pas à s'intégrer en France. En
1950, il est rentré à Berlin, chez lui,
rêvant de construire une nouvelle
Allemagne.
Derrière le mur, Manfred avait perdu
bien des illusions. Il décrivait avec un
extraordinaire humour les délires du
système communiste. Il redoutait
pourtant ce jour qui s'approchait, qu'il
n'a pas vu, celui de la réunification. Au
loin, à l'Ouest une enseigne lumineuse
défiait Berlin-Est, celle de coca-cola.
Manfred m'a dit qu'il ne regrettait rien.
Il aurait pu rester en France, en 1950,
trouver un bon petit boulot, vivre une
bonne petite vie. Il a choisi de suivre son
rêve, ses convictions. Instructeur du
peuple, il a été chargé de rééduquer le
peuple allemand, en lui rappelant les
horreurs du nazisme. Il donnait aussi
des cours de marxisme. Suspect de
déviationnisme, il s'est retrouvé au
placard. Un emploi d'archiviste, dans un
service chargé de préparer un musée
des années noires 1933-45, musée qui
ne devait jamais voir le jour. On le sortait
tout de même deux ou trois fois par an,
pour l'emmener dans quelques écoles
où il expliquait aux enfants comment le
nazisme avait fait le malheur de
l'Allemagne. Il était, bien sûr, surveillé
par la STASI, dont il saluait les agents
quand il les repérait. Il savait ce
qu'étaient devenus ses rêves de jeunesse
et ne regrettait aucun de ses combats.
Un jeune juif né après la chute du mur
de Berlin ne peut comprendre mon ami
Manfred, juif berlinois, communiste
affrontant les hordes nazies avant 1933,
soldat de la France libre, instructeur du
peuple de la RDA, vieil homme au
regard malicieux, qui me racontait, à
cinquante mètre du mur, la vie
d'autrefois, autour de la synagogue de
l'Oranienburg strasse.
Ce monde que j'ai vu s'achever relève
aujourd'hui du roman. Il me reste donc
à répéter un mot d'Aragon, à ce jeune
juif qui m'interpelle : " commencez donc
par me lire ". Cette histoire, j'essaye de
la transmettre, depuis Au chic ouvrier,
de romans en polars. Je vais donc
continuer.
GK
J'apprends encore, en lisant les deux
livres d'Orlando Figes, La Révolution
Russe (Folio) et Les Chuchoteurs
(Denoël). L'histoire des hommes,
pendant la révolution puis, sous Staline.
Des destins d'hommes, de Russes, de
Juifs, d'Ukrainiens ou de Lettons…
Orlando Figes peut fouiller dans des
archives qui étaient bouclées, il y a vingt
ans, il peut aussi réunir des témoignages
et écrire ce qui jadis se chuchotait.
Vingt ans, donc. J'avais rompu avec
le communisme bien avant 1989. Je me
passionnais toujours pour son histoire,
je voyageais dans les pays de l'Est, sauf
quand on me refusait le visa.
C
es pays disparus… Quelques
années avant la disparition du
mur, dans les rues vides de
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 17
REPÈRES
Finkielkraut
et le Talmud
A l'occasion de la parution de son
livre Un cœur intelligent ( Editions
Stock ) , Alain Finkielkraut évoque
pour le mensuel Transfuge son amour
de la littérature. Il déclare entre
autres: "Tandis que la littérature
dispute à la philosophie le monopole
de la question" qu'est-ce que ? ", le
Talmud s'efforce de répondre à la
question : "qu'est-ce qui m'incombe?".
Ily a cependant un point commun
entre l'approche talmudique et
l'approche littéraire : le rejet de la
pensée massive, l'amour des détails.
Comme l'écrit Lévinas " la loi orale
est une casuistique. Elle s'occupe du
passage du principe général incarné
par la Loi à son exécution possible, à
sa concrétude ". Le Talmud, dit-il
encore, " surveille le général à partir
du particulier ". La formule s'applique
également à la littérature ".
7.500.000
d'Israéliens
Selon des chiffres rendus publics
par les Services israéliens de la
statistique,
la
population
israélienne était évaluée, à la fin
de l'année 2008, à 7.500.000
personnes dont 5.634.000 juifs.
On compte 1.500.000 Arabes dans
le pays. Les sabras - les citoyens
nés dans le pays - sont, eux,
évalués à 4 millions de personnes,
soit 71 % de la population juive.
Ils n'étaient que de 35¨% au
moment de la création d'Israël.
21% de la population israélienne
sont installés dans la région de Tel
Aviv. Par ailleurs, au cours de
l'année dernière, on a enregistré
156.923 naissances soit 3 ,5 % de
plus qu'en 1007.
Les service officiels de la
statistique ajoutent que les
Israéliens ont pris l'habitude de
se marier de plus en plus tard.
Ainsi 92 % des hommes âgés entre
25 et 29 ans sont aujourd'hui
célibataires. Chez les femmes,
cette proportion est de 42%.
18 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
Israël en Afrique
La première visite d'un ministre israélien des Affaires étrangères en Afrique
subsaharienne depuis près de vingt ans s'est déroulée sans incident. Notre
excellent confrère Jeune Afrique, observe dans son numéro du 13 septembre
que des accords symboliques ont été signés "qui confirment le processus de
normalisation entre Israël et l'Afrique amorcé au début des années 1990.
Le journal ajoute : " Reconnu par une trentaine de capitales africaines au milieu
des années 1960, l'Etat hébreu avait fait l'objet d'un ostracisme diplomatique
quasi complet au lendemain des guerres israélo-arabes de 1967 et 1973.
Aujourd'hui, une douzaine de pays du continent entretiennent des relations
diplomatiques avec lui, malgré les diatribes anti-israéliennes du " Guide " libyen
Mouammar Kaddafi, président en exercice de l'Union africaine (…). De fait,
même lorsque les relations diplomatiques étaient au plus bas, les échanges
commerciaux n'ont jamais cessé. Ils ont atteint près de 3 milliards de dollars
en 2008. Pour l'Afrique, l'expertise technologique israélienne est particulièrement
précieuse, que ce soit en matière agricole et hydraulique ou de sécurité et de
défense. L'existence de commu-nautés juives en Ethiopie (es Falashas), au
Nigéria ou en Ouganda explique aussi la solidité des liens israélo- africains "
Une place Ben Gourion
En présentant au centre communautaire de Paris ses vœux de Roch Hachana
à la communauté juive de Paris, Bertrand Delanoë a confirmé son intention
d'inaugurer une place Ben Gourion dans la capitale. L'événement aura lieu
aussitôt que le président israélien Shimon Pérès pourra se rendre à Paris.
Allah Akbar
à la synagogue
Cela paraît irréel et c'est
pourtant vrai : la population
musulmane dans les
banlieues de Washington a
tendance à grossir. On
parle d'une population
musulmane de 7 millions
de personnes pour l'ensemble des Etats-Unis. Dans
“Des lieux de culte pour tous les hommes...”
ces banlieues de la capitale
américaine, on construit de plus en plus de mosquées pour répondre aux besoins
des fidèles musulmans. Mais cela ne semble pas suffire. Les musulmans ont été
amenés à louer des salles à la veille du ramadan. Deux rabbins chefs de
congrégations ont décidé de céder leurs deux synagogues aux fidèles musulmans
pour leurs prières du vendredi : " Quand les prières musulmanes s'achèvent,
nous préparons les salles pour le début de la prière du chabbat " a déclaré l'un
des rabbins. Il ajoute : " Le prophète Isaïe a dit que nos lieux de prière devraient
devenir des lieux de culte pour tous les hommes ". De son côté, un des chefs de
la communauté musulmane a déclaré en commentant l'événement : " De même
qu'il y a des catholiques de Noël et des juifs de Hanouka, il y a des musulmans
de ramadan "
Une initiative identique a été prise par la communauté juive en Virginie.
Ces relations se sont développées de telle sorte que désormais des rabbins
prennent la parole devant les fidèles musulmans et des imams le font à la
synagogue.
ECONOMIE
Le FMI optimiste
pour Israël
A
près une année 2009
de déprime économique généralisée,
marquée par la plus
forte
récession
mondiale jamais enregistrée depuis l’après-guerre, les
espoirs de reprise globale pour 2010
nés des mesures de relance hors-norme
prises par les gouvernements tout
autour de la planète, et encore
rappelées lors du récent sommet du
G20 à Pittsburgh, ont ravivé un
optimisme global. Que celui-ci puisse
paraitre quelque peu excessif est
probable, mais il n’en demeure pas
moins que les signaux permettant
israélien, après un recul de 0,1% cette
année. Ces prévisions du FMI sont en
ligne avec celles de la Banque d’Israël
qui table de son coté sur un taux de
croissance de +2,5% pour 2010.
De tels chiffres feraient pâlir d’envie
les dirigeants des principales
économies mondiales. Même avec une
croissance de -0,1% en 2009, Israël
reste en effet encore largement à la tête
des pays industrialisés, devant les
Etats-Unis (-2,7%), les pays de la zone
Euro (-4,2%) et le Japon (-5,4%). Il en
va de même pour les prévisions 2010
qui tablent sur +0,8% pour les EtatsUnis, +1,7% pour le Japon et
seulement +0,3% pour l’Europe. Parmi
Le FMI prévoit pour 2010 une croissance
de +2,4% du Produit Intérieur Brut israélien,
contre +0,8% aux Etats-Unis et +0,3% en Europe.
d’être plus serein pour l’année à venir
se multiplient de semaine en semaine.
Ainsi, le Fonds Monétaire International
(FMI), que l’on ne peut pas taxer de
démagogie ou d’optimisme par nature,
tant ses prises de positions et ses
critiques pendant la crise ont été jugées
justes et crédibles par la plupart des
observateurs, a revu à la hausse ses
prévisions de croissance pour
l’économie mondiale lors de sa récente
assemblée annuelle qui s’est tenue à
Istanbul les 6 et 7 octobre derniers.
Même s’il demeure prudent, signalant
que “les facteurs de récession
s’atténuent mais la reprise s’annonce
timide”, pour l’ensemble de l’économie
mondiale, le FMI table sur une
croissance de 2,5% l’an prochain (au
lieu des 1,9% prévus jusque là), après
un recul de 1,4% attendu cette année.
L’économie israélienne n’échappe pas
à cet optimisme renforcé de la part de
la principale institution économique et
financière au monde. Bien au contraire.
Dans ses Perspectives de l’économie
mondiale publiées le 1er octobre, le
FMI prévoit pour 2010 une croissance
de +2,4% du Produit Intérieur Brut
les principales économies de la planète,
seules la Chine et l’Inde devraient selon
le FMI faire mieux, avec respectivement
des taux de croissance attendus à +8,5%
et +6,5%.
Cette exceptionnelle performance
attendue pour l’économie israélienne
résulte certes du scénario de reprise
mondiale, particulièrement importante
pour une petite économie très ouverte
sur l’extérieur et très dépendante des
marchés étrangers, mais surtout de
fondamentaux domestiques qui, non
seulement, n’ont pas trop souffert de la
crise mais qui offrent aujourd’hui des
bases particulièrement solides pour la
reprise à venir.
Le secteur immobilier israélien n’est
pas aussi dévasté qu’il l’est aux EtatsUnis, n’ayant pas souffert préalablement
des mêmes excès ; le secteur bancaire
israélien a nettement mieux résisté à une
crise financière qui a d’abord frappé les
établissements mondiaux les plus
exposés aux abus du secteur immobilier
et les plus dépendants d’activités
financières spéculatives et volatiles ; le
secteur technologique israélien demeure
un fer de lance hors du commun qui
PAR PHILIPPE MEYER
continue d’innover et de créer des
richesses. Il se maintient aux premières
places mondiales de sa catégorie offrant
ainsi à l’économie israélienne dans son
ensemble des raisons solides pour
conserver et développer le dynamisme
qui la caractérise depuis des décennies.
Par ailleurs, les finances publiques
israéliennes affichent une situation plus
saine qu’ailleurs, même si elles ont
comme partout été frappées par les
mesures de relance décidées par le
gouvernement pour compenser le choc
de la crise.
Il convient bien sûr de rester prudent
quant à ces perspectives de sortie de
crise, tant les incertitudes restent fortes
au niveau mondial comme au niveau
intérieur israélien, et notamment pour
ce qui concerne l’impact social de la
crise et l’évolution du marché du travail
qui demeure fébrile. Le FMI prévoit à
cet égard, malgré son scénario de
reprise, la poursuite de la hausse du
taux de chômage qui atteindrait 8,6%
l’an prochain après 8,2% en 2009. Il
s’agit là du facteur de préoccupation
principal qui pourrait à lui seul briser
les perspectives optimistes qui règnent
actuellement.
Malgré ces incertitudes sociales qui
sont autant de risques majeurs qu’il
faudra surveiller de près dans les mois
à venir, les perspectives économiques
israéliennes demeurent au beau fixe.
Dernier facteur encourageant en date,
une récente étude de l’agence
d’information économique Dun &
Bradstreet montre que les pertes
économiques que feront subir cette
année les fêtes de Tichri à l’économie
israélienne (plus de trois semaines de
ralenti) devraient s’élever à environ 12
milliards de shekels, soit près de 1,5%
du Produit Intérieur Brut. Même si un
tel impact est loin d’être insignifiant , il
est inférieur de moitié à celui de l’an
dernier alors que de nombreux jours de
fêtes ont coïncidé cette année avec le
Chabbat qui est de toute façon chômé
en Israël.
Il n’y a pas de petites économies …
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 19
LA VIE DU CONSISTOIRE
Le Ministre de l'Intérieur invité
au Consistoire pour présenter
ses vœux à la communauté juive
L
e Consistoire Central et le Consistoire de Paris ont accueilli le Ministre
de l'Intérieur, en charge des cultes, pour la cérémonie des vœux de bonne
année à la communauté juive. Brice Hortefeux a été chaleureu-sement
accueilli par les très nombreux responsables communau-taires réunis
dans la salle Jérusalem de la synagogue de la Victoire.
Ouvrant la cérémonie, le Président du Consistoire Central Joël Mergui a surtout
insisté sur l'étroite concertation avec le bureau des Cultes du ministère de l'Intérieur
sur quatre dossiers majeurs : la préservation au niveau européen des normes relatives
à l'abattage rituel, l'entretien du patrimoine juif de France, les carrés confessionnels
dans les cimetières, et la conciliation des dates d'examens et du calendrier juif. Il a
aussi rappelé le projet de construction du centre européen du judaïsme dans le
17ème arrdt de Paris.
Dans son allocution, le Grand Rabbin de France Gilles Bernheim a insisté sur la
notion d'exemplarité pour les Juifs à l'égard de leurs frères, de tous leurs frères,
quelles que soient leurs origines. Il a estimé qu'au-delà de la
liberté et de l'égalité, la fraternité était certainement ce qui
manquait le plus dans notre société, mais qu'il ne doutait pas
que le Ministre, en dépit de ses lourdes responsabilités, saurait
mettre à profit cette valeur essentielle dans la conduite de ses
missions.
