Master 2 – Mathématiques Fondamentales Examen de topologie – 11 janvier 2011 Durée de l’épreuve : 4 heures. Rappels 1. Étant donné un espace topologique X et deux sous-espaces A, B. Supposons que X = A ∪ B. La suite de Mayer-Vietoris associée au triplet (X, A, B) est la suite exacte longue en homologie ··· / Hk (A ∩ B) φ / Hk (A) ⊕ Hk (B) ψ / Hk (X) ∂ / Hk−1 (A ∩ B) / ··· où φ : Hk (A ∩ B) → Hk (A), x 7→ (i∗ (x), i∗ (x)) est l’homomorphisme induit par les homomorphismes d’inclusions i∗ : Hk (A ∩ B) → Hk (A) et i∗ : Hk (A ∩ B) → Hk (B) respectivement ; et où ψ : Hk (A) ⊕ Hk (B) → Hk (X), (x, y) 7→ j∗ (x) − j∗ (y) est l’homomorphisme induit par les homomorphismes d’inclusions j∗ : Hk (A) → Hk (X) et j∗ : Hk (B) → Hk (X) respectivement. La suite associée au couple (X, A) est la suite exacte longue en homologie ··· / Hk (A) / Hk (X) / Hk (X, A) ∂ / Hk−1 (A) / ··· où l’homomorphisme Hk (A) → Hk (X) est induit par l’inclusion. ek . Les mêmes suites restent valides en remplaçant l’homologie Hk par l’homologie réduite H Les k-èmes groupes d’homologie réduite sont les mêmes que les k-èmes groupes d’homologie e 0 (X) ⊕ Z. En particulier, si X est connexe, pour tout k > 0 ; pour k = 0, H0 (X) = H e H0 (X) = 0. En homologie relative, les groupes d’homologie et les groupes d’homologie e k (X, A) = Hk (X, A) pour tout k ≥ 0 (pour A 6= ∅). Les groupes réduite coı̈ncident : H d’homologie réduite permettent de simplifier les arguments basés sur l’étude des suites exactes ci-dessus. 2. Soit Σ une surface connexe orientée. L’intersection géométrique de deux courbes fermées simples a, b est notée i(a, b) ∈ N. On rappelle que l’intersection géométrique est indépendante de l’orientation des courbes. On note • : H1 (Σ) × H1 (Σ) → Z la forme d’intersection algébrique. On rappelle que • est bilinéaire et antisymmétrique. Un automorphisme f de H1 (Σ) préserve la forme d’intersection • si f (x) • f (y) = x • y pour tous x, y ∈ H1 (Σ). L’ensemble des automorphismes préservant • forme un sous-groupe Sp(H1 (Σ), •) de Aut(H1 (Σ)). Problème Première Partie : Préliminaires géométriques Soit G un groupe abélien. On dit que x ∈ G est primitif si x n’est multiple non trivial d’aucun élément de G. En d’autres termes, x est primitif s’il vérifie la propriété x = k y, k ∈ Z =⇒ k = ±1. 2 1) Soit ϕ : G → H un isomorphisme de groupes abéliens. Montrer que x est primitif dans G si et seulement si ϕ(x) est primitif dans H. Dans la suite de cette partie, on suppose que G est un groupe abélien libre de type fini de rang n. 2) Soit x ∈ G et H le sous-groupe de G engendré par x. Montrer que x est primitif si et seulement si G/H est libre (de rang n − 1). Solution. Montrons que G/H est abélien libre de rang n − 1. Comme G et H ' Z sont abéliens, le quotient est abélien. Pour montrer que G/H est libre, il suffit de montrer que ce groupe est sans torsion. Soit [u] ∈ G/H1 et soit m le plus petit entier positif ou nul tel que m [u] = 0. Alors m u ∈ H1 . Donc m u = k x pour un certain k ∈ Z. Soit d le pgcd de m et de k. Alors (m/d) u = (k/d) x d’où (m/d) [u] = 0. Par définition de m, on en déduit que d = 1. Soit kv + mw = 1 une relation de Bezout. Alors x = 1 · x = (kv + mw) x = kvx + mwx = v(kx) + mwx = v(mu) + mwx = m(vu + wx). Puisque x est primitif, m = 1. Donc [u] = 0. On a ainsi démontré que G/H1 est sans torsion, donc libre. Son rang est donc rang(G/H1 ) = rang(G) − rang(H1 ) = n − 1. 2) Montrer qu’un élément x ∈ G est primitif si et seulement s’il existe une base (x1 , . . . , xn ) de G telle que x = x1 . Solution. Soit (x, x2 , . . . , xn ) une base de G. Supposons qu’il existe k ∈ Z et y ∈ G tels que x = k y. Comme x 6= 0, k 6= 0. Alors (y, x2 , x3 , . . . , xn ) est encore une famille Z-libre de G. C’est aussi une famille Z-génératice de G. C’est donc aussi une base de G. L’application envoyant la première base sur la seconde base définit une application f : G → G qui est Z-linéaire bijective, donc Z-inversible. La matrice de f dans la base (x, x2 , . . . , xn ) est Diag(k, 1, . . . , 1). Son déterminant est donc k. Comme f est inversible sur Z, k = ±1. Donc