Argumentaire - L`Union sociale pour l`habitat

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Argumentaire
Le logement
social pour
la solidarité
et la croissance
Sommaire
Quelle politique du logement pour demain ?
. . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 3
Le logement au cœur des enjeux des prochaines années . . . . . . . . . . . . . p. 4
Quels fondamentaux pour une politique du logement
en temps de crise, et pour sortir de la crise ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 5
Le logement social, meilleur outil
des pouvoirs publics contre la crise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 7
Analyses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 11
Réorienter les interventions publiques dans le logement . . . . . . . . . . . . p. 12
Inscrire le logement dans une dynamique
d’aménagement et de développement des territoires . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 20
Une mission sociale élargie, des exigences nouvelles . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 25
Soutenir l’accession sociale sécurisée à la propriété . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 30
Poursuivre la rénovation urbaine, relancer la politique de la ville . . . . p. 33
Développement durable et maîtrise de l’énergie :
un chantier bien engagé, une évaluation nécessaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 35
Qu’est-ce que le logement social ?
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 39
Une rencontre réussie entre le social et l’économique . . . . . . . . . . . . . . . . p. 40
Des organismes différents, répondant
à une même mission d’intérêt général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 41
Une mission sociale affirmée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 43
Un acteur économique de premier plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 44
Un modèle original de financement à l’efficacité prouvée . . . . . . . . . . . . p. 45
Le logement social en Europe, des approches différenciées,
des réalités contrastées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 48
Le logement social pour la solidarité et la croissance 01
Mieux loger
les Français, soutenir
la croissance et l’emploi
par Thierry Bert, Délégué général de L’Union sociale pour l’habitat
e logement présente ce
paradoxe d’être l’objet d’une
activité législative et
normative très intense, et d’être
depuis des décennies un parent
pauvre des politiques et du débat
public, une sorte d’impensé aux
plans économique, social et de
l’aménagement du territoire.
L
C’est dans cet esprit que l’ensemble
des partenaires de l’État, réunis en
États Généraux du Logement depuis
deux ans, a établi un diagnostic et
formulé des propositions communes
afin de rebâtir ces fondamentaux, et
d’élaborer une politique ambitieuse
et réaliste de l’habitat, inscrite dans
la durée et la stabilité.
Les textes se sont accumulés, les
décisions politiques ont évolué,
souvent au gré des injonctions des
journaux télévisés, la concertation
s’est appauvrie. Résultat : les
professionnels du logement, dont
l’action exige des investissements
lourds et une vision à long terme,
n’ont plus la capacité d’anticiper,
pourtant indispensable.
Mais le prochain Gouvernement
devra prendre en compte l’urgence à
agir face à la crise. Une action
immédiate doit être conduite pour
répondre aux besoins des
populations précarisées, et pour
soutenir l’activité et l’emploi. Une
sorte de quadrature du cercle, car il
ne faudra pas de ce fait aggraver les
déficits publics.
Un des grands défis de l’État pour les
années à venir sera donc de rebâtir
avec ses partenaires les
fondamentaux d’une politique stable
et équilibrée, reposant sur les trois
piliers que sont le logement locatif
social, le logement locatif privé et
l’accession à la propriété. Il aura à
jouer à la fois sur la régulation des
marchés et sur l’intervention
financière. Il devra améliorer la
gouvernance nationale et locale des
politiques de l’habitat. À cet égard, il
aura à prendre en considération,
avec une extrême attention, la
diversité des territoires.
Le meilleur levier possible au service
d’un tel défi est le logement social :
par son caractère d’intérêt général, il
est d’emblée au service des choix de
la collectivité ; par son modèle
économique, il donne à chaque euro
public investi un effet de levier sans
commune mesure avec celui des
autres secteurs. Et cela dans les deux
domaines aujourd’hui cruciaux :
celui de la solidarité avec les
ménages à revenus modestes, les
jeunes et les classes moyennes
précarisées par la crise, et celui de la
reprise d’une activité économique
immédiatement porteuse d’emplois
et de recettes pour les budgets
publics. Enfin il n’obère pas les
budgets à venir, puisque cet
investissement de long terme repose
sur un endettement porté par les
organismes et remboursé par les
loyers : investir dans le logement
social ne creuse pas les déficits.
Encore faut-il permettre que cet
effet de levier fonctionne, ce qui
suppose que les moyens publics
soient maintenus à un niveau
cohérent avec l’ampleur des besoins.
Heureusement, les budgets publics
recèlent des marges de manœuvre et
de réorientation vers les
investissements les plus efficaces.
C’est pourquoi le monde Hlm
rappelle à ceux qui aspirent à diriger
le pays dans une période
particulièrement difficile qu’ils
doivent et qu’ils peuvent compter
sur ce partenaire irremplaçable, non
seulement pour aider les Français à
mieux supporter la crise, mais aussi
pour apporter à notre pays un
supplément de croissance.
Il est temps d’oser
le logement social !
Le logement social pour la solidarité et la croissance 03
Quelle politique
du logement
pour demain ?
Le logement au cœur des enjeux
des prochaines années . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 4
Quels fondamentaux pour une politique
du logement en temps de crise, et pour
sortir de la crise ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 5
Le logement social, meilleur outil
des pouvoirs publics contre la crise . . . . . . . . . . . . p. 7
04 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Le logement
au cœur des enjeux
des prochaines années
Au centre de la question du pouvoir
d’achat, le logement représente
près du quart de la dépense des
ménages, beaucoup plus pour les
ménages à revenus modestes – avec
un accroissement important des
inégalités dans la dernière décennie.
La question du logement est
essentielle au pacte républicain et
au vivre-ensemble, c’est une
composante de la crise urbaine et de
la fracture territoriale porteuse de
fracture nationale et générationnelle.
Sa qualité et son adaptation aux
besoins des ménages conditionnent
largement les possibilités de
développement et d’épanouissement
personnel, familial et professionnel,
la réussite scolaire des enfants, la
prise d’autonomie des jeunes, mais
aussi le maintien à domicile des
personnes âgées ou en situation de
handicap.
Le logement conditionne plus que
jamais la mobilité professionnelle et
l’emploi, au point que des entreprises
renoncent à se développer ou à
s’implanter là où le logement
manque, est trop cher, ou de
mauvaise qualité. Une récente
enquête réalisée par le CREDOC (1) à
la demande du MEDEF confirme que
le problème du logement dissuade les
salariés ou les demandeurs d’emploi à
être mobile : 500 000 emplois
auraient ainsi été refusés en dix ans
du fait d’un problème de logement.
Il renvoie également à
l’aménagement du territoire. La
dérive des coûts fonciers, et l’absence
de prise en considération du logement
par les politiques d’aménagement du
territoire ont engendré un étalement
et une périurbanisation
accompagnant le départ des ménages
les plus modestes et des familles loin
des centres, avec des conséquences
sur la qualité de vie, la durée et le coût
individuel et collectif des transports,
le gaspillage des sols et des terres
agricoles. Mais on voit aussi, fort
heureusement, renaître des territoires
dont le dynamisme démographique
et/ou économique appelle une
réponse logement adaptée.
C’est un enjeu et un ressort essentiel
du développement durable. Le
secteur de l’habitat est identifié
comme le plus porteur avec celui des
transports pour la maîtrise de
l’énergie, la lutte contre l’effet de
serre, la prévention du gaspillage de
l’eau ou le traitement des déchets.
C’est aussi un secteur économique
de tout premier plan: le logement
représente 23% du PIB. D’une grande
diversité, il fait appel à des activités
telles que le bâtiment dans toutes ses
composantes du gros œuvre à
l’équipement et à l’entretien, mais
aussi à toutes celles qui portent sur les
services en réseaux associés au
logement (fourniture de fluides,
télécommunications…) et les très
nombreuses activités liées à sa
production, son financement, sa
gestion. Sa bonne santé est essentielle
à l’activité économique du pays, une
activité de surcroît porteuse d’emplois
non-délocalisables: un logement
construit représente ainsi entre 1,5 et
deux emplois, un logement qui fait
l’objet d’une réhabilitation lourde
représente jusqu’à un emploi. C’est
aussi un creuset d’innovation et un
soutien à la constitution de filières
françaises performantes et
exportatrices, qu’il s’agisse de PME
innovant dans le champ du
développement durable comme des
majors du BTP.
Un tel “poids lourd” pèse
relativement peu sur les finances
publiques. L’ensemble des dépenses
de l’État en faveur du secteur
représente environ 36 milliards
d’euros, soit environ 1,8% du PIB et
3,2% du budget de l’État. Mais en
recettes fiscales de toutes sortes, il
rapporte autant à la collectivité.
Pour toutes ces raisons, il faut cesser
de regarder le logement comme une
dépense improductive, et le
considérer comme un investissement
riche en emplois et, si les aides sont
bien ciblées, en retours pour la
collectivité, comme un investissement
structurant et porteur d’avenir pour le
pays, ses territoires et ses générations
futures.
Désendettement oblige, ceci n’exonère
pas les pouvoirs publics d’une gestion
avisée, ciblée et maîtrisée de son
action financière dans ce domaine.
Des marges de manœuvre existent,
qu’il importe d’exploiter.
(1) Note du CREDOC n° 240, juillet 2011 : Le coût du logement pèse sur la mobilité professionnelle.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 05
Quels fondamentaux pour
une politique du logement
en temps de crise, et pour
sortir de la crise ?
La situation de crise des finances
publiques ne doit pas déboucher
sur un repli de la politique du
logement, sauf à redoubler les
difficultés des Français en aggravant
leurs conditions de vie, à freiner
brutalement l’activité et à détruire
de nombreux emplois. Il faut au
contraire veiller à ce que ce secteur
crucial pour l’activité joue au mieux
son rôle d’amortisseur de crise.
Mais face à l’impératif de
désendettement, il est difficile
d’augmenter globalement la
dépense publique en faveur du
logement. Or une partie de cette
dépense – les aides à la personne –
augmente de manière mécanique car
l’accroissement du nombre d’ayants
droit suit les pertes d’emploi et
l’appauvrissement des ménages.
Cela, malgré une sous-actualisation
de ces aides pour 2012, aux dépens
des personnes concernées.
Limiter la dépense publique ne peut
consister à cantonner les aides à la
cible des ménages les plus
défavorisés : de très larges catégories
de la population sont touchées par
les difficultés de logement et par la
situation économique, et ne peuvent
se loger dans les conditions du
marché.
En outre, l’État ne peut se décharger
davantage sur les partenaires organismes de logement social,
collectivités locales, partenaires
sociaux. L’exercice a été trop
largement mené ces dernières
années pour ne pas risquer de
bloquer le système. L’argent prélevé
sur les organismes depuis 2011
manquera à la production, le 1 % a
déjà été trop largement soustrait à
son usage normal – loger les salariés
– au risque de compromettre son
avenir, et la substitution croissante
ces dernières années des
collectivités locales aux aides à la
pierre de l’État se heurte aux
contraintes des finances locales.
Il convient donc de rendre plus
efficace la dépense publique dans
le cadre d’un budget national
stable pour le Logement. Plusieurs
pistes peuvent être tracées :
• La maîtrise des coûts de
production doit être considérée
comme un impératif et passe par une
remise en cause profonde de la
logique actuelle de normalisation
sans contrôle ni évaluation, par une
recherche prioritaire d’efficience de
la filière de construction et surtout
par une nouvelle politique foncière.
06 Le logement social pour la solidarité et la croissance
• Le foncier est en effet au centre
du problème du coût du logement,
et relève d’un véritable
changement d’approche. Il ne s’agit
plus de se poser la question du
montant de fonds publics à apporter
pour compenser l’augmentation
indéfinie des coûts fonciers, mais de
se demander à quel prix doit se
situer le foncier pour être
compatible avec les revenus des
ménages à loger. Autrement dit, la
collectivité ne doit plus favoriser la
« rente foncière », mais prendre des
mesures volontaristes pour lutter
contre la rétention et l’inflation du
prix des terrains.
• La régulation des marchés, est
indispensable pour disposer d’une
gamme d’offre cohérente avec la
capacité contributive des ménages,
permettre les parcours résidentiels
en évitant les écarts trop importants
de prix entre types de logement, et
éviter que les aides publiques
n’alimentent l’inflation.
• L’évaluation territorialisée des
besoins doit s’inscrire dans une
vision d’aménagement du territoire.
Il ne saurait être question, ni
« d’arroser » l’ensemble du territoire
d’aides uniformes, ni de tomber dans
l’excès inverse consistant à nier les
besoins en matière de logement de
pans entiers du territoire.
• Toute aide publique doit être
soumise à une exigence renforcée
d’efficacité économique et sociale,
en privilégiant les dépenses qui
débouchent sur une augmentation
effective de l’offre, compatible avec
les revenus des ménages à loger, et
bien localisés. Ceci conduit à
supprimer toute aide qui constitue
un simple effet d’aubaine, ou qui a
un effet inflationniste, et à renforcer
le ciblage des aides aux
investissements en fonction
des besoins locaux et des prix
ou loyers de sortie.
• Une telle politique suppose un
soutien à la mobilisation de
l’ensemble des acteurs, des efforts
d’organisation et de productivité, la
recherche de ressources alternatives
ou complémentaires. Or, les
changements perpétuels de règles
du jeu désorganisent les acteurs, et
les « coups d’accordéon » dans la
gestion des effectifs des organismes
et des entreprises de BTP diminuent
la productivité. Il est donc impératif
que l’effort de l’État s’inscrive dans
un plan débattu avec les partenaires,
bien ajusté aux besoins territoriaux,
et portant sur une période minimale
de cinq ans.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 07
Le logement social,
meilleur outil
des pouvoirs publics
contre la crise
Le secteur Hlm répond à la
définition européenne du service
d’intérêt général, puisque les
organismes Hlm sont spécialement
mandatés à cet effet, n’ont pas
d’autre activité, sont étroitement
réglementés et contrôlés, et que la
compensation de leurs obligations
de service public est strictement
encadrée. Les immeubles restant
soumis aux règles Hlm sans aucune
limite de durée, ceci garantit le
meilleur retour sur investissement.
La collectivité s’est ainsi constituée
au fil du temps un patrimoine de
4,5 millions de logements qui reste
à sa disposition bien au-delà de
l’amortissement des logements.
Cet effet d’accumulation d’un
« patrimoine commun de la Nation »
offre à la collectivité un outil
puissant au service de politiques qui
évoluent en fonction des besoins :
logement des salariés, des familles,
des rapatriés, et aujourd’hui droit au
logement ou accueil des ménages
paupérisés. Sans le parc construit,
réhabilité et conservé depuis plus
d’un siècle, ces politiques seraient
encore plus difficiles à conduire. De
même, les logements dont la
construction est lancée aujourd’hui
bénéficieront aux générations
futures et aux politiques sociales qui
seront décidées, ce qui n’est pas
possible avec le secteur privé
conventionné, dont les engagements
sont temporaires.
Les organismes gérant dans la
durée les immeubles qu’ils ont
construits, sont particulièrement
attentifs à la qualité et à la
durabilité de leurs logements.
Confrontés à la précarité
économique des populations logées,
ils ont très tôt été soucieux de la
maîtrise des dépenses énergétiques
– la performance de leur parc
existant est 30 % meilleure que celles
de l’ensemble du patrimoine
résidentiel, et leur production neuve
est au-delà des normes.
Le logement social pèse
relativement peu sur les finances
publiques (2) car chaque euro
accordé par les pouvoirs publics a
un effet de levier très important :
les aides de l’État sont complétées
par celles des collectivités locales,
par les fonds propres des organismes
dégagés grâce aux loyers des
immeubles amortis, par des apports
du 1 %, et surtout par 70 à 75 % de
prêts de la Caisse des Dépôts, prêts
remboursés grâce aux loyers perçus.
Non seulement le coût en aides
directes ou fiscales de l’État s’en
trouve limité, mais cela n’entraîne
pas de dettes pour les budgets
ultérieurs, car ce sont les organismes
et non les contribuables qui
remboursent les emprunts.
Par ailleurs les décisions publiques
en matière de construction ou de
réhabilitation sont rigoureusement
ciblées, tant pour la localisation que
pour les populations concernées : la
construction Hlm fait l’objet d’une
programmation territoriale par
l’État, en accord avec les délégataires
(2) Moins de 12 milliards toutes aides confondues, sur un budget total de 36,3 milliards en 2011.
08 Le logement social pour la solidarité et la croissance
des aides à la pierre, et chaque projet
fait lui-même l’objet d’un agrément
de la puissance publique qui
conditionne, non seulement les aides
publiques, mais également l’octroi
du prêt de la CDC.
La collectivité a donc à sa
disposition un outil d’une très
grande précision, sans comparaison
avec les aides à l’investissement
privé en locatif comme en accession
qui, s’il permet de soutenir l’activité
globale de construction, ne fait pas
l’objet d’agréments et dépend de
décisions individuelles.
Le système Hlm est par ailleurs
parfaitement sécurisé ce qui est
précieux en cette période. En effet
l’exemple de l’immobilier aux ÉtatsUnis ou en Espagne, mais aussi le
krach immobilier français des
années 90, soulignent l’importance
d’un système sûr. Protégé par son
financement spécifique, des règles
prudentielles strictes et des prix
encadrés qui assurent qu’il ne reste
pas sans clients, il n’a jamais connu
de faillite et constitue le placement
le plus sûr pour tous les épargnants.
Le système Livret A/prêts de la CDC
a toujours garanti la disponibilité et
la sécurité de l’épargne populaire : en
plaçant leurs économies sur le
Livret A, les Français se protègent
du risque de perdre leurs fonds,
tout en assurant le logement de
leurs concitoyens et celui des
générations futures.
Ces caractéristiques lui confèrent
un rôle contra-cyclique qui lui
permet d’être pleinement
opérationnel quand les autres
acteurs sont en repli, faute de
clientèle solvable pour leur offre, ou
faute de crédits bancaires pour
accompagner des projets qui
semblent risqués aux établissements
prêteurs.
Face à la crise, le secteur Hlm peut
donc remplir deux fonctions
fondamentales : être un
amortisseur de crise sociale pour
les ménages précarisés, soutenir
l’activité et l’emploi. Élément
central de solidarité, il permet aux
ménages modestes, pauvres ou
défavorisés, mais aussi aux jeunes,
aux salariés, aux familles, aux
personnes âgées, de trouver ou
garder un logement malgré les aléas
économiques. Un logement
convenable à un prix modéré
atténue les conséquences sociales de
la crise. C’est aussi le meilleur
moyen d’aider les jeunes à s’insérer
socialement et économiquement.
Il maintient ou accroît l’activité et
l’emploi lorsque les autres acteurs
se retirent des territoires : il donne
du travail au bâtiment à travers son
activité de production ou de
réhabilitation, permettant de créer
ou de maintenir des emplois
moyennement ou peu qualifiés, et
non-délocalisables.
On voit ainsi des zones en déprise
pour lesquelles la rénovation
urbaine ou la réhabilitation
permettent le maintien d’activités et
d’emplois, tout en apportant du
mieux-être aux populations. Il
favorise l’économie résidentielle,
services à la personne ou de
proximité, petit commerce. On le
voit par exemple dans des territoires
où les personnes âgées trouvent des
conditions de logement adaptées
pour un coût abordable, et
contribuent au développement
d’emplois, notamment pour les
jeunes. Dans les quartiers en
difficultés, mais aussi dans les
petites villes qui perdent leurs
services publics, le logement social
reste présent et contribue au lien
social et à la vie locale, quand les
autres acteurs se retirent.