Le Grand Rabbin de Paris David Messas a exprimé toute la
confiance de la Communauté juive dans le nouveau Ministre
de l'intérieur, et a insisté sur la notion de vivre ensemble, cette
volonté de respecter chacun dans ses croyances et ses convictions.
Il a également insisté sur le profond respect du judaïsme vis-àvis de la laïcité républicaine.
Brice Hortefeux n'a pas manqué de rappeler que le Consistoire
était "la plus ancienne institution représen-tative juive du monde"
qui a "toujours joué un rôle fondamental dans la structuration et
la gestion de la communauté juive", sachant trouver un juste
20 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
équilibre entre l'unité et la diversité. "Ma
présence parmi vous se veut, d'abord le
signe de l'attachement des pouvoirs
publics à cette grande institution qu'est
le Consistoire central et son réseau de
consistoires régionaux". Le Ministre a
par la suite fait le point sur les différents
dossiers évoqués. Concernant l'abattage
rituel, il a évoqué la stabilisation de la
législation européenne sur le sujet et
l'édiction de règles communes aux
différents pays européens. La question
de l'aménagement du calendrier des
examens pour les étudiants pratiquants
sera étudiée de près. Par ailleurs, le
Ministre a annoncé qu'une réunion
interministérielle
se
tiendrait
prochainement afin de faire avancer le
projet de création du plus grand centre
européen du judaïsme, qui pourrait voir
le jour dans le 17ème arrondissement de
Paris. Rappelant l'engagement sans faille
de l'Etat, comme de son "engagement
personnel" aux côtés de la communauté
juive pour combattre l'antisémitisme, il
a donné des consignes de fermeté aux
forces de l'ordre pour interpeller tous les
auteurs d'actes antisémites. "Les Juifs ont
un avenir en France" a-t-il conclu, car
ces derniers ont l'estime, la
reconnaissance et la confiance de l'Etat
et de la République.
LA VIE DU CONSISTOIRE
Cérémonie à la mémoire
des Déportés à la synagogue de la Victoire
L
a Cérémonie annuelle à la mémoire des Déportés s’est déroulée
dimanche 13 septembre à la synagogue de la Victoire dans le
cadre des 10 jours du Consistoire, en présence de nombreuses
personnalités. On notera la venue de Madame Simone VEIL,
Monseigneur André VINGT-TROIS, Monsieur Pierre LELOUCHE,
Madame Dina KAWAR Ambassadeur de Jordanie, Monsieur Osman
Koruturk, Ambassadeur de Turquie, la represantante de la Région Ile de
France, de la Mairie de Paris et de l'Assemblée Nationale, plusieurs maires
d’arrondissements et de la Région Parisienne, le Général Gouverneur
militaire de Paris, les Associations des fils et filles de déportés, l’Ambassadeur
d’Israël, le Président du CRIF, le Président de l'AIU et le Directeur Général
de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.
Le Président du Consistoire Joël Mergui a tenu à rendre un vibrant
hommage aux déportés rescapés, en insistant sur l'ardente nécéssité de
répéter inlassablement le message de la Mémoire et les témoignages de
l'Horreur. "Ils sont notre drapeau, notre phare, et nous devons nous inspirer
de leur courage et de leur persévérance".
Le Grand Rabbin de France Gilles Bernheim a rappelé avec émotion
l'horreur de la machine exterminatrice nazie et la volonté criminelle et
barbare "d'effacer non seulement la présence des juifs mais le mot juif luimême". "Nous sommes ici pour apporter un démenti définitif à ce qu'a été
le projet des nazis, à savoir qu'il ne reste plus aucune trace du peuple juif
assassiné", a-t-il également affirmé.
Le Grand Rabbin de Paris David Messas a rappelé la nécessité de rester
vigilant et de continuer à témoigner devant la résurgence de l’antisémitisme
et le développement du négationnisme.
La cérémonie a pris fin avec “le El Malé Rahamim”, prière pour les
disparus de la Shoah.
Installation du Rabbin Michaël Azoulay
à Neuilly-sur-Seine
Q
uelques mois après son arrivée à Neuilly, la cérémonie officielle
d’installation de Mon-sieur le Rabbin Azoulay s’est déroulée à
la synagogue de la rue Ancelle dimanche 13 septembre 2009
devant une foule importante et en présence de très nombreuses
personnalités, parmi lesquelles le Maire de Neuilly, les autorités
ecclésiastiques
et
académiques,
de
nombreux élus. Le
Grand Rabbin de
France Gilles Bernheim
a rendu un vibrant
hommage au Grand
Rabbin Blum et a
précisé que la mission
d'un
Rabbin
est
marquée par l'urgence
de l'action et la
patience de la réflexion,
deux points qui caractérisent le Rabbin Azoulay. Le Président du
Consistoire Joël Mergui a relevé les qualités humaines et professionnelles
du Rabbin Azoulay, acquises par un parcours universitaire complet et
brillant et lui a demandé de tout faire pour faire vivre ensemble les
composantes de cette Communauté plurielle aux sensibilités différentes.
Le Grand Rabbin de Paris David Messas a dressé une feuille de route au
Rabbin Azoulay : savoir être rigoureux tout en allant à la rencontre des
fidèles et être à leur écoute.
Donation au Consistoire
de la synagogue
de la rue du Fbg St-Honoré
L
e 10 Septembre 2009, "l'Association des
Israélites d'Oranie en France" représentée
par son Président Monsieur Joseph
Benazera, accompagné de Messieurs Raymond
Bunan, Charles Bunan et Patrick Atthar a
solennellement fait donation de la Synagogue du
218-220 rue du Fbg St Honoré à Paris au
Consistoire de Paris Ile de France, représentée par
son Président Monsieur Joël Mergui. Cet acte
s'inscrit comme l'a déclaré le Président Benazera
dans la volonté d'assurer la pérennité de la
Synagogue, et des traditions, coutumes et de
l'héritage liturgique et cultuel des juifs oranais.
Pour la Communauté des Israélites d'Oranie en
France, la garantie que leur patrimoine matériel
et spirituel soit conservé et transmis en héritage
à leurs enfants et petits-enfants passe par
l'Institution consistoriale. Le Président Joël Mergui
a rappelé que c'est avec la plus grande
détermination que le Consistoire a le souci de
préserver le patrimoine culturel et historique de
nos communautés.
La Synagogue Elie Dray, inaugurée en juin
dernier, est un complexe de 220 m² composé d'une
salle de culte proprement dite et d'une extension
de 150 m² de salles de conférences et de Talmud
Thora. Cette synagogue réunit plus de 200
personnes chaque Chabbat, dont de nombreux
jeunes que le Président Benazera souhaite intégrer
à la Commission administrative. Elle dispose d'un
programme d'activités riche et varié auquel le
Rabbin Shélomo Zini apporte une contribution
majeure.
Cette séance de signature était emprunte
d'émotion et de joie. Emotion parce qu'au delà de
la donation physique du bâtiment, il s'agissait pour
les dirigeants de la communauté d'accomplir un
devoir de transmission et de pérennisation de leurs
valeurs et de leur culture ; et joie parce que le
Consistoire devenait le garant pour l'avenir et pour
la jeunesse, de la préservation de ce riche
patrimoine.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 21
LA VIE DU CONSISTOIRE
Kippour 5770 : plus de 500 offices organisés à travers la France
L
es synagogues de Paris et d’Ile de
France ont connu une fréquentation
en hausse avec plusieurs dizaines
de milliers de personnes.
Le Grand Rabbin de France Gilles
Bernheim s'est rendu à la synagogue de La
Victoire pour Kol Nidré et Néhila, et a
participé par ailleurs aux prières de SaintLazare (Berit Chalom), de la synagogue de
l'AIO (Oranais) rue du Faubourg SaintHonoré, et de l'office consistorial de l’Hôtel
Méridien dans le 17ème arrdt organisé par
Elie Korchia.
Le Président du Consistoire Joël Mergui
était quant à lui à l'office de l'Ecole
Rabbinique rue Vauquelin pour Chaharit,
puis à la Synagogue de la rue Notre Dame
de Nazareth, à la synagogue de la Place des
Vosges, à la Synagogue de la rue de La
Roquette et a terminé par la Synagogue de
la rue des Tournelles.
Le Maire de Paris Monsieur Bertrand
Delanoë a tenu à se rendre dans la
synagogue du Grand Rabbin de Paris David
Mesas. M. Goasguen est venu saluer
la Communauté à la disposition de
laquelle il avait mis la Salle des Fêtes
de la Mairie pour y célébrer l'office
consistorial du 16ème arrdt organisé
par David Amar.
Matinée de réflexion au Beth Hamidrach de Paris
En province, ce sont des centaines
d’offices qui ont été organisés par les
communautés consistoriales à travers
la France. Les présidents de
communauté et les rabbins ont eu
l'occasion de passer un message
unitaire à l'ensemble des juifs de France
ainsi qu'aux centaines d'élus venus leur
rendre visite.
Les services du Consistoire Central,
avec l'aide du Grand Rabbinat de
France, ont pu aider de nombreuses
communautés à assurer leurs offices
en envoyant des rabbins et des
officiants ou encore en prêtant des Sifré
Torah. On citera notamment les
communautés de Angers, Bastia (où
150 personnes sont venues à la
synagogue, et ce pour la première fois
depuis plus de vingt ans), Belfort, Brest,
Châlons-sur-Saône, Clermont Ferrand,
Compiègne, Ile de La Réunion, La
Rochelle, Limoges, Perpignan, SaintCyr les Ecoles, Saint-Quentin, Tahiti,
Tarbes, Troyes, Verdun.
22 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
A
l'initiative du Grand Rabbin de Paris David Messas, le Beth
Hamidrach des Rabbins de Paris, animé par le Rav Ariel
Messas, a réuni jeudi 24 septembre 2009 plus de soixante
cadres religieux de Paris et sa région, invités à suivre une
matinée d'étude et de réflexion ayant pour thème les fêtes du mois de
Tichri. Après les interventions du Rav Ariel Messas, du Grand Rabbin
Michel Gugenheim, et du Dayan Jermyahu Kohen, Av Bet din de Paris,
le Grand Rabbin de Paris a traité du thème de l'homme en prière le jour
de Kippour et de la puissance des mots qu'il prononce. Le Président du
Consistoire Joël Mergui a finalement adressé un message de bénédiction
et de félicitation à l'égard du corps rabbinique.
LA VIE DU CONSISTOIRE
Commémoration du Yskor de la Shoah
L
e Grand Rabbin de France Gilles Bernheim et le Président
du Consistoire Joël Mergui sont intervenus au cimetière de
Bagneux le dimanche 27 septembre lors de la
Commémoration du Yiskor de la Shoah organisée par l'USJF et
présidée par Henri Batner.
Le Grand Rabbin de France a déclaré que « pour Israël, la mort
de six millions de Juifs, c’est la disparition des forces, des énergies
qui auraient pu contribuer à la genèse d’une spiritualité
supplémentaire dans l’État juif », et d’jouter « Je n’oublie pas que
l’extermination du judaïsme européen a détruit une partie
importante des forces vives et créatrices du peuple juif. C’est au
sein de ce judaïsme d’Europe centrale et orientale que sont nés
les grands courants de vitalité religieuse, intellectuelle, politique
de la société juive des deux derniers siècles. (…) Ce monde disparu
était un monde étonnant de richesse, de complexité, de subtilité
et de ferveur. » (…) « Nous devons nous employer à restituer à ces
victimes, dont les nazis voulaient effacer jusqu’à la trace, leur
pleine intégrité et surtout leur identité de vivants. ».
Le Président du Consistoire a exprimé sa colère « de voir que
récemment, un homme qui a exprimé publiquement sa volonté de
bruler des livres juifs aurait pu devenir le dirigeant de la culture
dans le monde, et que par ailleurs le dirigeant d’un Etat puisse
continuer de remettre en cause l’existence même de la Shoah.
Face à cela, il faut continuer encore et toujours d’écouter les
témoignages des survivants et se souvenir de ce qu’on a voulu
effacer : le Peuple juif, ses valeurs, son éthique, sa morale, sa
Torah. A l’occasion de Yom Kippour, nous serons présents dans
nos synagogues pour dire que ce judaïsme qu’on a voulu effacer,
ne s’effacera pas. Nous seront présents pour faire mentir ceux qui
ont dit qu’en brulant des livres il n’y aura plus de juifs. Ce soir,
demain, les livres juifs et la Tora juive seront ouverts partout dans
le monde».
Avant-première du film
“Le Concert” au profit
du centre du 17ème arrdt
L
e Consistoire de Paris organise le
15 octobre à Paris la projection en
avant-première du film “Le
Concert” réalisé par Radu
Mihaileanu et dont la sortie nationale est
prévue le 4 novembre. La projection aura
lieu au Publiciscinémas à Paris en présence
de l’équipe du film et de nombreuses
personnalités. Les bénéfices de cette soirée
seront consacrés à la construction du centre
européen du judaïsme dans le 17ème
arrondissement de Paris.
Rappelons que ce projet majeur pour le
Consistoire vise à créer le plus grand centre
du judaïsme en France destiné à proposer
à la communauté juive de Paris, d’Ile de
France et de tout le pays une offre
exceptionnelle dans le domaine cultuel,
culturel, intellectuel et artistique. Un lieu
unique de rencontres, d’échanges et de
débats qui constituera un centre unique en
Europe qui sera également le symbole des
valeurs républicaines de la communauté
juive. Le programme comprend notamment
une surface utile de 4800 m2, un pôle
cultuel comprenant une synagogue
indispensable dans cet endroit de la
Capitale, un pôle culturel destiné à accueillir
des activités artistiques, littéraires et
sportives, une bibliothèque, un pôle
jeunesse, un espace multimédia, des
espaces administratifs et associatifs, des
salles polyvalentes, d’exposition et de
réception.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 23
LA VIE DU CONSISTOIRE
Commission des travaux de l'ACIP :
Soyez informés …
Nous sommes tous concernés !
PAR DOROTHY BÉNICHOU KATZ (*)
A
rrivée au terme de quatre ans
à la tête de la commission des
travaux du Consistoire de
Paris, je souhaite vous
adresser un aperçu du travail réalisé en
collaboration avec de nombreux acteurs.
Les synagogues et les centres
communautaires de l'ACIP représentent
environ 60 000 m2 à entretenir au
quotidien, mais également à maintenir
en l'état et à rénover. Dans ce patrimoine,
une cinquantaine de sites a bien plus de
30 ans, dont une vingtaine qui sont
quasiment centenaires. Pour avoir la
maîtrise des travaux de sécurisation,
l'ACIP a signé une convention avec le
préfet de la région Ile de France et le
préfet de Paris en 2005. Le recours à des
financements publics, dans le cadre de
l'article 13 de la loi 1905, a constitué un
appoint appréciable bien qu'insuffisant.