x est primitif. Réciproquement, supposons x primitif. Soit H1 = {k x | k ∈ Z} le sous-groupe engendré par x1 = x. Ce groupe est isomorphe à Z. D’après la question précédente, G/H1 est libre de rang n − 1. Supposons avoir construit une famille (x1 , x2 , . . . , xk ) libre dans G engendrant un sous-groupe libre Hk de rang k ≤ n−1 tel que G/Hk est un groupe abélien libre de rang n − k. Comme Hk 6= G, il existe xk+1 ∈ G tel que y 6∈ Hk . On peut supposer xk+1 primitif. Alors la famille (x1 , x2 , . . . , xk , xk+1 ) est libre dans G. Le sous-groupe qu’elle engendre est donc libre de rang k + 1. Montrons que G/Hk+1 est libre de rang n − (k + 1). Il suffit de montrer que ce groupe abélien est sans torsion. Soit [u] ∈ G/Hk+1 . Soit m un entier positif ou nul vérifiant m [u] = 0 dans G/Hk+1 . Il existe donc l1 , . . . , lk+1 ∈ Z tels que m u = l1 x1 + · · · + lk+1 xk+1 . Comme (x1 , . . . , xk+1 ) est une base de Hk+1 , on en déduit que li ∈ mZ pour tout 1 ≤ i ≤ k+1. Donc u ∈ Hk+1 d’où [u] = 0. Donc G/Hk+1 est libre de rang rang(G)−rang(Hk+1 ) = n − (k + 1). On a donc démontré le résultat par récurrence. 3 3) On suppose que G est abélien libre de rang fini n et que (x1 , . . . , xn ) est une base de G. Montrer que y = a1 x1 + · · · + an xn est primitif si et seulement si le pgcd de a1 , . . . , an est 1. Première partie : représentation symplectique 1) Soit Σ une surface connexe orientée. L’objet de cette question est de déterminer H1 (Σ) 1.1) On suppose Σ compacte sans bord. Montrer qu’il existe g ≥ 0 et des courbes fermées simples λ1 , . . . , λg , µ1 , . . . , µg sur Σ telle que 1 si j = k; i(λj , µk ) = , i(λj , λk ) = i(µj , µk ) = 0. 0 sinon En déduire une Z-base l1 , . . . , lg , m1 , . . . , mg de H1 (Σ) vérifiant 1 si i = j; li • mj = et li • lj = mi • mj = 0, pour tous 1 ≤ i, j ≤ g. 0 sinon En particulier H1 (Σ) est un groupe abélien libre de rang 2g. On dit que Σ possède une base symplectique géométrique si elle vérifie la propriété de la question 1.1. 1.2) On suppose que Σ a exactement une composante de bord, c’est-à-dire que ∂Σ est un b la surface cercle. Montrer que Σ a une base symplectique géométrique. [Indication : soit Σ 2 b à laquelle on a bouché la composante de bord par un disque : Σ = Σ ∪ D avec ∂D2 = ∂Σ. b On pourra considérer l’application induite en homologie par l’inclusion Σ → Σ.] 1.3) On suppose que Σ a exactement une piqûre, c’est-à-dire que Σ est le complémentaire d’un point dans une surface Σ0 compacte connexe orientée sans bord. Montrer que Σ a une base symplectique géométrique. [On pourra considérer l’application induite en homologie par l’inclusion Σ → Σ0 .] Dans toute la suite, on note H = H1 (Σ) et on suppose que Σ vérifie l’une des trois hypothèses des questions 1.1, 1.2 et 1.3. 2) L’objet de cette question est détudier les classes d’homologie de Σ représentables par une courbe fermée simple non séparante. Soit α ∈ H1 (Σ) une classe d’homologie non nulle. 2.1) Montrer qu’il existe une réunion de courbes fermées simples orientées deux à deux disjointes c1 , . . . , cn telles que α = [c1 ] + · · · + [cn ]. 2.2) Montrer que s’il existe une courbe fermée simple orientée c telle que [c] = α alors c est non séparante. 2.3) Dans cette question, on considère à titre d’exemple le cas particulier où Σ est de genre 1. Soit (l, m) une base symplectique géométrique de Σ. Montrer par un dessin que 2m ∈ H1 (Σ) est représenté par une courbe fermée immergée c (avec un unique point d’auto-intersection). Démontrer qu’il n’existe pas de courbe fermée simple c telle que 2m = [c]. [On pourra raisonner par l’absurde et considérer un difféomorphisme approprié de Σ.] Plus généralement montrer qu’il existe une courbe fermée simple c représentant une classe d’homologie α = x l + y m ∈ H1 (Σ) ' Z2 si et seulement si 4 2.4) Soit ρ : M(Σ) → Aut(H1 (Σ)), [f ] 7→ f∗ . 2.1) Justifier brièvement que ρ est un morphisme de groupes bien défini. 2.2) Justifier brièvement que l’image de ρ est dans Sp(H, •). 2.3) On note ρ : M(Σ) → Sp(H1 (Σ; Z, •), [f ] 7→ f∗ la représentation symplectique du groupe de difféotopies de Σ.