Il accompagne l’implantation et le
développement d’activités en
aidant les salariés à se loger. C’est
d’ailleurs sa vocation originelle
d’accompagner l’activité
économique et la création d’emplois,
et c’est la raison d’être de la
Participation des employeurs à
l’effort de construction (PEEC) le
fameux 1 %. En outre, le logement
social dégage – grâce à ses prix ou
loyers inférieurs à ceux du marché –
un pouvoir d’achat pour les ménages
à revenus modestes qui sera
consommé, favorisant l’activité
locale (3).
(3) Des travaux à paraître prochainement, soutenus par la CDC et l’USH, et menés par le groupe DELPHIS et l’Institut d’urbanisme de
Paris mesurent ces apports.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 09
Loin de constituer une dépense
socialement nécessaire mais faisant
concurrence à des investissements
plus productifs, le logement social
est un investissement structurant
des territoires et un puissant
ressort de l’activité et de l’emploi.
Le logement social est ainsi un allié
précieux pour tout gouvernement
qui saura l’utiliser au service d’une
ambitieuse stratégie de sortie de
crise à travers la politique
économique, sociale et de cohésion
nationale.
Encore faut-il lui permettre de
jouer pleinement son rôle, en
sachant s’appuyer sur lui, et en
maintenant les moyens
indispensables à l’effort de
production, de rénovation urbaine et
de réhabilitation. Or à l’heure
actuelle, ces moyens sont gravement
menacés : diminution drastique des
aides à la pierre, prélèvement
important sur les fonds propres des
organismes, détournement du 1 %
vers des usages sans rapport avec le
logement des salariés, augmentation
du taux de TVA, concurrence accrue
pour les emplois du Livret A. Cette
évolution doit être inversée pour
retrouver le chemin de la solidarité
et de la croissance.
Une politique de développement du logement social est donc parfaitement
compatible avec la maîtrise des finances publiques, dès lors que ce
développement repose sur une meilleure orientation des aides en fonction de leur
efficacité économique et sociale, et sur un effort important de maîtrise des coûts.
Elle est même de nature à favoriser la relance de l’activité.
Pour cela, même si des améliorations sont possibles, les fondamentaux du modèle
économique et social du secteur doivent être reconnus et préservés. On peut les
résumer ainsi :
• le Livret A, qui apporte près des trois-quarts du financement des opérations, et
limite en conséquence l’effort de la collectivité ;
• des aides publiques, à l’investissement (aides fiscales ou subventions), et aux
ménages (APL), dans un dosage équilibré ;
• la capacité des organismes à injecter des fonds propres dans la production, grâce
à la pérennité du patrimoine et au caractère non lucratif du secteur, ce qui
suppose des acteurs spécifiques.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 11
Analyses
Réorienter les interventions publiques
dans le logement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 12
Inscrire le logement dans une dynamique
d’aménagement et de développement des territoires . . . p. 20
Une mission sociale élargie, des exigences nouvelles . . . p. 25
Soutenir l’accession sociale sécurisée à la propriété . . . p. 30
Poursuivre la rénovation urbaine,
relancer la politique de la ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 33
Développement durable et maîtrise de l’énergie :
un chantier bien engagé, une évaluation nécessaire . . . p. 35
12 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Réorienter
les interventions publiques
dans le logement
Face à la crise que traverse le pays,
optimiser l’intervention publique
signifie renforcer la réponse aux
besoins en logements abordables
partout où sont les besoins, soutenir
la croissance et l’emploi, et cela sans
aggraver les déficits publics. Cette
équation complexe ne peut se
résoudre qu’en choisissant parmi les
dépenses celles qui ont la plus
grande efficacité à la fois en termes
de solidarité et en termes d’activité.
Ceci exclut un simple report de
charges entre acteurs, comme c’est le
cas lorsqu’on transfère l’effort vers
les collectivités locales ou qu’on
« ponctionne » les bailleurs sociaux
ou le 1 % pour alléger le déficit de
l’État… De même la maîtrise de la
dépense publique immédiate ne doit
pas reposer sur un report de la
dépense sur les années suivantes.
Graphique 1 - Aides publiques selon le statut d’occupation
(hors aides à la personne)
Une politique volontariste du
logement doit en conséquence
trouver des marges de manœuvre
dans une enveloppe budgétaire
contrainte, afin de pouvoir
développer l’investissement dans le
logement abordable. Pour cela
chaque euro public dépensé doit
avoir un important effet de levier, et
la gouvernance des politiques
nationale et locales du logement doit
être améliorée pour mieux mobiliser
l’ensemble des acteurs.
État des lieux : moins du tiers
des aides bénéficient au
logement social
100 %
On entend souvent qualifier le
logement social de « logement aidé »
pour le distinguer des autres
secteurs. Il s’agit là d’un abus de
langage, car le secteur privé (locatif
ou propriétaires occupants) recueille
en réalité les deux tiers des aides
apportées par l’État, pour un effort
global de l’État d’environ 36 Md€.
90 %
80 %
70 %
60 %
50 %
40 %
30 %
20 %
0%
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
10 %
■ Locatif social ■ Locatif privé
■ Propriétaires occupants
(4) Prêts à taux modérés assis sur le Livret A.
Montant des aides publiques hors
aides à la personne (graphique 1)
Pour les seules aides à
l’investissement et à l’exploitation –
subventions, aides fiscales ou aides
de circuit (4) – le poids du locatif
social a décru de près de 40 % du
total au milieu des années 1990 à
20 % au début des années 2000 ; avec
le plan de cohésion sociale et le
PNRU, le social est remonté à 29 %
des aides en 2009. Les propriétaires
occupants sont les principaux
bénéficiaires des différentes aides :
Le logement social pour la solidarité et la croissance 13
prêts aidés ou aides fiscales pour
l’investissement ou la maintenance
des logements.
Répartition des aides à la personne
(graphique 2)
On observe une baisse presque
continue des aides à la personne aux
propriétaires occupants (mesures
d’économie, érosion des barèmes et
baisse du volume des prêts avec
APL) : 7 % des aides en fin de
période. La part croissante du locatif
privé – 55 % du total en fin de
période – coïncide avec la
généralisation des aides au début des
années 1990 et la mise en place d’un
barème d’aide unique en 2001. Le
secteur locatif social représente 36 à
38 % de ces aides depuis une dizaine
d’années.
Montant total des aides publiques
(graphique 3)
Ces évolutions contrastées donnent,
en 2009, une répartition en trois
tiers des 36,3 Md€ d’aides publiques :
• 11,9 Md€ pour le locatif social: 33%
• 12,3 Md€ pour le locatif privé: 34%
• 12,1 Md€ pour les propriétaires: 33%.
Depuis le début des années 1980, la
part du locatif social a fortement
diminué, malgré une remontée en fin
de période, du fait notamment des
aides fiscales et de circuit liées à une
augmentation de la production.
Ce désengagement de l’État vis-à-vis
du secteur Hlm comparé aux deux
autres ne s’est pas encore traduit par
une baisse de la production, grâce à
un relais des autres aides (fonds
propres et aide des collectivités) qui
atteint ses limites, mais aussi au prix
de tensions sur les loyers aux dépens
des ménages à revenus modestes ou
bas qui peinent à accéder aux
logements récents. Il ne faut pas sousestimer non plus l’effet retard
inhérent au secteur immobilier: la
production ne peut que se ressentir à
terme de la baisse des aides.
Graphique 2 - Aides à la personne selon le secteur d’occupation
100 %
90 %
80 %
70 %
60 %
50 %
40 %
30 %
Propriétaires
occupants
Locatif
social
33 %
33 %
20 %
10 %
34 %
Locatif
privé
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
0%
■ Locatif social ■ Locatif privé
■ Propriétaires occupants
14 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Graphique 3 - Toutes aides publiques selon le statut d’occupation
(hors hébergement)
100 %
90 %
80 %
70 %
60 %
50 %
40 %
30 %
20 %
10 %
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
0%
■ Locatif social ■ Locatif privé
■ Propriétaires occupants
Le modèle du logement social
repose sur un dispositif de
financement des Hlm avantageux
pour la collectivité, qui a également
permis de limiter les effets du
désengagement de l’État. Le modèle
économique français du logement
social repose en effet sur un
triptyque original.
• Des prêts assis sur le Livret A,
remboursés par les organismes grâce
aux loyers perçus, assurent
l’essentiel du financement des
opérations (70 à 75 %). L’avantage est
de minimiser les subventions au
profit des emprunts. Mais il tient
aussi à ce que, à la différence, par
exemple, d’un partenariat publicprivé (PPP), ce n’est pas la
collectivité qui rembourse, mais
l’organisme, et cela ne pèse ni sur
les budgets publics, ni sur la dette.
• Des aides complémentaires,
fiscales et en subventions, venant de
l’État, des collectivités locales, et des
partenaires sociaux à travers Action
logement (le « 1 % logement »). Et
des aides à la personne, qui
permettent aux locataires de faire
face aux loyers d’équilibre des
opérations.
• Des organismes spécialisés et
strictement réglementés à cette fin
qui réinvestissent leurs résultats et
gardent les logements sans limite de
durée : les immeubles amortis
financent la production nouvelle à
travers les fonds propres apportés
aux opérations. L’encadrement
réglementaire des Hlm, leur système
de garantie et leur dispositif
d’autocontrôle assurent une sécurité
maximale.
Ce modèle trouve sa limite, avec
des coûts de production croissants,
et des subventions publiques en
recul accompagnées d’une
ponction de l’État sur les fonds
propres. Ceci porte atteinte à la
capacité de production – après des
années de production record, un
repli s’amorce – et, en faisant
pression sur le loyer d’équilibre des
opérations, rend l’offre moins
accessible à des populations
précarisées, tandis que les aides à la
personne s’érodent. Avec des besoins
qui augmentent, cela rend
nécessaire et urgente la recherche
de marges de manœuvre.
Heureusement, celles-ci existent.
Une part importante du budget de
l’État, constituée d’aides à guichet
ouverts n’est pas maîtrisée. Les
aides à la personne sont tributaires
de la situation économique et sociale
et augmentent naturellement, leur
augmentation étant cependant
contenue par des restrictions dans la
définition des ayants droit et dans les
barèmes, aux dépens des ménages
modestes. Les aides fiscales au
secteur privé dépendent de choix
d’opérateurs, qui répondent assez
mal aux attentes de la collectivité
(localisation et niveau de prix
notamment) : l’explosion des aides
fiscales qui en découle reporte de
plus une charge importante sur les
budgets futurs, et alimente l’inflation
foncière (5).
Les aides au secteur Hlm qui font
l’objet d’une programmation et d’un
agrément au coup par coup,
optimisant à la fois la localisation et
les contreparties sociales, sont au
contraire parfaitement maîtrisées
quant au coût budgétaire et au
ciblage (6). Elles ont de plus un effet
de levier en termes de loyer sans
rapport avec celui du secteur privé,
du fait du modèle économique déjà
décrit. Une étude, réalisée en 2006
dans le cadre du Conseil national de
l’habitat, avait montré qu’entre le
Robien (à l’époque le Scellier
n’existait pas) et le PLUS, l’effet sur
la baisse de loyer d’un euro dépensé
par l’État variait en faveur de
l’efficacité du PLUS de 0,10 € à
3,70 € de baisse de loyer pour un
euro public dépensé. On ne peut que
regretter que cet exercice n’ait pas
été réitéré.
(5) Selon le récent rapport de l’Inspection générale des finances sur les niches fiscales, le ministère du Logement est celui qui a le plus de
dépenses fiscales avec 12,5 Mds en 2010 (à comparer aux 450 millions d’aides à la pierre) et les dépenses fiscales qui croissent le plus vite.
(6) Les aides de l’ANAH sont également attribuées sur dossier et en fonction de critères sociaux et/ou environnementaux.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 15
Réorienter les aides publiques
en fonction de leur efficacité
sociale et économique
Dégager des marges de manœuvre
à l’intérieur de l’enveloppe des
36 milliards actuels signifie donc
diminuer les dépenses mal ciblées au
plan territorial, ou au regard des
revenus des ménages à loger, voire
qui ont un effet inflationniste, pour
renforcer celles qui permettent de
produire, là où existent des besoins,
une offre réellement abordable et
d’une qualité environnementale
contrôlée.
Cela signifie privilégier le
logement social, dont la relance
répondrait à la fois à l’impératif de
solidarité et à l’objectif de soutien à
l’activité et à l’emploi, sans écarter
toute autre forme d’aide (locatif
privé, accession) si l’on renforce
leurs contreparties sociales.
Un tel projet doit s’inscrire dans
une durée minimale de cinq ans,
pour permettre une montée en
puissance de la production, et viser à
résorber en quelques années le
déficit identifié par les experts de
plus de 600 000 logements sociaux.
Dans une note récente, l’OFCE (7)
montre qu’une relance de la
construction Hlm aurait, par rapport
à d’autres actions sur le logement,
des avantages en termes de
localisation, de loyers, de croissance
mais aussi en termes de coût pour la
collectivité.
Une réorientation des aides doit
donc s’envisager sans tarder, mais
une optimisation durable nécessite
d’améliorer les outils de pilotage, par
une meilleure connaissance des
besoins diversifiés des territoires
(voir chapitre suivant) mais
également par une évolution du
cadre de la Loi organique relative
aux lois de Finances (LOLF).
La LOLF devrait intégrer des
indicateurs relatifs à la dépense
des collectivités locales, et aux
transferts sur d’autres partenaires
(prélèvement sur le 1 % et les
organismes). Elle devrait comporter
une mesure des effets de levier de la
dépense, en termes d’activité et de
contreparties sociales ou
environnementale. Elle devrait
intégrer des indicateurs d’efficacité
de la dépense fiscale, retracer les
recettes fiscales apportées par le
secteur, comme d’éventuels effets
inflationnistes.
Ceci permettrait de mieux orienter
et proportionner les aides en
fonction de leur efficacité sociale
environnementale et économique,
d’opérer un pilotage dans la durée en
jouant sur la gamme des actions
possibles en fonction de la situation
sociale mais aussi économique, et de
prendre en compte le caractère
cyclique des marchés immobiliers.
Maîtriser les dépenses en
agissant sur les coûts de
production
Agir sur des coûts de production
est aujourd’hui un impératif
absolu : pour donner aux aides
publiques leur efficacité maximale
en évitant tout gaspillage et tout
effet inflationniste, et pour proposer
des prix de vente et des loyers plus
bas pour les ménages.
On le sait, la charge du logement s’est
aggravée pour les ménages, mais a
creusé aussi les inégalités : les
catégories supérieures gardent des
taux d’efforts modérés, les victimes
étant ceux qui ne disposent pas d’un
patrimoine, et ceux dont les revenus
sont modestes ou bas. Cela est dû à
l’érosion des revenus des catégories
qui sont touchées par la précarité, et à
la pénurie de logements compatibles
avec leur revenu. Ceux qui veulent
accéder à la propriété pour la
première fois subissent la
concurrence des ménages qui ont
déjà un bien à revendre, et sont moins
sensibles à l’effet prix. Sans compter
que certaines aides (crédit d’impôt
TEPA) ont favorisé les plus hauts
(7) 05/10/2011 - S. Levasseur - OFCE (Centre de recherche en économie de Sciences-Po) - Cherté du logement : le logement social est-il la
bonne solution ?
16 Le logement social pour la solidarité et la croissance
revenus. En dix ans, les prix de vente
ont augmenté de 135 % dans l’ancien
et ceux du neuf de 96 %, à comparer
avec une hausse générale des prix
d’environ 20 %.
L’usage de la réglementation à des
fins de régulation des marchés est
donc incontournable si l’on veut à la
fois renforcer l’offre à des prix
accessibles, et ménager les aides
publiques en agissant sur les coûts et
en évitant les effets inflationnistes.
LE PREMIER DOMAINE OÙ
DES MARGES DE PROGRÈS
EXISTENT EST LE FONCIER
tant la France est en retard sur son
approche de la question. En effet, la
collectivité, dont les efforts sont
souvent à l’origine de la valorisation
foncière (classement en zone
constructible, création
d’infrastructures de transports,
d’équipements culturels. sportifs etc.)
laisse aux propriétaires le bénéfice
entier de la valeur créée, allant
jusqu’à devoir « racheter » cette
valeur à travers le prix lorsqu’elle
acquiert le terrain ou subventionne la
surcharge foncière pour produire des
logements sociaux.
Ce véritable « enrichissement sans
cause » n’est pas indissolublement
lié au droit de propriété, comme le
montrent d’autres pays d’Europe
(Pays-Bas, Allemagne par ex) qui
gèrent mieux le foncier tout en
respectant la propriété privée. Et la
France elle-même n’a pas hésité à
mener des réformes hardies, face à
un impératif d’intérêt général,
nourrir la population :
remembrement rural, obligation
d’exploitation des terres agricoles.
L’impératif de loger les Français
exige aujourd’hui un même
volontarisme.
Beaucoup d’outils de régulation
existent, et ne demandent qu’à être
utilisés, quitte à faire l’objet
d’adaptations. Mais la culture de la
production foncière s’est effritée et
beaucoup d’acteurs publics et privés
ne sont plus formés à leur usage.
Cela rend indispensable
l’intervention d’opérateurs
puissants d’intérêt général, tels que
les Établissements publics fonciers,
qui regroupent les compétences
nécessaires, et dont la généralisation
serait utile. Mais cela ne doit pas
empêcher les collectivités
territoriales ni les organismes de
logement social de s’impliquer
davantage.
Les ZAD avec un prix des terrains
gelés permettent à la collectivité
d’anticiper un risque d’inflation
des prix et d’acheter à un prix
modéré. Les opérations
d’aménagement et les projets
urbains partenariaux (PUP),
permettent de mieux employer le
foncier. La fiscalité est un outil
intéressant, mais il faut savoir ce que
l’on vise : modérer les prix et
dissuader la rétention, ou
simplement mieux partager la plusvalue entre le propriétaire et la
collectivité. Le second objectif n’est
pas illégitime, mais ne permet pas
d’enrayer l’inflation.
La fiscalité doit en toute hypothèse
évoluer avec une révision des
valeurs locatives, et avec une
imposition des plus-values incitant
à mettre ou remettre sur le marché
des biens immobiliers, alors qu’elle
incite aujourd’hui au contraire à la
rétention. Elle peut aussi favoriser le
logement social, comme c’est le cas
pour l’exonération des plus-values
de cession pour le logement social,
qui était totale pour les personnes
physiques, et partielle pour les
entreprises. Ce dispositif était d’un
coût modeste, et a permis des baisses
de prix significatives, car n’étant
ouvert que pour deux ans, il incitait
les vendeurs à négocier le prix pour
en bénéficier. Il est souhaitable de le
remettre en œuvre pour une
nouvelle période de deux ans.
Un équivalent urbain de
l’obligation d’exploiter les terrains
agricoles peut aussi se faire par la
fiscalité. La taxe sur le foncier non
bâti pourrait être considérablement
renforcée dans les périmètres où un
besoin de construire est identifié.
Après un délai pour que le
propriétaire puisse construire ou
céder le terrain, elle pénaliserait la
rétention dans ces zones, pouvant
aller jusqu’au niveau de la TFPB sur
la valeur du bâti que le COS permet
de construire.