Au niveau local, nous travaillons avec
les présidents des communautés et leurs
équipes de bénévoles qui font un
formidable travail de sensibilisation
auprès de leurs préfectures ou
municipalités. Grace à leurs actions
souvent déterminantes (par exemple en
obtenant l'échelonnement des travaux de
mises aux normes), de nombreux conflits
ont été résolus entre nos communautés
et les communes qui sont juridiquement
responsables en cas de sinistre.
Sur nos sites classés, les services de
Conservation du patrimoine cultuel et
religieux, les conservateurs et
conservatrices du patrimoine, la Direction
des Affaires Culturelles de la Ville de
Paris, le conservateur des œuvres d'art
religieuses et civiles et les mairies
d'arrondissement sont des partenaires
précieux et sans faille pour les gros
travaux d'extérieur mais aussi à l'intérieur
par exemple : la restauration des grands
candélabres de la Teba à la Victoire et la
réfection totale de l'oratoire tunisien de
la Victoire ou les fenetres de la synagogue
donnant sur la place des Vosges selon le
respect absolu de la construction d'origine
du batiment .
Grace à notre Av Beth Din Yrmiahou
Kohen, la conformité Halakhique de nos
mikvaot est systématiquement réalisée.
Ainsi, 8 mikvaot ont bénéficié de travaux
d'adaptation et d'embellissement pour un
coût de 68 000 euro, 3 nouveaux mikvaot
ont été construits (Saint Brice,
24 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
Champigny et Vitry). Le mikvé de la
Varenne est en cours de réalisation.
Nous sommes des ERP (établissements
recevant du public), donc nous devons
faire preuve au quotidien d'une réelle
rigueur, d'une vigilance constante et
parfois d'une grande réactivité. Voici
quelques exemples:
- 32 sites, soit 4000m2, ont nécessité des
interventions pour les toitures et
l'étanchéité,
- 19 sites ont fait l'objet de consolidation
en gros œuvre, ravalement, rampes
handicapés,
- 30 sites ont bénéficié d'une réfection
électrique,
- 8 sites ont eu un remplacement total ou
partiel du système de chauffage, soit une
enveloppe des dépenses incontournables
de 203 777 euros en 2006, 480 261 euros
en 2007 et 360 940 euros en 2008.
Dans un autre domaine, 36 sites ont
été remis en conformité incendie et ont
reçu un avis favorable des commissions
de sécurité, pour un coût de 96 626 euros
en 2006, 169 669 euros en 2007 et 69 882
euros en 2008. Pour le seul 1er trimestre
2009, 144 856 euros de travaux ont déjà
été réalisés.
Moyennant souvent le recours à
l'emprunt, il a été possible de reconstruire
et d'agrandir la synagogue d'Asnières
détruite par la tempête de 1999, de
réaliser
l'extension
du
centre
communautaire du Perreux et ses salles
de Talmud Thora. Grace à la dynamique
communauté
de
Vincennes
l'agrandissement de la synagogue,
l'acquisition et l'aménagement du Centre
Communautaire fonctionnent bien. Au
Kremlin Bicêtre, une belle salle des fêtes
est en cours de finition. A Paris 19e, la
synagogue Michkenot Israël a inauguré
son auditorium et sa salle des fêtes…
Enfin, le siège du 17 rue St Georges a
fait l'objet d'un rafraichissement ô
combien indispensable tant pour les
permanents, qui au quotidien font un
travail épatant, que pour tous les publics
qui sollicitent chacun de nos services.
Du RDC au 5e étage, sols, murs et
éclairage ont été refaits du mieux
possible, avec, comme toujours, un souci
maximum d'économie. Néanmoins le 1er
étage n'est pas encore fait à ce jour et il
manque une ventilation indispensable
au service des divorces qui est sous les
toits.
Durant cette présidence aux travaux,
mon objectif a été d'être à l'écoute. De ne
pas laisser en souffrance les demandes
souvent bien légitimes. Ce parcours a été
émaillé de nombreuses rencontres, de
contacts passionnants avec les
responsables bénévoles lors des visites à
Sarcelles, place des Vosges, St Ouen
L'Aumône, Villiers le Bel, Les Tournelles,
Garges
les Gonesse, Nazareth,
Doudeauville… et d'autres… il reste
encore beaucoup à faire.
Mon mandat n'aurait pas été possible
sans les "artisans" permanents et
incontournables qui ont œuvré chaque
jour "au chevet" de cette passionnante
mission : sur tous les terrains avec moi et
au quotidien les 3 indispensables : Daniel
Sandler, Asnath Saada et Ilan Baruch, et
puis Simon Marec Gladys Akoka, Alain
Samama, le service de protection de la
communauté juive (SPCJ) et…forcément
le service comptabilité de l'ACIP.
A chacun, je vous dis franchement
merci et bravo.
-(*) Présidente de la commission des
travaux du Consistoire de Paris.
Formation des professeurs
de Talmud Torah
Une formation de tous les professeurs
et des directeurs des Talmudei Torah
a eu lieu dimanche 13 septembre à
l'école rabbinique de France de la rue
Vauquelin à Paris. A cette occasion, les
livres du Maître associés aux
nouveaux ouvrages mis en circulation
lors de la récentre rentrée de début
septembre et édités sous la direction
du Président de la Commission Talmud
Torah David Amar (cf. notre numéro
précédent) ont été remis aux
professeurs ainsi qu'une sacoche au
logo du Consistoire pour chacun et
chacune d'entre-eux. Le président du
Consistoire Joel Mergui était présent
pour inaugurer ces nouveaux ouvrages
et s'adresser à tous les enseignants
pour les encourager dans cette tache
majeure au service de l'avenir même
de la communauté.
MEMOIRE
Une Juste des Nations
en Pologne
PAR SIMONE VEIL*
Les Editions du Cerf publient un ouvrage de Larissa Cain consacré à Irena Adamowicz "
Une juste des Nations en Pologne ". Larissa Cain est elle-même né en Pologne, elle a été
enfermée dans le Ghetto de Varsovie et a survécu à la guerre. Son livre rappelle ce que
fut l'itinéraire d'Irena Adamowicz, catholique polonaise fervente, devenue à vingt ans
membre d'un mouvement de jeunesse sioniste et laïc, le Haschomer Hatzaïr. Dans la
Pologne occupée elle a participé au sauvetage des juifs.
Décédée en 1972, elle a été reconnue comme Juste des nations en 1988.
Nous publions ci-dessous avec l'autorisation des Editions du Cerf (que nous remercions)
la préface que Mme Simone Veil, membre de l'Académie française, a donnée à cet ouvrage.
C
omment Irena Adamowicz, jeune polonaise,
catholique
fervente, a-t-elle pu
s'impliquer corps et
âme pour aider les
Juifs au moment même où ils étaient
haïs, pourchassés, parqués dans des
ghettos, avant d'être exterminés?
Comment a-t-elle pu s'imprégner des
idéaux sionistes au point d'aider ses
camarades à rejoindre clandestinement
la Palestine, au point de se rendre ellemême plus tard en Israël ?
C'est cette part de mystère que,
dans ce récit, Larissa Cain a tenté
d'élucider en interrogeant tous ceux
qui ont connu Irena Adamowicz,
ceux qui l'ont vue dans le
rayonnement de ses vingt ans, au
moment où, cheftaine scoute, elle a
partagé l'expérience d'un kibboutz
au fin fond de la Pologne, créé par
des membres de l'Hashomer
Hatsaïr. Cette expérience a été si
forte pour elle qu'elle a guidé toute
sa vie future, et surtout son
engagement pendant la guerre.
Engagement politique, notamment
aux côtés de Joseph Kaplan, un des
leaders
qui
préparèrent
l'insurrection du ghetto de Varsovie.
Irena lui servait d'agent de liaison
pour rassembler les forces et fédérer
les mouvements de résistance au
sein des différents ghettos de
Pologne, mais aussi pour faciliter les
contacts entre l'Organisation juive
de combat et la résistance polonaise
dont elle faisait partie. Engagement
humanitaire aussi, puisqu'elle avait
pour mission de visiter les orphelinats
et que, à ce titre, elle put obtenir les
autorisations nécessaires pour entrer
dans le ghetto de Varsovie.
Engagement moral enfin, car jamais
elle ne ménagea ses forces pour
accueillir et aider ceux qui, à l'époque,
étaient considérés comme la "Lie de la
terre ", pour reprendre l'expression
d'Arthur Koestler.
De tels destins méritent d'être
racontés aux jeunes générations, car
ils fournissent l'exemple d'engagements spontanés, inattendus,
aucunement obligatoires, et pourtant
réalisés avec une ferveur et une
simplicité
admirables.
Irena
Adamowicz appartenait à un
mouvement, à un réseau, mais sa
volonté et sa ténacité lui ont permis de
se faire accepter par les réseaux de
résistance juive qui ont pu lui confier
des missions délicates, qu'elle seule
polonaise, catholique, au-delà de
tout soupçon, pouvait exécuter.
Que des femmes, en un temps où
la barbarie était presque la règle, en
un temps où l'héroïsme aurait dû voir
se lever tant d'hommes qui sont
pourtant restés impassibles, aient eu
le courage de défier les autorités,
afin de venir en aide à ceux qui,
dans toute l'Europe, étaient
pourchassés, déportés, et exterminés,
voilà une leçon que nous devons
retenir du récit de la vie d'Irena
Adamowicz, voilà aussi une leçon
pour les générations à venir.
Irena Adamowicz fait partie de ces
consciences isolées qui ne faiblirent
pas alors que l'Europe sombrait dans
le chaos et le déshonneur. Elle
mérite une place dans le Panthéon
de l'humanité. Merci à Larissa Cain
de l'avoir tirée de l'oubli.
-*de l'Académie française.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 25
IN MEMORIAM
Les “revenants
dans la question”
I
l est difficile de parler de
Stéphane Mosès au passé
après plus de 50 ans de
fraternité.
Vous
me
pardonnerez de parler en
mélangeant parfois le présent
et le passé. Je laisse à d’autres, plus
compétents, le soin de parler du
contenu de son œuvre. Je me
contenterai d’égrener quelques
souvenirs.
Nous nous sommes suivis un peu
partout pendant tout ce temps, d’abord
à Paris, et dans la vallée de Chevreuse,
à Orsay qui était un petit village avant
l’Université qui l’a fait connaître depuis,
ensuite au Maroc, et bien sûr à
Jérusalem, et encore à Paris. Tout cela
avait commencé quand nous étions
étudiants, lui à l’École Normale
Supérieure en littérature et philosophie,
moi à la Faculté de médecine et à la
Faculté des sciences, et s’est poursuivi
au moins jusqu’à notre dernier séder
de Pessah ensemble à Paris il y a deux
ans.
Nous étions en fait très différents, par
nos histoires personnelles, par nos
caractères et nos centres d’intérêt, mais
nos échanges étaient pour cela d’autant
plus intéressants et enrichissants,
autour des textes juifs anciens que nous
découvrions ensemble et où nous
cherchions
des
significations
pertinentes pour notre existence.
Nous n’étions pas nombreux à suivre
ce cheminement à cette époque, dans
les années 50, dans notre petite
communauté d’Orsay, moitié scoute,
moitié hippie avant l’heure. Manitou
Léon Askénazi avait qualifié cette
situation de “clandestinité de la pensée
juive”.
Les sources judéo-allemandes de
cette modernité du début du siècle, à
part Freud et Kafka, c’est-à-dire
Rosenzweig, Scholem, Benjamin, que
Stéphane fera connaître par la suite,
26 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
PAR HENRI ATLAN
n’étaient appréciées que d’une poignée
de spécialistes, tout comme l’œuvre
d’Emmanuel Levinas.
Le tout était recouvert par l’ombre de
Jean-Paul Sartre, qui avait déclaré de
façon péremptoire que le marxisme
était “l’horizon indépassable de la
modernité”!
Cela se traduisait, sur la Rive Gauche
de la Seine, par l’idée que si l’on n’était
pas marxiste, éventuellement mâtiné
Et c’est dans ces textes hébreux – que
Levinas appelait les “papiers d’identité”
du peuple juif – que nous allions
chercher des ouvertures, études et
pratiques, Tora et mitzvot, mais en
refusant de se laisser enfermer dans cet
autre conditionnement que peut
constituer l’orthodoxie institutionnelle.
La mode n’était pas encore à la
‘hazara bitchouva, “revenir dans le
retour”, expression assez abusive pour
Notre découverte de la tradition était en fait
découverte de questionnement. Revenir à la
question était pour nous le mouvement même du
revenir au retour vers la tradition
d’un peu de psychanalyse, on ne
pouvait être qu’un débile ou un salaud
[au sens sartrien du terme].
Nous voulions échapper à ce
conditionnement idéologique en évitant
autant que possible d’être trop débiles
ou salauds.
Henri Atlan
désigner la conversion au judaïsme
traditionnel, étude et pratique, de Juifs
jeunes et moins jeunes pour qui c’était
une découverte. Parler de retour est
évidemment un euphémisme puisqu’il
s’agit de personnes censées revenir à
une tradition qu’ils n’ont jamais connue
et donc jamais quittée. Certes, leurs
parents ou leurs grands-parents
l’avaient probablement quittée. Mais
ce que l’on découvrait alors était bien
différent car il n’était pas possible de
supprimer purement et simplement une
ou deux générations d’assimilation à la
culture occidentale, à celle des
Lumières et à la pensée critique.
C’est pourquoi cette expression,
‘hazara bitchouva, avait pour nous une
connotation beaucoup plus historique
de retour aux racines, qu’intellectuelle
et religieuse de conversion à
l’orthodoxie.
Ceci fut à l’origine d’un malentendu
profond, un parmi d’autres, dans notre
rencontre avec les différentes parties
de la communauté juive et de la société
israélienne.
En effet, en parallèle avec ce
IN MEMORIAM
mouvement de ‘hazara bitchouva, donc,
chez des jeunes Israéliens jusque-là
élevés dans le sionisme laïque
antireligieux qui se trouvaient convertis
à une orthodoxie religieuse sans
questions, se produisait un mouvement
en direction opposée, de sortie du
monde fermé des yechivot vers une
existence laïque, considérée comme
une libération du joug des mitzvot.
C’est au niveau de la langue que se
trouvait pour nous le malentendu.
En effet, ce double mouvement de la
laïcité vers la religion et de la religion
était pour nous le mouvement même
du revenir au retour vers la tradition, à
tel point que l’expression “revenir dans
le questionnement” devait s’appliquer
non pas à ceux qui abandonnaient la
tradition mais au contraire à ceux qui,
comme nous, découvraient ou
redécouvraient cette tradition de
questionnement.