Les PLU offrent deux dispositifs
intéressants : les secteurs de mixité
sociale, qui imposent dans un
périmètre un quota défini par type
de logement (locatif social, accession
sociale), et les emplacements
réservés au logement social.
L’avantage de ces dispositifs outre
leur effet sur la mixité, est d’imposer
aux opérateurs un rétro-calcul
limitant la part du foncier à un
niveau compatible avec les prix de
sortie. Il pourrait être prévu que la
collectivité locale délibère, non plus
pour décider de tels secteurs, mais
pour décider de ne pas en faire. Et la
loi pourrait prévoir que toutes les
communes de la loi SRU établissent
sur leur territoire de tels dispositifs à
un niveau conforme à leurs objectifs
de production de logement social.
La loi SRU s’est en effet révélée un
puissant outil de mobilisation des
collectivités, et d’incitation à
l’action foncière. Il s’agit désormais
de garantir son application
complète, si nécessaire en renforçant
les sanctions, et notamment le
pouvoir de substitution des préfets
en matière de droit de préemption
urbain, ou en prévoyant l’accueil de
ménages à bas revenus dans le
secteur privé. Il est aussi souhaitable
de l’adapter à l’évolution des
besoins : pondération en faveur des
PLAI ou PLUS plutôt que des PLS,
augmentation du taux dans les zones
tendues, extension à de nouveaux
territoires où l’on observe une
croissance démographique soutenue.
Les politiques de l’habitat devant
s’envisager au niveau du bassin de
vie, et la compétence habitat étant
au niveau intercommunal, il est
aussi souhaitable que le PLU soit
élaboré à ce niveau, ou, à défaut que
le PLU soit conforme au PLH, et non
plus seulement compatible.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 17
On doit aussi chercher un progrès
dans un renouveau de
l’aménagement, notamment mais
pas seulement les ZAC, et le secteur
Hlm peut utiliser de nouveaux outils
tels que les PUP (projets urbains
partenariaux), ou d’autres qui
pourraient être mis en œuvre
(PUP renforcés, Secteurs de projet,
SCI de construction réunissant
des organismes Hlm et
des opérateurs privés).
La VEFA est une solution de
complément intéressante, dans les
situations où les organismes ne
peuvent accéder directement au
foncier. Elle a également permis
dans le cadre du plan de relance, de
maintenir l’activité et l’emploi dans
le bâtiment, grâce au rachat par les
organismes Hlm d’opérations
auxquelles les promoteurs
renonçaient au moment de la crise
des subprimes. Mais elle ne doit pas
être un prétexte pour écarter les
Hlm du foncier au motif que la
VEFA serait possible.
Enfin le foncier public doit être
davantage mis à la disposition de
l’offre de logements sociaux.
Aujourd’hui, l’immobilier de l’État
est géré et arbitré sous l’égide du
Ministère des finances. On peut
comprendre le souci de dégager des
recettes les plus élevées possibles
pour désendetter l’État, mais où est
l’intérêt de dégager ces recettes si de
l’autre côté on doit apporter plus de
subventions pour la surcharge
foncière ? Il serait souhaitable que
les choix s’opèrent en prenant en
compte les deux enjeux, ce qui
plaide pour une décision mieux
concertée, avec consultation des
acteurs de l’habitat.
FREINER L’INFLATION
NORMATIVE
Les normes de construction sont
nécessaires et utiles pour garantir la
sécurité et la qualité des logements,
ainsi que leur adaptation aux besoins
et aux attentes des ménages.
Mais la machine normative s’est
emballée, les normes techniques
sont largement initiées et écrites par
les industriels qui en viennent à
définir les besoins, le contrôle
politique fait défaut, quand il
n’aggrave pas le phénomène dans
une surenchère émotionnelle (un
accident = une nouvelle norme).
Le problème vient moins de
chaque norme prise séparément,
que de leur mise en cohérence.
Ainsi de la compatibilité des normes
thermiques et des normes antiincendie (problème des balcons
rapportés, de l’habillage bois) ou
celle les normes handicap, croisées
avec les normes thermiques et
d’étanchéité (balcons, portesfenêtres, siphons de douche) : la
compatibilité ne se résout qu’au prix
de surcoûts élevés. L’ensemble des
surcoûts dus aux législations
récentes, et notamment handicap et
réglementation thermique, peut
atteindre 20 %, et aboutit à un effet
d’éviction par le prix.
Sans compter des incompatibilités en
termes de qualité d’usage. Ainsi ces
mêmes normes handicap imposent
une largeur de couloir, des portes,
une taille des WC, etc., au détriment
des pièces à vivre, notamment des
chambres qui ne peuvent accueillir
un deuxième enfant.
Il paraît urgent de revisiter
l’empilement des normes et de
réfléchir, non seulement avec les
techniciens du bâtiment, mais avec
les maîtres d’ouvrage, les
représentants des usagers et des
élus, afin de chercher le meilleur
équilibre possible entre les
exigences normatives, les véritables
besoins des usagers, et bien entendu
les aspects économiques.
On doit aussi, comme le font d’autres
pays (Canada, Belgique) rechercher
des compromis entre normes
18 Le logement social pour la solidarité et la croissance
techniques et gestion de proximité.
Ainsi pourrait-on, par exemple,
déroger aux 100 % des logements
accessibles aux personnes en
fauteuil roulant, mais mieux assurer
par la gestion la disponibilité des
logements accessibles aux
demandeurs handicapés.
PESER SUR LES COÛTS
DE CONSTRUCTION
Au-delà des normes, ils intègrent
l’augmentation du prix des matières
premières en lien avec la demande
des pays émergents. Mais l’efficience
de la filière de production peut être
améliorée, qu’il s’agisse des grandes
entreprises ou des PME, des
entreprises générales ou
spécialisées. Les Entreprises
générales du bâtiment affirment
ainsi qu’une baisse de 20 % des coûts
de production est possible (maîtrise
du foncier compris).
Le secteur Hlm peut être un
puissant levier d’une stratégie
volontariste de baisse des coûts,
une véritable « locomotive de
progrès ». Il est dès à présent un
levier essentiel pour la constitution
de filières performantes dans le
domaine du développement durable
(bois, photovoltaïque…). Il a
participé au programme CQFD et
développe, à partir des résultats, des
formules de systèmes constructifs et
d’industrialisation ou semiindustrialisation.
À partir de l’expérience menée dans
le cadre d’opérations pilotes, il
souhaite développer la conceptionréalisation, ce qui suppose que le
système soit pérennisé au-delà du
terme prévu à la fin de 2013.
L’utilisation des accords-cadres
entre maître d’ouvrage, maître
d’œuvre et entreprises est une voie
importante, qui nécessite cependant
un apprentissage des acteurs et ne
peut être généralisée
immédiatement.
Une fidélisation des PME locales
peut permettre de renforcer leur
efficacité en ayant plus de visibilité
sur leur carnet de commande futur.
Mais cela passe également par la
visibilité de la maîtrise d’ouvrage et
exige donc, une fois de plus, une
programmation publique sur 5 ans.
Enfin les architectes peuvent jouer
un rôle important, en intégrant un
objectif économique en amont.
Nombre d’entre eux savent déjà le
faire, mais ce devrait être un thème
plus central de leur formation
initiale.
LE COÛT DU LOGEMENT
POUR LES MÉNAGES
Il peut être mieux maîtrisé par les
moyens évoqués plus haut, mais il est
nécessaire d’agir aussi sur les loyers
du parc existant.
Dans le parc social existant, la
question des taux d’efforts se pose
essentiellement pour les ménages à
faibles ressources, car le patrimoine
n’offre pas suffisamment de très bas
loyers pour répondre à cette demande
croissante, et qu’en outre ces bas
loyers se trouvent davantage dans un
patrimoine obsolète ou des quartiers
déjà paupérisés. Mais il n’y a pas lieu
d’agir sur tous les loyers Hlm, car
pour les représentants des classes
moyennes le taux d’effort est normal,
et les surloyers corrigent l’avantage de
ceux, peu nombreux, qui dépassent
les plafonds de ressources.
Certains envisagent de régler le
problème des bas revenus par des
loyers indexés sur les ressources.
Mais c’est le rôle des aides à la
personne d’assurer cette meilleure
adéquation, sauf à substituer, à la
solidarité nationale, une solidarité
entre locataires à revenus modestes.
Les expériences étrangères montrent
d’ailleurs les effets pervers,
notamment sur l’entretien du
patrimoine, des systèmes de loyers
fonction du revenu: à territoire
pauvre, insuffisance des recettes
d’exploitation, ou appel aux
subventions de fonctionnement…
Mais il faut néanmoins agir au
niveau des loyers qui dépassent les
plafonds des aides à la personne, et
qui sont souvent des PLA ou des
PLUS récents. L’affectation
privilégiée du produit des surloyers
sur une partie des logements pour les
ramener à un loyer compatible avec le
plafond des aides à la personne peut
avoir un effet analogue à celui d’une
aide à la pierre. Cette diminution
pourrait être effectuée pour une
période de 10 ans (durée moyenne de
séjour en Hlm) pour éviter de
maintenir sans limite un avantage à
des ménages dont la situation
s’améliore. Une telle action est déjà
pratiquée par certains organismes.
Pour les organismes dont la clientèle
est très largement constituée de
ménages à faibles revenus et n’ont
guère de surloyers, un allongement de
la durée du prêt permettrait de telles
baisses.
Le Mouvement Hlm doit aussi
répondre aux autres ménages qui ne
peuvent se loger dans les conditions
du marché, et offrir des parcours
résidentiels à ses locataires, en
accession ou en locatif intermédiaire.
Il faut pour cela envisager une
intervention plus importante des Hlm
dans le secteur intermédiaire, là où
celui-ci manque au point de pénaliser
les classes moyennes, les salariés et
les familles à revenus moyens, de plus
en plus rejetées hors des centresvilles.
Une intervention renforcée dans le
secteur intermédiaire pourrait
bénéficier de prêts du Livret A (si
nécessaire en relevant les plafonds de
ce livret, voire en remontant le taux
de centralisation). Les PLI sont
difficiles à équilibrer en zones très
tendues – c’est-à-dire là où ils ont leur
place – et ils nécessitent des moyens
complémentaires, par exemple sous
forme de foncier, ou de 1%. Cet appui
supplémentaire trouverait sa
contrepartie en Hlm par le contrôle
de la collectivité sur les plafonds de
ressources et de loyers, et par une
politique d’attribution privilégiant
l’accueil des salariés qui «font
fonctionner la ville» (salariés des
entreprises de services urbains, autres
salariés, infirmières, enseignants,
chercheurs, artistes…) et la sortie par
le haut des ménages logés en Hlm et
dont la situation s’améliore.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 19
Améliorer la gouvernance
pour soutenir la mobilisation
des acteurs
Les États Généraux du Logement,
qui réunissent 33 organisations
représentant les différents acteurs
de l’habitat ont démontré au niveau
national et territorial que la volonté
commune des acteurs permet de
dégager des propositions sur les
enjeux fondamentaux, et d’améliorer
la réponse aux besoins par une
meilleure chaîne d’acteurs
Il y a un consensus des acteurs de
l’habitat sur la responsabilité
essentielle de l’État, garant des
grands équilibres et de la solidarité
nationale, et qui doit retrouver son
rôle de stratège : il doit notamment
se réapproprier les enjeux du long et
très long terme, et relancer une
politique d’aménagement du
territoire dans laquelle le logement
serait traité comme un
investissement structurant.
Ces acteurs convergent également
sur la nécessité de reconnaître le
rôle des collectivités locales dans la
mise en œuvre des politiques de
l’habitat en tenant compte de la
diversité des besoins locaux. Ces
collectivités doivent pouvoir
s’organiser autour d’un chef de file
disposant des moyens nécessaires.
L’intercommunalité semble le
meilleur niveau, en cohérence avec
les bassins de vie, mais le rôle du
département peut s’imposer, en zone
rurale ou comme niveau de mise en
cohérence : il n’y a pas lieu d’imposer
une solution unique pour des
territoires différents.
Le dialogue État-Collectivité doit
pouvoir s’exprimer dans une
nouvelle approche des zonages, qui
ne répondent plus à la
diversification des besoins et
nécessitent des approches plus fines.
Des marges d’adaptation autour de
valeurs pivots devraient pouvoir être
dégagées de façon concertée entre
l’État local, les collectivités et les
opérateurs.
Ceci passe naturellement par une
meilleure connaissance des
marchés locaux et des besoins
réels, et par la constitution d’outils
d’évaluation des effets locaux des
politiques du logement.
C’est l’un des enjeux, mais aussi un
bon moyen de développer la
coopération des différents acteurs
locaux qui détiennent souvent des
informations, mais celles-ci sont
insuffisamment partagées. Ce n’est
pas un hasard si les États Généraux
en Région, et si le Réseau des acteurs
de l’habitat mettent souvent l’accent
sur les moyens de connaissance à
développer en commun. C’est une
condition d’efficacité de l’action,
mais aussi l’occasion d’un dialogue
et d’une acculturation commune
d’acteurs venant d’horizons
différents, ayant des intérêts parfois
concurrents, mais dont la
convergence des pratiques est
nécessaire. L’enjeu de la
connaissance n’est pas une question
simplement technique, mais un
objectif politique. Les services
fiscaux qui sont des sources
incontestables d’information doivent
y contribuer.
En coopération avec les pouvoirs
publics – collectivités et État local
– les organismes de logement
social peuvent apporter leurs
connaissances en amont des
politiques de l’habitat et leurs
compétences à leur mise en œuvre.
Ils peuvent coopérer entre eux et
avec les acteurs privés pour favoriser
un fonctionnement plus équilibré
des marchés, développer les
opérations mixtes.
La coopération des acteurs doit aussi
prendre en compte le rôle du monde
associatif, et bien entendu celui des
habitants eux-mêmes : on ne peut
envisager l’avenir des politiques
locales de l’habitat sans associer les
citoyens.
Mais au-delà du niveau local, la
nécessité d’un niveau de cohérence
plus large se fait sentir. Le niveau
régional paraît pertinent pour
croiser les objectifs locaux avec les
enjeux économiques, de transports,
de développement durable, et des
politiques en faveur des jeunes. À ce
niveau l’État est représenté, des
instances de concertation ou de
réflexion existent : CRH, CESER, et
le monde Hlm est organisé en
Associations régionales. On doit
donc envisager qu’à ce niveau puisse
être abordée la question des liens
activité-emploi-logement autour du
rôle d’Action-logement, la
mutualisation de certains moyens –
entre Hlm par exemple –, etc.
Les États Généraux du Logement
en Région ainsi que les réseaux
régionaux des acteurs de l’habitat
sont un bon point d’appui pour
développer de telles stratégies
concertées.
Au niveau local comme au niveau
régional, les acteurs publics et privés
doivent pouvoir innover et adapter
les dispositifs aux besoins : en
matière de zonage comme on l’a vu
mais aussi de priorités d’accès, de
mobilité, ou en matière de
contreparties sociales aux aides au
secteur privé et à l’accession.
Cette politique doit reposer sur une
plus grande confiance dans les
responsables politiques locaux et
dans les acteurs de l’habitat, avec un
développement de la
contractualisation et du contrôle a
posteriori. Ce qui suppose une
réforme parallèle de l’État local, qui
doit disposer des marges de
manœuvre pour négocier, et des
compétences stratégiques
nécessaires.
Les prérogatives ainsi confiées aux
responsables politiques locaux
doivent être exercées au bénéfice
du meilleur logement de nos
concitoyens, dans le respect des lois
de solidarité, en particulier en
direction des plus fragiles et de ceux
qui mobiles, peuvent être mal prises
en compte : l’État doit exercer
réellement son contrôle de légalité,
et pouvoir « reprendre les rênes »
aux collectivités gravement
défaillantes.
20 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Inscrire le logement
dans une dynamique
d’aménagement et
de développement
des territoires
Les territoires se transforment et se
différencient sous l’effet combiné des
dynamiques démographiques, des
mutations du système productif, des
transformations sociétales et des
nouveaux modes de vie : des besoins
en logements et en logements
sociaux sont constatés partout.
Or, la programmation du logement
social est aujourd’hui inscrite dans
un zonage territorial, élaboré pour
l’investissement locatif privé, qui ne
rend pas compte de cette diversité et
s’avère inadapté à la conduite d’une
politique publique qui nécessite une
vision de moyen et long terme.
La Bourgogne : des besoins de nature très différente selon
les territoires bourguignons
Les besoins en logements sociaux varient très largement selon les territoires
bourguignons, parfois jugés trop hâtivement homogènes dans leur ruralité et leur
évolution démographique. L’avenir du logement social est certes conditionné par
le devenir des villes qui ont accompagné l’histoire industrielle de la région et qui
constituent aujourd’hui autant de sites d’implantation des logements ouvriers, en
location ou en accession : depuis la fin du XXe siècle, cet essor ouvrier qui avait
porté, tant la dynamique démographique des territoires que le développement des
villes dans des espaces ruraux densément peuplés s’est tari au rythme de la
désindustrialisation et de l’exode rural. Aujourd’hui, la diversité des besoins en
logements des territoires bourguignons est réelle. Certains territoires urbains
désindustrialisés, ou ruraux en déclin démographique, doivent intégrer une logique
de décroissance de leur patrimoine locatif social parfois conjointement avec le
développement d’une accession sociale à la propriété. Tous sont percutés par les
évolutions sociétales, vieillissement, éclatement des familles, diffusion de
l’automobile et de la propriété, et ont engagé une requalification patrimoniale
intense, associant démolition-reconstruction, réhabilitation et lutte contre la
précarité énergétique. Mais ce pari ne pourra être tenu sans un projet fort de
développement porté par les collectivités et la Région. Les grandes aires urbaines
de la Région ont quant à elles à répondre aux besoins nouveaux des ménages et à
l’arrivée d’habitants à petits revenus.
Des situations territoriales
hétérogènes
L’Ile-de-France et Paris ; les
capitales régionales et les grands
pôles urbains dans lesquels le
logement social permet de disposer
d’une offre pour l’ensemble des
catégories qui ne peuvent se loger
sur le marché, mais, dont une part
présente des vulnérabilités urbaines
et sociales manifestes.
Les territoires dynamiques dans
lesquels le logement social est
historiquement peu présent : les
territoires du littoral qui connaissent
de fortes mutations, conséquences de
leur attractivité et de la
transformation de leur économie
(transformation de l’activité
portuaire, économie de flux,
développement touristique…), des
zones rurales qui connaissent un
développement économique et/ou
démographique rapide, des villes
moyennes ou petites connaissant un
renouveau économique, certaines
zones frontalières.
Des territoires frappés par des
mutations économiques et sociales
fortes : les anciens grands bassins
industriels, des villes moyennes qui
ont connu une histoire marquée par
Le logement social pour la solidarité et la croissance 21
la mono-industrie ; des petites villes
et des espaces à dominante rurale
affectés par les aléas de la politique
agricole commune ; des espaces
frontaliers affectés par la disparition
des frontières dans le cadre de
l’espace Schengen, dans lesquels
l’offre locative sociale doit être
renouvelée et adaptée.
Les régions et les collectivités
d’Outre-mer enfin qui cumulent des
handicaps structurels liés à l’insularité
et l’éloignement, un contexte
économique et social difficile, des
enjeux d’aménagement structurants,
la persistance de l’habitat insalubre
et des risques naturels récurrents.
Ces différences de dynamiques
territoriales entretiennent des
dynamiques de besoins très
différentes.
Des besoins en logement partout
mais des besoins différenciés y
compris à l’intérieur d’un même
territoire
Besoins liés à l’accroissement du
nombre de ménages par croissance
démographique, estimés à 170 000 à
180 000 logements par an (8).
Mais également, et tout autant,
besoins liés à la baisse de la taille
des ménages, en l’absence même de
croissance démographique, ce qui
signifie qu’un territoire en stagnation
démographique a également des
besoins liés à la croissance du
nombre de ménages : là aussi,
environ 180 000 logements par an.
Besoins liés à l’évolution de l’offre
existante au travers des changements
d’usage (transformation de logements
en locaux d’activité), des démolitions,
de la transformation de résidences
principales en résidences secondaires
dans les secteurs touristiques :
environ 75 000 logements
annuellement, dont 50 000 pour
compenser la démolition hors ANRU.
Nord-Pas-de-Calais : des besoins soutenus portés par le
renouvellement de l’offre et la diminution de la taille des ménages
La région Nord-Pas-de-Calais compte plus de 4 millions d’habitants, avec une
évolution annuelle moyenne de 0,1 % par an, portée très largement par le solde
naturel, avec un solde migratoire particulièrement défavorable chez les 25-29 ans.
Si la taille moyenne des ménages demeure plus importante que celle constatée
sur le reste de la France, elle a fortement diminué entre 1999 et 2008 (-0,84 % par
an), contribuant largement aux besoins en logements. Entre 2008 et 2020, il est
envisagé une croissance du nombre de ménages (et donc de résidences
principales) de l’ordre de 1,1 % par an, faisant passer les ménages de 1,6 million à
près de 1,8 million. Ainsi, malgré un faible dynamisme démographique, les besoins
en logements sont globalement importants sur la Région.
Par ailleurs, parmi les 23 % de logements sociaux que compte la Région, la
vacance est faible et majoritairement portée par la vacance technique, imputable
aux nombreux projets de renouvellement urbain de la Région, constituant
également un facteur important de besoins en logements.
Mais ce portrait recouvre des réalités très hétérogènes. En effet, sur les 15 zones
d’emplois que compte la Région, la part de logements sociaux varie, en 2008, de
8,7 % à 45 %. Par ailleurs, d’un point de vue de dynamique, les besoins en
logements et en particulier en logements sociaux identifiés, sont très variables.
Ainsi, sur l’ensemble de la Région, afin de répondre aux besoins, le taux de
logements sociaux pourrait aller d’un niveau inchangé pour certains territoires qui
accueillent d’ores et déjà un nombre important de logements sociaux (ce qui
nécessite cependant de produire en locatif social) à une hausse de 3 points de la
part de logements sociaux d’ici 2020 pour d’autres territoires dont la fonction
résidentielle a tendance à s’accentuer.
Mais les besoins sont également des
besoins qualitatifs : en termes de
prix qui constitue de plus en plus une
dimension essentielle de la réponse
aux besoins de nos concitoyens, de
confort, de localisation, de taille de
logement, de performance
énergétique, etc. Ces besoins ne
peuvent être satisfaits par la seule
croissance du nombre de logements
mais nécessitent une action sur
l’ensemble de l’offre existante,
publique et privée.
Il convient enfin de prendre en
considération les besoins liés aux
politiques de développement
territorial, qui entendent faire de
l’habitat un outil pour l’aménagement
durable du territoire, et ne pas
abandonner les secteurs déprimés
socialement et économiquement ;
renouveler l’offre, y compris dans les
marchés non tendus, afin de
revaloriser un centre-ville, un centrebourg, de lutter contre l’habitat
(8) Estimations présentées par Guy Taieb, économiste, dans le dossier
« Territoires et besoins en logement » de la revue Habitat et société, juin 2011.
indigne et plus largement le « mal
logement » ; créer une offre locative
dans les marchés où elle est peu
présente ou proposer une offre
d’accession sociale à la propriété là où
les ménages modestes, et notamment
les jeunes ménages ne peuvent plus
accéder à la propriété ; lutter contre la
ségrégation territoriale en diversifiant
l’offre dans les quartiers sensibles et
en reconstituant une offre mixte dans
le centre-ville…
22 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Des réponses différentes à
apporter en matière de
logement, notamment social
parc existant, de ses besoins en
réhabilitation ou en
renouvellement doit constituer une
dimension fondamentale des
politiques publiques du logement.
Environ 26 millions de nos
concitoyens n’ont pas accès au
logement social sur leurs territoires,
alors même que globalement, depuis
10 ans, la part relative du logement
social dans les résidences principales
régresse ou au mieux s’érode
légèrement, selon les sources.
Les pistes d’action souhaitables
En effet, 90 % des logements sociaux
sont concentrés dans un peu plus de
2 000 communes, regroupant 60 % de
la population.
L’action du Mouvement Hlm et des
politiques publiques volontaristes
sont donc nécessaires si l’on veut
infléchir la tendance et répondre
véritablement à l’ensemble des
besoins. Ceux-ci appellent la
production de nouveaux logements
sociaux, en locatif et en accession,
avec des objectifs quantitatifs et
qualitatifs, notamment en termes de
prix.
Mais la production neuve
représentant dans le meilleur des cas
1 % de l’offre existante, et 80 % des
logements de 2030 étant déjà
construits, la prise en compte du
Développer un volume de
production de logements sociaux
suffisant pour faire face aux
nouveaux besoins tant en locatif qu’en
accession sociale à la propriété, mais
également renouveler et adapter
l’offre sociale existante, dans le cadre
des politiques territoriales de l’habitat
élaborées sous la responsabilité des
collectivités territoriales et en
collaboration avec les services de
l’État.
Permettre aux acteurs des
territoires d’adapter les règles
nationales, notamment en matière
de zonages, qu’il s’agisse du zonage
régissant les paramètres du logement
social (plafonds de prix ou de loyers,
plafonds de ressources…) ou servant
à la territorialisation des politiques
de l’État en matière de construction
neuve (type zonage Scellier) de
manière concertée entre l’État local,
Midi-Pyrénées : des besoins en logements sociaux variables selon
les territoires mais importants dans une région attractive
La région Midi-Pyrénées fait partie des régions ayant connu les plus forts taux de
construction neuve en France dans la dernière décennie, en particulier en HauteGaronne. Mais les huit départements qui la composent sont très diversement
engagés dans cette dynamique résidentielle, alors que le parc social reste
globalement peu présent (moins de 9 % des résidences principales).
L’explosion démographique de l’aire urbaine toulousaine nécessite une production
soutenue de logements, notamment sociaux pour répondre aux besoins des
nouveaux ménages.
Mais cela ne saurait masquer les dynamiques qui animent les autres territoires
Midi-Pyrénéens. Une forte attractivité, certes plus mesurée que celle de Toulouse,
caractérise plusieurs autres territoires. Parfois, il s’agit du renforcement d’une
dynamique touristique accompagnée ou pas d’un profil démographique
vieillissant. Parfois, l’attraction s’exerce aussi auprès de familles qui s’éloignent de
l’aire toulousaine pour augmenter leur pouvoir d’achat logement. Ailleurs, la
recomposition de la fonction économique de territoires ruraux ou monoindustriels appelle une réponse spécifique à même d’éviter au parc social existant
de se déqualifier. Pour d’autres villes enfin, les enjeux sont de consolider une
armature urbaine secondaire, animée par leur pôle d’équilibre, grâce à un
renforcement de l’attractivité du parc social.
les collectivités et les organismes
Hlm au sein de leurs Associations
régionales.
Améliorer la connaissance des
besoins en logement dans et par
les territoires. L’État rencontre des
difficultés grandissantes à
territorialiser la politique du
logement. Cela nécessite une rupture
dans la logique qui a prévalu jusqu’à
présent, pour ancrer territorialement
l’approche des besoins en logement,
afin de produire une connaissance
pouvant bénéficier tant aux
politiques locales que nationales. Ce
qui implique que les acteurs des
politiques publiques (État,
collectivités territoriales, organismes
Hlm au sein de leurs associations
régionales) développent une
connaissance partagée des besoins.
Tenir compte de l’interdépendance
des différents segments du marché.
Cette connaissance ne doit pas être
cloisonnée mais elle doit permette
d’inscrire résolument la réflexion sur
les besoins en logement sociaux dans
celle sur les besoins en général. Cette
réflexion sur les besoins doit
également reposer sur une
observation de l’offre existante,
trop souvent négligée, de ses
caractéristiques, de son évolution et
de ses capacités d’adaptation. Enfin,
l’évaluation territorialisée des
besoins doit être inscrite dans une
approche prospective des
dynamiques des territoires.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 23
L’Ile-de-France et l’Outre-Mer :
deux situations d’exception qui
appellent des réponses
spécifiques
LA RÉGION ILE-DE-FRANCE
présente des caractéristiques bien
spécifiques. Sur moins de 3 % du
territoire national, elle loge près 19 %
de la population française (soit
environ 12 millions d’habitants) pour
seulement 10 % de la construction
totale de logements. Elle représente
près de 30 % du PIB national et 22 %
des revenus des ménages, mais en
dépit d’un secteur social important
(plus de 1 200 000 logements locatifs
sociaux, 140 organismes Hlm, 24 000
salariés et 4 milliards d’euros
d’investissements en production de
logements sociaux), elle recense près
de 400 000 demandeurs de logement
social et 65 % de la demande nationale
DALO.
Ces particularités sont le fruit de
l’histoire politique et administrative
française, ainsi que de du statut de
région capitale. Une forte attractivité,
un contexte institutionnel très
morcelé et en évolution, des
compétences éclatées en matière
d’urbanisme et d’habitat, une
gouvernance politique et de grands
projets encore en devenir (Paris
métropole, Grand Paris (9)), en font,
pour ce qui concerne notamment la
politique du logement, le prototype
même d’un territoire tendu.
Phénomène aggravé par la répartition
inégale du parc Hlm sur l’espace
régional avec des concentrations
fortes sur des territoires très
spécialisés, un foncier insuffisamment
mobilisé et des besoins en rénovation
urbaine très importants.
Malgré ces handicaps, l’activité de
production de logements sociaux est
en augmentation significative depuis
plusieurs années. Les organismes
Hlm franciliens ont lancé entre 2005
et 2010 près de 106 000 logements
sociaux et restent très mobilisés pour
contribuer à l’essor économique et
social de la région. Ils concourent
ainsi non seulement au quart de la
production nationale de logements
sociaux mais aussi, bon an mal an, à
30 ou 40 % de la construction neuve
totale en Ile-de-France.
Au-delà de ces chiffres et de
réalisations remarquables, en relation
avec les collectivités locales et
l’ANRU, en matière de
renouvellement urbain, de
désenclavement de nombreux
quartiers populaires, voire aussi de
recherche architecturale novatrice,
les organismes Hlm sont fortement
confrontés à un délitement du tissu
social particulièrement sensible, à la
persistance de « ghettos » urbains et
au creusement d’inégalités entre villes
et à l’intérieur même de nombre
d’entre elles.
Leurs efforts les conduisent donc à la
recherche permanente d’innovations
en matière urbaine et sociale, au
développement d’une offre très
diversifiée de logements permettant
de répondre au plus près tant à
l’accroissement de la demande en
provenance de personnes de plus en
plus paupérisées mais aussi d’une
classe moyenne qui peine chaque jour
davantage à se loger aux conditions
du marché immobilier et qui est
contrainte de s’éloigner de plus en
plus des cœurs des villes, renforçant
ainsi l’encombrement des systèmes de
transports avec ce que cela comporte
d’atteintes à l’environnement naturel
et spatial.
(9) Le « Grand Paris » dépasse de loin la simple problématique des réseaux de transports. Il concerne la géographie urbaine, sociale et
économique du bassin parisien au sens extensif du terme. Visant à susciter un développement économique et urbain structuré défini et
réalisé conjointement par l’État et les collectivités territoriales, il prévoit des contrats de développement territorial (CDT) entre l’État et
les communes ou EPCI, dont le territoire est compris dans un des grands territoires stratégiques de l’Ile-de-France et notamment autour
des gares du réseau Grand Paris-Express. Chaque contrat définit un projet stratégique de développement durable du territoire avec des
objectifs aux priorités affirmées, notamment en matière d’urbanisme, de logement, de lutte contre l’étalement urbain. Ils participent à
l’objectif de construire chaque année 70 000 logements géographiquement et socialement adaptés en Ile-de-France.
24 Le logement social pour la solidarité et la croissance
OUTRE-MER : ACTUALITÉ ET
ENJEUX DE LA CRISE
DU LOGEMENT
Dans un contexte économique et
social particulièrement difficile,
l’intensité de la crise en Outre-mer
reste dans les régions de La Réunion,
de la Guadeloupe, de la Martinique,
de la Guyane, de Mayotte et des
collectivités d’Outre-mer comme la
Polynésie ou la Nouvelle-Calédonie
notamment, une préoccupation
majeure des collectivités locales et
des organismes de logement social.
Ici, probablement encore plus
qu’ailleurs, l’accès à un logement
décent revêt un enjeu de cohésion et
de justice sociale de premier plan.
Les cadres législatif, réglementaire et
surtout du financement du logement
social dans les départements et
régions d’Outre-mer (avec la Ligne
Budgétaire Unique, LBU) et dont le
ministère de l’Outre-mer détient la
compétence, ont connu ces dernières
années de fortes évolutions.
Celles-ci ont rendu plus complexe
l’acte de construire avec une
évolution de la réglementation de la
construction pas toujours adaptée à
ces territoires, des dispositions
législatives fortement contraintes par
l’insuffisance des moyens
mobilisables (traitement de l’habitat
insalubre, droit au logement
opposable dans un contexte de forte
pénurie…) ou encore plus récemment
la réorientation de la défiscalisation
vers le logement social.
Des besoins élevés, une offre rare et
chère… Avec une population totale de
près de 2,7 millions d’habitants, les
besoins sont estimés à 100 000
logements sur l’ensemble de l’Outremer. 80 % des ménages ultra-marins
sont éligibles au logement social, avec
des revenus en moyenne de moitié
inférieurs aux revenus des ménages
métropolitains, des taux de chômage
records de 22 à 30 % dans la plupart
de ces régions et un taux de chômage
des jeunes avoisinant 60 %, contre
23 % en métropole.
La production globale de logements a
connu une forte contraction malgré la
relance de la construction de
logements sociaux engagée ces deux
dernières années par les organismes
de logement social avec l’appui des
plans locaux de relance à l’initiative
des collectivités locales.
La faiblesse des moyens disponibles
pour la lutte contre l’habitat
insalubre, les difficultés liées à
l’équilibre des opérations, aux
procédures du Logement Évolutif
Pour un « Plan logement » adapté à l’Outre-mer
L’ampleur des besoins, la persistance de l’habitat insalubre et la prégnance des
risques naturels rendent indispensable la mise en œuvre d’un plan pluri annuel
concerté entre les organismes, l’État et les collectivités locales et adapté à chaque
région et collectivité ultra-marine :
• La politique sociale du logement Outre-mer doit rester une priorité de la
solidarité nationale, avec une Ligne Budgétaire Unique confortée comme socle
de son financement.
• La mobilisation des aides de l’État doit faire l’objet d’une meilleure prise en
compte des taux d’effort des ménages de manière à préserver leur pouvoir
d’achat et d’une mise en perspective des parcours résidentiels : locatif social et
intermédiaire, accession, logement des jeunes et des seniors...
• Les réalités environnementales et les enjeux de développement durable doivent
pouvoir se traduire dans une réglementation technique de la construction qui
reste aujourd’hui peu adaptée, coûteuse et complexe.
Social (LES) et à la mobilisation du
PTZ+, et enfin l’absence d’un produit
d’accession sociale adapté à ces
territoires, ont contribué sans
conteste à la faiblesse d’une offre
diversifiée et à la panne des parcours
résidentiels.
Ces fortes contraintes sur le secteur
du logement social, aggravées par la
faible disponibilité de terrains
constructibles à des prix compatibles
avec l’équilibre des opérations, ont
été à la source de prix de revient
élevés ne permettant pas des taux
d’effort compatibles avec les
ressources des ménages à loger.
Remettre en perspective la politique
sociale du logement Outre-mer.
Plus globalement, dans des régions
marquées par la faiblesse des
politiques foncière et d’aménagement
urbain, avec des contraintes liées aux
risques naturels, l’urgence de
développement d’une offre plus
diversifiée et une meilleure
anticipation des besoins actuels et
futurs des territoires ultra-marins est
indispensable… Si la LBU doit rester
le socle du financement du logement
social, la politique du logement Outremer doit pouvoir être posée dans des
termes actualisés afin de mieux
prendre en compte les dynamiques
territoriales différenciées. Cette
politique du logement doit faire l’objet
d’une meilleure concertation au plan
local, à l’aune d’un état des lieux
actualisé pour que soit adapté,
simplifié et mis en œuvre le légitime
accès à un logement décent des
habitants de l’Outre-mer.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 25
Une mission sociale
élargie, des exigences
nouvelles
Des difficultés croissantes pour
se loger pour une part
importante des ménages
La hausse des dépenses de logement
est une tendance lourde. Les prix de
l’immobilier ont été multipliés par
2,5 depuis 1998. Les loyers du parc
privé ont connu une augmentation
plus modérée en moyenne nationale
mais avec de fortes disparités
territoriales. Les loyers parisiens ont
doublé en 20 ans pour dépasser
23 euros/m2/mois. Les revenus des
ménages n’ayant pas suivi la même
progression, le taux d’effort pour se
loger a augmenté, cette hausse
touchant plus fortement les deux
premiers quintiles de revenus. Dans
les zones les plus tendues, le parc
locatif privé ainsi que l’accession à la
propriété sont inaccessibles ou
demandent un taux d’effort
difficilement soutenable pour la
majeure partie de la population.
Face à ce coût trop élevé et faute
d’un nombre de logements sociaux
suffisant pour accueillir à la fois les
ménages à revenus simplement
modestes et les ménages pauvres qui
sont prioritaires, une large part des
classes moyennes ne peut se loger à
des conditions acceptables dans les
villes chères et doit s’exiler en
périphérie de plus en plus lointaine.
Un parc social qui a pour
vocation de répondre à tous
ceux qui ne peuvent se loger
aux conditions du marché
De par la loi, le logement social a
pour fonction de loger à un prix
modéré tous ceux qui ne peuvent y
parvenir par le simple jeu du
marché. C’est pourquoi les plafonds
de ressources prévus par la loi
permettent, en théorie, à 64 % de la
population d’y prétendre (soit
2 050 euros par mois pour une
personne seule à Paris), mais cette
proportion est ramenée à 33 % si on
exclut les ménages propriétaires de
leur logement. Dans l’esprit de la
législation, le parc Hlm s’adresse
donc à une population à revenus
modérés, mais pas exclusivement à
sa composante la plus pauvre.
Les constructions des années 19501960 répondaient à l’impératif de
loger une population croissante et
diversifiée : employés, ouvriers,
familles rapatriées, migrants venus
du monde rural ou d’ailleurs,
retraités, jeunes ménages,
fonctionnaires… Les reportages de
l’époque rappellent l’espoir suscité
par ces Hlm, synonymes de confort,
d’espace et de modernité. Depuis, le
secteur Hlm a profondément évolué
mais l’ambition de mixité sociale et
d’équilibre des quartiers et des
immeubles reste intacte.