Malentendu parce qu’en réalité, il est
malheureusement exact que revenir à
la tradition, dans une conversion
religieuse telle que nous l’observons le
plus souvent, consiste en effet à ne plus
Stéphane Mosès
vers le monde laïque, s’est traduit par
un jeu de mot sur le sens de tchouva,
qui veut dire en effet “retour”, et même
“repentir ”, mais veut dire aussi
“réponse”, réponse à une question.
“Revenir dans le retour ”,‘hazara
bitchouva, est interprété dans ce jeu de
mot de façon ironique comme “revenir
dans la réponse”, en soulignant ce
caractère de la croyance religieuse qui
croit posséder les réponses aux
questions. Au contraire, ceux qui
quittent le monde fermé des croyances
religieuses – où les réponses sont
censées être données – se dénomment
eux-mêmes, à la fois par dérision du
mouvement contraire et par leur propre
sentiment de libération, ‘hozrim
bicheéla, “revenant dans la question”,
c’est-à-dire au questionnement que les
réponses de la religion avaient arrêté.
C’est là qu’il y avait pour nous
malentendu car notre découverte de la
tradition était en fait découverte de
questionnement. Revenir à la question
vouloir poser de questions, en se
réfugiant dans l’abri des réponses
toutes faites.
Parmi les quatre enfants de la
Haggadah, c’est “celui qui ne sait pas
poser de questions” qui est le cas le
plus fréquent dans le monde religieux.
C’est celui qui ne voit pas ou ne veut
pas voir les questions gênantes.
Nous étions donc en porte-à-faux, en
nous percevant comme ‘hozrim
bicheéla, “revenant dans la question”,
alors que nous étions engagés dans un
mouvement qui ressemblait à celui des
‘hozrim bitchouva, qui semblaient
“revenir ” non seulement “dans le
retour”, mais “dans la réponse”.
Bien plus récemment, à propos de
notre approche de l’étude de ces textes
visant à découvrir ou revenir à une
sorte de nouvelle authenticité par-delà
les credos religieux, Stéphane avait
parlé de “déconstruction de Dieu”.
C’est une expression bienvenue
“déconstruction de Dieu”, et très
pertinente quand on se rappelle qu’il
n’existe pas en hébreu de mot pour
“Dieu”, ou plutôt qu’il existe beaucoup
de noms et d’expressions qui sont
invariablement détournés de leur sens
quand ils sont traduits banalement par
ce mot Dieu, dérivé du grec Theos ou
Zeus.
Le questionnement critique ne portait
pas seulement sur certaines formes
d’orthodoxie, mais aussi sur cette fausse
modernité que l’historien des religions
Gilles Kepel avait appelé la “revanche
de Dieu”, qui a pris chez nous la forme
du nationalisme religieux messianique,
où l’on retrouve les caractéristiques du
mouvement de Sabbataï Zvi et de ses
errances.
Et bien sûr, dans le contexte de la
guerre interminable entre Israël et le
monde arabo-musulman, il était difficile
– et c’est toujours difficile – de supporter
les effets des erreurs politiques de
gouvernements israéliens successifs,
en réponse le plus souvent aux erreurs
au moins aussi grosses, sinon pires, des
gouvernements et dirigeants arabes
bloqués dans leur refus.
Et pourtant, il faut souligner à quel
point Stéphane était très sensible à
toute
forme
de
récupération
idéologique de ces critiques. Et cela le
conduisait à riposter fortement aux
expressions d’une intelligentsia
antisioniste à la fois juive et non juive.
Véhiculées parfois par certains de nos
amis, ces expressions reviennent,
encore et encore, au nom d’une
exigence de pureté morale, à refuser
purement et simplement au seul peuple
juif le droit à son auto-détermination.
Stéphane aurait pu dire de lui-même
comme Abraham dans la Genèse, guer
vetochav anokhi, “je suis étranger et
résident”, déraciné et installé. Ce
cheminement servira de source
d’inspiration pour les générations
futures, et d’abord celles de ses enfants
et petits-enfants.
-NDLR : Cet article est tiré du livre
“Retours. Mélanges à la mémoire de
Stéphane Moses“ publié par les Editions
de l’Eclat dans le cadre de la Bibliothèque des Fondations. Il est publié ici
avec l’accord de l’auteur et de l’éditeur,
que nous remercions.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 27
POLÉMIQUE
Les accusateurs accusés
PAR ANNIE LELIÈVRE
D
ans le "Nouvel Observateur" paru le 23 juillet, Denis
Olivennes, directeur du journal, a commenté les suites du procès Fofana. L'article a choqué bien des juifs.
Pourtant il ne fait que reprendre les arguments de la
défense et des magistrats : contestation de l'appel et stigmatisation des associations juives qui ont protesté.
En fait l'indignation qu'a suscitée ce texte tient à sa rhétorique plus qu'à son contenu. Et tout d'abord "l'attaque", brutale,
sans préambule, avec cette citation qui s'impose de plein fouet
: "Il faut tout refuser aux juifs comme nation et tout leur accorder comme individus"...
Ecrite il y a deux siècles par le marquis de Clermont-Tonnerre et par l'abbé Grégoire pour plaider en faveur de l'émancipation, cette "maxime" sonne mal aux oreilles des juifs d'aujourd'hui. Car ici sous l'effet d'une étrange coïncidence, elle
définit l'antisionisme selon lequel, précisément, il faut tout refuser aux juifs comme nation.
blique. C'est alors qu'il conclut avec condescendance : "Le Crif
aurait été bien inspiré de s'en souvenir"...
L'accusation va loin... Elle présuppose l'ingratitude ainsi que
le mépris envers la République. Bien sûr, la stratégie de Denis
Olivennes c'est de focaliser ses critiques sur le Crif sans jamais
désigner les juifs. Mais comme les juifs partagent, dans leur
majorité, la position du Crif pour ce qui est de l'appel et du procès public, ils se sentent impliqués dans cette accusation.
Cependant Olivennes fait une "exception" pour la famille de
la victime : "personne ne peut reprocher aux parents d'Ilan
Halimi de juger insuffisante la condamnation des bourreaux
de leur fils"... Une petite "concession" qui n'ira pas plus loin...
Elle est vite rattrapée par la pire des menaces sur les associations sous prétexte que par leur action, elles "prennent le risque d'alimenter l'antisémitisme" !
Mais Denis Olivennes ne semble pas sensible aux échos
regrettables qu'induit sa citation. Il invoque "l'émancipation"
comme le cadeau suprême que l'humanisme a fait aux juifs et
qui, par extension aux autres communautés, fonde la Répu-
Qu'Olivennes se rassure : l'antisémitisme n'a pas besoin d'être
alimenté ; il s'alimente tout seul ! Telle une maladie mentale
qui renaît sans raison et qui génère, elle-même, les ingrédients
de son délire.
Mais le journaliste, quant à lui, alimente bel et bien le cliché ! Celui du juif qui aggrave son cas...
ODASEJ
Cependant son article protège ses invectives sous l'argumentation. C'est ainsi qu'il défend le principe d'individualisation des peines pour juger le "gang des barbares" selon le "caspar-cas" et non sur le critère de "l'antijudaïsme"...
L’ Œ U V R E D ’A S S I S TA N C E S O C I A L E A L’ E N FA N C E J U I V E
est une association reconnue d’utilité publique par décret du 28 mai 1919
Pa r c e q u ’ u n e n f a n t h e u r e u x
devient un adulte qui a de meilleures chances
de construire son avenir et celui
de la communauté
L’ODASEJ a pour mission
d’aider les enfants et les adolescents défavorisés ou
en difficulté sur le territoire national
Leur avenir
est entre vos
Transmettez
mains
votre nom à un programme
de solidarité…
Perpétuez la mémoire de vos parents …
… Faites un legs ou une donation à l’ODASEJ
Que vous ayez des héritiers ou non, vous pouvez faire
un legs ou une donation en faveur de l’ODASEJ
en exonération des droits de succession ou de mutation
Pour un rendez-vous confidentiel
Appelez Tony SULTAN
Tél. : 01 42 17 07 57 • Fax : 01 42 17 07 67
ODASEJ ESPACE RACHI, 39, RUE BROCA, 75005 PARIS
28 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
Ce légalisme minutieux est d'ailleurs récurrent chez tous les
opposants à l'appel. Car pour eux l'antisémitisme des "barbares" doit être évalué avec précision, selon des degrés, des nuances...
Ainsi lors de l'émission "C dans l'air", un représentant de la
magistrature a rappelé un épisode du procès où un membre
du "gang" que l'on interrogeait sur ce point, répondit négligemment : "J'aime pas les feujs"... Alors l'intervenant eut un
haussement d'épaules qui voulait dire : "Pas de quoi s'inquiéter"... Comme si l'expression même de la haine des juifs était
exonérée par la grâce du "verlan"...
Rien à faire. Il existe une discordance absolue entre le légalisme de la magistrature et la souffrance des juifs qui défendent la mémoire d'un des leurs massacré.
Cette situation déclenche comme un procès contre eux. C'est
ainsi qu'Olivennes considère que le Crif "a manqué à son devoir
en exigeant bruyamment un appel du parquet dont il n'avait
pas à se mêler"... L'adverbe "bruyamment" et la formule "ne
pas se mêler" ont la posture hautaine que prennent les réprimandes...
C'est à propos du crime qui fait honte à la France que le Crif
est rappelé à l'ordre !
Le principe d'inversion est ainsi consommé... les accusateurs
accusés... Et quant au "progressisme", le voilà qui s'égare, dévié
à contresens.
OPINION
L'état du monde en 2009 :
Personne n'a empêché pharaon…
Q
uel est l'état du
monde ?Sur toile de
fond d'une mobilisation générale contre
la
"colonisation",
c'est-à-dire la présence juive à Jérusalem et en JudéeSamarie, on assiste à de multiples
manifestations de connivence avec les
pires excès antisémites et avec la mise
hors-la-loi de l'Etat juif.
Qu'on en juge.
Le 20 août, le président de la Confédération helvétique se rend à Tripoli
pour " exprimer ses excuses au peuple
libyen pour l'arrestation injuste de
diplomates libyens par la police de
Genève. " Le fils du colonel Kaddafi,
Hannibal, et son épouse avaient été
PAR PAUL GINIEWSKI
270 morts. Les gouvernements de Londres et d'Edinburgh ont invoqué dans
un document commun la nécessité de
" ne pas nuire " à des relations " étendues et profitables " à Tripoli " (2).
Le rédacteur en chef du Temps suisse
avait contesté : " Le retour en grâce de
Kaddafi doit tout au pétrole".
En même temps, une crise se développe entre Israël et la Suède. Le 17
août, un journal suédois avait accusé
Tsahal de se servir de cadavres de
Palestiniens pour trafiquer leurs organes. Jérusalem proteste et le gouvernement suédois refuse de condamner
l'allégation, arguant de la liberté de
parole. Pourtant, quand un journal suédois avait publié des caricatures de
Mahomet jugées offensantes dans le
Les hitlériens aussi brûlaient des livres juifs ou
enjuivés, en attendant de brûler des Juifs.
arrêtés en juillet 2008 et accusés d'avoir
maltraité leurs domestiques. Aussitôt,
deux Suisses sont arrêtés à Tripoli. Le
colonel Kaddafi aurait déposé une
requête devant l'ONU pour démanteler la Suisse. Hannibal déclare " Si
j'avais une bombe atomique, je radierais la Suisse de la carte ".
Le quotidien 24 Heures qui rapporte
ces détails et pèse le pour et le contre
des excuses du président suisse,
constate : " Les volumes de nos exportations en Libye ont chuté de 70%
depuis 2008 " et " les livraisons de
pétrole libyen de 88% " (1). Et " La
Suisse à genoux devant Kaddafi ", titre
Le Temps du 21 août à la " une ".
Fin août, la Grande-Bretagne libère
un Libyen, ancien chef de la sécurité
des lignes aériennes libyennes,
condamné en 2001 à la prison à vie
pour sa participation à l'attentat de
Lockerbie, la destruction d'un vol d'un
Boeing de la Panam en 1998, qui fait
monde musulman, la Suède s'était-elle
aussi… - officiellement excusée. Dans
la sphère internationale règne la loi des
" deux poids et deux mesures ". La diffamation des Juifs est permise, celle
des musulmans ne l'est pas.
Un autre pays scandinave, la Norvège, entame en ce moment une année
de célébration du centenaire d'un de
ses écrivains, Knut Hamsun. Il reçut le
Prix Nobel en 1920 mais fut par la suite
un collaborateur notoire des nazis.
Il fit don de son Prix Nobel à Goebbels. En 2009, avoir été un nazi ne fait
pas obstacle à être un héro national.
La Norvège annonce aussi qu'elle
désinvestit en Israël. Elle vend les parts
détenues par son Fonds de pensions
dans la firme israélienne Elbin, en
représailles des matériels électroniques
de cette firme équipant la " barrière de
sécurité ". Ainsi, non seulement on pro-
teste contre une mesure-phare d'autodéfense israélienne contre l'infiltration
de terroristes. On punit Israël pour le
crime de se défendre contre eux.
Le pire pourrait se produire, ou s'est
produit, le 17 septembre, quand
l'UNESCO élira son directeur général.
Le candidat soutenu à fond par le président Hosni Moubarak et une majorité de pays, était le ministre égyptien
de la culture, dont les propos avaient
naguère fait scandale : il brûlerait de
ses propres mains les livres israéliens,
s'il en découvrait dans une bibliothèque du Caire. En 2009, annoncer qu'on
brûlerait des livres juifs ne fait pas obstacle à l'exercice d'une haute fonction
internationale dans le domaine de la
culture.
Les hitlériens aussi brûlaient des
livres juifs ou enjuivés, en attendant de
brûler des Juifs. Dans l'indifférence à
peu près générale. Rien ne ressemble
plus à l'humanité d'aujourd'hui que l'humanité du temps d'Hitler.
On dit que la Shoah a été un crime
contre l'humanité. Elle a été un crime
de l'humanité.
Mais comment le monde civilisé en
est-il arrivé là, comment le monde civilisé peut-il se conduire aujourd'hui
comme il se conduit ? La réponse se
trouve peut-être dans une anecdote
subtile et significative du folklore arabe.
On raconte qu'on demanda un jour à
Pharaon qui l'avait fait Pharaon. Il
répondit : " Je me suis fait tout seul. Personne ne m'a empêché de devenir Pharaon "…
-(1) " Un an de crise " et " Pertes sonnantes ", 24 Heures, 21 août 2009, p3.