Aujourd’hui, de par la hausse du
coût des logements sur le marché
conjuguée à une augmentation des
inégalités dans un contexte de crise
économique, le logement social
correspond toujours aux besoins
d’une large part de la population.
Le logement social est désormais
envisagé à la fois comme un
logement pérenne, une solution
d’accueil pour les nouveaux ménages
jeunes ou arrivant sur le territoire,
mais aussi comme un recours face
aux aléas de la vie (veuvage, perte
d’emploi, divorce…).
26 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Jeunes : un défi pour le logement social
Particulièrement touchées par la montée de la précarité de l’emploi et la pénurie de logements à loyers abordables, les jeunes
générations cumulent les difficultés pour accéder à un logement autonome, qui conditionne pourtant largement leur
intégration sociale et professionnelle. Si la situation des jeunes est hétérogène (stagiaires, étudiants, jeunes en formation
professionnelle ou en alternance, salariés, chômeurs, jeunes chassés du domicile familial, etc.), ils ont en commun d’avoir des
ressources et un statut précaires, de connaître une forte mobilité aussi bien géopgraphique que sociale, voire de susciter la
méfiance des bailleurs. Les conditions d’accès et le coût des logements du parc locatif privé sont de plus en plus inadaptés
aux ressources des jeunes. Le taux d’effort net des jeunes locataires du secteur libre atteignait en moyenne 20 % en 2002,
mais l’augmentation de la charge brute et la diminution des revenus conduisent aujourd’hui à des taux d’effort net de l’ordre
de 40 % dans le parc locatif privé. Dans le même temps, la part des ménages de moins de 30 ans locataires dans le parc social a
diminué de moitié en vingt ans. Particulièrement en zones tendues, qui concentrent une partie des lieux d’étude, de
formation et d’emploi, nombre d’organismes Hlm peinent à accueillir les jeunes ménages, qui ne sont pas ciblés dans les
catégories prioritaires. La forte baisse de la proportion du parc social occupée par des jeunes ménages est aussi liée à la baisse
du taux de rotation et au vieillissement de la population logée. Conscients que l’accueil des jeunes dans le parc locatif social
représente non seulement un enjeu de mixité sociale, mais également un devoir de loger les nouveaux ménages, les
organismes Hlm se mobilisent en faveur du développement d’une offre de logements répondant à leurs besoins (petits
logements bien desservis ou à proximité des centres, offre spécifique comme des résidences universitaires et foyers de jeunes
travailleurs), de formules locatives plus adaptées (location directe en meublé, colocation…), et de partenariats renforcés sur les
territoires, notamment avec les associations pratiquant l’intermédiation locative. C’est un thème de travail très important
pour le monde Hlm, mais aussi pour les États Généraux du Logement, à travers leurs travaux nationaux et en régions.
Cette sécurisation vaut aussi dans le
cadre de l’accession sociale sécurisée
à la propriété, qui aide les ménages
sous plafonds de ressources à
acquérir un logement à prix maîtrisé
et qui bénéficient de nombreuses
garanties. Le Mouvement Hlm doit
absolument continuer à être un outil
de progrès social et de sécurité dans
une société dans laquelle la stabilité
de l’emploi et des revenus est
incertaine.
Un accueil croissant de ménages
en situation précaire
Depuis près de 40 ans, le parc Hlm
joue un rôle croissant d’accueil de
ménages à faibles revenus et pauvres.
En 1973, 12 % des ménages locataires
Hlm appartenaient au quart de la
population aux plus faibles
ressources (10) ; en 2006, cette
proportion est passée à plus de 40 %.
Dans certaines zones, la disparition
très rapide d’un parc locatif privé à
bas loyers provoque une grave crise
du logement abordable. Les
nouveaux entrants sont plus fragiles
économiquement, à cause de la
(10) En intégrant les aides au logement.
précarisation du travail, de la baisse
de revenus d’une partie importante
de la population (retraites, emplois à
temps partiel), et de l’accroissement
du nombre de familles
monoparentales. Ces tendances sont
renforcées par le départ des
locataires Hlm appartenant au quart
le plus élevé des revenus, soit vers
l’accession à la propriété, soit par
l’effet du surloyer imposé aux
ménages.
Depuis 2008, de nouvelles demandes
au titre de la loi sur le Droit au
logement opposable (DALO) sont
apparues : ce dispositif oblige l’État à
reloger les demandeurs considérés,
par recours, comme des populations
prioritaires. Il le fait presque
exclusivement dans le parc locatif
social, ce qui augmente
nécessairement la pression sur le parc
Hlm. C’est particulièrement vrai en
Ile-de-France où s’exercent 65 % des
recours. À partir du 1er janvier 2012, le
DALO sera ouvert à tous les
demandeurs de logement social dont
l’attente dépasse un délai fixé
localement. Ceci pourrait se traduire
par une augmentation du nombre des
recours, notamment en Ile-de- France
et dans les grandes agglomérations.
La politique dite du « Logement
d’abord » initiée en 2009 par l’État
conforte cette tendance : l’objectif est
de privilégier l’accès direct au
logement, sans passage obligatoire
par l’hébergement des ménages
proches de l’autonomie comme des
plus vulnérables. Là encore, le parc
social est le principal outil mobilisé
par l’État. La mise en œuvre de cette
politique nécessite le développement
d’une offre diversifiée adaptée aux
besoins et notamment d’un parc de
logements d’insertion, de pensions
de famille et de logements-foyer.
Des moyens de solvabilisation et
d’accompagnement social
conséquents, le cas échéant
pluridisciplinaires, sont également
nécessaires. La mise en œuvre de
cette politique connaît des difficultés
liées pour partie à l’augmentation
des sans-abri et des besoins
d’hébergement, ainsi qu’à des
difficultés dans le pilotage de
cette réforme.
À travers ces évolutions, se trouve
réinterrogée la question de la mixité
et du « vivre-ensemble » dans le parc
social. Pour le Mouvement Hlm, il
s’agit de préserver les acquis des
opérations de rénovation urbaine en
Le logement social pour la solidarité et la croissance 27
matière de diversification sociale et
d’éviter de renforcer les
concentrations de difficultés dans les
quartiers en zones urbaines sensibles
par la mise en œuvre de politiques
d’attributions fines. Il s’agit
également d’organiser l’accueil des
nouveaux entrants, y compris les
plus fragiles, dans des ensembles
immobiliers bien localisés et dans
des environnements sociaux
favorables.
L’accès au logement des
personnes vulnérables sur
les territoires : revoir
la gouvernance des dispositifs
locaux
L’accès au logement des ménages
défavorisés sur les territoires fait
aujourd’hui l’objet d’une
superposition de dispositifs qui se
sont accumulés, depuis la loi Besson
du 31 mai 1990, en fonction des
politiques publiques et pour répondre
à l’accroissement des ménages en
difficulté de logement. Le
fonctionnement de ces politiques
connaît également un déficit de
partenariat entre l’État et les
collectivités territoriales : ceci rompt
avec l’esprit de la loi Besson car la
lisibilité des priorités sur les
territoires fait défaut, ainsi que la
cohérence des politiques et des
moyens. L’État a des difficultés à faire
fonctionner les dispositifs qui relèvent
de sa responsabilité propre, qu’il
s’agisse des « Services intégrés
d’accueil et d’orientation » mis en
place pour le Logement d’abord, ou
des nouvelles Commissions de
coordination de prévention des
expulsions (CCAPEX). Ces
dispositifs, à l’origine tournés vers le
parc privé et le parc public, visent
aujourd’hui essentiellement l’accès au
logement social par le biais d’une
multiplicité de filières et de
procédures qui tendent à se rigidifier
(réactivation du contingent
préfectoral, accords collectifs
d’attributions, contingent Action
logement dédié au DALO…). Leur bon
fonctionnement nécessiterait une
gouvernance renouvelée entre l’État,
les collectivités locales et les
opérateurs – bailleurs sociaux,
associations –, en fonction des
compétences et responsabilités de
chacun en matière d’hébergement, de
logement et de politiques sociales.
L’élargissement du cœur
de métier des organismes et
le renforcement de la gestion
sociale
Évolutions économiques et
sociétales, marchés immobiliers en
crise, politiques publiques renforcent
le rôle des organismes d’Hlm vis-àvis de demandeurs ou de locataires
dans des situations, ponctuelles ou
persistantes, de précarité sociale,
familiale et économique et parfois de
dépendance ou de souffrance
« psycho-sociale ».
Le modèle qui prévalait d’un
parcours de vie linéaire : plein emploi
avec une progression salariale
régulière pour le travailleur, parcours
résidentiel ascendant de la location
(notamment dans le parc social) à
l’accession à la propriété est
aujourd’hui en panne. À cette
régularité succèdent désormais des
parcours de vie heurtés, rythmés par
des ruptures fréquentes, dans
l’emploi ou le cadre familial et dans
les itinéraires résidentiels.
Le logement social devient un
élément essentiel de sécurisation
pour des ménages isolés ou fragiles
28 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Des politiques d’attribution pour permettre l’égalité de traitement
La procédure, de l’enregistrement de la demande à la tenue de la Commission d’attribution des logements (CAL), associe les
bailleurs sociaux et différents acteurs disposant de droits de réservation sur les logements (maires, préfectures, CIL - comités
interprofessionnels du logement). Elle fait l’objet d’un encadrement législatif et réglementaire. Le manque de logements
impose des arbitrages permanents, effectués de façon collégiale.
Les conditions d’accès fixées par la loi sont la nationalité française ou, pour les personnes étrangères, un titre de séjour
régulier, des conditions de ressources et l’obligation de ne pas être propriétaire d’un logement adapté à ses besoins. Par
ailleurs, cinq publics sont définis comme prioritaires : les personnes en situation de handicap, les mal-logés et/ou défavorisés,
les personnes hébergées temporairement, les personnes mal-logées reprenant une activité après une période de chômage de
longue durée, les victimes de violence conjugale. De plus, depuis 2007, le dispositif DALO (Droit au logement opposable) fixe
à l’État une obligation de résultats en matière de logement. Ces demandeurs sont considérés « ultra-prioritaires » et les
organismes doivent loger les candidats désignés par les préfets. Dans ce contexte normé et contraint, les bailleurs doivent
aussi être en permanence attentifs à la mixité sociale des villes et des quartiers.
Pour la mise en œuvre de ces règles et priorités, les organismes définissent des orientations d’attribution, élaborent un
règlement intérieur de leur commission d’attribution. Ils formalisent également des procédures pour favoriser l’égalité de
traitement.
Par ailleurs, ils sont engagés dans des démarches visant à :
• Mieux informer les demandeurs : leurs sites internet présentent le plus souvent les conditions et règles d’attribution des
logements et comportent fréquemment des informations sur leur patrimoine. Certains organismes informent par internet
sur les logements disponibles (lorsqu’ils ne sont pas réservés).
• Simplifier les procédures de demande grâce au formulaire unique d’enregistrement, à une liste nationale de demandes, à la
limitation des pièces à fournir et à l’enregistrement sur Internet.
• Améliorer la transparence par le biais d’une gestion partagée de la demande, associant le plus souvent les réservataires et le
bailleur (un seul dossier pour un traitement plus égalitaire entre demandeurs et une meilleure répartition entre les
opérateurs et les territoires).
• Objectiver le choix du candidat par des méthodes de priorisation de la demande. Appelées à se développer, elles ne
remplacent pas l’analyse qualitative puis le choix collégial en dernière instance.
• Mettre en place une politique visant à favoriser les mutations pour rechercher une meilleure adaptation des logements à la
taille et aux revenus des familles.
face à un marché du travail incertain
et à un marché immobilier sélectif.
Pour les bailleurs sociaux, il s’agit
d’organiser leurs interventions de
manière à ce que le ménage ne
bascule pas, à la moindre rupture,
d’une situation de fragilité à celle de
l’exclusion. La crise actuelle renforce
encore ces préoccupations. Le cœur
de métier des organismes d’Hlm,
produire et gérer un patrimoine et
les rapports locatifs qui y sont
attachés, s’adapte et s’élargit afin de
prendre en compte en temps réel les
difficultés de leurs locataires et
demandeurs confrontés à la perte
d’emploi, à la baisse de leur niveau de
vie et aux difficultés de la vie
quotidienne.
Les organismes renforcent leurs
capacités d’anticipation et de
prévention des difficultés locatives
par une veille et un suivi des
ménages vulnérables, des réponses
plus réactives, individualisées et
adaptées à la diversité des situations
des locataires ou demandeurs, qu’ils
soient jeunes, âgés, handicapés, avec
des problèmes de santé ou
simplement en difficulté sociale.
La prévention des impayés et des
expulsions est un enjeu central de
cette gestion, dans un contexte où les
dépenses de logement représentent
aujourd’hui une part très importante
des revenus des ménages compte
tenu d’une insuffisante évolution de
l’APL et de l’augmentation des
charges connexes – chauffage, eau
chaude, éclairage – corrélative à celle
des coûts de l’énergie. Cette gestion
fine est complexifiée par les
phénomènes de surendettement dont
sont victimes les locataires qui
souscrivent des crédits pour faire face
aux charges de la vie quotidienne, et
qui ne disposent pas ou peu de
capacités de remboursement.
Les organismes organisent les
itinéraires résidentiels au sein du
parc social de ménages qui n’ont pas
la capacité de le quitter, soit pour des
raisons d’absence d’offre abordable,
soit en raison de la précarité de leur
situation. Ils intègrent des objectifs de
mutation interne dans leurs politiques
d’attribution et accompagnent des
mouvements locatifs favorisant une
meilleure adéquation du logement à la
situation des ménages, qu’il s’agisse
du niveau de la quittance, de sa taille,
ou de son confort. Ils sont à l’origine
d’expérimentation de bourses
d’échange du logement sur internet,
qui sous leur contrôle facilitent les
mutations à l’initiative des locataires.
Ces itinéraires au sein du parc sont
également facilités par les fichiers
partagés de la demande qui
permettent la prise en compte par
l’ensemble des bailleurs sociaux des
demandes de changement de
logement exprimées par les locataires.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 29
Des partenariats à renforcer
sur les territoires
Apporter des réponses aux ménages
vulnérables ne peut reposer sur le
seul bailleur social qui doit s’appuyer
sur les compétences spécialisées
présentes sur un territoire ou les
susciter si nécessaire.
Les organismes jouent un rôle
essentiel de repérage des situations,
d’interpellation des dispositifs et
partenaires compétents et parfois
même de coordination des
interventions pour permettre l’accès
et le maintien dans le logement :
acteurs des secteurs social et
médico-social (services
départementaux d’action sociale,
coordinations gérontologiques,
maisons départementales des
personnes handicapées), du milieu
sanitaire (centres médicopsychologiques), de l’insertion. Ils se
rapprochent des conseils généraux
en charge des politiques sociales et
du FSL.
Le renforcement du partenariat
avec les associations est
indispensable pour permettre
l’accueil dans de bonnes conditions
de publics fragilisés : diagnostic
partagé sur les sorties d’hébergement
vers le logement, développement du
bail glissant, propositions communes
pour la mise en œuvre des SIAO,
appui aux associations qui
contribuent à l’accompagnement
social, développement de formules
de logement accompagné (type
résidences sociales, maisons relais
etc.). D’ores et déjà, les associations
et les organismes Hlm mènent
ensemble de nombreuses actions
ayant permis de reloger 19 000
ménages sortant de centres
d’hébergement et de réinsertion
sociale en 2010.
Personnes âgées : l’enjeu du maintien à domicile
Elles représentent une part non négligeable des locataires du parc social (environ
25 %). Il s’agit souvent d’anciens locataires, parfois présents depuis l’origine de
l’immeuble, qui sont fréquemment concentrés dans les ensembles immobiliers
anciens et bien localisés. Leur proportion devrait s’accroître rapidement sous le
double effet du vieillissement des locataires en place et d’une demande de
personnes âgées modestes ou défavorisées, souhaitant un logement moins cher
et/ou plus fonctionnel au moment du passage à la retraite. Ces ménages devraient
être touchés par des phénomènes de pauvreté, liés à l’évolution des retraites, et à
l’augmentation des ménages composés d’une seule personne.
Les bailleurs sociaux deviennent un acteur important du maintien à domicile
notamment des ménages à bas et très bas revenus. D’ores et déjà, ils améliorent le
confort de leur parc, développent des produits nouveaux adaptés à la diversité des
besoins des personnes âgées, dans un souci de maîtrise des coûts pour les
locataires. Ils adaptent leur gestion à leurs locataires âgés, ce qui constitue leur
valeur ajoutée par rapport au parc locatif privé. Ils s’impliquent également dans la
mise en place de services à la personne en lien avec les partenaires (11).
La question de la prévention des
impayés et des expulsions appelle
une attention particulière compte
tenu de l’enjeu majeur que présente
aujourd’hui le maintien dans le
logement. Les organismes qui font
face à une augmentation des impayés
et des abandons de créance au titre
des procédures de rétablissement
personnel interviennent dès
l’apparition du premier incident de
paiement auprès du locataire
débiteur dans une logique d’aide à la
résolution de ses difficultés. Cette
prévention repose sur une
mobilisation cohérente de l’ensemble
des partenaires impliqués, sous
l’égide de l’État.
La réforme récente montre ses
limites : la suppression de la CDAPL
ne permet plus de concertation
partenariale sur les impayés juste
constitués. Les CCAPEX, censées
organiser la coordination des acteurs,
sous l’égide des préfets et des
présidents de conseils généraux, ne
sont pas toujours effectives, Quand
elles le sont, elles interviennent trop
tardivement pour des situations très
dégradées. L’articulation avec les
procédures de traitement du
surendettement et les commissions
Banque de France reste largement
insatisfaisante.
(11) Rapports de Muriel Boulmier : « Adaptation de l’habitat au défi de l’évolution démographique » (2009) ; « Bien vieillir à domicile :
enjeux d’habitat, enjeux de territoires » (2010).
30 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Soutenir l’accession
sociale sécurisée
à la propriété
L’accession est souvent présentée
comme une des solutions à la crise
du logement, voire comme une
alternative avantageuse à la location.
Le Mouvement Hlm considére qu’il
n’y a pas lieu de mettre en
opposition ces deux modes d’accès
au logement. Il a une tradition
importante d’accession sociale à la
propriété dans le neuf (activité de
promotion et de prêt immobilier)
qu’il souhaite développer.
Les dernières années sont marquées
par l’instabilité avec pour point de
départ la crise amorcée en 2008
entraînant une baisse du marché
immobilier en 2009 et sa
prolongation au moins jusqu’en 2012
(malgré la courte reprise du seul
premier semestre 2010).
Ce marché est de plus en plus
difficilement accessible aux
personnes à ressources modestes. En
effet, il est largement « dopé » par les
ventes aux investisseurs qui de ce
fait alimentent les prix à la hausse et
concurrencent fortement les primo
accédants et, en particulier les plus
modestes d’entre eux. Les prix ont
également été poussés à la hausse
par les aides aux plus hauts revenus
(loi TEPA, PTZ sans plafonds de
ressources). Les familles qui
constituent le « cœur de cible » des
Hlm dans l’accession (entre 2 et 3
Smic pour un couple avec un enfant)
sont les plus pénalisées par ce
marché. Soit, s’ils sont locataires
Hlm, ils le restent durablement et
concourent ainsi à la faible mobilité
du parc locatif social. Soit ils
achètent un logement qui ne
correspond que très imparfaitement
à leurs vœux : taille réduite,
logement de qualité médiocre, ou en
lointaine périphérie exigeant de
longs et coûteux déplacements,
allongement de la durée
d’endettement.
Qu’est-ce que l’accession sociale sécurisée, telle que la mettent en œuvre les organismes
de logement social ?
1. L’accession sociale s’adresse aux ménages disposant de ressources modestes ; elle concerne les ménages disposant de
ressources inférieures à 135 % des plafonds PLUS ; l’accession très sociale concerne des ménages sous ces plafonds PLUS.
2. L’accession sociale concerne principalement des candidats primo-accédants ; c’est une offre de parcours résidentiel
proposée notamment aux locataires Hlm qui le souhaitent et le peuvent
3. L’accession sociale est inscrite dans les politiques locales de l’habitat. Elle participe à la mixité urbaine et sociale.
4. L’accession sociale est sécurisée. Elle offre aux ménages à ressources modestes, en cas de difficultés, une possibilité de
retour au statut locatif : garanties de rachat, de revente et de relogement, actions de conseil et d’information sur les
conséquences de l’acquisition ; accompagnement dans leur plan de financement pour leur garantir un endettement
maximum de 30 %.
5. L’accession sociale répond aux exigences de qualité et de développement durable.
6. Les opérateurs Hlm proposent une large palette de services après-vente (contrats de maintenance, garanties
d’équipements) ; ils assurent le plus souvent les fonctions de syndic de copropriétés selon des règles de transparence et
d’exigence de qualité de services.
7. Les opérateurs Hlm offrent des dispositifs adaptés aux ménages les plus modestes, tels que la location-accession, et
l’acquisition progressive via des SCI de capitalisation.
8. L’activité de promoteur social est à but non lucratif ; les résultats sont réinvestis dans la production nouvelle, les services
aux clients et les missions sociales.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 31
Le Mouvement Hlm renforce
son rôle en faveur de l’accession
à la propriété sous toutes ses
formes
En 2010, plus de 23 000 ménages sont
devenus propriétaires de leur
logement grâce aux organismes Hlm :
• 70 % via l’acquisition d’un
logement neuf produit par
le Mouvement Hlm,
• 30 % par l’achat de leur logement
Hlm.
Pour favoriser cette accession
sociale sécurisée, l’existence de
produits à taux de TVA réduite
est indispensable
Après avoir fortement mobilisé le
Pass-Foncier, les organismes Hlm
s’orientent vers une utilisation
importante du prêt social locationaccession (PSLA) qui, outre ses
avantages fiscaux, permet une
démarche d’apprentissage de la
propriété et un parcours
entièrement sécurisé.
Toutefois, des améliorations sont
encore nécessaires pour que ce
produit devienne le fer de lance d’un
développement de l’accession
sociale. Notamment les conditions
initiales de financement de
l’acquéreur devraient se voir
garanties jusqu’à la levée d’option
effective.
En complément du PSLA, la
poursuite d’une politique d’habitat
équilibré et la recherche d’harmonie
dans les territoires de la politique de
la ville nécessite le maintien durable
d’un produit d’accession à taux
réduit de TVA qui a été mis en place
en visant plus spécifiquement ces
quartiers.
D’une manière générale, il apparaît
souhaitable que les collectivités
locales qui optent pour un
volontarisme affirmé en termes de
mixité sociale soient incitées à le
faire et que les documents
d’urbanisme et de planification
traitent de façon systématique de ce
sujet (par exemple, en intégrant un
volet accession sociale sécurisée de
droit dans les programmes locaux de
l’habitat et en améliorant leur
Dotation globale de fonctionnement
en fonction des populations
accueillies).
L’accession sociale dans le cadre
de la vente Hlm
Après l’engagement global de mise
en vente signé entre l’État et l’Union
sociale pour l’habitat en décembre
2007, les organismes Hlm ont pris,
dans le cadre des conventions
d’utilité sociale signées avec l’État,
des engagements sur les mises en
vente liées aux besoins et aux
réalités de chaque territoire. Ces
derniers ont permis d’accroître le
nombre de ventes de 52 % en 2010,
passant ainsi en un an de 4 500 à
7 000.
Mais cette activité étant en lien
direct avec le contexte économique
et la capacité des ménages à acquérir
leur logement et à l’entretenir, il est
vraisemblable que l’aggravation de la
crise ne facilitera pas un
accroissement continu de ces ventes.
D’autant que le maintien du PTZ
pour les locataires qui acquièrent
leur logement Hlm a été assorti,
dans la Loi de Finances, de
conditions restrictives qui limiteront
très fortement son efficacité.
L’Europe et l’accession :
la France en retard ?
Pas plus que pour le locatif, il n’existe
de « modèle européen » pour
l’accession. Si la proportion de
propriétaires est souvent élevée dans
les pays d’Europe du sud (82 % en
Espagne, 76 % en Grèce, 70 % en
Italie). Elle est plus faible en Allemagne
(43 %), ou en Suisse (35 %) et la
France occupe une position moyenne
avec 58 % de propriétaires. L’Union
européenne reconnaît l’accession
sociale comme partie intégrante du
service d’intérêt général du logement
social justifiant de règles particulières,
dans le cadre de critères sociaux
(attribution à certaines catégories
d’accédants, sécurisation,
accompagnement…).
32 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Les principes de la « vente Hlm »
En toute hypothèse, la vente Hlm ne peut être envisagée de façon systématique, a
fortiori comme un moyen de financement ordinaire de l’offre nouvelle. D’une part,
le parc effectivement cessible est limité, d’autre part il faut retirer du prix de
vente, outre les frais de commercialisation, mise en copropriété, la décote offerte
au locataire, rembourser les emprunts en cours, indemniser les réservataires ou
ceux qui ont apporté une subvention. Et il faut aussi prendre en compte la perte
de loyers futurs. Tout ceci réduit d’autant les fonds propres qui peuvent être
apportés à des opérations nouvelles et les chiffres avancés par les tenants de la
vente forcée (la vente d’un logement permettrait d’en produire deux ou trois) sont
erronés. Les principes pour réussir la « vente Hlm ».
1. La vente Hlm est pour le locataire une opportunité, jamais une obligation.
2. La vente est un élément de diversité de l’offre d’habitat social dans un territoire
donné ; elle exige le parfait accord des collectivités territoriales concernées.
3. Inscrite dans des politiques locales de l’habitat, elle n’est pas opportune dans
toutes les circonstances ni pour tous les types de logements : par exemple
lorsque le logement locatif social est insuffisant, ou lorsque des risques de
copropriétés dégradées existent.
4. La décision de vendre est du ressort de l’organisme Hlm propriétaire, c’est une
composante de sa stratégie patrimoniale, en relation avec la politique
territoriale ; réinvestis dans le patrimoine et les services, les produits de la vente
n’ont qu’un caractère accessoire dans le financement de la production nouvelle.
5. Comme toute production d’accession sociale, un dispositif de sécurisation peut
exister : garanties de rachat, de revente et d’éventuel relogement. S’adressant à
des ménages acquérant pour leur occupation personnelle ou celle de leurs
ascendants ou descendants, elle comporte des clauses visant à éviter les dérives
spéculatives et les dérives d’utilisation des biens vendus.
6. Le corollaire de la sécurisation est que l’organisme vérifie la validité du projet
d’accession du locataire, notamment concernant son plan de financement.
7. Dans les immeubles où des logements sont vendus, entraînant la création d’une
copropriété, les incidences de ce changement pour les ménages doivent être
parfaitement maîtrisées, qu’ils aient choisi de rester locataires ou de devenir
propriétaires : charges maîtrisées, maintenance garantie, travaux provisionnés.
Vendre mais aussi gérer
Les organismes Hlm sont attentifs à
favoriser le succès du parcours des
ménages accédants, dont ils assurent
sur le long terme la sécurisation des
acquisitions. Ils sont donc très
impliqués dans le fonctionnement et
la gestion des copropriétés
provenant de leur parc ou de leur
production en accession sociale dans
le neuf.
Il devient impératif que le
législateur opte pour une
convergence, ou pour le moins une
compatibilité, des réglementations
Hlm et des copropriétés dans l’esprit
des travaux de la commission
présidée par Dominique Braye,
comme des propositions des États
Généraux du Logement. En effet,
parce que les organismes Hlm
veulent jouer tout leur rôle dans la
création de copropriétés
durablement harmonieuses issues de
la production neuve et de la vente
Hlm, il est primordial que la
réglementation leur facilite cette
démarche.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 33
Poursuivre la rénovation
urbaine, relancer
la politique de la ville
Des quartiers d’habitat social
connaissant des évolutions
contrastées
Plus d’un million de logements Hlm
construits dans les années 1950 et 60
sont concentrés dans des quartiers à
dominante d’habitat social qui
correspondent aujourd’hui à la
fraction du parc la plus dépréciée. Ils
font l’objet depuis trente ans de
politiques publiques spécifiques, et
les organismes Hlm ont été des
opérateurs de premier rang aux côtés
des collectivités locales pour
requalifier ces quartiers et apporter à
leurs habitants une qualité de vie
quotidienne tout en favorisant le lien
social.
Les efforts réalisés n’ont pas toujours
eu les résultats escomptés face aux
effets dévastateurs des crises socioéconomiques de ces dernières
décennies et à la difficulté d’infléchir
les tendances lourdes à la
ségrégation socio-spatiale dans ces
quartiers populaires, même si des
réussites indiscutables ont vu le jour
en permettant à de nombreux
habitants de « s’en sortir ». Ces divers
constats ont conduit, depuis le début
des années 2000 à réorienter les
interventions publiques vers des
transformations en profondeur pour
redonner à ces territoires une
attractivité résidentielle, atténuer
leur spécialisation sociale et y
introduire des fonctions urbaines
plus diversifiées. C’est un chantier au
long cours qui nécessite de la
continuité et de la cohérence entre
les politiques aux différents niveaux
territoriaux.
Ces quartiers connaissent des
situations différenciées du point de
vue de leur taille, du poids et du rôle
du logement social, de leur
localisation par rapport aux
dynamiques de la ville, de leur
peuplement, du type d’organisation
urbaine, de leur image et de la qualité
de l’habitat. On y observe également
des écarts prononcés en termes de
ressources des ménages.
2,7 fois plus élevée que celui de leur
agglomération et la dépendance aux
prestations familiales y est plus
grande. Le taux de chômage y est
deux fois plus élevé. De même, les
ménages les plus autonomes au plan
économique ont tendance à quitter
ces quartiers, accélérant leur
spécialisation de plus en plus sociale.
La politique de rénovation engagée
depuis 2003 a révélé cette diversité
de potentialités et accentué ces
différenciations. Aujourd’hui des
quartiers en cours de rénovation,
situés dans un environnement
porteur, commencent à bénéficier
des dynamiques de développement
de leur ville. D’autres vont garder
une vocation très sociale ou,
implantés dans des zones en
dépression, continueront d’être
affectés par des problèmes de
vacance. Certains sont confrontés à
des phénomènes lourds de
délinquance et de violence urbaine
qui constituent un obstacle à leur
évolution urbaine. Enfin les quartiers
qui n’ont pas été concernés par le
programme de rénovation urbaine
peuvent subir des phénomènes de
report des difficultés sociales et
urbaines et voir leur déqualification
s’accélérer.
La Programme National de
rénovation urbaine : des
quartiers remis dans le
mouvement de la ville
Néanmoins derrière cette diversité se
cache une tendance générale à la
paupérisation et à la fragilisation des
ménages comme le montre le dernier
rapport de l’ONZUS. Le déficit de
formation et d’activité notamment
chez les femmes et les jeunes y est
persistant. La part des personnes
vivant sous le seuil de pauvreté est
À l’évidence, les projets de
rénovation urbaine engagés sur 500
quartiers depuis sept ans ont permis
d’y améliorer les conditions d’habitat
et de leur redonner de nouvelles
perspectives d’avenir. Les habitants
retrouvent la fierté de leur cadre de
vie, une mobilité dans la ville et des
rapports plus positifs à leur habitat,
leur quartier et leur ville.
Les conditions de leur évolution vers
une « banalisation » urbaine ont été
installées grâce à un travail
important sur l’organisation foncière,
sur la restructuration urbaine et le
désenclavement. La réalisation de
quelques opérations de
diversification des fonctions
urbaines et résidentielles a permis
d’en tester la faisabilité et de révéler
un potentiel d’accédants parmi ses
habitants. La réorganisation en
unités résidentielles a introduit une
échelle intermédiaire entre le grand
quartier d’habitat social et
l’immeuble, qui devrait faciliter la
construction de nouveaux liens
34 Le logement social pour la solidarité et la croissance
sociaux et la gestion de proximité.
Même s’il reste encore modeste et
s’il doit être amplifié, un processus
de redéploiement géographique des
logements sociaux s’est enclenché,
avec 50 % de reconstitution hors site
des logements démolis que les
politiques locales de l’habitat ont été
amenées à intégrer. Cette
redistribution permet, sur les sites
eux-mêmes, une amorce de
diversification.
Les organismes Hlm ont mobilisé
leurs compétences et leurs moyens
financiers pour mettre en œuvre ces
projets aux côtés des collectivités
locales. Ainsi la maîtrise d’ouvrage
Hlm est en train de réaliser un
programme de travaux sur ces 500
quartiers s’élevant à 27 milliards
d’euros, financés à 27 % par l’ANRU,
5, 5 % par les collectivités locales et
66,5 % par les bailleurs.
Les résultats de cette politique sont
aujourd’hui tangibles, mais ils
restent très fragiles et encore
éloignés des objectifs visés dans
certaines situations où les problèmes
sont « enkystés ». La dégradation de
la situation socio-économiques des
habitants et le durcissement des
problèmes de sécurité pourraient
compromettre ces premières
avancées.
Une politique de développement
social et urbain à poursuivre sur
de nouvelles bases
La réalité urbaine et patrimoniale
des quartiers traités a changé. Mais
la réussite durable n’est pas acquise.
Elle dépend pour l’essentiel des
choix que les collectivités publiques
effectueront, tant sur la poursuite de
l’amélioration du cadre de vie, que
sur la politique de la ville, les
politiques de cohésion sociale et
d’égalité des chances, et sur le
rétablissement de la sécurité
publique dans tous les quartiers.
Il est impératif d’achever l’actuel
programme national de rénovation
urbaine et de lancer un PNRU 2. En
effet sur nombre de quartiers,
notamment ceux de taille
importante, s’arrêter aux premiers
investissements consentis risquerait
à terme de rendre inutiles ceux-ci. Il
reste également des copropriétés
dégradées qui n’ont pas été traitées
et compromettent l’attractivité des
sites : elles appellent des
interventions fortes.
Il convient d’amplifier la dynamique
de changement engagée :
programmes d’accession sociale,
changement d’usage de certains
Exemple de l’implication d’un organisme Hlm dans la rénovation
urbaine d’un quartier : Belle Beille à Angers
Premier bailleur d’Angers avec 12 900 logements, Angers Habitat loge 16 % de la
population de la commune. Son patrimoine est impacté par cinq projets de
rénovation urbaine lancés par la ville. Il est ainsi engagé à hauteur de 7 000
logements concernés.
Dans le cadre du projet de Belle Beille, l’organisme a renouvelé la partie du
patrimoine la plus stigmatisée, 7 tours représentant 322 logements. Il a ainsi
permis une nouvelle urbanisation qui avec une diversification des produits par le
statut et la forme urbaine et une nouvelle architecture travaillée participe
fortement du changement d’image du quartier. Il a également réalisé des
transformations d’usage de logements pour accueillir des services en pied
d’immeuble et reconstruit sur site la moitié des logements démolis sous forme
d’un habitat social diversifié, collectifs bas et individuels.
Ainsi la combinaison d’actions patrimoniales du type démolitions, reconstruction,
réhabilitation, résidentialisation, portant sur plus de la moitié du parc de ce grand
quartier (plus de 2 500 logements sociaux) et d’investissements publics sur
l’aménagement urbain a permis de redonner une attractivité au quartier. La
sécurité publique s’est améliorée. On constate un retour des demandeurs sur le
site. De nouveaux opérateurs sont venus réaliser des opérations d’accession.
immeubles, éventuellement
programmes de vente aux
occupants, immobilier d’activité… le
tout dans le cadre d’un schéma de
référence urbain précisant
l’évolution du quartier sur le long
terme et prévoyant son
désenclavement notamment par des
transports en commun performants
vers les pôles d’emploi. Des
montages techniques et financiers
en se référant à la notion de bilan
global d’aménagement seront à
imaginer.
Les politiques d’attribution qui sont
déterminantes pour l’évolution de
ces quartiers doivent être traitées
dans le cadre d’une stratégie
d’ensemble au niveau de la
commune et de l’agglomération, de
pratiques partenariales et de moyens
d’accompagnement.
La concentration des situations de
précarité dans ces territoires appelle
une politique de la ville et une
politique de cohésion sociale à la
hauteur des enjeux.
Une grande ambition est à fixer
dans ce domaine à travers des
programmes locaux de
développement urbain et social.
Ces derniers pourraient être établis
au niveau intercommunal, servir de
cadre aux conventions urbaines de
cohésion sociale, s’imposer aux
politiques de droit commun et être
articulés au projet urbain. Les
questions d’emploi, d’éducation, de
formation professionnelle des
jeunes et de santé doivent être au
cœur de la politique de la ville.
Enfin, la question de la sécurité
doit faire l’objet d’une attention
particulière de la part des pouvoirs
publics. Les moyens attribués sont
insuffisants. De véritables stratégies
locales de la tranquillité – sécurité à
l’échelle de chaque site méritent
d’être construites collectivement
avec l’ensemble des acteurs de la vie
de quartier, dans le cadre de la
déclinaison du contrat local de
sécurité précisant les objectifs et les
moyens nécessaires.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 35
Développement durable
et maîtrise de l’énergie :
un chantier bien engagé,
une évaluation nécessaire
Le développement durable est
devenu au cours de ces dernières
années un enjeu de société majeur,
qui consiste à promouvoir sur le long
terme un nouveau modèle de
développement conciliant croissance
économique, équité sociale et respect
de l’environnement, afin de répondre
aux besoins d’aujourd’hui sans
compromettre la situation des
générations suivantes.
Le secteur de l’habitat, à travers les
responsabilités qui sont les siennes
dans les enjeux énergétiques, la
préservation des ressources
naturelles et la gestion des déchets,
est particulièrement concerné pour
contribuer à la lutte contre le
changement climatique et à un
développement urbain plus durable.
Au sein de ce secteur, le monde Hlm
a pris les devants, et constitue une
véritable locomotive pour la
réduction des consommations
énergétiques, des émissions de gaz à
effet de serre et la préservation de
l’environnement, dans l’intérêt de ses
habitants, et des générations futures.
Il est également un moteur
économique au profit d’une filière
française spécialisée.