(2) Marc Roche : " La polémique sur
la libération du Libyen ", Le Monde, 2
septembre 2009.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 29
HUMEUR
Interrogations
OOO Il est bon, il est heureux que
l'ancien ministre égyptien de la culture, M. Hosni ait été battu dans la
course au poste de directeur général de l'Unesco. Cela aurait, en vérité
- s'il avait réussi - constitué un
exemple navrant donné à tous ceux
qui voudraient demain s'essuyer les
pieds sur les livres en hébreu et la
culture d'Israël ou encore à ceux qui
souhaiteraient imiter les dérapages
devenus quotidiens de M. Mahmoud
Ahmadinejad. Il faut se féliciter de
ce qu'une sorte de coup de frein ait
été ainsi donné à ce genre de déclarations insultantes pour tout un peuple à travers le monde. Les candidats
à ce genre de dérapage sauront désormais qu'il leur en coûtera cher,
que cela en tout cas a un prix.
Et qu'il ne suffit pas que l'on
confie, après coup, pour éteindre l'incendie et pour faire taire les protestations, à une plume élyséenne
(bien complaisante en l'occurrence)
le soin de démentir des propos violemment antisémites pour se fabriquer du même coup on ne sait quelle
virginité politique et pour s'offrir un
brevet de respectabilité..
C'est à propos de tels cas que le
texte de la Bible dit : " Et tout le peuple entendra et… " tirera les leçons!
OOO Qui prendra l'initiative de
réfléchir sérieusement à la transmission du judaïsme à l'heure de la
nouvelle civilisation, celle d'Internet ? Qui nous dira comment on
peut désormais faire face à ce robinet permanent de paroles et de textes où il y a plus de boue et de
vomissures que de pépites d'or ?
Comment faire face au déchaînement de frustrations, de peurs et de
fantasmes que l'on y observe chaque jour ? C'est le monde de l'àpeu-près, de la calomnie et du n'importe quoi. Racisme, mensonges,
perversités et irresponsabilité à tous
les étages. Un rendez-vous d'un
grand nombre de tarés. Et quand le
fils dit à son père : je l'ai lu sur Inter30 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
C'est le monde de
l'à-peu-près, de la
calomnie et du
n'importe quoi.
Racisme, mensonges,
perversités et
irresponsabilité à tous
les étages.
net, que peut-on répondre? Comment faire face à cette " déesse aux
cent bouches " quand on veut, ainsi
que l'ont fait nos pères, éduquer,
former, célébrer, transmettre ?
Les ultra- orthodoxes en Israël (les
harédim) auraient-ils donc raison
d'interdire dans leurs foyers et dans
leurs bureaux Internet sous prétexte
qu'il serait la " nouvelle idolâtrie "
du vingt-et-unième siècle ?
OOO Le directeur du journal
Marianne écrit dans son éditorial
du 12 septembre : " Il serait évidemment absurde, et même injuste de
comparer Netanyahou à Ahmadinejad. Quoique… "
Ce quoique signifie, si on comprend bien, que la comparaison
peut, malgré tout, être instruite et
défendue.
Sans doute la déclaration du chef
du gouvernement israélien menaçant de rayer l'Iran de la carte a-telle dû nous échapper.
On ne peut pas, comme Marianne,
tout savoir
OOO Quiconque s'est un jour intéressé à la poésie juive du Moyen
Age connaît sans doute le chant traditionnel du chabbat : Yedid Nefech
Av Harahmane. Des générations de
juifs séfarades, et singulièrement,
au Maroc, le connaissent par cœur
pour l'avoir entonné dans des veillées de bakkachot (supplications) ou
encore à la table du vendredi soir,
et l'ont enseigné à leurs enfants.
Pourquoi vous en parle-t-on ici ? Un
homme qui, au sortir de vingt-huit
ans de service dans les rangs de Tsahal, a consacré depuis des années
sa vie à rechercher et à identifier
parmi des ruines du vieux cimetière
de Safed les tombes des maîtres
kabbalistes, de ceux en particulier
qui ont été les compagnons de route
du Ari ( Isaac Luria Ashkénazi ) a
retrouvé ces jours-ci la tombe de
l'auteur de ce poème : Rabbi Elazar
Azkari.
HUMEUR
L'homme, Eliyahou Bentovim,
raconte qu'un jour il a retrouvé non
loin de la tombe de Luria, l'inscription Mazaltov. " Je savais qu'il
s'agissait du nom que portait la
femme du kabbaliste Azkari ". Quelques jours après, il devait repérer la
tombe du rabbin lui-même. On pouvait y lire : " Le saint rabbi Elazar.
1600. ". Nous savions, a ajouté Eliyahou Bentovim , qu'il s'agissait là de
la date de son décès. " Alors je me
suis assis auprès de la tombe et je
n'ai pas cessé de lire des psaumes ".
Le grand rabbin de Safed Chmouél
Eliahou a confirmé qu'il s'agissait là
en effet de la tombe du poète et kabbaliste.
OOOIl se présente comme docteur
en ethnologie et " spécialiste des
déserts et des populations qui y
vivent ". Le titre de son livre est
excellent : " Le désert des prophètes
". Il donne envie d'aller plus loin.
Mais on se rend bien vite compte de
ce que ce titre est la seule bonne
trouvaille de l'auteur .Parce que pour
le reste, M. Philippe Frey a manifestement mis les pieds dans un secteur qu'il ne connaît guère, quel que
soit le sentiment qu'il cherche à donner à son lecteur.
On se rend bien vite compte des
bourdes, des à- peu-près et des
contre- vérités qu'il assène sur un
ton omniscient. Un exemple, page
17, (sans doute le plus cruel) : le
Tanakh, à en croire notre singulier
spécialiste " comprend la Torah mais
également la Mishna, le Talmud et
le Midrash ". Et afin que nul n'en
ignore, M. Frey ajoute que " les protestants reprennent exactement les
mêmes textes que les juifs ". Ce qui
signifie, si on sait lire, que la Bible
des protestants comprend également
la Mishna, le Talmud et le Midrash.
Page 15, l'auteur signale imprudemment qu'en hébreu on appelle le prophète " le neviim ". Page 52, il parle
de " la miniane ". Il n'est pas grave
que M. Frey ne connaisse pas les
subtilités de la langue de la Bible.
Ce qui l'est en revanche c'est qu'il
cherche à donner, tout au long du
livre, une impression contraire.
A propos de l'épisode de la sortie
Quiconque s'est un jour
intéressé à la poésie
juive du Moyen Age
connaît sans doute le
chant traditionnel du
chabbat : Yedid Nefech
Av Harahmane.
d'Egypte, M. Frey écrit - et avec quelle
délicatesse : " Apparemment tous les
juifs étaient loin de quitter l'Egypte les
poches vides : l'épisode du Veau d'or
où chacun faisait fondre son or le laisse
en tout cas penser ". Par ailleurs, à en
croire l'auteur, il n'y a dans ce qu'il
appelle l'Ancien Testament " aucune
prophétesse ". M. Frey n'a pas dû lire
toute la Bible. Sans quoi il aurait
entendu parler d'une certaine Myriam.
Et de Déborah.
Quant aux 150 Psaumes, " ils font
partie de l'Ancien testament chrétien
et de la Torah juive " (page 130). A
lire M. Frey on dirait que la Torah n'a
fait que reprendre ces psaumes des
textes du christianisme, une sorte de
copié-collé.. Et cela évoque l'histoire
de cet enfant catholique qui entend
des juifs récitant des psaumes et qui
dit à son père :
-Quoi, les juifs ont, eux aussi, leurs
psaumes ?
Et on passe sur les dizaines de fois
où ce curieux écrivain traite les juifs
de " racistes " et évoque " le mythe
d'une nation israélienne constituée"
La page blanche supporte évidemment, sans protester, toutes les bêtises qu'un auteur tel que Philippe
Frey lui confie. La seule question que
pose ce livre est celle de savoir par
quel mystère il a pu trouver un éditeur parisien pour y croire et pour
accepter de promouvoir un tel tissu
de sottises.
Peut-être cherche-t-il à augmenter
le nombre d'ignorants ?
OOOUn homme de religion a cherché naguère à vendre, à des enchères publiques et au plus offrant, son
châle de prière (le tallith). Sans doute
l'homme se considérait-il comme un
saint et sa sainteté était censée
s'étendre jusqu'à ses vêtements.
La vente publique eut bien lieu. Et
quelle que soit l'interprétation et les
justifications que l'on donne à la
chose, je veux bien être pendu haut
et court s'il ne s'agit pas là purement
et simplement d'un acte d'idolâtrie.
Avoda zara, ni plus ni moins, même
si le vendeur est un homme de religion et l'objet de la vente un tallith.
V.M
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 31
COMMUNAUTÉS
"Les vraies vocations d'une
institution quasi-centenaire : l'OSE"
UN ENTRETIEN AVEC ROGER FAJNZYLBERG *
de consultations médicales, psychologiques
et paramédicales.
OOO I.J : Où en est l'OSE aujourd'hui ? C'est
une jeune centenaire !
Roger Fajnzylberg : Presque, puisque
l'OSE est née à Saint-Pétersbourg à la fin
de l'année 1912 ! Avec, dès juin dernier,
une première réunion internationale, nous
préparons les manifestations qui
marqueront cet évènement, non pas
comme une simple commémoration mais
comme un hommage à celles et ceux qui
ont apporté leur aide aux Juifs d'Europe
dans les exils, les pogroms, la Shoah ainsi
qu'aux Juifs d'Afrique du Nord pour sortir
de la misère puis s'installer en France.
Pour mieux faire connaître nos missions
présentes et futures, nous montrerons
quelle a été la qualité de ses prises en
charges médicales et éducatives.
Les communautés juives des pays
d'Europe de l'est et du centre, dont les
régimes soviétiques avaient contrarié
l'identité, retrouvent actuellement leur
histoire passée. L'OSE, qui a été très
présente dans ces pays, va leur rendre
leur histoire.
I.J : Pourquoi dites-vous que l'année 2008
aura été riche pour l'OSE ?
R.F. : En 2008, nous avons relevé un
défi, celui de la prise en charge du
polyhandicap, en intégrant le Centre
Raphaël, fondé il y a 7 ans par le rabbin
Elmkayes, à qui je rends hommage.
Nous avons ouvert le second accueil
de jour, Joseph Weill, pour personnes
atteintes de la maladie d'Alzheimer, à
Paris dans le XIIe arrondissement et créé
la première unité pour " jeunes " patients
pris en charge dès 50 ans.
Nous avons porté la capacité de l'ESAT
Jules et Marcelle Lévy, qui emploie des
travailleurs handicapés, de 50 à 65 places.
Nous avons commencé à travailler sur
des projets qui prendront plusieurs
années et puis, dans chacun de nos
établissements accueillant des enfants, il
se passe toujours quelque chose de neuf.
Aider des jeunes à s'en sortir, ce
n'est pas banal. Un pari à chaque fois
renouvelé.
32 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
L'appui moral et le soutien aux survivants
de la Shoah aux anciens enfants cachés à
qui nous devons offrir des conditions de vie
à la mesure de la redevance morale dont
toute la communauté et la nation doivent
les entourer.
La place de l'OSE est de plus en plus
globale, autour de la prise en charge
médicale, éducative et psychologique de
la famille tout entière.
Roger Fajnzylberg
I.J : Dans quels domaines en particulier
s'exercent vos activités ?
R.F. : L'enfance et la santé d'abord. Nous
offrons une variété de prises en charge qui
vont du conseil éducatif aux soins, en
passant par le suivi individuel éducatif et
social ou encore le placement en maison
ou en famille d'accueil, en fonction de
constats
tels
l'impossibilité
de
développement normal au sein de la
famille biologique ou l'impératif de protéger
l'enfant dans un contexte de mesure
administrative ou judiciaire. Plus de 1000
enfants sont ainsi suivis chaque année.
La maladie d'Alzheimer : les personnes
dont l'état permet un maintien à domicile
bénéficient d'un accueil quotidien au sein
de deux centres de jour. Ils se situent pour
l'instant à Paris mais nous oeuvrons pour
en développer d'autres en couronne
parisienne ou dans les métropoles de
province.
Le handicap : avec la prise en charge de
travailleurs handicapés au sein de notre
Esat ou de personnes handicapées ne
pouvant pas travailler dans notre centre
d'activité.
La santé : avec le centre Elio Habib,
modernisé il y a moins de trois ans et qui
dispose d'un plateau technique dentaire et
I.J : Quel type d'actions menez-vous auprès
des populations fragilisées ?
R.F. : Nous avons la chance d'avoir des
institutions juives qui agissent dans des
domaines variés. Notre orientation, à l'OSE,
n'est pas de vouloir ou de savoir tout faire
et nous travaillons en complémentarité
avec de nombreuses institutions. Notre
savoir-faire réside dans le domaine médical
et dans la prise en charge des troubles
psychologiques. Il est dans le domaine
éducatif pour aider les enfants à préparer
leur vie d'adultes. Il est dans l'aide aux
parents, en particulier pour les familles
fragilisées par des conflits dont il faut éviter
que les enfants deviennent les victimes.
I.J : Que faites-vous par exemple dans le
domaine du handicap ?
R.F. : Cette prise en charge s'est imposée
à l'OSE au point que nous disposons
aujourd'hui à Paris de trois établissements.
Il s'agissait d'abord de reprendre, avec
l'ESAT, le CAT de l'association Naguilah et
donc, de développer un cadre de travail
salarié pour amener les travailleurs
handicapés à une autonomie maximale.
Pour ceux qui ne peuvent travailler, nous
avons créé ensuite un centre valorisant
chacun dans des activités variées tout en
donnant aux parents la possibilité de vivre
normalement, sans culpabilité ni angoisse.
Enfin, la reprise du Centre Raphaël nous
a
conduits
à
comprendre
les
problématiques du multi-handicap et de
travailler sur des projets pour des adultes
polyhandicapés.
COMMUNAUTÉS
Aucune structure n'existe, dans la
communauté juive , en dehors de la
région parisienne. L'OSE pourrait en
développer en province. J'appelle les
parents, les rabbins ou les présidents
de communauté confrontés à ce
problème à prendre contact avec nous.
I.J : Parlez-nous de l'action que vous
conduisez au sujet des anciens enfants
cachés et de la mémoire de la Shoah.
R . F. : L'accueil des survivants de la
Shoah et des anciens enfants cachés
est pour nous une mission fondatrice.
Il est au cœur de notre raison d'être. Au
delà de l'assurance de leur donner les
conditions d'une prise ne charge
matérielle leur permettant d'adoucir
leurs vieux jours, l'OSE apporte un
soutien médical, une mise en relation
sociale à travers la Pause Café du
service Ecoute-Mémoire-Histoire ou
des groupes de parole qui permettent
d'exprimer les souvenirs et les
cauchemars.
L'OSE aide chaque enfant caché à
reconstituer son parcours, par la
consultation d'un dossier ou à travers
le travail du service Archives et
Histoire.