Si le Grenelle de l’environnement a
donné un coup d’accélérateur à
l’amélioration des performances
énergétiques et environnementales
des bâtiments, il importe de
s’assurer que les nouvelles
exigences techniques sont
compatibles, financièrement et en
Une performance des Hlm supérieure à celle des autres logements
Alors qu’il loge 16 % de la population, le parc social contribue pour 11 % aux
émissions de CO2 produites par le secteur résidentiel.
La consommation énergétique moyenne du parc Hlm en énergie primaire est
de 170 kWh/m2/an pour 240 kWh/m2/an dans l’ensemble du parc résidentiel.
La consommation d’eau moyenne est de 100 litres par jour et par habitant,
pour 150 litres dans l’ensemble du parc résidentiel.
La collecte sélective est en place dans 65 % du patrimoine Hlm pour moins
de 50 % pour l’ensemble du parc résidentiel.
97 % de la production est réalisée en habitat groupé dans des conditions
d’optimisation de la constructibilité.
termes de qualité d’usage, avec les
revenus et les besoins des
habitants. Ceci est d’autant plus
nécessaire dans un contexte de crise
économique et financière qui
renforce les situations de précarité,
notamment de précarité énergétique,
et accentue les contraintes
économiques qui pèsent sur les
opérateurs et la collectivité.
Le logement social, un secteur
en pointe dans la performance
énergétique et
environnementale
Le Grenelle de l’Environnement a
fixé comme objectif, d’ici à 2020, de
réduire d’au moins 20 % les
émissions de gaz à effet de serre, de
38 % la consommation d’énergie du
parc existant et de porter la part des
énergies renouvelables à au moins
23 % de la consommation d’énergie
finale. Il promeut une nouvelle vision
de la « ville durable » : meilleure
intégration logement/transports en
commun, contrôle de l’expansion
urbaine et de la consommation de
foncier, lutte contre l’étalement
urbain incontrôlé par de nouvelles
formes architecturales et urbaines,
présence de la nature dans la ville…
Le secteur Hlm a une politique de
maîtrise des coûts énergétiques
depuis la première crise pétrolière
des années 1970. Compte tenu de son
poids social, économique et
environnemental, il s’attache à
prendre en compte les différentes
exigences du développement
durable. Il construit, loge et gère
dans la durée un patrimoine
important. Ceci le place dans une
position de pragmatisme et de
responsabilité vis-à-vis des habitants
– notamment au regard de leurs
charges – des collectivités locales et
de la société en général.
Les organismes Hlm se sont
résolument engagés dans la voie
36 Le logement social pour la solidarité et la croissance
tracée par le Grenelle de
l’Environnement, qui a fixé pour le
parc social les objectifs suivants :
• la rénovation énergétique de
800 000 logements les plus
consommateurs en énergie d’ici
2020 ;
• la généralisation des bâtiments
basse consommation (BBC) dès
2013 et par anticipation pour les
programmes de rénovation
urbaine faisant l’objet de
conventions avec l’ANRU ;
• une incitation au recours aux
énergies renouvelables ;
• le développement d’éco-quartiers
au sein desquels les réalisations
Hlm ont toute leur place.
Pour la production neuve, tous les
dossiers déposés visent désormais à
minima le niveau BBC et d’ores et
déjà, des projets sont engagés à des
niveaux plus élevés. Plus de 137 650
logements sociaux font l’objet d’une
demande de label BBC Effinergie,
13 650 ont déjà été certifiés et les
premières opérations viennent d’être
livrées. Concernant le parc existant,
les organismes Hlm ont initié des
Fin juillet 2011, les 100 000 premiers
logements identifiés comme les moins
performants avaient bénéficié de l’écoprêt logement social, générant ainsi
2,8 milliards de travaux, dont la moitié
de thermique, contribuant à assurer
l’activité de 33 000 équivalent temps
plein directs et 19 000 indirects,
réduisant de moitié la consommation
énergétique des logements (sur la base
des calculs réglementaires) et
permettant de compenser les
émissions annuelles de CO2 d’une ville
de 34 000 habitants. Le secteur Hlm
est ainsi en passe de devenir un
acteur central d’une filière française
d’entreprises performantes dans le
domaine énergétique.
stratégies énergétiques et/ou la
réactualisation de leur Plan
stratégique de patrimoine (PSP) avec
la prise en compte des
préoccupations énergétiques, mais
également le vieillissement de la
population, l’accessibilité aux
personnes handicapées, la maîtrise
des consommations d’eau…
Une évaluation nécessaire
des dispositifs techniques et
des modes de financement
Les premiers retours sur
expériences ont mis en lumière
plusieurs enjeux.
La sophistication des matériels
permettant d’atteindre la
performance énergétique entraîne
une augmentation des charges
d’entretien et de maintenance ainsi
qu’éventuellement un coût
supplémentaire pour le comptage et
le suivi des performances. Un enjeu
important est posé : comment éviter
que la réduction des
consommations d’énergie ne soit
annulée sur la quittance par
l’augmentation des coûts fixes ?
Certaines mesures en faveur des
énergies renouvelables peuvent
aussi se traduire par des surcoûts
pour les habitants. Dans le cas des
réseaux de chauffage urbain,
souvent coûteux, il s’agit de
promouvoir une plus grande
transparence dans les coûts de la
chaleur, une exigence de
performance dans la gestion de ces
réseaux et le déploiement de cadres
partagés avec les abonnés et usagers
de ces réseaux.
Il est essentiel de travailler aux
conditions d’acceptabilité des
nouvelles technologies par les
habitants, qu’il s’agisse des coûts
induits en face des économies
réalisées, mais aussi d’effets de
certains dispositifs sur les modes
d’habiter : il s’agit d’une part de
favoriser l’appropriation par les
habitants de ces dispositifs et les
aider à devenir acteurs de la
diminution des consommations. Il
s’agit d’autre part d’évaluer certains
dispositifs au regard des qualités
d’usage (facilité d’utilisation des
équipements, aération…).
Enfin, les opérateurs constatent une
difficile articulation des multiples
référentiels de qualité qui
conditionnent par ailleurs certaines
aides des collectivités, rendant
essentiel un travail de mise à plat de
la certification et la définition d’un
contenu acceptable pour tous.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 37
L’Observatoire de la performance énergétique du logement social
Afin d’évaluer les performances énergétiques, économiques, en termes de
confort et et de qualité d’usage d’opérations d’habitat social neuves à minima
BBC, ou de rénovations énergétiques dans l’esprit du Grenelle, l’Union a mis en
place, en partenariat avec le Programme RAGE 2012, Promotelec et GRDF,
l’Observatoire de la Performance Énergétique du logement social pour une durée
de cinq ans. Sont ainsi capitalisées les solutions techniques et énergétiques
mises en place dans le neuf et dans le cadre des rénovations énergétiques. Des
opérations sont également évaluées qualitativement depuis la conception
jusqu’en phase d’exploitation.
Enfin, un programme d’instrumentation d’opérations neuves ou réhabilitées a été
lancé. Les résultats seront suivis et analysés pendant deux ans.
Cet Observatoire constitue une base de connaissance sur laquelle l’USH et ses
partenaires pourront s’appuyer pour accompagner les acteurs de la construction
et de la rénovation énergétique dans l’amélioration de leurs pratiques et placer le
logement social en pointe dans ce domaine.
Pérenniser les financements et
homogénéiser les critères
d’éligibilité
Alors que l’approche globale des
réhabilitations et constructions
neuves rend difficile de quantifier
les surcoûts induits par
l’amélioration des performances
énergétiques, les montages
financiers se complexifient. Les
organismes mobilisent des lignes
budgétaires (éco-prêt de la Caisse
des Dépôts, fonds européens via le
FEDER, dégrèvement de TFPB…)
qu’il est urgent d’inscrire dans la
durée afin d’assurer de la visibilité
aux opérateurs qui investissent sur
le long terme. Concernant le
FEDER, il s’agit avant tout d’éviter
une rupture de programmation entre
la fin de la période actuelle et la mise
en œuvre de la prochaine période de
programmation (2014-2020) et de
déplafonner l’enveloppe nationale
fixée à 4 % afin de libérer son
potentiel de croissance.
Le FEDER et la rénovation énergétique : continuer à investir dans l’avenir
Introduite à titre exploratoire, la révision du règlement FEDER en faveur de la
rénovation thermique des logements sociaux a montré son efficacité. Dans de
nombreuses régions cependant, des dossiers sont en attente d’instruction en
raison du plafonnement à 4 % de l’enveloppe nationale. On évalue le montant des
dossiers en liste d’attente à environ 15 millions d’euros de FEDER pour un
investissement potentiel, actuellement gelé jusqu’en 2013, de 103 millions
d’euros. La mesure concerne potentiellement 110 400 ménages, pour un
investissement total de 2,2 milliards d’euros et 31 000 emplois induits.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 39
Qu’est-ce que
le logement
social ?
Une rencontre réussie entre le social et
l’économique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 40
Des organismes différents, répondant
à une même mission d’intérêt général . . . . . . . . . . p. 41
Une mission sociale affirmée . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 43
Un acteur économique de premier plan . . . . . . . . p. 44
Un modèle original de financement
à l’efficacité prouvée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 45
Le logement social en Europe, des approches
différenciées, des réalités contrastées . . . . . . . . . . p. 48
40 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Une rencontre
réussie entre le social
et l’économique
Dès la fin du XIXe siècle, la France
devient une grande nation
industrielle. Les besoins de maind’œuvre sont croissants et
collectivités territoriales et
entreprises se mobilisent pour loger
ces nouveaux venus, issus largement
de l’exode rural et de l’immigration
étrangère.
Apparaissent ainsi, au fil des
premières années du XXe siècle, à
l’initiative des entreprises et
pouvoirs publics nationaux et
municipaux, deux types
d’organismes en charge du logement
du monde du travail : les Sociétés
anonymes et les Offices publics.
Elles se sont ajoutées aux
coopératives d’Hlm apparues au
milieu du XIXe siècle dans le sillage
du mouvement coopératif alors
Les Hlm : une réalité fondamentale
pour la vie des Français
L’habitat social occupe une place
essentielle dans notre société :
• Le parc est constitué de près de
4,5 millions de logements (dont
4,1 millions directement gérés par
les organismes Hlm).
• Le parc Hlm représente 16 % des
résidences principales et loge
11 millions de personnes.
• Chaque année, 450 000 logements
sociaux environ sont attribués.
Des valeurs fortes, traduites dans les faits
Progrès, solidarité, mixité, qualité, développement durable… Ces valeurs
fondatrices du Mouvement Hlm guident au quotidien l’action des organismes
Hlm. Cette dynamique se concrétise dans les faits :
• Un tiers des ménages du parc Hlm gagne moins de 795 euros par mois/personne.
• Selon le dernier recensement, les employés et les ouvriers représentaient la
moitié des résidents, les professions intermédiaires 12 %.
• En 2010, 102 000 logements Hlm ont été financés.
• Près de 80 % de la production neuve reçoit un label de performance énergétique.
fortement développé dans le monde
rural, et aux Sociétés de crédit
immobilier qui prêtaient aux salariés
pour acquérir leur logement (12).
Ces divers organismes, à vocation
sociale et d’accompagnement
économique, se sont développés au
rythme de l’aménagement industriel
et urbain du territoire, mais aussi
des décisions imposées par les
politiques économiques, budgétaires
et sociales de l’État.
C’est le logement construit et géré
par ces organismes qui peut être
qualifié de logement social. Certes, il
n’existe pas en France, ni au niveau
européen, de définition précise du
logement social, ce qui autorise des
confusions entre logement « aidé »,
« social », « social de fait », « public »,
« à loyer modéré ou maîtrisé ».
du logement s’accordent pour
reconnaître que doit être considéré
comme réellement social un
logement qui, en contrepartie des
aides reçues, fournit un logement de
bonne qualité – à la différence du
« parc social de fait » – contre un
loyer (ou un prix de vente) inférieur
au marché : les écarts de loyers avec
le parc locatif privé sont importants
(de 1 à 2, voire de 1 à 3 dans certaines
zones géographiques). Il offre des
services associés, des priorités
d’attribution, ainsi qu’une
participation des habitants aux
instances de décision. Sa production
et sa gestion ne peuvent donc être
assurées durablement que dans un
cadre institutionnel et financier doté
de règles propres (caractère non
lucratif, activité réglementée),
différentes de celles du marché.
Mais les pouvoirs publics nationaux
et locaux et les principaux acteurs
(12) Sans oublier dans la seconde moitié du XXe siècle, les Sociétés d’Économie Mixte (SEM), aujourd’hui Entreprises Publiques Locales
dont certaines sont spécialisées dans le logement social ainsi que quelques mouvements associatifs, PACT, Sociétés d’habitat rural…
Le logement social pour la solidarité et la croissance 41
Des organismes
différents répondant
à une même mission
d’intérêt général
Le Mouvement Hlm
Cinq grandes « familles » composent
aujourd’hui l’Union sociale pour
l’habitat. Chacune d’entre elles est le
résultat d’une histoire et d’une
culture spécifiques.
Quels que soient leur statut
juridique, leurs conditions d’exercice
et leur gouvernance, l’ensemble des
770 organismes Hlm – Offices, ESH,
Coopératives et SACICAP –
répondent aux mêmes objectifs : être
au service de l’intérêt général, avec
un double ancrage national et local.
Ils possèdent 4,1 millions de
logements locatifs et 0,2 million de
logements-foyers et logent environ
11 millions de personne. Ils sont
animés par près de 12 000
administrateurs bénévoles et
emploient 76 000 salariés.
Les Offices publics de l’Habitat
Les Offices publics de l’habitat sont
des établissements publics à
caractère industriel et commercial,
rattachés à des collectivités locales
ou à des EPCI. Ils construisent et
réhabilitent des logements, en
assurent la location, la gestion,
l’entretien. Ils peuvent également
réaliser et vendre des logements en
accession sociale à la propriété et
réaliser des opérations
d’aménagement et d’urbanisme. Le
patrimoine des 274 OPH (en 2009)
comprend 2 137 000 logements
locatifs et 124 000 équivalents
L’Union sociale pour l’habitat représente, en France métropolitaine et Outre-mer,
l’ensemble des organismes Hlm à travers ses cinq fédérations (la Fédération des
Offices publics de l’habitat, les Entreprises sociales pour l’habitat, la Fédération
nationale des Sociétés coopératives d’Hlm, l’Union d’économie sociale pour
l’accession à la propriété et la Fédération nationale des Associations régionales
d’organismes de logement social). Elle remplit trois missions : un rôle de
représentation nationale auprès des pouvoirs publics, des médias, des milieux
professionnels et de l’opinion publique ; une mission de réflexion, d’analyse et
d’étude sur tous les dossiers relatifs à l’habitat et l’élaboration de propositions
pour une politique sociale de l’habitat ; une fonction d’information, de conseil et
d’assistance auprès des organismes afin de faciliter, rationaliser et développer
leurs activités et leurs compétences professionnelles.
logements répartis dans des foyers
pour jeunes travailleurs, personnes
âgées, résidences universitaires et
sociales.
Les Entreprises sociales
pour l’habitat
Les Entreprises sociales pour
l’habitat (anciennement Sociétés
anonymes et fondations Hlm), sont
des sociétés anonymes à but non
lucratif en raison de dispositions
particulières sur les cessions
d’actions, la rémunération du capital
social et la dévolution des actifs. Les
collectivités territoriales et les
locataires sont représentés dans
leurs conseils d’administration. Leur
vocation principale est d’être à la fois
des constructeurs et des bailleurs
sociaux, partenaires actifs des
politiques publiques locales en
matière d’aménagement, de
construction et d’urbanisme.
Les 274 ESH sont propriétaires
d’un parc locatif composé de près
de 1 905 000 logements et de
121 000 équivalents logements.
Les Sociétés coopératives Hlm
Les coopératives Hlm sont des
sociétés à capital variable fondées
sur les principes coopératifs de
démocratie et de transparence.
Avec plus de 400 000 logements
construits en un siècle, les 166
coopératives Hlm sont des acteurs
historiques de l’accession sociale
à la propriété, tout en ayant aussi
des compétences élargies au
domaine du logement locatif et
de l’aménagement.
Les Sociétés anonymes
coopératives d’intérêt collectif
pour l’accession à la propriété
(SACICAP)
Les 56 SACICAP et l’Union
nationale d’économie sociale pour
l’accession à la propriété (UESAP),
succèdent depuis 2008 aux Sociétés
42 Le logement social pour la solidarité et la croissance
de Crédit immobilier (SACI) et à la
Chambre syndicale du Crédit
Immobilier. Les SACICAP sont des
opérateurs de proximité avec un fort
ancrage territorial, appuyés sur un
sociétariat intégrant des collectivités
locales et des organismes Hlm. Elles
peuvent répondre à tous les besoins
en matière d’accession à la
propriété : crédit, construction,
aménagement, services. Dans le
cadre d’une convention passée avec
l’État, elles ont obligation de
financer des missions sociales et de
réaliser 15 000 logements en
accession sociale à la propriété en
Prêt social location-accession
(PSLA), en zone ANRU ou à prix
maîtrisé.
Les Associations Régionales Hlm
De création plus récente (1973 pour
les premières), elles œuvrent
principalement à l’application locale
des politiques nationales de l’habitat
et regroupent, sur un plan territorial,
l’ensemble des organismes Hlm
présents qu’elles représentent
auprès des instances politiques,
économiques et sociales locales.
D’autres acteurs ont une mission
analogue
Les Entreprises publiques
locales (EPL) intervenant
dans le logement
Les Entreprises publiques locales
(EPL) sont des entreprises au
service et sous le contrôle des
collectivités locales qui en sont les
actionnaires majoritaires ou
exclusifs. La « famille » des EPL est
composée de Sociétés d’économie
mixte (SEM), de Sociétés publiques
locales (SPL) et de Sociétés
publiques locales d’aménagement
(SPLA). 219 EPL interviennent dans
le domaine du logement (logements
sociaux, logements intermédiaires,
logements étudiants, logements pour
personnes âgées, résidences sociales,
accession à la propriété…) et gèrent
un parc d’environ 480 000
logements dont près de 68 % sont
conventionnés (321 000 logements).
Les habitants, premiers partenaires du monde Hlm
L’une des spécificités du logement social en France est la place des habitants et de leurs associations dans les instances de
tous les organismes Hlm. Ils sont membres de droit du Conseil d’administration (ou autre instance de décision), de la
Commission d’attribution des logements et du Conseil de concertation locative mis en place dans tous les organismes.
De plus, une concertation est organisée pour toute opération d’amélioration ayant une incidence sur les loyers ou les charges
locatives. La plupart des organismes vont au-delà des exigences légales par leur engagement sur la qualité du service (charte
qualité, certification…), une contractualisation avec les habitants (chartes, accords collectifs locaux, chartes de voisinage),
la mise en place de dispositifs d’écoute et de réponse aux problèmes vécus au quotidien par les habitants (enquêtes,
traitement des réclamations, médiation de proximité…) ou encore une contribution au financement d’associations de
locataires pour maintenir leur présence dans les quartiers. Ils soutiennent les initiatives d’associations qui contribuent à
la qualité des relations entre habitants (fêtes des voisins, accueil des nouveaux locataires, chartes de bon voisinage…),
à l’amélioration de la qualité de la vie (spectacles, sports, clubs, art…) et au développement d’associations de prestation
de service en faveur des habitants (maintien à domicile de personnes âgées, alphabétisation, monitorat travaux…).