Nous avons vécu un temps fort l'an
passé autour d'Elie Wiesel, à l'occasion
de la célébration de son 80e
anniversaire car nous avons, à cette
occasion, célébré l'anniversaire de
chacun des survivants mai également
nous avons salué la mémoire des
disparus.
I.J : Pourquoi avez-vous adopté de
nouveaux statuts ?
R . F. : L'OSE a beaucoup évolué
depuis 1951 et 1955, dates auxquelles
nos statuts actuels font référence.
Un colloque sur
Immigration juive
et action sociale.
En 1866, la France compte
90 000 juifs. Un demi-siècle plus
tard, au lendemain de la première
guerre mondiale, le recensement
affiche le chiffre de 150 00 juifs
dont 1/3 d'étrangers. On évalue à
300 000 le nombre de juifs en
Ce qui change : d'une partn la
définition du statut de membre par
rapport à celui du donateur. Ensuite la
composition des organes exécutifs de
l'association et notamment la géométrie
du Conseil d'administration. Nous avons
d'anorexie…Ce service travaillera en
liaison étroite avec les écoles de la
communauté
Nous ouvrons en octobre une
extension de nos services Enfance à
Notre savoir-faire réside dans le domaine médical et
dans la prise en charge des troubles psychologiques.
Il est dans le domaine éducatif pour aider
les enfants à préparer leur vie d'adultes.
Il est dans l'aide aux parents, en particulier pour les
familles fragilisées par des conflits.
décidé de constituer un Conseil
scientifique et de nous doter d'un
Comité d'honneur. Enfin dans une
association très professionnalisée, nous
avons précisé les responsabilités du
directeur général et le fonctionnement
du bureau auprès du président.
I.J : Quels sont vos projets pour l'avenir ?
R.F. : Ils sont nombreux et je sais que
certains nous reprochent de vouloir trop
en faire.
Quand je vois tout ce qu'il reste à faire
pour répondre aux situations de
malheur ou de détresse, je me dis que
nous devons être exigeants avec nousmêmes.
Nous venons d'ouvrir le Centre
Georges Lévy, à Paris XIIe, pour orienter
et prendre en charge, dans le domaine
médical, dentaire et psychologique, des
enfants et des adolescents, " addicts "
par exemple à leur écran ou des jeunes
qui souffrent de boulimie ou
France à la veille de la seconde
guerre mondiale, chiffre auquel
il faut ajouter les 110 000 juifs
d'Algérie. De 1945 à 1965, la
population juive en France passe
de 225 000 à 600 000 personnes.
Comment
accueillir
ces
populations déracinées qui ont
tout quitté ? Comment aider les
survivants de la Shoah à
reconstruire leur vie ? Comment
l'action sociale a permis aux
rapatriés d'Afrique du Nord à
s'installer et s'intégrer en France ?
Créteil afin de mieux faciliter la prise
en charge des enfants du 94.
Nous sommes bien placés pour
reprendre le Café des Psaumes de la rue
des Rosiers.
Nous travaillons aussi de plus en plus
en partenariat avec des associations
israéliennes, qui se situent dans les
mêmes domaines d'action que l'OSE.
Enfin, nous travaillons à des projets
de nouveaux accueils de jour pour
personnes âgées atteintes d'Alzheimer
dans l'ouest parisien, dans les
départements de la couronne parisienne
et en province. En conclusion, nous
souhaitons nous mettre plus encore au
service des communautés en province
et notre président, Jean-François
Guthmann comme moi-même, sommes
disponibles pour tout contact à cet effet.
-*Directeur général de l'œuvre de
Secours pour l'enfance
Mercredi 28 octobre, la Fondation
Casip-Cojasor organise un grand
colloque sur " L'immigration juive
en France : Accueil et intégration,
du XIXe siècle aux années 1960 ".
Réunissant de jeunes chercheurs
et des historiens connus, cette
journée de réflexion marque le
point d'orgue des activités
marquant le bicentenaire de la
Fondation Casip Cojasor. (Hôtel
de ville de Paris. de 9h à 17h.
Réservation
obligatoire
au
01 44 62 13 81.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 33
CHRONIQUE
Retour
à la Maison de Vie
PAR ALBERT BENSOUSSAN
L
e mois d’Elloul, entre les
Selihot et l’approche des
Yamim Noraïm, ces “jours
redoutables”, nous invite à
penser à ceux qui ne sont
plus et à leur rendre visite
à leur dernière demeure. C’est à mes
yeux une autre forme de réunion de
famille, car il ne me convient pas de
distinguer entre les vivants et les morts.
Ces derniers habitent une Maison de
Vie – Beth ha’hayim - , toute une cité
jardin où je me suis, donc, rendu,
accompagné de ma grande sœur et de
mes deux neveux. Pantin est l’un des
plus grands cimetières de Paris, avec pas
moins de deux cent mille tombes. Et qui
associe autour de son corps qui repose
là-dessous les membres de sa famille qui
ont péri dans les camps. Pour un mort
dans la tombe, des quatre et des cinq
s’inscrivent sur la dalle, partis en fumée,
mais ici convoqués. Alors oui, c’est bien
une maison de vie, parce qu’ils sont
inscrits pour l’éternité au registre des
vivants. Immensément présents. Ce
cimetière, en vérité, est mégapole
populeuse et archive de mémoire.
Jean-Claude, mon neveu, n’a jamais
admis que son grand-père fût mort, et il
soutient qu’il revient lui parler de temps
à autre. Son vieux pépé s’assoit alors sur
son lit, qu’il sent tanguer dans la nuit, il
Il voit bien que la mort s'abolit et que tous vivent
devant nous, en nous, pour nous…
contiennent plusieurs locataires à
demeure. Certains sous forme de rappel
mémorieux, comme on le voit quand le
défunt, qui fut un rescapé des rafles,
lui prend la main, le caresse et lui parle.
Et donc, ce jour-là de début septembre,
dans la chaleur caniculaire du cimetière,
parti en éclaireur, mon neveu avait du
Prière au Kotel
34 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
mal à retrouver la tombe des anciens ;
pourtant si près, il était bien au carré
213, mais où, dans quelle rangée, toutes
ces sépultures de marbre noir se
ressemblent ! Et soudain il a entendu
chuchoter à son oreille : retourne-toi
donc, mon fils, Je suis là. Et voilà :
Claudy avait le nez sur le marbre et son
baiser sur la pierre chaude voulait
rejoindre la joue mal rasée du géniteur
de son père. Mon neveu n’aime pas le
cimetière, mais là, cette fois, il voit bien
que la mort s’abolit et que tous vivent
devant nous, en nous, pour nous…
Claudy avait échappé à la rafle et aux
camps parce qu’en mars 1941 sa
maman, Juliette, avec une audace folle,
avait quitté Paris en portant son
nourrisson dans ses bras, et elle avait
traversé la France en droite ligne pour
gagner Marseille et la nef salvatrice. Le
souvenir légendaire rapporte que dans
le train et l’interminable nuit, un officier
allemand s’était levé pour lui céder la
place, quelle ironie ! Et donc Claudy,
de quatre mois à quatre ans, avait grandi
au milieu de nous, à Alger, qui allait
devenir la capitale de la France Libre.
Et moi, le dernier de la famille, celui que
mon père appelait son Benjamin, je
m’étais trouvé détrôné par un petit frère,
mais sans être en rien privé de gâteries.
Parce que mon père n’était que
tendresse et douceur, et ma mère une
de ces juives vaillantes dont on célèbre
les vertus chaque vendredi soir. Et puis
ce petit je l’ai toujours porté dans mon
cœur, presque comme s’il avait été ou
mon frère, ou même mon enfant.
Je nous revois au soir du Chabbat,
tous debout pour accueillir les anges de
la paix et faire le kiddouche, mais mon
père voyait toujours sa longue jambe
entravée, saisie et enserrée par le plus
petit de nous tous, haut comme trois
pommes. Toujours il se pressait contre
CHRONIQUE
la cuisse de mon père et c’est ainsi qu’il
reçut le judaïsme, de peau à peau,
comme par capillarité. Mon neveu est
très juif, même s’il n’est guère regardant
sur la religion. Qu’importe, dit-il, son
pépé lui a tout donné de ce verbe
fabuleux et de cette foi dans la vie qui
descendait de son cœur jusqu’à ce tronc
étreint par l’enfant…
Chacun d’entre nous a coiffé sa kipa
et j’ai récité de joyeux psaumes, d’abord
le premier qui brosse le portrait du juste
— heureux cet homme Ashré ha-ich qui ne suit pas le chemin des méchants,
cet homme juste et bon, ce père aimé de
Dieu ; et puis le dernier chant qui
rameute tout l’orchestre des instruments
bibliques et fait entendre à deux reprises
le fracas joyeux des cymbales – tseltsal
: les deux tsadé se font face comme les
deux disques de cuivre lxlx et le lamed
propage la retentissante sonorité de
l’entrechoc — ; ensuite nous avons
déposé des pierres pour papa, maman
et mon grand frère Fraïm. Et nous étions
heureux. Apaisés…
Alors nous avons entrepris de
retrouver la tombe de Juliette, la maman
de Jean-Claude et d’Yves, qui les a
quittés alors qu’ils étaient encore si
gosses. Depuis si longtemps, nul ne
savait plus la retrouver. Nous sommes
allés tout au bout des carrés juifs, et
même nous nous sommes partagés en
équipes d’arpenteurs, d’explorateurs,
d’ahuris meraglim, rien à faire, le champ
d’honneur nous était hostile. Et ainsi est
passée encore une heure sous le soleil
accablant. Nos yeux pleuraient dans la
sueur. Jusqu’à ce que soudain un
homme noir surgisse, que personne
n’avait vu. C’était un rabbin, ou plutôt
un envoyé, un messager miraculeux –
la mère avait-elle eu pitié de ses deux
orphelins ? – qui nous a permis, sur un
simple coup de téléphone, de localiser
exactement l’emplacement : zone,
priait, le fameux Echet ‘hayil qui, au
soir du Chabbat, vante les vertus de la
femme et mère du foyer, en clamant
d’emblée : “La femme vaillante, qui la
trouvera — mi yimtsa ?-”, laborieuse,
soucieuse du bien de tous, mère
nourricière et source de miel, alors oui
“ses fils se lèvent pour l’acclamer”…
Et ses deux fils, en effet, se tenaient
droit devant elle, fiers devant la tombe
retrouvée, cette dalle égarée, cette
femme lointaine… Puis le rabbin a béni
le mari de cette mère exceptionnelle
qui avait su braver la peur de
l'Allemand et sauver son enfant, et il a
béni toute la famille une fois de plus
Je nous revois au soir du Chabbat, tous debout pour
accueillir les anges de la paix et faire le kiddouche.
rangée, numéro de pierre tombale ;
mieux, il nous y a conduits et nous
l’avons retrouvée, Juju, notre chère
disparue qui fut responsable de nos
larmes primordiales, elle qui mourut si
jeune, un soir de Kippour qui nous
couvrit tous, ô Dieu terrible en action
hlyli arvn la, de sel et de soufre…
Alors le rabbin a récité les prières
nécessaires, et même, parce qu’on l’en
sur ce tas de pierres sous lequel
reposait la maman de mes neveux
depuis plus d'un demi-siècle. Mais
qu'était-ce en fin de compte tout ce
sable ? Une infinie mémoire. Un amour
infini.
C'est donc joyeusement que nous
nous sommes lavés les mains en
sortant. Allons, nos morts sont en bonne
santé !
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 35
LIVRES
Un livre-clef sur le djihad :
“Anatomie d'un désastre”
U
n auteur inconnu, qui
signe d'un pseudonyme, Enyo (le nom de
la déesse grecque des
batailles) dévoile dans
un livre récent, Analyse d'un désastre (1) les vérités sur la
Quatrième Guerre mondiale qui oppose
l'anti-civilisation de la terreur islamiste
à la civilisation. Enyo serait une " éminente responsable des renseignements
", ancienne diplomate, qui " travaille
actuellement au sein d'une organisation
internationale ".
conscience. Car l'Islam a pour vocation
de subjuguer le monde, pour son bien ".
S'agirait-il d'une Arabe ? La bibliographie du livre est précédée de cette note
: " les ouvrages dans la langue maternelle de l'auteur ont été supprimés de
cette bibliographie ". Or, sur les centaines d'ouvrages mentionnés, pas un seul
n'est en arabe.
dent veut ignorer que pour ses ennemis, nul traité de paix n'a de valeur
juridique durable, et n'est qu'une trêve,
qui doit permettre de se renforcer ou
d'assurer " la progression de l'islam plus
efficacement que la guerre ".
humilié, " comme si l'islam n'avait pas
inventé, lui, l'humiliation des dhimmis
et ne se sentait pas humilié pour la seule
raison qu'il se trouve depuis plusieurs
siècles dans l'incapacité matérielle
d'exercer son pouvoir d'humiliation ".
De même, l'Occident prend pour
argent comptant les " pieuses contrevérités ", les subterfuges qui endorment
" la vigilance de l'ennemi ".
En 1983, le Hezbollah assassine quarante-huit parachutistes français ; il participe à la série d'attentats qui ont ensanglanté Paris en 1985 et 1986 ; il assassine l'attaché militaire français à Beyrouth. Mais en 2002, le président de la
République française assiste au sommet
de la francophonie à Beyrouth, à côté
des représentants du Hezbollah.
A Molenbeek, quartier de Bruxelles,
" une police islamique fait appliquer la
charia tandis que policiers, élus locaux
et journalistes belges détournent les
yeux ".
Anatomie d'un désastre énumère de
nombreux exemples de démission équivalents.
A coup sûr, le livre sera rejeté par
beaucoup de gens. Mais peut-être serat-il quand même un peu mieux reçu
qu'un livre au contenu similaire qui
aurait été signé Pierre Lurçat, Raphaël
Israeli ou Paul Giniewski. On le taxerait
de " parti- pris pro-israélien " et d' " arabophobie viscérale " puisque toute description juive ou israélienne des horreurs
de l'extrémisme arabo-islamiste est récusée a-priori.
L'atout dont l'Occident se prive
Quel est le désastre ?
L'islamisme livre une guerre à mort à
la civilisation. L'Occident veut l'ignorer.
Au lieu de résister, il fait tout ce qui peut
conduire à sa propre destruction. C'est
une guerre d'extermination. Le terrorisme, dans 'esprit de la formule de Clausewitz " est un acte de violence destiné
à contraindre l'adversaire à exécuter (la)
volonté de l'attaquant ". Et quels sont
cette volonté et l'objectif ? " La conversion ou l'assujettissement de toute l'humanité ", la " réislamisation des musulmans et l'islamisation du monde ". Et les
djihadistes ont parfaitement bonne
36 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
Or l'Occident, qui connaît peu ou
méconnaît complètement la pensée de
ses ennemis, se prive par là de ses
meilleurs atouts, car " l'art de connaître le génie du général ennemi et celui
de la nation qu'il commande, renferme
l'art de vaincre l'un et l'autre ". L'Occi-
le moyen de prétendre au statut de combattants légitimes, en qualifiant de " politiques " leurs mobiles.