Les associations représentant les habitants sont des interlocuteurs importants des organismes mais aussi des partenaires
importants du Monde Hlm. Elles siègent dans deux des instances nationales de l’Union sociale pour l’habitat (Conseil social,
Instance nationale de concertation).
Les organisations représentatives au niveau national sont la Confédération nationale du logement (CNL), Consommation,
logement et cadre de vie (CLCV), la Confédération syndicale des familles (CSF), la Confédération générale du logement (CGL)
et l’Association Force ouvrière consommateurs (AFOC).
Le logement social pour la solidarité et la croissance 43
Une mission
sociale affirmée
Des locataires aux revenus de
plus en plus modestes
Le logement social a pour mission de
loger tous les ménages qui peinent à se
loger dans les conditions du marché:
familles, nouveaux ménages, salariés,
retraités à revenus modestes, mais
aussi personnes ayant des revenus bas,
rencontrant des difficultés, etc.
34% environ de la population peut
prétendre à un logement social: les
plafonds légaux de ressources,
différents selon le territoire ou la
composition familiale, concernent en
effet 64% de la population (ex.
2050 euros par mois pour une
personne seule à Paris), dont il faut
soustraire près de la moitié, constituée
de propriétaires de leur logement. Les
employés (25%) et les ouvriers (24%)
24 %
18,7 %
12,9 %
27,9 %
représentent la moitié des résidents,
les professions intermédiaires
(infirmières, instituteurs, agents de
maîtrise…) 12%, et les artisans et
commerçants, 2%.
La réalité de la situation sociale de ces
dernières décennies tend à concentrer
dans le parc social davantage de
personnes ou de familles à revenus
très modestes, malgré les efforts
déployés par les organismes Hlm,
souvent avec l’appui des collectivités
locales, pour concilier l’accueil des
ménages à bas revenus ou défavorisés
avec la mixité sociale, générationnelle
et urbaine.
Une mixité qui, sous la pression des
mutations économiques et sociales,
tend à disparaître dans certaines
zones. Depuis près de 40 ans, tandis
que certains quartiers se spécialisent
dans l’accueil des familles aisées,
12,1 %
10,7 %
9,2 %
8,8 %
24,3 %
22,3 %
25,1 %
24,6 %
7,7 %
18,9 %
33,2 %
35 %
33,5 %
31,4 %
33,5 %
32,6 %
32,9 %
32,6 %
31,8 %
33,9 %
37,5 %
39,8 %
30,2 %
1988
1992
1996
2001
2006
30,9 %
29 %
25,7 %
12 %
1973
17,2 %
1978
■ 1er quartile
1984
■ 2e quartile
■ 3e quartile
■ 4e quartile
chassant par l’effet des prix les classes
populaires, le parc Hlm se paupérise
comme l’illustre le graphique cidessous.
Ainsi, si en 1973, 59% des locataires du
parc Hlm appartenaient aux deux
quartiles des revenus les plus élevés,
trois décennies plus tard, il ne s’établit
plus qu’à 26,6% alors que le taux de
présence du premier quartile des
ménages les plus modestes a plus que
triplé (12,0% à 39,8%). Sur la même
période, la proportion de locataires
Hlm du dernier quartile (revenus les
plus élevés) a chuté, passant de 24%
à 8%.
Ce phénomène est renforcé par la
disparition d’un parc locatif privé à
bas loyers, ainsi que par l’application
de la loi sur le Droit au logement
opposable (DALO) qui oblige l’État à
reloger les demandeurs dont une
commission de médiation a reconnu le
caractère absolument prioritaire,
obligation qui ne s’exerce, dans les
faits, que dans le parc locatif social.
Cela augmente nécessairement la
pression sur le parc Hlm, tout
particulièrement en Ile-de-France où
s’exercent 65% des recours, et où les
relogements pèsent sur les communes
ayant un parc social important. Les
nouveaux entrants sont plus fragiles
économiquement, à cause de la
précarisation du travail, de l’érosion
des revenus (retraites, emplois à
temps partiel), du phénomène de
souffrance psychique, et de
l’accroissement du nombre de familles
monoparentales. Ces tendances sont
renforcées par le départ des locataires
Hlm appartenant au quart le plus
élevé des revenus, soit qu’ils
choisissent d’accéder à la propriété,
soit par l’effet du surloyer imposé aux
ménages qui dépassent les plafonds de
ressources.
44 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Un acteur économique
de premier plan
Le logement, public comme privé,
est un secteur économique de tout
premier plan (13) : il représente,
toutes activités confondues, 23 %
du PIB et le logement Hlm
y contribue pour une part
significative (14), à savoir :
• 13 milliards d’euros
d’investissement,
• 17,3 milliards d’euros de loyers et
4,7 milliards de charges
récupérables,
• 2,6 milliards d’euros de dépenses
d’entretien,
• 102 milliards de dettes financières,
• 7,1 milliards d’euros d’intérêts de la
dette et de remboursement en
capital,
• 1,7 milliard d’euros de taxe sur le
foncier bâti,
• 8 milliards d’euros de pouvoir
d’achat pour les habitants du
secteur Hlm.
pouvoir d’achat. En effet, à surface
équivalente, un locataire Hlm
dépense en moyenne chaque année
2000 euros de moins par rapport à
ce qu’il dépenserait dans un
logement privé et cette différence
est bien plus importante dans les
zones de marché tendu. Le prix du
mètre carré en Hlm est en moyenne
moitié moins cher que dans le locatif
privé. En cumulé, plus de
8 milliards d’euros de pouvoir
d’achat des 4,1 millions de ménages
logés par le secteur Hlm apportent
mieux-être aux habitants,
consommation et activité
pour le pays.
Au-delà de ces chiffres, les Hlm,
constituent aussi un
investissement d’avenir, utile et
responsable. Ainsi, par exemple, en
2008, en pleine crise des
« subprimes », le Mouvement Hlm a
démontré sa capacité à amortir la
crise. Dans le cadre du plan de
relance de 2008, les organismes Hlm
ont, avec l’aide de leurs partenaires,
collectivités notamment, donné un
coup d’accélérateur à la production
de logements et racheté des
programmes aux promoteurs en
difficulté. Ce caractère contracyclique du secteur a ainsi permis de
maintenir l’emploi qui menaçait de
s’effondrer dans le BTP. De plus, ils
contribuent à l’amélioration du
(13) Cf. Réorienter les interventions publiques dans le logement.
(14) Chiffres pour l’année 2009.
Les organismes Hlm ont par
ailleurs un effet direct sur la vie
économique des territoires. Ils
emploient directement 76 000
salariés et créent en outre de
nombreux emplois dans le secteur
du BTP et chez les artisans. Pas
moins de 115 000 emplois sont ainsi
apportés par les seuls programmes
de logements neufs (11,5 milliards
d’euros au titre du locatif social et
1 milliard supplémentaire au titre
de l’accession sociale à la propriété),
sans compter les programmes de
rénovation urbaine, la réhabilitation
et le gros entretien. De plus,
l’ensemble de ces emplois
n’est pas délocalisable.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 45
Un modèle original
de financement
à l’efficacité prouvée
La politique publique visant à
permettre aux ménages à revenus
modestes de se loger à des
conditions décentes peut passer
classiquement par l’attribution
d’aides financières aux ménages
(aides à la personne) ou par des
subventions à la production de
logements à loyer modéré (aides à la
pierre). Ces différents dispositifs
sont répandus en Europe et
coexistent souvent sur un même
territoire (15). C’est la manière
d’équilibrer les avantages et les
inconvénients inhérents à ces deux
formules qui caractérise la politique
de chaque pays ; leur bonne
coordination est d’ailleurs un des
facteurs de réussite ou non de la
politique menée.
L’aide à la personne
Points positifs : son adaptation à la
situation financière du ménage et à
son évolution dans le temps et
l’espace ; points plus négatifs
relevés : son impact potentiellement
inflationniste sur le niveau des
loyers lorsque ces loyers sont libres,
son caractère « pro-cyclique »
difficile à assumer pour les finances
publiques en période de crise
économique et enfin la difficulté à
orienter la production immobilière
(rythme de la production,
localisation, qualité…).
Les aides à la pierre
Points positifs : la constitution d’une
offre pérenne de logements à loyers
modérés quelle que soit la
conjoncture économique,
l’orientation possible de la
production ; point plus négatif : sa
plus difficile adaptation aux
évolutions de la situation des
ménages, tant en termes de
conditions d’entrée que de loyers.
(15) Voir encadré « Le logement social en Europe ».
Un financement majoritaire
par l’emprunt
Mais ce qui caractérise le système
français est l’importance du recours
aux emprunts et à des ressources
complémentaires (1 % et fonds
propres des organismes Hlm) qui
permet de peser modérément sur les
budgets publics.
Certes, tous les acteurs du marché
locatif immobilier (logement,
bureaux, locaux commerciaux ou
industriels) basent leur modèle
économique sur le levier de
l’endettement : par le canal de
l’emprunt ce sont les loyers futurs
qui permettent de financer les
achats ou les constructions
d’aujourd’hui. Mais ils intègrent
également la possibilité d’une plusvalue de revente, et c’est pourquoi le
secteur privé recourt régulièrement
à des cessions (ventes en bloc ou à la
découpe).
La nécessité des aides publiques
en complément
Ces plus-values n’existent pas dans
le secteur Hlm qui a des
engagements sociaux sans limite de
durée. Comme par ailleurs les loyers
du parc social sont plus faibles que
dans le parc privé, ils permettent de
mobiliser toutes choses égales par
ailleurs moins de prêts, et comme les
coûts de production sont
sensiblement les mêmes dans le parc
privé et dans le parc social (même
foncier, même normes, même
qualité…), le bouclage financier des
46 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Plan de financement moyen en PLUS et aides publiques associées
PLAN DE FINANCEMENT PLUS 2010
Prix de revient unitaire
Subvention État (surcharge foncière incluse)
Subvention 1 % Logement
Subventions collectivités locales et autres
Prêt CDC
Fonds propres
Montant moyen par logement
142 300
3 900
3 800
12 800
105 000
16 800
MONTANT DES AIDES PUBLIQUES REÇUES
Subvention État
Subvention 1 % Logement
Subventions collectivités locales et autres
Baisse du taux de TVA
Exonération de TFPB de 25 ans
Avantage de taux du prêt CDC
Montant total en euros 2010
Montant moyen par logement
3 900
3 800
12 800
19 000
9 900
14 700
64 100
opérations nécessite l’apport de
financements complémentaires. Plus
ceux-ci seront élevés plus le loyer de
sortie de l’opération sera faible. C’est
dans la nature de ces « aides » que
réside l’originalité du modèle
économique du logement social en
France. On trouve essentiellement :
• des aides apportées par l’État et les
collectivités locales sous forme de
subventions, de régime fiscal
spécifique (taux de TVA réduit,
exonération longue de taxation du
foncier bâti) ou sous forme d’apport
de foncier à coût réduit. Elles sont
très différentes d’un projet à l’autre.
Elles donnent lieu à des droits de
réservation, leur permettant de
proposer des candidats.
• des aides venant du monde de
l’entreprise via les prêts bonifiés ou
les subventions d’Action logement
financée par les cotisations du 1 %
Logement. Elles donnent lieu
également à des réservations.
• des subventions en provenance de
fonds européens pour certains
travaux de réhabilitation ou des
projets innovants.
Un circuit d’endettement
original
Les emprunts des organismes de
logement social se font
essentiellement auprès de la Caisse
des Dépôts et consignations, grâce
au Fond d’épargne qui centralise
65 % des fonds déposés sur les livrets
d’épargne faisant l’objet de
défiscalisation (Livret A, Livret
développement durable, Livret
d’Épargne Populaire). Ce circuit a
permis de financer sans faille les
investissements des organismes de
logement social (production et
réhabilitation) à des conditions
favorables quant à leur durée (40 ans
voire plus) et leur taux (proche du
coût de la ressource).
L’apport de fonds propres
des organismes
La gestion d’un parc locatif ancien et
de qualité permet de dégager des
résultats d’exploitation significatifs
(plus de 2 milliards d’euros) qui ne
font pas l’objet de redistributions ou
de prises de bénéfice mais vont
contribuer pleinement au
financement des investissements.
Les organismes de logement social
contribuent ainsi à leur propre
développement. La vente de
logements Hlm dès lors qu’elle
correspond à une stratégie
patrimoniale raisonnée et maîtrisée
de l’organisme peut participer au
développement des fonds propres,
mais elle nécessite parallèlement le
développement d’une offre
supplémentaire adéquate de
logements pour ne pas réduire les
capacités d’accueil et ne peut donc
être une source de financement
importante.
Un investissement moins
coûteux car pérenne
Pour prendre en compte le caractère
pérenne du logement social ainsi
financé, il convient de rapporter ce
montant d’aide à la durée du prêt
principal ou celle du logement
financé. Le montant annuel de
l’aide publique pour un Hlm est
ainsi de 1 300 euros (pendant
50 ans). Le montant annuel de
l’aide publique pour un logement
comparable bénéficiant du
dispositif Scellier aux conditions
revues à la baisse pour 2012 est
de 2 300 euros (pendant 9 ans).
Rapporté à une durée identique de
50 ans, le Scellier, malgré l’absence
de contrepartie sociale, revient
donc à 115 000 € contre 65 000
pour un PLUS.
Le logement social pour la solidarité et la croissance 47
Une péréquation dans le temps
L’horizon temporel long résulte de
raisonnements financiers reposant
sur la détention et la gestion d’un
parc de logements sur une durée
plus longue que la durée des prêts
initiaux, afin de permettre la
reconstitution et le développement
des fonds propres. Ils supposent une
gestion patrimoniale soucieuse à la
fois de la qualité de la production
initiale et du bon niveau des travaux
d’entretien tout au long de la vie de
l’immeuble.
Un investissement sûr
Le souci de sécurité est rendu
nécessaire par l’utilisation de fonds
d’épargne garantis par l’État et de
taux d’intérêt qui n’intègrent que
très peu de provisions pour risques.
Les prêts font donc l’objet d’une
garantie soit, cas très majoritaire, par
les collectivités locales soit par la
Caisse de garantie du logement
locatif social (Cglls). Pour éviter
tout risque systémique, les
organismes pratiquent une gestion
prudente et sont sous le contrôle
de nombreuses instances :
Mission interministérielle
d’inspection du logement social,
Cour et chambres régionales des
Comptes, et plus spécifiquement les
dispositifs d’analyse et de prévention
au sein des fédérations d’organismes.
La solvabilisation des ménages par le
biais de l’Aide personnalisée au
logement (près de 50 % des
locataires du parc social en
bénéficient) contribue en limitant
les impayés à cette maîtrise des
risques.
Une gestion dans la durée
Des menaces sur le modèle
de financement
Si la production de nouveaux
logements est une vitrine de l’action
des organismes de logements
sociaux et mobilise souvent
l’attention, il ne faut pas occulter que
la gestion locative, l’adaptation des
logements aux évolutions de la
population et de ses attentes,
l’accompagnement social des
habitants dans leur insertion, leur
mobilité, leur trajectoire
résidentielle, la participation à la
gestion des quartiers… font partie
intégrante des missions des
organismes et ne relèvent pour le
moment d’aucune aide publique
spécifique.
Le modèle économique du logement
social a donc fait ses preuves : le parc
constitué progressivement est
globalement en bon état et propose
des loyers modérés ; il a permis une
accélération de la production
récente. Toutefois il importe de
préserver trois de ses
fondamentaux : l’alimentation en
prêts de la CDC – les fonds issus du
Livret A font l’objet de convoitises –
la pérennité du patrimoine – l’idée
d’une vente massive sous couvert de
droit à l’achat séduit certains – et
l’apport en subventions des acteurs
publics, eux-mêmes sous contraintes
financières.
48 Le logement social pour la solidarité et la croissance
Le logement social
en Europe, des approches
différenciées, des réalités
contrastées
Le concept de logement social est
différent entre les pays européens, et
relève de deux approches en
fonction des destinataires de ces
logements.
Une approche « universaliste »,
fondée sur une vision particulière de
l’assistance sociale : fournir à toute
personne un logement de qualité,
décent et abordable (Suède, PaysBas). Le logement y est considéré
comme une responsabilité publique
qui s’exerce via des sociétés
municipales ou des sociétés à but
non lucratif qui n’ont pas
d’obligations légales en matière
d’attributions, mais jouent un rôle de
régulateur du marché notamment
par le contrôle des loyers. En Suède
les loyers maximaux sont négociés
entre associations de locataires et
sociétés de logement public et
imposés à l’ensemble du marché
du logement.
Une approche «ciblée» qui réserve
l’attribution d’un logement social aux
ménages pour lesquels le marché est
incapable de fournir un logement
décent à un prix abordable. Cette
approche se subdivise elle-même en
deux, «généraliste» (catégories qui ne
peuvent se loger dans les conditions
du marché, comme en France), ou
«résiduelle» (catégories défavorisées
(Espagne, Royaume-Uni).
Pour l’approche « ciblée », la
majorité des pays ont mis en place
des entités spécifiques au logement
social agréées pour répondre à de
nombreuses obligations de service
public relatives aux conditions
d’attribution, au loyer, aux
conditions d’occupation (baux à long
terme), et aux services spécifiques
aux résidents. Seule l’Allemagne
fonctionne par conventionnement à
durée limitée en échange de
l’accomplissement de ces obligations
de service public, ce qui pose la
question de la continuité de ce
service de logement social, et
fonctionne dans un contexte où la
démographie est peu vigoureuse et
où les loyers du marché sont très
encadrés.
L’Europe et le logement social : d’une vision « résidualiste »
à une approche plus généraliste
Bien que l’Union européenne n’ait pas compétence en matière de logement, elle
ne s’est pas privée pendant longtemps de porter une vision du logement social
extrêmement restrictive, dans laquelle un parc minimal accueille la frange la plus
démunie de la population.
La Commission a ainsi donné suite à des plaintes contre les systèmes
universalistes des Pays-Bas, puis de la Suède et leur a imposé des mesures
drastiques. Elle n’a cependant jamais mis en cause le système français, du fait de
son ciblage (plafonds de ressources) mais aussi du fait qu’il ne porte pas atteinte à
la concurrence : ses obligations sans limites de durée, et le mandatement institué
dans le CCH qui assigne des obligations rigoureuses de service public, préviennent
tout risque de surcompensation par les aides publiques.
Tout récemment, les instances communautaires, Parlement puis Commission
Européenne, ont modifié considérablement leur discours et leur approche du
logement social, reconnaissant le bien-fondé d’une approche plus large des
populations cibles et d’une recherche de mixité sociale.
Ce dossier a été réalisé par L’Union sociale pour l’habitat,
avec l’appui des services de l’Union et des Fédérations membres, ainsi que des Associations régionales Hlm.
Les 10 propositions de l’Union ont fait l’objet d’un débat et d’une adoption à l’unanimité lors
de la Convention nationale Hlm du 19 janvier 2012 réunissant l’ensemble des organismes adhérents,
de leurs associations régionales et de leurs fédérations, ainsi que le Conseil social de l’Union.
Contact
[email protected]
Tél. 01 40 75 68 46
www.union-habitat.org
Février 2012
Conception-réalisation : Gavrinis
Crédits photographiques
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Flandres. Page 47 : Un toit pour tous. Page 50 : La Sablière © F. Achdou, OPH de Nanterre © Crossay. Shutterstock.
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