Après l'attentat contre le World Trade
Center et le Pentagone, le 11 septembre
2001, les Américains ont été rapidement
et universellement condamnés pour
avoir riposté. Les agresseurs sont peu à
peu devenus des vengeurs de l'islam
Un danger plus grave que le Djihad armé
nous menace : l'islamisation pacifique
De même encore, quand les djihadistes invitent, par lettre, le président
Jacques Chirac ou les Britanniques à
se convertir " tout en promettant de
purger le monde des cancers de la
liberté et de la démocratie ", l'Occident
croit qu'il s'agit d'une fanfaronnade,
d'un enfantillage. Il ne discerne pas là
" l'application orthodoxe du droit de la
guerre islamique qui impose d'inviter
par la prédication l'ennemi (à se
convertir) avant de déclencher contre
lui la guerre ".
Les victimes condamnées
L'inertie, l'abdication de l'Occident,
son aveuglement volontaire sont les
aspects les plus déconcertants, pour un
esprit rationnel, du désastre décrit et
annoncé.
Les Nations unies sont devenues
l'auxiliaire inconscient des terroristes.
En reconnaissant la légitimité de la lutte
anticoloniale, on a fourni aux terroristes
Les mythes du conflit israélo-arabe
Bien entendu, le livre aborde par différents biais le conflit israélo-arabe, l'un
des premiers fronts du djihad, et qui
résume tout le vis-à-vis entre la civilisation et la barbarie.
La politique arabe des pays d'Occident est un aspect éloquent de leur abdication devant l'ennemi. Ils ont intériorisé tous les poncifs, tous les mythes anti-
LIVRES
israéliens. D'où une série de faux axiomes légitimant des pseudo-solutions.
Par exemple, qu'il suffirait de satisfaire
les exigences légitimes de ceux qui
recourent au terrorisme, pour mettre fin
au djihad. Or, " celui qui cède n'a jamais
assez cédé, ou devra toujours recommencer, que la doléance originelle soit
ou non fondée. L'argument des revendications à prendre en compte est d'ailleurs celui des partisans de 'l'apaisement'
munichois lorsque Hitler soulève la
question des Sudètes".
C'est élémentaire, mais il faut le rappeler indéfiniment. Comme aussi le fait
que les Palestiniens ont été des " pions
soviétiques dans la déstabilisation du
bloc occidental ". Ils ont utilisé et utilisent un verbiage marxisant pour " faire
passer leur terrorisme pour une révolution populaire sinon prolétarienne ". Et
ils acquièrent une immense audience
partout en revêtant " un antisémitisme
censuré depuis la fin de la Deuxième
Guerre mondiale des oripeaux présentables de l'antisionisme ".
Aucun autre groupe terroriste n'a
jamais cumulé de tels atouts. La presse
occidentale répercute les élucubrations
anti-israéliennes de la presse arabe. Les
soldats du Tsahal sont accusés de viols
de femmes palestiniennes. Les medias
consacrent plus de temps et d'espace "
à la mort d'un terroriste palestinien (qu'à)
celle de cent Irakiens innocents ". On
filme abondamment les " charniers "
fabriqués par les Palestiniens avant l'arrivée des caméras, lors de l'opération
israélienne Rempart à Jenine, en 2002.
Etc, etc.
le terrorisme et les mouvements terroristes s'armer comme Hitler remilitarisait la Rhénanie en 1936".
Faire la guerre signifie abandonner
l'idéologie des soi-disant " camps de la
paix " selon laquelle la guerre serait toujours la pire des solutions. Au nom de
cette idéologie, la France a longtemps
choisi " d'être un sanctuaire pour les terroristes en échange de la tranquillité ".
Faire la guerre, c'est mener un véritable contre-Djihad ", comprendre que
le centre de gravité de l'adversaire,
avant ses chefs et ses finances, c'est sa
foi et donc, empêché l'islamisme d'accéder à toutes formes de souveraineté
Le livre D'Enyo comporte d'autres analyses et mises en garde encore.
Notamment sur les réalités de l'intégrisme. Le 11 mars 2002 par exemple, "
lorsque des petites filles d'une école primaire (d'Arabie Saoudite) fuient leur
bâtiment en flammes, insuffisamment
voilées, la police les refoule dans l'incendie ". Et "en 2007, un tribunal saoudien
condamne à 6 mois de prison et 200
coups de fouets une femme qui a eu l'impudence d'avoir été victime d'un viol collectif ! "
Et un danger plus grave que le Djihad
armé nous menace : l'islamisation pacifique, qui prétend ne viser qu'à faire des
musulmans vivant en Occident de bons
Un livre qui fait froid dans le dos, à la mesure de
l'épouvantable désastre qu'il décrit.
et imposer au Djihad des revers militaires à l'échelle du globe. Dans chaque
pays, il faudrait "ôter aux musulmans le
moyens de s'opposer à la souveraineté
démocratique, et aider tous les musulmans qui (…) en ont fait le choix ".
Faire la guerre, c'est entrer dans la
logique en partie irrationnelle de l'adversaire qui, lorsqu'il détient la souveraineté, a pour devoir traditionnel d'humilier les dhimmis et par conséquent,
concevoir des structures d'humiliations
plus efficaces que l'enfermement pour
traiter les terroristes, par exemple " les
faire garder par des femmes (pour) les
avilir à leur propres yeux ".
citoyens, mais qui, en fait, leur " apprend
à 'apprivoiser' les législations occidentales pour permettre l'extension de la
charia ", de sorte qu'elle devienne progressivement la loi du pays. L'arme la
plus redoutable n'est pas la bombe du
terroriste, mais " la démographie et la
prédication ".
Un livre qui fait froid au dos, à la
mesure de l'épouvantable désastre qu'il
décrit.
Paul Giniewski
-(1) Enyo, Anatomie d'un désastre, "
L'Occident, l'islam et la guerre au XXIe
siècle ", Denoël, 2009, 426 p, 24 Euros.
Pour vaincre : faire la guerre
Dans ces conditions, que faire ?
Existe-t-il des moyens d'enrayer le désastre, d'en limiter l'envergure, d'inverser
la débâcle déchaînée ? Il existe des
recettes pour gagner et Anatomie d'un
désastre les suggère.
Le choix est entre céder au Djihad ou
bien accepter la réalité de la lutte à mort
et livrer combat.
Faire la guerre signifie ne plus nier la
menace, recourir à la force, pour l'éradiquer, ne plus laisser " les Etats soutenant
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 37
LIVRES
L'Étoile du matin d'André Schwarz-Bart :
Un Kaddish dans l'écriture
I
l faut savoir gré à Simone
Schwarz-Bart d’avoir plongé
dans les manuscrits restés épars
dans le bureau de son époux,
André Schwarz-Bart, disparu
juste avant Kippour 2006, et
d’en avoir extrait les chapitres d’un projet
de livre (“le naufrage d’un livre” comme
il l’appelait) pour nous offrir un nouveau
chef d’œuvre près d’un demi siècle, jour
pour jour, après la parution du Dernier
des Justes.
Ceux qui ont aimé Le dernier des
Justes, ce roman désormais classique
qui valut en 1959 à son auteur, alors
inconnu, le prix Goncourt, retrouveront
dans L’Étoile du matin la poésie et la
vigueur, l’ironie et l’humour yiddish, la
maîtrise de la composition romanesque,
qui enchantèrent des millions de
lecteurs à travers le monde. Car s’il
intègre certains des éléments et des
thèmes qui sous-tendent le cycle antillais
de La mulâtresse Solitude, resté
inachevé (ou en tout cas inédit), L’Étoile
du matin est bien dans la veine et dans
le sillage du Dernier des Justes. Pourtant
cette fois, le Kaddish du narrateur
révolté, esquissé dans la dernière page
du roman de 1959 (“ Et loué. Auschwitz.
Soit. Maïdanek. L’Éternel. Treblinka. Et
loué…”), est devenu un Kaddish de
soumission, de libération – presque
d’espoir – dans la bouche du héros de
L’Étoile du matin, Haïm Schuster, notre
contemporain, un Kaddish qui clôt le
roman…
Dans sa “Petite note d’introduction”,
Simone Schwarz-Bart nous confie que
le dernier chapitre de ce roman
posthume lui a été dicté d’un trait par
André quelques semaines avant sa mort:
“Il termina ce passage sur ses mots ; un
titre possible : “l’étoile du matin”. Ce
fut tout. Il avait un air mystérieux et
paraissait tout jeune, joyeux, apaisé” .
Le récit central accompagne une famille
juive hassidique de Pologne, dont le
38 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
PAR FRANCINE KAUFMANN
dernier descendant combat dans le
Ghetto de Varsovie, réchappe
d’Auschwitz, erre entre l’Afrique, Paris,
Jérusalem et Tel Aviv, pour revenir en
pèlerinage à Auschwitz avec Sarah, la
jeune femme dont il attend un enfant,
et là, laisser monter un Kaddish. Entre
le prologue et la première partie du livre
– un conte fantastique qui fait revivre la
foi vibrante et les mœurs du judaïsme
de Pologne – une note de travail est
insérée qui donne la clé du Kaddish
prononcé à Auschwitz par Haïm
Schuster : “Le Kaddish lui-même n’est
pas une réconciliation avec Dieu, mais
une soumission, une réconciliation avec
l’idée que le peuple juif se fait de Dieu,
idée sans laquelle le peuple juif n’est
plus, est condamné. Dieu, le véritable
Dieu n’intéresse pas Haïm ; ce qui
intéresse Haïm c’est un Dieu inventé
par le peuple juif ; et peut-être, à force
de l’inventer, Dieu deviendra-t-il réel,
ce Dieu-là” .
Le prologue (et quelques passages du
livre) introduisent la narration dans une
perspective transhistorique, adoptant
“le point de vue de Sirius” pour décrire
la Shoah et les horreurs du XXème
siècle où culmina la cruauté de l’histoire
humaine. Le ton – délibérément proche
des romans de science fiction – illustre
les menaces d’une fin du monde
nucléaire que l’humanité prise de folie
risque d’attirer sur sa tête. Il constitue
une mise en abyme du comportement
humain, observé à la fois par l’historien
de l’avenir (l’an 3000 dans le roman) et
par un Dieu pour qui la terre et son
histoire ne sont rien de plus qu’une
grouillante goutte de sang observée
dans un microscope. Dans les notes de
Schwarz-Bart, l’historien est une
mutante, une femme qui fait des
recherches sur la planète Terre et
retrouve dans les souterrains de Yad
Vachem des manuscrits qui gardent la
trace du Grand Massacre. Elle porte un
nom précis : Linemarie. Lorsqu’on sait
que le nom complet de Simone est :
Line Marie Simone née Brumant, on
comprend que l’épouse-écrivain
d’André se soit considérée comme
investie d’une mission d’exécuteur
testamentaire, chargée d’exhumer le
manuscrit inachevé d’André et de lui
donner vie.
Dans l’épilogue, la Linemarie de l’an
3000 s’interroge “sur l’étrange folie de
cet homme qui avait consacré sa vie à
remplir ces milliers de feuillets de son
écriture, sans jamais pouvoir écrire le
mot “Fin”. “Et elle comprend (ce que
la deuxième partie du livre révèle
plusieurs fois explicitement) que
l’écriture in-finie que s’était imposée
l’auteur du Dernier des justes, sans
jamais pouvoir y mettre un point final,
constituait un Kaddish perpétuel pour
sa famille et pour sa civilisation à jamais
anéanties : “Peut-être était-ce là son
véritable objectif : non pas écrire un
livre, mais demeurer en contact avec
les disparus, leur ménager un espace
de vie sur la terre, en son esprit, jour
après jour, jusqu’à sa disparition d’icibas…”
LIVRES
L'Affiche rouge
Par Benoit Rayski
OOO C'est une nouvelle édition de ce
livre, revue et augmentée d'une nouvelle
préface que notre ami Benoît Rayski
propose à ses lecteurs. Lors de sa
première publication en 2004, le livre
avait été salué par la critique. Rayski a
voulu reconstituer le monde d'où
venaient ces combattants à peine sortis
de l'adolescence. De jeunes juifs pour
l'essentiel, des petites gens modestes et
courageux. Rayski a arpenté les
cimetières où ces combattants furent
enterrés avec d'autres résistants.
Voici ce que Rayski écrit en guise de
préface à cette nouvelle édition : " J'ai
tenté de rendre justice dans ce livre, à ceux de l'Affiche Rouge, au
monde d'où ils étaient issus, un monde juif, ouvrier et rouge, aux
quartiers populaires, de vrais quartiers populaires, où l'on ne brûlait
ni les voitures ni les écoles, où l'on frappait pas à coups de barre de
fer et où l'on ne violait pas les filles parce qu'elles avaient
l'outrecuidance de porter une jupe "
Ce livre reparaît alors que le cinéaste Robert Guédiguian rend à son
tour hommage à ces soldats de l'Armée du crime. ( Ouvrage publié
sous la direction d'Alexandra Laignel-Lavestine. Editions Denoël 13
euros)
Le Midrach Rabba sur Ruth.
Et sur Esther
OOO Ce livre est annoncé comme le
premier d'une série visant à fournir aux
lecteurs francophones les midrashim
relatifs aux cinq Rouleaux : Ruth, Esther,
Le Cantique des Cantiques, Les
Lamentations et l'Ecclésiaste.
Maurice Mergui qui a, avec Frédéric
Gandus traduit une partie des textes et
qui a assuré l'édition de ce travail,
considère que, malgré l'importance de
leur contenu, ces textes n'avaient jamais
été traduits en français.
Dans l'introduction qu'il donne à ce
travail, l'auteur rappelle que le midrash
est fort mal connu du grand public. Luimême le définit comme une " modalité
d'interprétation du texte biblique qui apparemment est hors de la
raison, préscientifique, énigmatique jusque dans son usage des règles
du monde ordinaire ". Cet exercice, ajoute-t-il, " est d'une créativité
foisonnante "
La lecture du Midrash Rabba sur Ruth, faite en compagnie des
auteurs est enrichissante, de même que celle du Rouleau d'Esther. On
doute pourtant, qu'elle soit mise ici .à la portée du lecteur moyen qui
n'a pas auparavant lu et réfléchi dans " une lecture naïve " de ces deux
ouvrages. ( Editions Gallimard. Collection Tel 8 E 50 )
Retours,
Mélanges à la mémoire
de Stéphane Mosès
OOO Patricia Farazzi et Michel Valensi
qui animent les Editions de l'Eclat ont pris
l'initiative de coordonner un livre de
mélanges à la mémoire du regretté
Stéphane Moses. Le livre qui a pour titre "
Retours " réunit un certain nombre de
contributions
d'auteurs
qui,
tous,
connaissant
l'œuvre
et
l'apport
philosophique de Moses. Citons parmi ces
contributions Marc Crépon, Julia Kristeva,
Guy Petitdemange, Emmanuel Mosès,
Henz Wismann, Liliane Klapisch entre
autres.
Le livre met en lumière le parcours
intellectuel de celui qui, au lendemain de
la guerre, succéda à Léon Askénazi à la
direction de l'Ecole d'Orsay. On sait que
Mosès a profondément marqué les études
sur le judaïsme moderne et qu'il a
accompagné en France la découverte
d'auteurs aussi importants que Walter
Benjamin ou Franz Rosenzweig. Le livre
s'attarde naturellement sur ce que fut " le
retour au judaïsme " de Mosès. Rappelons
que Stéphane est décédé à l'automne 2007.
Notons dans la contribution de Julia
Kristeva cette formule : " Rarement, et peutêtre jamais, un être humain ne m'a donné,
autant et aussi bien que Stéphane Mosès,
la certitude que l'humanité est une voix, un
regard, un sourire, une écoute : accueillante
et malicieuse, donc hospitalière, cette voix
saisit immédiatement votre vulnérabilité, la
plus intime, mais c'est pour retenir et
favoriser votre capacité de vivre, de survivre
par cet acte original qui s'appelle penser ".
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 39
ARTS
Dessiner l'indicible
B
oris Taslitzky est ce
dessinateur
incomparable dont le talent,
salué avant-guerre, s'est
fortifié dans les engagements politiques des
années trente, les grèves de 36, la lutte
contre la menace fasciste, la gangrène
raciste, la guerre d'Algérie et la
dictature au Chili…
Peintre réaliste et social, Boris
Taslitzky (1911 - 2005) a accompagné
l'histoire en mouvement et laissé sur
les événements vécus, des images
fortes. Prisonnier en 1940, évadé, repris
dans la Zone sud, livré par Vichy aux
Allemands, il a ramené de sa vie dans
l'enfer
concentrationnaire
de
Buchenwald
un
témoignage
inestimable. Des dessins tracés sur de
mauvais papiers, au verso de tracts ou
des affiches arrachés dans le stalag.
Images dérobées où resurgit le
quotidien de ses compagnons
d'infortune, les
baraques
lépreuses et la " cour des Miracles
" à l'heure de l 'appel. Fragments
d'un passé rendus par un trait vif,
intelligent. Images au réalisme
incisif puisées dans la lumière de
la géhenne. Dessins pathétiques
tendus comme miroir à notre
humanité vite oublieuse.
Cent onze dessins fins ; sobres
et précis ; en noir et en blanc et
qui habillent de dignité la détresse
des déportés. L'ensemble est
désormais préservé au Musée de
la Résistance nationale grâce à la
commission du Fonds régional
d'acquisition des musées, du
Ministère de la culture et de
quelques mécènes.
Le Musée d'Art et d'Histoire du
judaïsme a présenté cet ensemble
en 2006. Un bel album réunit et
reproduit dans leur " jus ", à
l'échelle des originaux le plus
souvent, cette moisson ramenée
de l'enfer. Des textes les
40 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
PAR MAURICE ARAMA
accompagnent, ceux de
Jorge
Semprun et de Julien Caïn, ses
compagnons d'infortune à Buchenwald.
Annette Wieworka, Lionel Richard,
Christophe Cognet et Maurice KriegelValrimont apportent leurs éclairages et
les analyses nécessaires à cette édition.
A partir de ses dessins, Boris Taslitzky
a peint, en 1945, une vaste fresque sur
le Petit Camp de Buchenwald que le
Musée national d 'Art moderne
conserve désormais. Le regard de
Taslitzky rejoint celui de Walter Spitzer
qui dans des mémoires poignantes "
Sauvé par le dessin " livre d'autres
éclairs sur l'enfer de Buchenwald.
Comment rendre l'indicible ? L'art de
Zoran Music passé par Dachau celui
de David Olère revenu de Birkenau
Auschwitz et d'autres palettes ont hurlé
leur douleur et rappelé sur la toile ou
le papier leurs cauchemars. Le monde
est sourd. L'indifférence chasse les
ténèbres nazies. La pensée entre dans
la glaciation.
Le Mémorial de Caen présente
Survivre, une exposition sur les Enfants
et les dérives meurtrières du
totalitarisme. Ce que l'homme a fait aux
enfants juifs pendant la Shoah, à ceux
du Biafra, du Rwanda, du Cambodge,
du Darfour, hier et aujourd'hui, est
présenté au Mémorial de Caen avec
sobriété et intelligence. La clarté du
propos trouve appui sur une
iconographie
poignante.
Des
témoignages venus des plus grands
musées mémoriaux du monde : dessins
d'enfants, jouets, objets et œuvres
amplifient le sombre dossier du meurtre
massif des enfants. " Le pire serait de
croire, par confort ou paresse, que
l'humanité s'est guérie de ses folies
après la Seconde Guerre mondiale "
écrit, dans son introduction, Gérard
Rabinovitch, commissaire scientifique
de l'exposition. Les discours
venus d'un Orient pas si lointain,
ne dissipent nullement ses
appréhensions.
Boris Taslitzky ; 256 pages ;
200 illustrations, juxtaposition
de la totalité des œuvres
clandestines de Boris Taslitzky
; Préface de Jorge Semprun et
Julien Caïn ; textes de Annette
Wieworka, Lionel Richard,
Christophe Cognet et Maurice
Kriegel-Valrimont ; postface de
Guy Krivopissk. Biro éditeur
avec le soutien de la Fondation
de la Shoah. 39 €
Survivre ; les enfants dans la
Shoah ; M é m o r i a l d e C a e n
Esplanade Général Eisenhower
- BP 55026 - 14050 Caen Cedex
4 - Tél. 33 (0)2 31 06 06 47
Exposition présentée tous les
jours jusqu'au 31 décembre
2009.
Walter Spitzer Sauvé par le
dessin Favre éditeur 19 €
CINEMA
Une raison de vivre
face à la raison d'état
L
e film d'espionnage est un
genre assez peu habituel
dans
notre
pays,
contrairement à ce qui
peut
exister
outreAtlantique, d'où l'originalité certaine qui se dégage du
nouveau film de Christian Carion, à
qui l'on devait déjà l'agréable
reconstitution d'une trêve en plein noël
1914 dans les tranchées (Joyeux Noël,
sorti en 2005).
Au moyen d'un scénario précis, qui
n'hésite pas à prendre des libertés par
rapport à la réalité historique et qui a
pu bénéficier d'une interprétation de
haut niveau -principalement portée par
un impressionnant Emir Kusturica- le
réalisateur d'Une hirondelle a fait le
printemps (joli premier film qui
réunissait Mathilde Seigner et Michel
Serrault) adapte avec intelligence et
efficacité un livre récent de Serguei
Kostine, "Adieu Farewell".
PAR ELIE KORCHIA
ministres communistes dans le
gouvernement Mauroy de mai 1981.
Notons à ce sujet que dans le
premier volume de son Verbatim,
Jacques Attali avait rappelé à quel
point l'affaire Farewell avait été
déterminante dans les premiers
rapports de pouvoir entre Mitterrand
et Reagan, étant précisé qu'en
décryptant les quelque 3000
documents miraculeusement transmis
à la DST par la " taupe " russe, les
contre-espions français ont alors pu
évaluer à deux ans le retard
technologique du camp communiste
sur le camp occidental !
Récit d'une affaire qui a fortement
affaibli les services secrets sovié-tiques
au tout début des années 80, le film
commence au moment où Pierre
Froment (Guillaume Canet), jeune
ingénieur français en poste à Moscou
pour une grande société française, est
contacté par un homme qui se présente
comme un colonel du KGB, Grigoriev
(Kusturica).
Celui-ci se déclare prêt à
communiquer aux services français des
informations cruciales qui sont de
nature à neutraliser la campagne de
pillages des secrets industriels et
militaires occidentaux, orchestrée
jusqu'alors de main de maître par
l'URSS et ses fameux espions.
Dans la réalité, l'obtention de ces
secrets, dévoilés par le colonel Vladimir
Vetrov (qu'on avait affublé du nom de
code anglais " Farewell " pour brouiller
les pistes et qui finit exécuté en 1985)
permit à François Mitterrand, tout
nouvellement élu, de démontrer à
Ronald Reagan qu'il était un bon
Occidental, en dépit de la présence de
Dans le rôle de celui par qui le
scandale arrive, et qui va permettre à
nos autorités de démasquer la
logistique du KGB dans plus 16 pays,
Emir Kusturica, le célèbre réalisateur
serbe du Temps des gitans, double
Palme d'or au festival de Cannes,
occupe ici tout l'espace de fiction du
film et parvient à imposer sa présence
jusque dans ses silences.
Idéaliste jusqu'au bout des ongles,
son personnage en quête existentielle
refuse tout autre paiement que
quelques bouteilles de Cognac ou
quelques disques de Léo Ferré, sans
oublier quelques CD de Queen pour
son fils unique, un adolescent en
pleine tourmente qui ne rêve que de
Walkman et de Levi's.
Face à lui, Guillaume Canet est une
fois de plus convaincant en petit
ingénieur français qui prend peu à peu
gout à la mission qui lui est confiée et
au jeu de l'espionnage, alors même
que cela le place dans une situation
plus que délicate avec sa jeune
épouse…
Ayant bénéficié d'un très beau travail
en matière de décors, que ce soit la
ville de Moscou qui a été fidèlement
reconstituée en Ukraine ou encore le
fameux bureau ovale de la Maison
Blanche que le réalisateur a bâti dans
une usine désaffectée d'Ivry sur Seine
(située avenue Lénine !) le film se
concentre avec justesse sur le point de
vue humain en contant avec habileté,
face à des enjeux géostratégiques tout
puissants, la course contre la montre
et la fin tragique d'un agent idéaliste
pour qui raison de vivre et raison d'Etat
sont finalement devenus antinomiques.
Cependant, même s'il s'agit à
l'évidence d'un film plaisant, qui
revisite avec un savoir-faire certain une
histoire passionnante et quelque peu
oubliée - alors même qu'on célèbrera
le 9 novembre prochain les 20 ans de
la chute du mur de Berlin - il faut bien
reconnaître que nous sommes encore
loin de la maestria d'un Mankiewicz
(dans l'Affaire Cicéron) ou encore de
la subtilité d'un Martin Ritt (dans
L'espion qui venait du froid).
Car il manque en effet une certaine
amplitude à ce film d'espionnage qui
aurait mérité sans doute un peu plus
de folie et de profondeur de champ,
d'autant plus lorsqu'on peut compter
sur la présence d'un premier rôle
comme Emir Kusturica, dont la
prestation fera date dans la carrière de
Christian Carion, metteur en scène
populaire qui entend privilégier plus
que tout le divertissement dans son
œuvre.
INFORMATION JUIVE Octobre 2009 41
VERBATIM
MICHEL SCHIFRES.
Chroniqueur :
" Seul le modèle social français
risque de nous rester sur les bras.
Mystérieusement, personne n'en
veut ".
JEAN DUHAMEL.
Auteur :
" Le temps où l'on puisait
essentiellement les bêtisiers dans les
maternelles est révolu. Les enfants
n'ont jamais été aussi gavés
d'informations, et pourtant,
l'intelligence moyenne semble
s'appauvrir "
YAZID SABEG.
Haut-commissaire à la diversité :
" L'Etat n'a pas à se prononcer sur la
tenue vestimentaire des Français ".
ABDELWAHAB MEDDEB.
Poète. Professeur :
" Contre l'antisémitisme maladif nourri
par Al-Jazira, je rappelle aussi à tout
musulman que l'islam émane du
judaïsme. Les juifs ne peuvent pas être
nos ennemis, car ils sont nos pères ".
JOSÉ MARIA AZNAR.
Ancien chef du gouvernement
espagnol :
" Les Arabes nous demandent de
nous excuser de ceci, de nous
repentir de cela. Mais, jusqu'ici,
aucun Arabe n'est venu me présenter
ses excuses pour l'occupation de
l'Espagne "
Philosophe :
" Va-t-on confier les rênes de
l'agence culturelle mondiale à un
homme qui, lorsqu'il entend le mot
culture, sort ses ciseaux ou son
briquet ? "
MARTINE AUBRY.
Premier Secrétaire du PS :
" Il faut être un homme pour ne
penser qu'à la présidentielle "
ABDOLKARIM SOROUSH.
Philosophe iranien :
PEER STEINBRÜCK.
BERNARD-HENRI LÉVY.
paix en éliminant le venin de la
haine. Lui-même ne regrette-t-il pas
aujourd'hui de l'avoir craché ? "
Ministre allemand des finances :
" La politique c'est davantage que du
glamour et du divertissement "
EDOUARD BALLADUR.
Ancien Premier ministre :
" Par principe, je fais confiance à la
liberté "
MARCEL GAUCHET.
Philosophe de l'éducation :
" Les disciplines littéraires
sont parmi les plus touchées
par le phénomène de la perte
de sens ".
" Le pouvoir au nom de la religion
pourrit aussi bien le pouvoir que la
religion. C'est un honneur de
gouverner un peuple libre, heureux,
intelligent, pas un peuple triste et
emprisonné "
WALID JOUMBLATT.
Chef des Druzes libanais :
" Il nous faut des armes antichars et
antiaériennes… Je pense que nous
pouvons trouver ce type d'armes en
Russie ou en Chine ".
PETER SLOTERDIJK.
Philosophe allemand :
ROGER COHEN.
Editorialiste au New York
Times :
"Avec l'énorme moyen de
pression que constitue la
contribution américaine au
budget de l'Unesco, faisons
impitoyablement pression
sur lui ( Farouk Hosni,
candidat égyptien) pour
qu'il combatte le fanatisme
antisémite qui contamine
tant de jeunes Arabes ; pour
qu'il contribue à l'ouverture
du dialogue ; pour qu'il
s'efforce d'ouvrir davantage
les esprits arabes à la science
et à l'éducation ; et pour qu'il
épouse, enfin, la cause de la
42 INFORMATION JUIVE Octobre 2009
" L'impôt progressif sur le revenu
représente le seul progrès moral
substantiel depuis les Dix
Commandements "
PATRICK DESBOIS.
Directeur du Service des relations avec
le judaïsme au sein de l'épiscopat :
" Je suis sidéré de rencontrer autant
de haine en France, quand soixante
ans après la Shoah, on déterre des
morts juifs "
COLUM MCCANN.
Ecrivain irlandais :
" Le monde est en morceaux, mais
nous devons l'aimer parce que nous
n'en avons pas d'autre "
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